NOTES

 

CHAPITRE I : DIFFÉRENTS ASPECTS DE LA PROBLÉMATIQUE DE LA RECONNAISSANCE DES ACQUIS CHEZ LES FEMMES

1. Diversité des lieux de formation et reconnaissance des acquis

Depuis l'Enoncé d'orientation et plan d'action en_ éducation des adultes du gouvernement du Québec (1984), la reconnaissance des acquis a fait l'objet de plusieurs recherches et ce, selon différents aspects. Conséquemment, ceci a amené un élargissement de la notion de formation et a permis de se sensibiliser au fait que l'école n'était plus le seul lieu d'acquisition des connaissances. On reconnaît désormais la diversité des lieux et des méthodes d'apprentissage, ainsi que l'affirme cet extrait de l'Enoncé.

"Dans le monde scolaire, la reconnaissance des acquis de formation est une activité qui permet de traduire dans un titre (diplôme, certificat, attestation, unité ou "crédit") des connaissances ou des habiletés, quelles qu'en aient été les modalités ou les méthodes d'apprentissage. Se trouvent ainsi considérés aussi bien les acquis scolaires que les acquis expérientiels ou extra-scolaires, les premiers se référant au cheminement proprement scolaire et les seconds s'appliquant aux formes diverses de l'autodidaxie, à des expériences de travail y compris le travail non rémunéré au foyer ou encore à des engagements socio-culturels".1

On reconnaît, par cet extrait, les apprentissages de l'adulte faits en dehors du système scolaire. On admet donc que l'adulte continue d'apprendre a travers lesexpériences qu'il est amené à vivre. Plus particulièrement, l'adulte qui n'a pas complété ses études secondaires se trouve dans une situation de nécessité, où il doit acquérir par l'expérience le bagage de connaissances et d'habiletés qui lui sont nécessaires pour travailler. C'est souvent par l'exploration et l'expérimentation de divers milieux de travail et de diverses occupations qu'il va chercher l'expérience souhaitable. Par contre, il reste limitédans une certaine mesure par l'absence de diplôme officiel, plus spécifiquement le diplôme d'études secondaires (DES), qui constitue pour plusieurs employeurs la condition minimale pour occuper un emploi. Que s'offre pour cet adulte l'éventualité de faire reconnaître les connaissances acquises par son expérience de travail et de vie et que cette reconnaissance le conduise éventuellement à l'obtention d'un diplôme officiel constitue une possibilité nouvelle.

2. Expérience et apprentissage chez les adultes

Parmi les acquis qui devront être pris en considération par le monde scolaire, l'Enoncé d'orientation mentionne ceux qui se rapportent "à des expériences de travail y compris le travail non rémunéré au foyer ou encore à des engagement socio-culturels" 2 , ce qui renvoie aux activités bénévoles, entre autres. Pour les femmes, ceci constitue une perspective nouvelle très importante car, de jour en jour, elles prennent davantage conscience de la valeur des connaissances et des habiletés qu'elles développent alors qu'elles travaillent à l'écart du marché du travail et qu'elles apprennent en dehors d'une institution reconnue. Mais avant d'aborder les caractéristiques du travail au foyer et du travail bénévole, nous nous arrêterons sur le mode d'apprentissage utilisé par l'adulte.

Afin d'augmenter ses connaissances en dehors du système d'éducation, l'adulte s'appuie sur un processus basé plus particulièrement sur l'expérimentation concrète. Francine Landry dans L'apprentissage expérientiel et la reconnaissance des acquis de formation (1986)' apporte un éclairage sur ce sujet en nous présentant le modèle d'apprentissage de David Kolb (Etats-Unis, 1984). Dans ce dernier, l'expérience en tant que facteur d'apprentissage et de développement occupe une place égale à l'apprentissage théorique des concepts. Dans le cas de l'apprentissage par expérience concrète, la préhension (saisie de l'expérience) est basée sur les caractéristiques tangibles et ressenties de l'expérience immédiate. Dans l'apprentissage théorique, la préhension est basée sur des représentations mentales (concepts). On retrouve ici deux approches différentes du processus d'apprentissage.

Tout être humain, compte tenu de ses caractéristiques personnelles, utilise les deux modes de fonctionnement, en autant que les conditions d'apprentissage le permettent, c'est-à-dire qu'une part aussi importante soit accordée à l'expérimentation qu'à la conceptualisation. C'est en ce sens que ces propos rejoignent la problématique de la reconnaissance des acquis. Car même si c'est le résultat du processus (les acquis) et non le processus lui-même qui doit être évalué, nous croyons important de considérer la façon particulière dont les personnes développent leurs savoirs. Et ceci aussi longtemps que le système éducationnel n'offrira pas un processus complet d'apprentissage intégrant les deux modes de préhension. On devra donc tenir compte aussi bien des habiletés que des connaissances lors de l'évaluation, particulièrement en formation générale, où les concepts occupent une place prépondérante. Un processus de reconnaissance des acquis basé uniquement sur des concepts théoriques peut difficilement rendre justice à une partie importante de la population, pour qui le "faire" devient le "savoir".

3. Apprentissages extra-scolaires et travail non-rémunéré: une double reconnaissance à gagner!

Reconnaître des acquis expérientiels, c'est donc admettre la valeur d'un processus d'apprentissage différent de celui prôné par notre mode d'éducation actuel et permettre à toutes et à tous d'acquérir le savoir, tout en respectant les besoins et le mode d'apprentissage de chacun: c'est tendre vers un équilibre qui respecte l'être humain dans sa globalité.

Considérer l'adulte dans sa globalité, c'est aussi tenir compte de l'ensemble des secteurs dans lesquels il ou elle développe ses capacités. Nous rejoignons ici certains aspects particuliers du travail en ce qui concerne les femmes.

Jusqu'à maintenant, le travail au foyer et le bénévolat n'ont pas été socialement reconnus comme activités de production, au même titre que le travail rémunéré. C'est pourtant dans ces lieux qu'une forte majorité des femmes travaillent ou ont travaillé pendant plusieurs années. En plus d'exclure ces secteurs d'activités du monde du travail, on ignore, dans une large mesure, la nature des tâches qui y sont accomplies. Les femmes sont donc particulièrement touchées, car ni le système scolaire, ni le marché du travail ne reconnaissent la valeur de ces sphères d'activité.

A la suite des nombreux groupes de femmes qui, au Québec, travaillent depuis plusieurs années ces questions, nous croyons que la diversité des expériences, la multiplicité des tâches à accomplir au foyer et dans le bénévolat amènent le développement d'habiletés et de connaissances variées, susceptibles d'être reconnues pour l'obtention du DES.

La présente recherche se propose donc d'accorder une attention particulière aux compétences développées par les femmes dans le travail au foyer et le bénévolat, et de situer ces apprentissages en rapport avec le système de reconnaissance des acquis qui se met présentement en place au niveau secondaire.

Inclure des données propres aux femmes dans la problématique de la reconnaissance des acquis, c'est non seulement enrichir d'éléments nouveaux cette problématique, mais surtout contribuer à faciliter l'accès des femmes aux études et au marché du travail.

Car on ne parviendra jamais à rendre justice à l'expérience réelle des femmes si, dans le système de reconnaissance des acquis qui se met en place, on n'examine que les apprentissages correspondant à des programmes scolaires établis, ou si on n'élargit la perspective qu'aux expériences de travail rémunéré. Ignorer les habiletés acquises par le travail au foyer et le bénévolat, sous prétexte qu'il n'existe pas de programme approprié auquel on peut les comparer, ce serait renforcer le monopole scolaire et non "manifester une plus grande ouverture" 3.

En nous intéressant au travail domestique et au bénévolat chez les femmes, nous élargissons les notions de lieux et de modes d'apprentissage et nous rejoignons également la problématique plus globale de l'adulte qui veut faire reconnaître ses acquis développés en dehors du système scolaire. Pour l'ICEA, la reconnaissance de la diversité des lieux et des modes d'apprentissage et l'accréditation des compétences ainsi acquises a toujours été au centre de ses préoccupations.

