Comparution de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada Dans le cadre des audiences publiques sur l'examen des politiques gérant les réseaux nationaux

Présenté au CRTC

5 novembre 1997

Tout d'abord, je désire remercier les membres du Conseil d'avoir accordé à la FCFA du Canada l'occasion de s'exprimer devant vous aujourd'hui, dans le cadre de la présente audience publique. En effet, nous savons que les résultats de cette audience pourraient avoir un impact substantiel sur les communautés francophones et acadiennes du pays.

La Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada est un organisme national qui regroupe les associations de neuf provinces et de deux territoires ainsi que quatre organismes nationaux à vocation sectorielle. Elle a pour but de défendre et de promouvoir les droits d'un million de citoyennes et de citoyens qui composent les communautés francophones et acadiennes du pays.

Dans cette optique, il est naturel que notre intérêt premier soit celui de s'assurer que la création de nouveaux réseaux nationaux pourra augmenter la quantité de programmation canadienne en français disponible aux communautés, mais aussi qu'elle pourra augmenter la quantité de programmation canadienne en français qui reflète la réalité des communautés francophones et acadiennes. Nous voudrons également nous assurer que la création de nouveaux réseaux n'entravera pas les services en français auxquels les communautés ont actuellement accès.

A) CRÉATION DE RÉSEAUX BILINGUES

Pour débuter, la Fédération est tout à fait contre la création de réseaux nationaux bilingues. Comme nous l'avons clairement indiqué dans notre mémoire du mois d'octobre dernier, nous sommes d'avis que la création de réseaux bilingues irait à rencontre a) du sens des objectifs de la politique canadienne de radiodiffusion, établis dans la Loi sur la radiodiffusion et b) des intérêts des communautés francophones et acadiennes du Canada.

L'expérience que les communautés ont fait des institutions bilingues est révélatrice et concluante : ce ne sont, ni plus ni moins, que des bassins offrant un très grand potentiel d'assimilation pour nos communautés. Cette réalité s'applique aussi bien aux services de radiodiffusion.

Nous comprenons l'intérêt politique de voir à la création de réseaux bilingues, c'est-à-dire de mieux faire connaître aux Canadiennes et aux Canadiens d'une langue officielle la réalité des citoyens de l'autre langue officielle. Toutefois, nous croyons que cet objectif peut être atteint par d'autres moyens.

Nous ne tenons pas à élaborer davantage sur cette question : nous croyons avoir bien étayé notre position à cet égard dans notre dernier mémoire. Nous réitérons qu'à notre avis, la création de réseaux bilingues serait dangereuse pour les communautés francophones et acadiennes.

La FCFA du Canada demande donc au Conseil de se prononcer contre rétablissement de réseaux bilingues.

B) CRÉATION DE NOUVEAUX RÉSEAUX NATIONAUX FRANCOPHONES

Permettez-nous maintenant de nous exprimer sur la question de la création de nouveaux réseaux nationaux de langue française.

Les communautés francophones et acadiennes sont pour la plupart situées dans des régions à majorité anglophone. Il est difficile pour elles d'avoir accès à une programmation de langue française, et plus encore, à une programmation qui reflète leur réalité. Non seulement les services francophones disponibles aux communautés sont-ils très limités, mais trop souvent la programmation de langue française qu'elles reçoivent est essentiellement québécoise de provenance et de contenu.

Conséquemment, il ne suffit pas simplement pour les communautés de savoir si la création de nouveaux réseaux permettrait d'augmenter la programmation canadienne. Pour que leurs besoins soient considérés, il faut s'assurer que la création de nouveaux réseaux de langue française pourra augmenter leur accès à de la programmation canadienne de langue française qui reflète, dans certaines de ses parties, leurs réalités.

Nous avons étudié les mémoires soumis par Télé-Métropole et par l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec (APFTQ). Nous avons été particulièrement intéressés par leur proposition de faire changer la définition de « réseau national de langue française » pour permettre à d'autres réseaux que celui de la Société Radio-Canada, d'avoir accès à ce statut. Cette proposition aurait une répercussion importante sur les communautés que nous représentons : les communautés francophones et acadiennes auraient ainsi accès à une gamme beaucoup plus étendue de services dans leur langue.

Toutefois, notre appui aux propositions des deux intervenants est hautement conditionnel. En effet, la FCFA du Canada entrevoit quatre éléments problématiques des interventions de Télé-Métropole et de l'APFTQ.