Par les multiples recherches qui se font actuellement en reconnaissance des acquis extrascolaires, il nous semble que le train est déjà parti. Souhaitons qu'on n'y oublie pas le principal passager, l'adulte, et que celui-ci puisse choisir les voies qui lui conviennent pour le conduire à la destination qu'il aura choisie (travail, perfectionnement, études, etc.)... Et qu'il lui sera loisible d'utiliser ses acquis pour arriver rapidement à destination.

CHAPITRE II : OBJECTIFS DE LA RECHERCHE

La présente recherche porte sur les besoins des femmes en reconnaissance des acquis extrascolaires, plus précisément sur les habiletés générales et spécifiques qu'elles ont acquises à travers leurs expériences de vie, de travail au foyer et de travail bénévole.

Le premier objectif consiste à préciser les domaines d'expérience où les femmes ont développé des connaissances, des habiletés, des expertises et à cerner les compétences (connaissances, habiletés, attitudes) qu'elles y ont développé. C'est à l'intérieur du travail au foyer et du bénévolat que nous explorerons leurs savoirs. Nous avons choisi ces lieux d'apprentissage non reconnus socialement, car ils concernent une forte proportion de femmes et nous permettent de dépasser l'approche qui axe la reconnaissance des acquis expérientiels uniquement sur l'exercice d'un métier reconnu par le marché du travail (Chapitre III).

Pour que la reconnaissance des acquis expérientiels se traduise en une reconnaissance de type scolaire, il faut d'abord examiner les compétences développées par les femmes en regard des objectifs actuels des programmes conduisant à l'obtention du DES en formation générale et des conditions d'admission à ces programmes. Nous chercherons donc à déterminer les correspondances qui existent entre les programmes de niveau secondaire et les savoirs des femmes. C'est là notre second objectif. (Chapitre IV).

Le troisième objectif consistera à identifier les obstacles rendant difficile la reconnaissance des acquis. Nous nous placerons dans une perspective plus globale en questionnant, par le biais des données précédentes, différents aspects de la reconnaissance des acquis extrascolaires telle qu'elle se développe à l'heure actuelle et en proposant certains éléments de solution. (Chapitre V).

CHAPITRE III : IDENTIFICATION DES COMPETENCES DES FEMMES

1. MÉTHODOLOGIE

Dans un souci d'associer l'adulte à sa propre formation, nous avons privilégié une méthode basée sur la réalisation d'entrevues collectives semi-dirigées qui, croyons-nous, ont permis aux participantes de se sensibiliser à la reconnaissance des acquis, tout en amorçant une réflexion sur l'identification de leurs propres compétences.

Un comité d'encadrement composé de représentantes de groupes de femmes et du milieu institutionnel a également été constitué.

1.1 La grille d'entrevue

Afin de bâtir une grille d'entrevue, nous avons consulté diverses recherches existantes en rapport avec notre sujet, et plus particulièrement celles de Marie Lamoureux, Inventaire des compétences développées par les femmes (1985) et Marthe Sansregret, La reconnaissance des acquis expérientiels des femmes aux Etats-Unis (1983). A partir de ces recherches, nous avons retenu six champs d'expérience susceptibles de rejoindre les femmes qui travaillent au foyer et dans les activités bénévoles. A l'intérieur de chaque champ, certains thèmes furent privilégiés tout en laissant la possibilité d'aborder d'autres aspects. Les champs d'expérience et les thèmes abordés furent:

Santé:

  • alimentation
  • activité physique
  • santé mentale

Education

  • psychologie de l'enfant
  • école

Communication

  • savoir écouter
  • savoir parler
  • savoir écrire
  • savoir lire
  • communications non verbales

Vie en société

  • action sociale
  • politique
  • ressources communautaires
  • groupes
  • consommation

Administration

  • budget, comptabilité
  • gestion
  • vente

Développement personnel

  • prise de décision, solution de problème
  • processus d'apprentissage et de développement

Chaque thème fut abordé en faisant appel au vécu, à l'expérience concrète des participantes pour essayer ensuite d'en dégager les connaissances et habiletés acquises. A la fin de chaque rencontre, les participantes étaient invitées à nommer d'autres habiletés qui n'avaient pas été mentionnées.

Une pré-expérimentation avec un groupe nous confirma que les six thèmes prévus selon la grille ne pouvaient être vus dans une seule rencontre. Cette rencontre a donné lieu à un partage d'expériences vécues et à une réflexion des participantes sur leurs acquis; nous avons respecté ce processus, qui nous permettait d'atteindre un des objectifs poursuivis par cette recherche. Mais pour ne pas allonger indûment le temps alloué aux rencontres, il fut décidé que pour chaque groupe nous mettrions l'accent sur certains champs d'expérience selon les particularités du groupe: les intérêts communs développés par les participantes et/ou la démarche antérieure faite par les participantes dans l'identification de leurs savoirs.

1.2 Les participantes

Plusieurs responsables de regroupements, d'organismes, de centres ou d'associations furent rejointes et, grâce à leur collaboration, dix groupes furent constitués; six à Montréal, quatre à Québec. Les groupes comportaient en moyenne six personnes. Dans un cas, il y eut une rencontre individuelle, les autres participantes ne s'étant pas présentées. Au total, 57 femmes ont été rencontrées.

Ces dernières répondaient aux critères suivants:

  • ne pas détenir le diplôme d'études secondaires;
  • avoir une expérience de travail au foyer;
  • posséder préférablement une expérience du bénévolat.

Elles faisaient partie de l'un ou l'autre des groupes suivants:

Au moment de la rencontre, les participantes des groupes Transition-travail avaient terminé le programme complet de formation. Dans les centres de femmes, plusieurs participantes en étaient a leur première réflexion sur les compétences qu'elles avaient acquises au foyer ou dans le bénévolat. Dans quelques-uns de ces centres et d'autres groupes, les femmes ne se connaissaient pas entre elles et expérimentaient leur premier échange sur ce sujet.

Le fait d'avoir choisi une clientèle féminine reliée à des groupes ou des centres suppose que les femmes rencontrées avaient déjà fait une démarche ou manifesté une intention et un intérêt pour un changement dans leur situation. Il s'agit donc d'une clientèle particulière, en ce sens qu'elle est déjà impliquée dans une action. Les rencontres ont eu lieu dans les locaux habituellement utilisés par les groupes, sauf pour un cas.

Les rencontres furent enregistrées et retranscrites. Les informations recueillies furent regroupées selon les thèmes déjà mentionnés. En plus des champs identifiés préalablement, nous avons regroupé, sous le titre "Autres compétences", des habiletés pouvant se rattacher plus particulièrement à la formation professionnelle.

Au début des rencontres, les participantes étaient invitées à compléter une fiche de renseignements personnels. Nous verrons plus loin l'analyse de ces informations.

1.3 Limites de la méthodologie

Les choix méthodologiques que nous avons faits nous ont permis d'explorer rapidement un éventail assez vaste de champs d'expérience. Ils comportaient aussi des limites.

Tout d'abord, nous n'avons pas analysé à fond tous les champs et tous les savoirs que les femmes peuvent être amenées à explorer et à approfondir par le travail au foyer et le travail bénévole et nous n'avons pas la prétention de le faire. En ce sens, il est possible que les catégories choisies aient laissé échapper une partie de la réalité dont d'autres recherches pourront rendre compte de façon plus exhaustive.

En outre, les rencontres collectives et les interactions qui les caractérisent ont mis en évidence les expériences dont les femmes pourraient témoigner le plus facilement, les acquis dont elles avaient le plus clairement pris conscience.

En effet, certaines participantes qui, individuellement ou par le biais d'un groupe (Transition-Travail, par exemple), avaient déjà entrepris une réflexion sur leurs propres compétences exprimèrent assez clairement les acquis qu'elles possédaient. Par contre, celles qui en étaient à leur première réflexion sur le sujet éprouvèrent des difficultés à nommer les apprentissages réalisés à partir de leurs expériences. Dans ce cas nous avons opté pour une formulation conceptuelle et globale de leurs apprentissages, en nous appuyant sur les propos recueillis.