1) Production francophone en provenance de l'extérieur du Québec

Dans son mémoire, Télé-Métropole propose un changement à la définition de Réseau national de langue française afin de pouvoir accéder à ce statut. Il affirme toutefois que « Le statut de réseau national ne doit pas entraîner un alourdissement des obligations réglementaires ». En d'autres termes, Télé-Métropole argumente que si un réseau devient un nouveau réseau national, il ne doit pas se voir imposer l'obligation supplémentaire en vue d'assurer une programmation provenant de l'extérieur du Québec. Ainsi, Télé-Métropole souhaite devenir un réseau pancanadien sans être obligé de diffuser un contenu pancanadien, donc sans considération pour refléter la réalité de sa nouvelle clientèle.

Toutefois, si un réseau de langue française obtient le privilège d'être diffusé sur l'ensemble du territoire canadien, il nous apparaît juste et équitable qu'il ait l'obligation de desservir, par une portion de sa programmation, l'ensemble de son auditoire.

Sans vouloir remettre en question les bonnes intentions de Télé-Métropole face aux communautés francophones et acadiennes, nous savons que ce réseau constitue une entreprise privée. Nous pouvons supposer que leur demande d'atteindre le statut de réseau national soit en partie motivée par la possibilité d'avoir accès, à moyen terme, à une nouvelle source de revenu, par exemple par l'obtention de droits de transports. Il en serait sans aucun doute de même pour tout autre réseau faisant la demande d'accéder au statut de réseau national.

Nous comprenons qu'il soit financièrement impossible pour un nouveau réseau national de langue française d'ouvrir une station dans chaque région du Canada. Toutefois, nous croyons qu'il existe plusieurs options moins coûteuses pour permettre des productions provenant de l'extérieur du Québec.

  • Il serait possible pour les nouveaux réseaux de faire appel aux maisons de productions francophones de l'extérieur du Québec en vue de la production d'émissions culturelles ou de divertissement. D'ailleurs, nous savons que cette possibilité a déjà été envisagée par Télé-Métropole en vue de la production d'émissions sur la déportation des Acadiens.
  • Il serait aussi possible de faire appel à des journalistes pigistes en région pour la production de reportages ponctuels.
  • Enfin, nous pouvons imaginer la possibilité pour les nouveaux réseaux d'entrer en partenariat avec les stations anglophones. À cet effet, Télé-Métropole a, dans le passé, signé des ententes avec le réseau CTV : il serait intéressant d'étudier la possibilité de coproductions ou encore de location des installations.

Nous suggérons donc que tout réseau national de langue française ait l'obligation d'investir dans des productions d'information et de divertissement en provenance de l'extérieur du Québec afin qu'elles constituent 15% de leur programmation.

2) Distribution obligatoire

De plus, nous souhaitons aborder la question de la distribution des réseaux nationaux de langue française.

Comme nous l'avons mentionné précédemment, la FCFA du Canada voit, dans la création de nouveaux réseaux de langue française, une excellente solution à la rareté des services francophones de radiodiffusion disponibles aux communautés qu'elle représente. S'il y avait statu quo dans la réglementation du Conseil sur la distribution des réseaux nationaux, les réseaux télévisuels accédant au statut de réseau national de langue française seraient distribués obligatoirement.

Dans son mémoire déposé en première phase, Télé-Métropole suggère que « la définition de ce qui constitue un réseau national devrait être accompagnée d'une mesure réglementaire attribuant un statut de distribution obligatoire en mode numérique sur l'ensemble des systèmes de distribution, indépendamment du type de licence (SRD, câble, SDM, compagnies de téléphone) à travers le pays.

D'une part nous croyons en effet que les systèmes de distribution SRD, SDM et les compagnies de téléphone devraient être contraints de diffuser l'ensemble des réseaux nationaux. Il est d'ailleurs de notre avis que ces systèmes devraient être obligés de porter l'ensemble des postes canadiens de langue française.

Toutefois, contrairement à ce qu'avance Télé-Métropole, nous croyons que tous les câblodistributeurs, peu importe leur mode de fonctionnement, analogique ou numérique, devraient aussi être contraints de porter sur leurs services l'ensemble des réseaux nationaux de langue française.

Notre expérience du passé nous a clairement démontré qu'il est très difficile de faire percer un service de langue française dans une région à forte majorité anglophone. Ceci est d'autant plus vrai chez les plus petits câblodistributeurs.