D'autres méthodes ou des entrevues en série pourront sans doute faire émerger davantage d'habilités et de connaissances acquises dans la pratique.

2. CARACTÉRISTIQUES GÉNÉRALES DES FEMMES RENCONTRÉES

Dans un premier temps, nous ferons une description de la clientèle rejointe, à l'aide des données recueillies sur la fiche de renseignements personnels. Suivra une description des savoirs, par rapport aux champs de compétences déjà mentionnés.

La majorité (90%) des 57 femmes rencontrées en entrevue ont entre 25 et 54 ans, se répartissant également dans les 3 catégories d'âge: 25-34 ans, 35-44 ans, 45-54 ans.

La moitié d'entre elles (52%) vivent maritalement avec un conjoint. Près du tiers (31%) sont cheffes de famille et 62% ont des enfants de 18 ans ou moins à la maison.

Ces femmes ont entre 5 et 11 années de scolarité, la moyenne se situant au niveau de la 9e année.

La majorité d'entre elles (80%) ont fait ou font encore du bénévolat. De ce nombre, 32% y ont été impliquées pendant 3 ans et plus. Afin de mieux comprendre les compétences développées par les femmes dans le bénévolat, nous avons identifié les lieux où s'exercent leurs actions ainsi que les gestes qu'elles y posent. Nous pouvons ajouter à ce sujet le commentaire d'une participante: "le bénévolat, on fait cela à la maison à l'année longue".

LIEUX

ACTIONS

68% d'entre elles avaient déjà une expérience de travail rémunéré se situant souvent avant le mariage ou au début du mariage, avant la naissance des enfants. Une seule personne était sur le marché du travail à temps plein et 8 à temps partiel. L'expérience de ces femmes sur le marché du travail se situe dans l'un ou l'autre des domaines suivants:

  • en restauration: gérante, serveuse, cuisinière, caissière, aide cuisinière;
  • en secrétariat: commis de bureau, commis comptable, réceptionniste, sténo-secrétaire, tenue de livre;
  • dans le commerce: gérante, caissière, vendeuse.

Viennent ensuite: travail dans une buanderie, une manufacture de vêtements, pompiste, agente de sécurité, coiffeuse, couturière, entretien domestique, garde d'enfants.

Actuellement 98% sont au foyer. Parallèlement au travail à la maison, 7 étudient à temps partiel et 5 à temps plein. Une même personne pouvant mener conjointement plusieurs projets, 20 d'entre elles sont en processus d'orientation et 51 sont à la recherche d'un emploi sur un total de 57.

3. DESCRIPTION DES COMPÉTENCES DES FEMMES

Cette partie de la recherche a bien comme objectif d'identifier le mieux possible des apprentissages auxquels le travail domestique et le travail bénévole donnent lieu, de même que de faire une description des savoirs que les femmes peuvent y acquérir.

Dans la réalité, bien sûr, aucune femme ne détient tous les savoirs dont nous ferons la description; au contraire, dans ce domaine comme dans tant d'autres, il n'y a pas deux femmes qui présentent le même profil.

Il nous a toutefois semblé indispensable de mentionner tous les savoirs que nous avons repérés grâce aux entrevues, même si certains d'entre eux n'étaient partagés que par un petit nombre de femmes.

Quelle que soit la quantité de femmes qui possèdent telle ou telle habileté, elles doivent l'identifier de manière à la faire valoir au moment d'une reconnaissance d'acquis.

Bref, tous ces savoirs constituent des indices importants du territoire à explorer lors des interventions en reconnaissance d'acquis.

Les thèmes sont présentés dans l'ordre suivant: santé, éducation, communication, vie en société, administration, développement personnel. Nous avons cité des propos de participantes pour illustrer les données. Ceux-ci apparaissent en retrait dans le texte.

3.1 Santé

Plusieurs femmes mentionnent l'importance d'une saine alimentation et d'une activité physique modérée pour le maintien d'une bonne santé.

Elles assument pour l'ensemble des membres de la famille la responsabilité de leur santé et prennent les décisions dans ce domaine. Connaissant les symptômes et les remèdes des maladies courantes, elles surveillent l'état de santé de chacun.

Plusieurs femmes ont à utiliser les services médicaux offerts. Elles connaissent donc les procédures reliées aux soins à l'hôpital ainsi que les termes médicaux les plus courants. Une participante tient à jour le dossier médical qu'elle a monté pour ses enfants et qui renferme des informations sur les maladies, les hospitalisations et les médicaments administrés. Elles manifestent de l'ouverture aux nouvelles médecines (osthéopathie, homéopathie, naturopathie), lorsque la médecine officielle a échoué dans le traitement de leurs maladies ou de celles des enfants.

Sur le plan alimentaire, un grand nombre d'entre elles ont appris à connaître les règles d'une bonne alimentation, les combinaisons alimentaires, les produits naturels. Elles savent équilibrer et varier les menus, souvent avec des revenus très limités.

"Je sais comment m'alimenter pour rester en santé".

La marche, la bicyclette, la danse, le ski de fond, la natation sont les activités les plus fréquentes. Quelques-unes pratiquent régulièrement une activité physique. Elles ne peuvent pas toujours s'y adonner librement, mais encouragent et stimulent fortement les enfants à le faire.

Santé mentale

Pour un grand nombre de femmes, la santé mentale est tout aussi importante, sinon plus, que la santé physique et indissociable de cette dernière.

"Si ta santé mentale ne marche pas, tu as automatiquement des troubles physiques".

Pour garder ou retrouver un équilibre mental, l'alimentation et l'activité physique sont encore ici importantes. Elles y ajoutent des activités de loisir (cinéma, restaurant) dans les limites de leur budget, la relaxation, les bonnes nuits de sommeil. Quelques-unes ont expérimenté des soins médicaux basés sur la prise régulière et intensive de médicaments et en ont constaté les effets négatifs sur leur santé mentale.

Plusieurs ayant eu à traverser des périodes difficiles de remise en question d'elles-mêmes, elles partagent ouvertement en groupe leurs expériences et les moyens qu'elles utilisent pour améliorer leur vie. Elles y trouvent support et entraide.

3.2 Éducation

Plusieurs des femmes rencontrées connaissent les étapes de développement chez l'enfant, sur le plan physique, émotif, intellectuel.

"La psychologie, c'est un de nos points forts. On en fait tous les jours avec les enfants".

Elles savent qu'elles doivent respecter les caractéristiques de chaque personnalité et son évolution et s'efforcent de composer avec le caractère de chaque enfant dans la famille, souhaitant ainsi amener chacun au développement de son potentiel.

Elles ont conscience d'agir souvent comme stimulant et support pour les enfants, qu'elles encouragent, motivent, soutiennent dans leurs activités.

La communication avec l'enfant et l'adolescent-e, par l'écoute, la parole ou l'exemple, occupe une place importante dans l'éducation. Elles aident à résoudre les difficultés de l'enfant et lui transmettent valeurs et connaissances. Elles conseillent les jeunes et les aident à prendre des décisions qui les concernent (plus particulièrement les adolescent-e-s) lorsque surviennent des périodes difficiles. Elles utilisent alors plus volontiers la négociation qu'un rapport d'autorité.

Ces femmes savent que l'éducation se fait de façon progressive et répétitive.

"J'ai fait une recherche sur l'alimentation et changé mes habitudes et celles des enfants. J'ai tout changé l'alimentation de la famille, tranquillement, progressivement".

École

La plupart des femmes ayant des enfants d'âge scolaire assurent le suivi scolaire et collaborent avec les enseignant-e-s. Plusieurs participent aux comités d'école, s'impliquent à la bibliothèque ou à la caisse scolaire comme bénévoles. Elles accompagnent également, à l'occasion, les enfants dans des activités scolaires extérieures.

Comme l'exprimait une mère de famille:

"La femme qui a élevé des enfants et qui s'est occupé du foyer, quand les enfants sont partis, elle se dit: "franchement, j'ai bien réussi! Les enfants nous disent: 'tu es psychologue1. Si je voulais aller travailler dans une garderie, on ne m'engagerait pas, parce que je n'ai pas de papier, mais j'ai quand même réussi à élever mes propres enfants et à les comprendre. C'est un acquis".

3.3 Communication

La communication est envisagée dans son aspect relationnel et comme un moyen d'améliorer la qualité des relations entre les gens.

Savoir écouter

Dans l'ensemble, les femmes rencontrées se reconnaissent une capacité d'écoute très développée. Elles savent recevoir les paroles de l'autre, les décoder, les comprendre.

La télévision et la radio sont d'importantes sources d'informations. Certaines se documentent, comparent les informations et se font une idée personnelle. Elles affirment apprendre beaucoup par les émissions documentaires, d'actualité, les tables rondes.

"A la radio, ce sont les programmes d'actualité que j'écoute. J'apprends, j'analyse, je me fais une idée. Cela me permet de voir les deux côtés de la médaille".

Savoir parler

La plupart croient pouvoir émettre une opinion personnelle tout en respectant celle de l'autre et trouver les arguments pour défendre un point de vue, réfuter une opposition.

Elles adaptent leur langage aux personnes à qui elles s'adressent. Elles accordent de l'importance à la façon de dire les choses pour être bien comprises. Elles transmettent les connaissances ainsi acquises en utilisant un vocabulaire concret relié au vécu.

Savoir écrire

Quelques-unes utilisent l'écriture et ce, selon leurs besoins. Cela s'étend de la liste d'épicerie, lettre, journal intime, curriculum vitae, procès-verbal de réunion jusqu'aux articles pour des journaux. L'habileté et les connaissances dans ce domaine varient selon l'utilisation faite.

Savoir lire

La plupart des femmes rencontrées lisent les journaux pour connaître l'actualité et les ressources du milieu.

"Je lis les articles dans les journaux locaux. Je me sens concernée et j'apprends des choses qui se passent dans mon quartier".

Par contre, plusieurs évitent les journaux où l'on montre, des actes de violence physique.

La lecture de volumes, moins régulière que les journaux,, répond chez certaines à un besoin de détente ou d'enrichissement des, connaissances.

"Pour ouvrir la garderie, je me suis mise à lire beaucoup sur le sujet et cela m'a beaucoup servi".

Le non-verbal

Les femmes, dans l'ensemble, connaissent l'importance du message non verbal. Elles savent l'interpréter et le mettre en relation avec le message verbal. Elles utilisent les informations du message non verbal émises par l'interlocuteur pour mieux le comprendre et en cas de contradiction entre les deux messages, elles se fient au non verbal.

"L'attitude compte plus que les paroles; c'est plus révélateur".

3.4 Vie en société

Globalement, on peut dire que les femmes rencontrées possèdent une conscience sociale dont la particularité se situe au niveau des préoccupations qui les animent. Pour elles, la qualité de la vie et l'environnement constituent des motifs d'action importants. Elles situent l'individu en relation avec son environnement, dans son milieu de vie et d'évolution.

Action sociale

Une bonne proportion des femmes rencontrées sait s'informer, mobiliser les énergies, les regrouper. Pour atteindre leurs buts, elles utilisent des moyens d'action collective tels que pétitions, sondages et comités d'étude.

"Je me suis battue contre l'implantation d'un dépotoir (dans un quartier résidentiel). J'ai fait des téléphones. On a monté un comité. On s'est incorporé. On a fait plusieurs rencontres: de 30 à 40. Ca a presque été un référendum; on a gagné 60% des votes. Le projet a duré 9 mois."

D'autres projets d'action communautaire ont eu également des résultats positifs. Citons, entre autres:

  • l'aménagement d'un parc de quartier
  • l'implantation d'une garderie
  • l'organisation d'activités de loisir
  • le changement de noms de rue
  • l'embellissement de l'environnement immédiat (balcons fleuris)

Certaines d'entre elles, étant membres d'organismes déjà existants, par exemple l'AFEAS, s'intéressent alors à des sujets de portée plus globale: allocations familiales, crédits d'impôt, rente des survivants, etc.

Politique municipale et provinciale

Un certain nombre de femmes participent également à la politique "officielle", bien que celle-ci leur apparaisse souvent étrangère à leurs préoccupations. Certaines assistent aux réunions du Conseil municipal, travaillent à l'organisation des élections municipales ou secondent un conseiller. En temps d'élection, elles travaillent comme scrutatrices ou secrétaires de parti. Elles utilisent leur droit de vote.

Au plan de la politique provinciale, quelques-unes sont membres d'un parti et une participante joue un rôle actif comme conseillère du parti dans le comté.

Ressources communautaires

Au niveau de la vie quotidienne, la plupart connaissent et utilisent les ressources communautaires. Elles s'informent et partagent leurs savoirs avec les autres. Elles comparent les services offerts et choisissent selon leurs besoins. Ces services concernent surtout les besoins matériels, les services de santé et d'aide personnelle.

"Je m'informe. Ce qui est disponible pour mon bien-être physique, émotif, personnel, je l'utilise".

Groupes

Toutes les femmes rencontrées ont eu à participer à un groupe, à un moment de leur vie.

Dans les groupes d'échange et de formation, la plupart ont appris à s'exprimer, à émettre une opinion, tout en respectant celle des autres, à évaluer leurs interventions. Plusieurs se sont déjà montrées capables de trouver des solutions d'ensemble aux problèmes soulevés dans un groupe.

Dans le cadre d'activités bénévoles, en particulier, certaines ont développé des capacités de leadership et savent animer un groupe. Comme cela a déjà été mentionné, elles savent travailler en groupe à la définition et à la présentation des revendications. Quelque-unes ont été présidentes ou directrices d'associations, représentantes de groupes ou membres de conseils d'administration.

Consommation

Plusieurs d'entre elles ayant à gérer le budget familial, elles ont une attitude critique face à la consommation. Elles comparent les prix en tenant compte de la qualité des produits; à l'occasion, elles marchandent. Elles utilisent à l'occasion leurs droits de consommatrices lorsqu'elles sont insatisfaites du produit ou du service acquis.

3.5 Administration

Dans l'ensemble, les femmes tiennent le budget familial souvent avec des revenus extrêmement limités.

"Nous, les femmes à la maison, c'est ça qu'on sait: où aller chercher de l'argent et quoi acheter avec, comment vivre avec, comment diviser l'argent".

Cette expérience acquise au foyer est réutilisée dans les groupes, les associations où elles font de l'action bénévole.

"On a fait agrandir le chalet du parc. On a organisé des activités. On a commencé avec 50$ dans le trou et là on a 14,500$ brut après 3 ans. On est aussi allé chercher des subventions".

Certaines femmes connaissent donc des principes, des règles de comptabilité, de gestion, d' administration, d'achat et de vente, qui se traduisent par des habiletés générales et spécifiques.

Dans le domaine de la comptabilité, en commençant par les habiletés générales pour aller vers des activités spécifiques, nous retrouvons:

  • faire des planifications budgétaires pour un organisme
  • gérer un budget
  • faire des placements d'argent
  • faire des emprunts
  • préparer les payes des employés
  • compléter un rapport d'impôt
  • tenir le grand livre
  • tenir les comptes, les livres; faire les bilans, la conciliation de caisse
  • percevoir les loyers, remplir les feuilles de rapport, faire les dépôts pour les logements

Sur le plan de la gestion et de l'administration, on retrouve, entre autres, les activités suivantes:

  • mettre sur pied une coopérative
  • administrer une garderie coopérative
  • organiser des campagnes de financement
  • organiser des activités pour des groupes jusqu'à 500 personnes
  • ouvrir un commerce et le fermer.