Nous croyons qu'il serait donc préférable d'obliger tous les câblodistributeurs à distribuer les réseaux nationaux de langue française. Le Conseil mettrait ainsi le fardeau de la preuve aux câblodistributeurs plutôt que de prendre pour acquis qu'il leur est impossible de diffuser les réseaux nationaux.

Nous suggérons donc que :

« La définition de ce qui constitue un réseau national devrait être accompagnée d'une mesure réglementaire attribuant un statut de distribution obligatoire sur l'ensemble des systèmes de distribution, indépendamment du type de licence (SRD, câble, SDM, compagnies de téléphone) à travers le pays, à toute entreprise qui serait considérée par le Conseil comme un réseau national ».

3) La Société Radio-Canada

Troisièmement, la FCFA du Canada est préoccupée par l'impact que pourrait avoir un changement à la définition de « réseau national » sur les services offerts par la Société Radio- Canada aux communautés francophones et acadiennes.

Comme vous le savez, Radio-Canada est actuellement le seul réseau national de langue française au pays. Les services offerts par Radio-Canada aux communautés francophones et acadiennes sont essentiels à leur développement et à leur épanouissement. D'ailleurs, la FCFA du Canada et ses associations membres travaillent ardemment à voir bonifier la qualité et la quantité de ces services.

Nous voyons, dans un éventuel changement de définition de « réseau national de langue française », la possibilité de faire en sorte que le système canadien de radiodiffusion desserve mieux la population francophone vivant en situation minoritaire. Toutefois, Télé-Métropole et l'APFTQ suggèrent de diminuer les exigences imposées aux réseaux nationaux de langue française au niveau des services offerts aux communautés francophones et acadiennes. Un tel changement pourrait potentiellement permettre à Radio-Canada de fermer ses stations en région et de diminuer davantage la production régionale. Il nous apparaît donc essentiel que de tels changements ne soient pas applicables auprès de la Société Radio-Canada.

La Société Radio-Canada, étant une société d'État, a des responsabilités qui lui sont conférées à l'égard des communautés de langue officielle. Par exemple, la Loi sur la radiodiffusion indique clairement que la programmation de la Société Radio-Canada doit, d'une part [3(l)m)(ii)] « refléter la globalité canadienne et rendre compte de la diversité régionale du pays, tant au plan national qu'au niveau régional, tout en répondant aux besoins particuliers des régions »; et d'autre part,

[3(l)m)(iii)] « être offerte en français et en anglais, de manière à refléter la situation et les besoins particuliers des deux collectivités de langue officielle, y compris ceux des minorités de l'une ou l'autre langue ».

Nous soumettons donc que :

La Société Radio-Canada doit être exemptée de tout changement à la définition de « réseau national de langue française » qui lui permettrait potentiellement de diminuer les services qu'elle offre aux communautés francophones et acadiennes.

4) Impact sur les plus petites stations

Enfin, nous avons des préoccupations face aux répercussions qu'un changement de définition de réseau national pourrait avoir sur la diffusion de plus petites stations, par exemple des stations francophones provenant d'une province autre que le Québec.

La distribution obligatoire éventuelle de réseaux comme TVA et TQS pourrait causer des problèmes à de plus petites stations qui voudraient percer les marchés à forte majorité anglophone. En effet, les câblodistributeurs de ces régions sont plutôt réticents à diffuser plusieurs postes francophones sur leurs services.

Nous souhaitons donc que l'établissement d'une définition de « réseau national de langue française » tienne compte cette réalité pour permettre à de plus petites stations d'avoir accès à ce statut.

À cet effet, nous nous opposons à la définition proposée par l'APFTQ qui souhaite que « des règles de reconnaissance de ce qui constitue un réseau national soient basées sur le pourcentage des téléspectateurs [rejoint par] l'ensemble des stations affiliées et réémettrices de télévision en direct d'un réseau, dans une langue donnée. »

Une telle définition désavantagerait des stations ou réseaux provenant de l'extérieur du Québec, n'étant pas diffusés auprès de 50 % des abonnés. La définition proposée par TVA nous semble pour sa part plus acceptable.

Nous soumettons donc au Conseil que :

S'il adopte une définition de réseau national de langue française qui donnerait l'occasion à des stations québécoises d'avoir accès à ce statut, il devra faire en sorte que des stations provenant de l'extérieur du Québec puissent aussi avoir la possibilité de demander une telle désignation si elles veulent le faire.