Dans le secteur de la vente, certaines ont eu à:

  • passer un contrat de vente
  • acheter et vendre une maison
  • passer un contrat devant notaire
  • vendre divers produits
  • acheter une terre
  • faire de la spéculation domiciliaire.

En ce qui concerne l'ensemble de ce champ d'expérience, les femmes rencontrées se définissent, les unes ou les autres, comme étant réalistes, responsables, pratiques, stables, méthodiques ou ayant le sens de l'organisation.

3.6 Développement personnel

Plusieurs femmes savent assurer leur développement personnel en suivant des cours, en participant à des activités de connaissance de soi,de développement de leurs capacités, d'affirmation de leur potentiel.

Prise de décision, solution de problème

Appelées à prendre de multiples décisions face à elle-même ou à la famille, plusieurs femmes ont adopté un processus décisionnel que l'on pourrait résumer ainsi:

  • définir le besoin, analyser la situation, situer le problème
  • rechercher des informations, consulter d'autres personnes
  • trouver des solutions
  • évaluer les implications, peser le "pour" et le "contre"
  • décider
  • agir
  • constater les effets, accepter les conséquences.

Les décisions prises quotidiennement ne font pas l'objet d'une démarche aussi élaborée mais ce processus sous-tend toute décision importante, tel un déménagement, l'éducation des enfants, etc.

"J'analyse bien avant. Je vais chercher de l'information. Souvent j'écris les bons et les mauvais côtés et après je décide. Et si je ne prends pas la bonne décision, je l'assume".

Quelques-unes mentionnent la place de l'intuition lorsqu'arrive le moment de faire un choix.

Processus d'apprentissage

Dans l'ensemble, les femmes rencontrées en entrevue ont développé, de façon autodidacte, leurs capacités d'apprendre, d'augmenter leurs connaissances. Les commentaires sont ici éloquents:

"Un cours souvent c'est de la technique seulement. Nous c'est la pratique et la technique. L'expérience c'est souvent mieux que la théorie. Quand tu gères un budget où il y a un seul revenu et 4 enfants, il faut que tu gères vraiment".

D'après les commentaires recueillis, l'apprentissage se fait à partir d'une situation spécifique, d'un problème concret à solutionner, d'un besoin ressenti. La composante émotive (motivation) est très importante au point de départ et agit comme stimulant tout au long de la démarche. En plus de l'apprentissage par expérimentation, les femmes complètent leurs expériences en allant chercher les informations qui vont leur permettre de situer et de compléter leurs apprentissages dans un cadre théorique.

"J'ai beaucoup appris à la maison, en particulier en écoutant la radio. Je prenais des notes, je faisais venir des revues. Je prenais toutes les informations qui pouvaient m'aider sur l'éducation des enfants. J'apprenais par moi-même et c'est ce que je trouve dommage: que ce ne soit pas reconnu".

3.7 Autres compétences

En plus des champs de compétences énumérés dans ce qui précède, divers autres domaines ont été explorés par l'une ou l'autre des participantes; elles nous ont signalé les connaissances ou les habiletés qu'elles possédaient, sans toutefois apporter plus de précisions:

Mécanique

"Je connais les moteurs".

"Je connais les transmissions".

"J'ai changé la boîte de contrôle du "pick-up".

Rénovation domiciliaire

"Je fais un peu de plomberie et d'électricité".

"Je sais tirer les joints".

"J'ai fait beaucoup de rénovation de maison".

"J'ai sablé des planchers".

Horticulture

"Je sais poser de la tourbe".

"Je sais entretenir les plantes".

"Je taille les arbres".

"Je fais un jardin potager".

"Je m'occupe des fleurs et de l'aménagement du terrain".

Gérontologie

"J'aime la gérontologie et j'en fais déjà. Il y a au moins 10 personnes dans ma famille qui ont plus de 70 ans."

Ces témoignages sont pour nous des indices, quant aux intérêts de ces femmes et aux domaines où devra se porter l'investigation des acquis, et non pas une preuve quant aux compétences qu'elles possèdent réellement.

Tâches domestiques

Les femmes rencontrées ont cité également des compétences en couture, cuisine, décoration d'intérieur. Ces habiletés s'étendent du travail fait pour la famille (vêtements des enfants, repas quotidiens) jusqu'au travail pour des organisations (décoration de salle et de lieux de rencontre, préparation de repas pour des grands groupes).

3.8 Habiletés génériques

Au-delà des habiletés spécifiques développées par les femmes en lien avec l'expérience de chacune, nous pouvons rassembler ces compétences sous forme de savoirs globaux et transférables, d'habiletés génériques. Bien que ces capacités s'utilisent autant en relation avec une ou plusieurs personnes (famille, groupe) et s'appliquent à différents champs d'expérience, nous avons indiqué entre parenthèses le domaine privilégié où ces habiletés se sont manifestées plus clairement dans cette recherche:

  • capacités de supporter, motiver, susciter, stimuler (éducation, vie en société, communication);
  • capacités de développer des habiletés, de transmettre des valeurs, des connaissances (éducation, santé);
  • capacités de recevoir et donner des informations, de les échanger et les faire circuler (communication, vie en société);
  • capacités de planifier, gérer, administrer, organiser (administration);
  • capacités de s'informer, de comparer, de décider, d'agir (développement personnel, vie en société).

3.9 Habiletés préalables

II existe également des habiletés préalables aux compétences qui ont été mentionnées. Ce sont des habiletés indispensables au développement ou à l'utilisation d'autres habiletés.

Si nous prenons pour exemple les compétences des femmes en comptabilité on peut déduire, qu'il s'agisse de tenir le budget familial ou de planifier le budget d'un organisme, que ces habiletés supposent des connaissances en mathématiques telles les opérations sur les nombres entiers et avec décimales, l'estimation des coûts, les calculs de pourcentage, etc.

Il en est de même pour les habiletés scientifiques. Par leur mode d'apprentissage plus particulièrement relié à l'expérience concrète, les femmes utilisent dans bien des cas une approche qui rejoint sensiblement la méthode expérimentale utilisée en sciences. Une recherche plus poussée dans ce domaine susciterait un rapprochement entre travail domestique et sciences et permettrait de démystifier pour les femmes ce secteur souvent considéré comme éloigné de leurs occupations.

4. CONCLUSION

A partir des propos recueillis auprès des femmes rencontrées, nous avons cherché à cerner les diverses compétences développées dans certains champs d'expérience. Quelques observations nous semblent appropriées à ce moment-ci de la recherche.

Rappelons, pour commencer, qu'il s'agit d'un portrait relatif des compétences des femmes dont l'activité principale se déroule au foyer et/ou dans des activités bénévoles et que les femmes peuvent posséder à des niveaux différents, l'une ou l'autre des compétences mentionnées.

Le portrait que nous en avons fait n'est sûrement pas le seul possible: d'autres recherches pousseront plus loin l'investigation, décèleront d'autres compétences, les identifieront avec plus de justesse, en feront un inventaire plus exhaustif et cerneront encore mieux les habiletés génériques, les savoirs transférables que les femmes sont susceptibles de développer au foyer et dans le bénévolat.

Il faudrait également éviter de confondre expérience et acquis. Nous entendons par là que la réalisation d'une expérience ne conduit pas automatiquement à la prise de conscience des habiletés ou des connaissances qui y sont reliées. Ressortir les apprentissages réalisés à partir des expériences et des gestes quotidiens demande un recul et un temps de réflexion. Or, la pratique journalière d'un travail qui ne reçoit aucune valorisation n'aide pas toujours les femmes à entreprendre cette réflexion. Traduire l'expérience concrète en savoirs implique, selon nous, une démarche particulière.

Nous pouvons également constater que, dans l'ensemble, les compétences identifiées se rattachent plus particulièrement à des habiletés (savoir-faire) et à des attitudes (savoir-être) qu'à des connaissances théoriques précises. Mis à part le fait que cette recherche sous sa forme participative se prêtait mal à une identification poussée des connaissances (savoirs), nous croyons déceler ici un aspect important de l'apprentissage expérientiel. Cette forme d'apprentissage semble se manifester beaucoup plus par des activités, concrètes que par l'énoncé de concepts.

Nous verrons, dans le chapitre suivant, comment ces compétences exprimées en savoir-faire et savoir-être reçoivent une correspondance dans certains programmes ou cours de niveau secondaire.

CHAPITRE IV : COMPARAISON ENTRE LES COMPÉTENCES DES FEMMES ET LES PROGRAMMES DE FORMATION

La tendance actuelle veut que la reconnaissance des acquis extrascolaires passe par la comparaison entre les connaissances, habiletés et attitudes développées dans l'exercice d'un emploi ou d'une activité et les objectifs des programmes existants à l'éducation des adultes. Cette comparaison implique par la suite une évaluation et une sanction. Quelles comparaisons pouvons-nous faire entre les programmes existants au niveau secondaire en formation générale et les compétences développées par les femmes, telles que nous les avons identifiées dans la première partie de cette recherche? C'est ce que nous allons étudier dans ce chapitre.

Le système scolaire est depuis longtemps responsable de transmettre le savoir, de l'évaluer et de le sanctionner. Par la reconnaissance des acquis extrascolaires, se manifeste un intérêt et une volonté d'élargir les notions d'apprentissage et le contenu du savoir. Le système scolaire ne devient plus alors le seul lieu reconnu pour la transmission des connaissances mais il doit reconnaître la valeur d'autres savoirs, d'autres modes et d'autre lieux d'apprentissage.

Ces principes sont reconnus par l'énoncé des postulats suivants que l'on retrouve dans Le cadre de reconnaissance des acquis extrascolaires, DGEA, 1987, page 5:

"1.1 L'adulte peut avoir fait des apprentissages valables et significatifs en dehors de système scolaire.

1.2 L'adulte qui a réalisé des apprentissages extrascolaires peut, selon les possibilités organisationnelles du milieu et conformément aux modalités définies par les organismes, se faire reconnaître ses apprentissages."

1. MÉTHODOLOGIE

Rappelons que le cadre de la formation générale au secondaire pour les adultes comprend actuellement, pour les francophones: le français, langue maternelle et l'anglais, langue seconde qui forment le bloc des cours obligatoires. Dans les cours optionnels, nous retrouvons les mathématiques, les sciences (physique, chimie) et les sciences humaines (histoire, géographie, vie économique, vie politique). (Voir annexe I)

C'est par l'analyse des programmes ou des cours susceptibles de correspondre aux habiletés identifiées chez les femmes que nous avons procédé. C'est sous l'angle des objectifs généraux et terminaux d'apprentissage, du contenu global et de la possibilité actuelle de se faire reconnaître des acquis dans ces domaines de connaissance que les programmes de formation générale menant au DES furent analysés.

Des rencontres avec les responsables de matière à la Direction générale de l'éducation des adultes (DGEA) ont permis d'obtenir les informations et les documents qui allaient être analysés.

Nous avons ainsi appris que plusieurs programmes subissaient des transformations. Le programme de français est utilisé dans sa forme actuelle mais on prévoit des modifications dans les années qui viennent. Les programmes des sciences humaines ont été refaits et seront applicables à l'automne 1987. Grâce à la collaboration de Monsieur Marc Goulet, de la DGEA, nous avons pu connaître les objectifs et les contenus des nouveaux programmes, même s'ils n'étaient pas encore officiellement acceptés. Un nouveau programme, Développement personnel et social (DPS), devrait également être disponible dès l'automne. Afin de retrouver les compétences développées par les femmes en administration, nous avons dû nous tourner vers la formation professionnelle (secrétariat et commerce). Là aussi des changements sont prévus.

C'est donc sur une base assez mouvante que s'est faite l'analyse des programmes et, même si cela a occasionné certains retards et amené au départ des informations fragmentaires, nous avons choisi d'étudier les nouveaux programmes sous leur forme provisoire, c'està-dire tels que décrits dans des "documents de travail".

2. ANALYSE DES PROGRAMMES DE FORMATION

Afin de mieux comprendre cette partie consacrée aux programmes, voici quelques informations sur le mode d'apprentissage particulier à l'éducation des adultes. On y applique une approche individualisée où, suite à une évaluation du dossier scolaire antérieur de l'adulte et/ou par la passation de tests de classement, on remet à l'adulte un profil de cours. Ce profil indique les cours qu'il aura à compléter pour atteindre son objectif. L'étudiant adulte peut ainsi, pour diverses matières, être classé à des niveaux différents d'apprentissage (secondaire I à V). Dans cette approche d'enseignement individualisé, le groupe-classe est remplacé par un groupe matière où les adultes qui étudient la même matière, peu importe le niveau, sont regroupés avec un formateur d'adultes. Afin d'acquérir les connaissances dont il a besoin, chaque adulte utilise un programme (ensemble de cahiers) où sont exprimés sous formes d'objectifs terminaux, intermédiaires et général la matière à apprendre. La réussite des tests reliés aux objectifs terminaux et intermédiaires permet à l'adulte d'atteindre l'objectif général et par conséquent, la réussite du cours.

2.1 Programme de français

Nous commençons notre analyse par le programme de français. Ce programme, pour le niveau secondaire s'étend du Secondaire I à V. Pour avoir droit au DES, l'adulte doit avoir accumulé, dans cette matière, douze unités (une unité = 15 heures d'apprentissage) de secondaire V. (Voir l'annexe I).

Le programme du Secondaire I à V s'articule autour de l'apprentissage de quatre savoirs: savoir écouter, savoir parler, savoir lire, savoir rédiger, dans lequel est incluse l'orthographe, qui fait l'objet d'une évaluation spécifique. Pour chacun de ces savoirs, on trouvera en Annexe II la liste des objectifs terminaux de niveau secondaire V.

L'adulte a accès à ce programme après avoir passé un test de classement qui le situe à un niveau d'apprentissage déterminé. C'est donc un instrument qui évalue les acquis de l'adulte en rapport avec le programme. La DGEA n'impose pas le test de classement aux commissions scolaires; cependant, il leur est fortement suggéré. Nous croyons que l'ensemble des commissions scolaires l'utilisent étant donné la forte relation entre le test et le programme. Au test de classement, l'adulte peut être classé à des niveaux différents d'apprentissage pour chacun des savoirs. Ainsi, il peut se retrouver en Secondaire V pour le savoir écouter, Secondaire IV pour le savoir parler, Secondaire III pour le savoir lire et Secondaire I pour le savoir rédiger (incluant l'orthographe). Ceci l'amènera, au cours de sa formation, I réaliser des activités d'apprentissage isolées pour chacun des savoirs.

Les objectifs terminaux en français de Secondaire V nous informent sur les habiletés attendues suite aux apprentissages réalisés. Ces habiletés sont les suivantes: décrire, résumer, commenter, faire un compte-rendu, comparer, critiquer, orthographier. Elles s'appliquent soit à une communication orale et visuelle, soit à une oeuvre littéraire écrite. (Voir l'annexe II).

Les apprentissages se font à partir d'extraits d'oeuvres littéraires ou de situations vécues par l'adulte. Les oeuvres à étudier sont laissées au choix des commissions scolaires et sauf exception, on laissera à l'adulte le choix de l'événement vécu qui fera l'objet d'étude.

C'est sous le thème "communication" que sont regroupées les compétences des femmes en rapport avec le langage. Dans les données recueillies chez ces dernières, on remarque l'importance de la communication orale (savoir parler et savoir écouter) considérée comme un processus d'échange. La communication est importante dans la mesure où elle permet l'expression d'un message qui tient compte de l'autre (adapter le langage aux personnes à qui elles s'adressent, tenant compte de la situation vécue) et dans la mesure où l'écoute permet de saisir le message de l'autre et de maintenir la communication. L'aspect fonctionnel de la communication orale occupe la première place dans la réception (compréhension) et la production d'un message significatif.