Conclusion

La Partie VII de Loi sur les langues officielles donne à toutes les institutions fédérales, y compris au CRTC, la responsabilité d'assurer le développement et l'épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Le Conseil a donc le pouvoir, mais aussi le devoir, d'améliorer l'accès aux services télévisuels de langue française pour les communautés francophones et acadiennes. Par le contenu de son rapport au gouverneur en Conseil, le CRTC peut déjà poser un premier geste important en vue de l'amélioration de la situation.

Les communautés francophones et acadiennes du pays doivent constamment faire pression pour avoir accès à un minimum de postes de télévision dans leur langue. Il est grandement temps que le principe de la dualité linguistique soit mieux reflété dans le système de radiodiffusion canadien. Un changement à la définition de « réseau national de langue française » pourrait améliorer la situation pour les communautés que nous représentons. Mais un tel changement doit être effectué avec prudence afin de non seulement améliorer l'état des francophones vivant en milieu minoritaire, mais aussi de préserver nos acquis qui sont déjà très chancelants dans le domaine de la radiodiffusion.

Nous vous remercions de votre attention et nous sommes prêts à répondre à vos questions.

Sommaire des recommandations

  1. La FCFA du Canada demande au Conseil de se prononcer contre l'établissement de réseaux bilingues.
  2. Nous suggérons que tout réseau national de langue française ait l'obligation d'investir dans des productions d'information et de divertissement en provenance de l'extérieur du Québec afin qu'elles constituent 15% de leur programmation.
  3. La définition de ce qui constitue un réseau national devrait être accompagnée d'une mesure réglementaire attribuant un statut de distribution obligatoire sur l'ensemble des systèmes de distribution, indépendamment du type de licence (SRD, câble, SDM, compagnies de téléphone) à travers le pays, à toute entreprise qui serait considérée par le Conseil comme un réseau national.
  4. La Société Radio-Canada doit être exemptée de tout changement à la définition de « réseau national de langue française » qui lui permettrait potentiellement de diminuer les services qu'elle offre aux communautés francophones et acadiennes.
  5. Si le Conseil adopte une définition de réseau national de langue française qui donnerait l'occasion à des stations québécoises d'avoir accès à ce statut, il devra faire en sorte que des stations provenant de l'extérieur du Québec puissent aussi avoir la possibilité de demander une telle désignation si elles veulent le faire.

Avis public CRTC 1997-48 Réponse concernant le décret 1997 - 592

Sommaire :

  • La FCFA du Canada est d'avis que la création de réseaux bilingues irait à rencontre a) du sens des objectifs de la politique canadienne de radiodiffusion, établis dans la Loi sur la radiodiffusion, et b) des intérêts des communautés francophones et acadiennes du Canada;
  • La FCFA du Canada est intéressée et préoccupée par l'impact d'un changement de définition de «réseau national», tel que proposé notamment par TVA et l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec, entre autres sur i) la qualité et la quantité de programmation francophone que reçoivent les communautés, ii) la qualité et la quantité de la programmation francophone qui reflète les communautés et iii) les services offerts présentement aux communautés, par le réseau public de langue française, Radio-Canada.

La Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada est un organisme national qui regroupe les associations de neuf provinces et de deux territoires ainsi que quatre organismes nationaux à vocation sectorielle. Elle a pour but de défendre et de promouvoir les droits du million de citoyennes et de citoyens qui composent les communautés francophones et acadiennes du pays.

Dans le présent mémoire, la FCFA du Canada adresse la question qui est devant le Conseil, dans la perspective des communautés qu'elle représente. La question qui est devant le Conseil est la suivante : est-ce que la création de nouveaux réseaux de langue anglaise, de langue française ou bilingues, pourrait augmenter la quantité de programmation canadienne disponible au public canadien?

Afin de prendre en compte les besoins des communautés qu'elle représente, la FCFA du Canada répondra à une question plus spécifique : est-ce que la création de nouveaux réseaux de langue française ou bilingues pourrait augmenter i) la quantité de programmation canadienne en français disponible aux communautés ET ii) la quantité de programmation canadienne en français qui reflète la réalité des communautés francophones et acadiennes qui leur est disponible, sans toutefois entraver les services auxquels elles ont accès actuellement?

A) Création de réseaux bilingues

Dans son décret 1997-592, le gouverneur en conseil demande au CRTC de :

« consulter le public et de faire rapport sur les vues et les préoccupations exprimées à savoir si la création d'un ou plusieurs autres réseaux nationaux de télévision canadiens de langue anglaise, de langue française ou bilingues (non souligné) irait dans le sens des objectifs de la politique canadienne de radiodiffusion, établis dans la Loi sur la radiodiffusion (...).