La communication écrite (savoir lire, savoir rédiger) semble occuper une place moins importante et répondre aux besoins spécifiques de chacune. L'absence de conditions facilitantes, par exemple le manque de temps de loisir et d'un lieu approprié facilitant la lecture et l'écriture, expliqueraient en partie que ces activités passent au second plan. Une étude pourrait être entreprise afin de vérifier cette hypothèse.

Les formes prises par la communication verbale et écrite chez les femmes sont d'ordre informatif, incitatif et expressif. On retrouve l'aspect informatif dans l'acte de renseigner, recevoir et transmettre des informations. L'aspect incitatif se traduit par les habiletés à susciter, convaincre, motiver. L'aspect expressif se manifeste dans l'expression des sentiments et le partage des expériences vécues.

Si on fait maintenant un rapprochement entre le programme et les habiletés des femmes, on remarque que le découpage des habiletés tel que présenté dans le programme (les différents savoirs) ne se retrouve pas de façon aussi tranchée dans l'expression quotidienne où les habiletés forment un tout axé sur la communication.

Au-delà de cette différence et dans la mesure où les informations recueillies chez les femmes et dans le programme de français nous permettent de vérifier des concordances, il ne semble pas y avoir d'opposition majeure entre les deux. Par contre, étant donné la relation existant entre le test de classement et le programme, il serait possible de vérifier cette concordance de façon plus précise. Une analyse des résultats obtenus par les centaines de femmes qui ont dû passer ce test depuis son application dans les commissions scolaires préciserait le rapport existant entre ce programme et le savoir des femmes.

Nous pouvons maintenant nous demander dans quelle mesure l'adulte peut faire reconnaître ses acquis en langue maternelle. Nous avons vu précédemment que le test de classement permet de situer l'adulte à l'endroit où il devra commencer ses apprentissages, mais non pas de traduire ses acquis en unités transférables, pouvant par la suite être consignées dans un document officiel. Par contre, il existe ici une exception. L'adulte qui se classe au même niveau d'apprentissage pour chaque savoir peut se voir accorder des unités pour le niveau antérieur. Cette situation est, selon notre expérience de travail en milieu éducatif, exceptionnelle. Là aussi, il serait possible de vérifier cette application du test de classement à une échelle provinciale. On pourrait aussi évaluer dans quelle mesure le test de classement permet d'accorder des équivalences à l'adulte. Les résultats permettraient de déterminer la pertinence d'adapter le test de classement à des fins de reconnaissance ou de créer un nouvel instrument axé uniquement sur la reconnaissance des acquis en langue.

Dans l'état actuel des choses, nous pouvons dire qu'il n'existe pas d'instrument clairement identifié permettant de reconnaître les acquis en langue, le test de classement ne répondant pas à cet objectif premier.

2.2 Programme en secrétariat-commerce

Nous avons vu dans le chapitre III, sous le titre "administration", les nombreuses compétences développées par les femmes en gestion, comptabilité et vente. C'est dans le secteur secrétariatcommerce que nous avons recherché des correspondances entre ces compétences et des programmes scolaires. Là aussi, on peut prévoir des changements dans les années qui viennent, en fonction du développement du marché du travail (bureautique) et des décisions relatives à l'intégration des jeunes et des adultes en formation professionnelle.

Il existe actuellement dix-huit plans de formation dans ce secteur (Voir l'annexe III). Ces plans se rattachent au cadre de la formation professionnelle et les cours permettent d'obtenir les unités {de niveau Secondaire IV ou V) nécessaires à l'obtention du DES, à condition toutefois que l'étudiant-e réponde aux normes de certification. Comme tous les programmes de formation professionnelle, les plans de formation sont normalement accessibles après que l'adulte a complété le Secondaire III.

De l'ensemble des plans de formation, nous avons ressorti les cours dont les objectifs peuvent rejoindre dans une certaine mesure les habiletés développées par certaines femmes dans le bénévolat ou acquises par les expériences de vie. Ces cours sont: art de la réception, classement, mathématiques commerciales, organisation de bureau, organisation de l'entreprise, protocole du téléphone, transactions commerciales, tenue de livres et techniques de vente (Voir l'annexe IV). Cette liste n'est pas exhaustive. D'autres cours de ce secteur pourraient correspondre à des compétences ou des habiletés spécifiques développées par certaines femmes.

Les objectifs généraux de ces cours sont exprimés de façon assez sommaire. Ils réfèrent soit à des habiletés techniques précises, par exemple "maîtriser une technique de calcul rapide" (CMC 142), soit au contraire d'ordre global: "Accueillir et guider le visiteur qui se présente à l'entreprise" (CAR 341).

Bien que ces cours puissent correspondre à des habiletés développées par un certain nombre de femmes, il y manque des dimensions importantes rencontrées chez certaines: le niveau de responsabilité qu'elles assument et l'implication pratique qu'elles manifestent dans leurs actions. Prenons pour exemple le cours "Organisation de l'entreprise" (COQ 141) dont l'objectif se lit comme suit:

"Connaître les notions de base qui se rattachent aux formes juridiques d'entreprise et aux services habituellement retrouvés dans une grande entreprise. L'adulte pourra lire un organigramme et identifier les différents départements d'une structure donnée".

On peut se demander comment une femme qui a mis sur pied une garderie coopérative ou ouvert un commerce peut se faire reconnaître

des acquis par le biais de ce cours. Nous croyons que cette adulte possède des habiletés plus précises et complexes et que son niveau de responsabilité est beaucoup plus élevé que ce qui est ici mentionné. Nous nous retrouvons devant deux niveaux différents de préoccupation. Dans le premier cas, le cours se situe dans un ensemble (un plan de formation) qui vise à former une adulte pour une fonction de travail reliée au secrétariat. Dans le second, il s'agit de compétences précises et variées, dans le but d'une réalisation concrète. Bien que certaines femmes pourraient retrouver, dans les cours mentionnés plus haut, des compétences qu'elles auraient acquises, d'autres se retrouveraient face à un manque. Il faudrait voir à ce que pour les nouveaux programmes prévus dans ce secteur, les objectifs de cours ou programmes incluent des dimensions relatives aux acquis expérientiels de l'adulte.

Les propos qui précèdent concernent les habiletés des femmes en gestion. Si nous analysons les compétences mentionnées en comptabilité, nous nous retrouvons ici aussi devant une lacune dans le contenu de ces programmes. On ne trouve rien de ce qui concerne les opérations reliées à l'argent dans la vie quotidienne. Nous reportons pour l'instant cette discussion, car nous prévoyons retrouver dans d'autres programmes les éléments qui nous intéressent.

Quant au secteur de la vente, l'objectif du cours "Vente (technique)": "Appliquer les techniques de la vente dans une situation donnée", ne comporte pas de données suffisantes pour établir un rapprochement avec les compétences des femmes que nous avons inventoriées.

Pour les femmes qui retrouvent dans les cours de secrétariatcommerce des habiletés qu'elles maîtrisent, quelles sont les possibilités de se faire reconnaître des acquis?

Il est important de souligner, dans un premier temps, que l'adulte pourra se faire reconnaître des acquis en autant qu'elle en sera informée. Comme ces cours sont offerts en formation professionnelle, il peut exister un manque d'information pour l'adulte se situant dans le cadre de la formation générale. Nous avons un exemple de cette difficulté telle qu'elle a été vécue par une femme rencontrée dans un des groupes. Cette personne avait déjà été propriétaire, pendant quatre ans, d'une petite entreprise de publicité. Elle désirait obtenir un DES pour retourner sur le marché du travail. Plutôt que de lui proposer de reconnaître ses expériences, on lui demande de suivre des cours de mathématiques et sciences afin de compléter le nombre de crédits optionnels nécessaires à l'obtention d'un DES.

Bien informée, elle aurait pu faire valoir ses acquis en administration et comptabilité au lieu d'investir temps et énergie à compléter des cours qui ne l'intéressaient pas et ne répondaient pas à son projet. Cet exemple met en évidence le besoin d'une information appropriée, générale quant à l'ensemble du système scolaire et spécifique au projet de l'adulte.