Rappelons ici l'article 3.(l)d)iii) de la Loi sur la radiodiffusion qui stipule que :

3.(1)11 est déclaré que, dans le cadre de la politique canadienne de radiodiffusion:(...) d) le système canadien de radiodiffusion devrait :

Hi) par sa programmation et par les chances que son fonctionnement offre en matière d'emploi, répondre aux besoins et aux intérêts, et refléter la condition et les aspirations, des hommes, des femmes et des enfants canadiens, notamment l'égalité sur le plan des droits, la dualité linguistique (non souligné) et le caractère multiculturel et multiracial de la société canadienne ainsi que la place particulière qu'y occupent les peuples autochtones.

Il importe de distinguer entre le concept de «bilinguisme» et celui de «dualité linguistique». Bilinguisme se définit comme «ce qui est en deux langues». La dualité linguistique, pour sa part, se définit comme la capacité de vivre, de s'éduquer, et de se divertir dans la langue de son choix. Elle sous-entend la création de services et d'institutions fonctionnant uniquement en français. L'article 3(l)d)iii) parle non de bilinguisme, mais bien de dualité linguistique. L'esprit de cet article est bien de faire en sorte que le système canadien de radiodiffusion reflète la dualité linguistique, par des services de programmation de langue française, et des services de programmation de langue anglaise.

Nous sommes d'avis que la création de réseaux bilingues irait à rencontre des objectifs de la politique canadienne de radiodiffusion, établis dans la Loi sur la radiodiffusion.

De plus, la Fédération croit que la création de réseaux bilingues enfreindrait le développement des communautés francophones et acadiennes. Il est important de se rappeler que le principe de la dualité linguistique est très cher aux communautés francophones et acadiennes. D'ailleurs, il constitue la clé de leur développement et de leur épanouissement. L'expérience que les communautés ont fait des institutions bilingues est révélatrice et concluante : ce sont ni plus ni moins que des bassins offrant un très grand potentiel d'assimilation pour nos communautés. Les exemples des écoles bilingues et du niveau des services offerts dans les hôpitaux soi-disant bilingues en disent long sur cette problématique. Nous revendiquons la création d'infrastructures homogènes de langue française afin d'assurer aux citoyennes et aux citoyens francophones du Canada l'accès à un service de qualité égale.

Cette réalité s'applique aussi bien aux services de radiodiffusion. Il est primordial pour les communautés d'avoir accès à des services de programmation uniquement en français. Comme nous l'avons fait valoir lors de nos nombreuses comparutions devant le CRTC, les communautés francophones et acadiennes du pays sont submergées d'informations et de contenus anglophones de toutes sortes, autant canadiens qu'américains. Cette situation présente une entrave supplémentaire à leur souhait et à leur droit de se développer et de s'épanouir pleinement en français. Il est donc capital pour les communautés d'avoir accès à des services de programmation qui les desservent uniquement dans leur langue.

La FCFA du Canada demande au Conseil de se prononcer contre l'établissement de réseaux bilingues.

B) Création de nouveaux réseaux de langue française

[Comme les membres du Conseil pourront le remarquer, nous n 'avons pas complété notre réflexion sur cet aspect de la question. En effet, nous soumettons ici nos pistes de réflexion ainsi que nos préoccupations face à quelques suggestions déposées par certains intervenants en première phase. Toutefois, nous n'avons pas, à ce stade-ci, réponse à toutes nos interrogations, ni de solutions pour répondre à l'ensemble de nos préoccupations. Nous serons plus en mesure, au moment des comparutions, de proposer au Conseil des pistes de solution qui satisferaient aux besoins des communautés francophones et acadiennes.]

Etant pour la plupart situées dans des régions à majorité anglophone, il est difficile pour les communautés francophones et acadiennes d'avoir accès à une programmation de langue française, et plus encore, à une programmation qui reflète leur réalité. Non seulement les services francophones disponibles aux communautés sont-ils très limités, mais trop souvent, la programmation canadienne de langue française qu'elles reçoivent est essentiellement québécoise (de provenance et de contenu).

Conséquemment, et comme nous l'avons noté au tout début de notre intervention, il ne suffit pas simplement pour les communautés de savoir si la création de nouveaux réseaux permettrait d'augmenter la programmation canadienne.

Pour que leurs besoins soient considérés, il faut se demander si la création de nouveaux réseaux de langue française pourrait augmenter leur accès à de la programmation canadienne en langue française, qui reflète dans certaines de ses parties, leurs réalités.

Changements à la définition de «réseau national»

Dans leur intervention déposée dans le cadre de la première étape, TVA et l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec proposent d'élargir la définition de « réseau national » afin de permettre à TVA et à TQS de devenir des réseaux nationaux. Ils proposent d'abolir la règle qui veut qu'un réseau national possède nécessairement des stations dans toutes les provinces. TVA demande également que le CRTC oblige les câblodistributeurs qui possèdent la technologie numérique, les SDM, les SRD et les compagnies de téléphone, à diffuser sur leur service de base, tous les services de réseaux nationaux. Ils argumentent qu'un tel changement à la définition permettrait aux communautés francophones et acadiennes d'avoir accès à un nombre plus important de services dans leur langue.

À prime abord, la proposition semble en effet intéressante, puisqu'elle augmenterait, comme le suggèrent les deux répondants, la quantité de programmation de langue française auquel auraient accès les communautés.

Toutefois, le changement de définition tel que proposé nous amène aussi à nous poser certaines questions.

1. Réseaux francophones pancanadiens sans reflet pancanadien

La suggestion de TVA propose de changer la définition de façon à permettre à plus de services de devenir des réseaux nationaux, sans pour autant se voir imposer de réglementation quant à leur programmation ou à leurs installations. En d'autres mots, on voudrait permettre la création de réseaux pancanadiens, sans pour autant que leur programmation soit pancanadienne. Voilà qui est tout à fait inacceptable aux communautés de langue française en situation minoritaire. Nous pouvons affirmer dès maintenant qu'un réseau pancanadien doit avoir un reflet pancanadien, qu'il soit francophone ou anglophone.

Il est bien possible que les communautés envisagent d'un bon oeil l'idée de voir diminuer les contraintes pour permettre aux services de devenir des réseaux et donc d'être distribués dans toutes les régions : cependant, nous ne pouvons pas accepter une telle chose à n'importe quel prix. En effet, un tel changement doit être accompagné de réglementation obligeant un minimum de programmation en provenance des communautés.

Toutefois, la Fédération est dans l'impossibilité d'identifier, à ce moment, un seuil minimum. Elle devra d'abord consulter ses membres. Voici, entretemps, les questions que tient à soulever la FCFA.

1. Si la définition de « réseau national » est changée, comme le proposent les deux répondants :

  • quel serait le minimum (en quantité et en qualité) de programmation en provenance des communautés que devrait diffuser les réseaux nationaux de langue française pour satisfaire les besoins des communautés?
  • quel serait le minimum d'installations hors Québec (ex. : journaliste dans chaque région, partenaires du secteur privé, stations...) dont devrait obligatoirement disposer les réseaux nationaux de langue française pour satisfaire les besoins des communautés?

2. Les effets sur les services de Radio-Canada

Aussi, nous sommes conscients que le fait d'abaisser la barre des critères pour permettre à un plus grand nombre de services de se faire reconnaître comme réseau national pourrait également avoir un impact néfaste sur la qualité et la quantité de services que nous offrent actuellement Radio-Canada. Radio-Canada, étant un réseau national selon la définition actuelle, doit posséder des stations partout au pays. Si la définition de « réseau national » devait changer, Radio-Canada pourrait ne plus être contraint de maintenir ces stations. Cela dit, une telle possibilité s'avère très inquiétante : nous ne pouvons pas nous fier sur les bonnes intentions du réseau public de desservir les communautés. La FCFA se pose donc la question suivante :

2. Comment permettre aux services francophones de devenir des réseaux nationaux, et donc d'être diffusés sur tout le territoire canadien, sans ouvrir la porte à ce que la société Radio-Canada diminue i) ses effectifs en régions et ii) le reflet qu 'elle offre à nos communautés?

3. Obligation de distribuer les réseaux nationaux sur les services de base

Nous avons été intéressés par la proposition de TVA de voir à ce que les réseaux nationaux soient obligatoirement distribués sur le service de base des divers services de distribution. Nous étudierons toutefois cette proposition à la lumière des besoins spécifiques des différentes communautés pour identifier la meilleure façon de les desservir.

3. Le mode de distribution obligatoire proposé par TVA est-il le plus profitable aux communautés?

La FCFA du Canada réitère son désir de comparaître devant le Conseil lors des audiences publiques afin de présenter des réponses aux questions qui ont été posées dans le présent document.

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