En supposant maintenant que la personne a été bien informée, comment pourrait-elle faire reconnaître ses acquis? La seule possibilité consisterait à passer tous les examens pour chacun des cours correspondant à ses acquis. Cette opération nous semble longue et onéreuse, car elle implique une préparation personnelle très poussée pour s'approprier les contenus de cours. Ceci illustre bien le manque d'outils pertinents pour les adultes qui ont appris par l'expérience dans un contexte autre que scolaire. Il ne suffit donc pas de retrouver une correspondance entre les cours et les acquis de l'adulte mais encore faut-il avoir les moyens (les outils) qui permettent de vérifier ces correspondances.

2.3 Programme de vie politique

C'est dans le nouveau programme "Vie politique", disponible dans les commissions scolaires, depuis l'automne 1987, que nous avons recherché les compétences des femmes dans le domaine politique. Notre analyse s'est faite à partir du document de travail servant de base au programme officiel.

Ce programme s'inscrit dans le champ des sciences humaines. Il comporte six cours, chacun permettant d'obtenir des unités de Secondaire V. Il n'existe pas de conditions préalables à l'inscription à ces cours. Les six cours composant le programme sont les suivants:

  1. Un Etat bicéphale: l'Etat québécois/l'Etat canadien
  2. Qui décide quoi? de l'Etat à l'électorat
  3. Le pouvoir invisible: de la dynamique politique
  4. Le quatrième pouvoir: mass-média et information
  5. Mondiovision: l'Etat des relations internationales
  6. Au-delà des Etats: les enjeux politiques mondiaux.

De cet ensemble, nous avons retenu les deuxième et troisième cours comme pouvant se rattacher, dans une certaine mesure, aux compétences identifiées chez certaines femmes. Chaque cours comporte un objectif général, des objectifs terminaux et des objectifs intermédiaires. On trouvera en annexe V les objectifs généraux et terminaux de ces cours, tels que formulés dans le document de travail.

Cours "Qui décide quoi? De l'Etat à l'électorat"

Comme le titre de cours le laisse supposer, il sera question du système électoral. Le contenu porte sur le système politique étudié par le biais de ses institutions parlementaires, gouvernementales et juridiques en tant que lieux de pouvoir. On aborde le système électoral selon diverses caractéristiques: droit de vote, dépenses électorales, carte électorale, etc.. On décrit finalement les étapes de la tenue d'un scrutin: déclenchement d'une élection, recensement, période électorale et jour du scrutin.

L'importance donnée au système électoral permet de faire le lien avec les habiletés de certaines femmes. Celles qui ont travaillé aux élections à divers titre (voir page 29) possèdent une connaissance pour le moins pratique du déroulement. Elles rejoignent ainsi le contenu du troisième objectif terminal "Décrire les différentes étapes dans la tenue d'une élection" et, pour certaines, une partie du second "Expliquer les principales caractéristiques du système électoral au Québec et au Canada".

Cours "Le pouvoir invisible: de la dynamique politique"

Dans ce cours, après avoir abordé quelques notions de base en politique, on étudie des éléments tels que les luttes et le cadre politiques, les actions politiques, les facteurs de lutte, le changement social. On traite ensuite des partis politiques et des groupes de pression, selon leur origine, leurs caractéristiques, leur dynamique et leurs fonctions.

C'est par le biais des "groupes de pression" (troisième objectif terminal) que nous pouvons faire le rapprochement entre le contenu de cours et les habiletés des femmes. Nous avons déjà mentionné, au chapitre III, les projets d'action communautaire réalisés par certaines femmes et leur implication dans divers organismes. De la même façon, un certain nombre d'entre elles ont choisi de jouer un rôle actif dans un parti. C'est en tant qu'organisatrices ou participantes actives de groupes de pression qu'elles agissent dans leur milieu, qu'elles exercent un pouvoir politique. Le troisième objectif terminal, concernant les groupes de pression, s'énonce comme suit: "Expliquer le rôle des groupes de pression dans le système politique, tant à l'échelle fédérale, provinciale que locale". Une fois établie cette correspondance entre une partie du contenu et les actions des femmes, il reste à savoir quelles habiletés sont recherchées en rapport avec ces connaissances.

Que conclure sur le rapport existant entre les cours du programme "Vie politique" que nous avons mentionnés et les compétences des femmes? Une première observation concerne le contenu des cours. Nous pouvons remarquer, aussi bien dans Te deuxième que le troisième cours, qu'une partie seulement du contenu (le troisième objectif terminal dans chacun des cours) se rattache aux compétences identifiées chez les femmes. Nous avons vu, en page 43, que l'atteinte des objectifs terminaux d'un cours amène la réussite de l'objectif général et par conséquent la réussite du cours. En retrouvant dans le troisième objectif terminal les compétences des femmes, ces compétences seront-elles ignorées parce que jugées incomplètes ou secondaires?

Une seconde remarque porte sur le type d'habiletés en cause. Les habiletés des femmes se situent au niveau de l'action, de l'intervention. Ce qui n'exclut nullement une compréhension et une connaissance théorique des phénomènes. Pour être reconnues, ces connaissances acquises par la pratique devront-elles être "organisées" ou exprimées de la même façon que dans le cours?

2.4 Programme de "Vie économique"

Ce programme est nouveau au même titre que le précédent. Il s'inscrit également dans le champ des sciences humaines et permet

d'obtenir des unités de niveau Secondaire V. Il comporte les six cours suivants:

  1. Une société, ça s'organise.
  2. Le monde du travail, c'est tout un job.
  3. Consommer sans se faire... consommer.
  4. L'Etat, problème ou solution?
  5. Echanger avec les autres pays: ça change quoi?
  6. Faire fructifier son argent, c'est facile...

Le troisième cours "Consommer sans se faire... consommer" a été analysé en regard des compétences des femmes en consommation.

Le contenu du cours aborde différents aspects de la publicité, du crédit, de la législation (contrats), des moyens de protection d'organismes et services de protection du consommateur. On retrouve ici les habiletés de femmes dans le domaine de la consommation telles que nous les avons vues au chapitre III. En tant que gestionnaires du budget familial, plusieurs ont développé une attitude critique face à la consommation: analyse des informations (publicité), comparaison des prix en regard de la qualité, utilisation des services et moyens pertinents quant à la protection de leurs droits de consommatrices.

Le contenu, dans 1'approche pédagogique qui est privilégiée, devrait se rattacher aux expériences de l'adulte, ainsi que l'affirme le quatrième principe directeur du programme: "Le programme privilégie une approche pragmatique, axée sur le vécu de l'adulte" (p. 3).

L'objectif général du cours est: "Expliquer le phénomène de la consommation, ses déterminants, les droits du consommateur afin d'organiser sa propre consommation de façon plus avertie". Les objectifs terminaux qui conduisent à l'objectif général sont:

"• Expliquer l'impact de la publicité et du crédit sur les habitudes du consommateur;

• Expliquer les mécanismes de protection du consommateur."

On retrouve, dans l'orientation du cours, la phrase suivante: "Ce cours vise avant tout un choix plus éclairé des dépenses, une rationalisation des revenus de tous, citoyens et citoyennes" (p. 25). C'est bien dans cette perspective que les femmes administrent le budget familial, souvent placées devant l'obligation de faire beaucoup avec très peu.

2.5 Programme "Développement personnel et social"

Le programme de Développement personnel et social (DPS) est un nouveau programme disponible depuis septembre 1987, pour les commissions scolaires qui veulent l'expérimenter, le terme expérimentation étant utilisé dans le sens où il y a possibilité d'apporter des corrections. Dans sa forme actuelle, le programme comporte cinq volets contenant deux ou trois cours chacun. Il est à noter qu'un sixième volet est prévu et que d'autres cours pourront être élaborés. Chacun des cours est indépendant des autres et permet d'obtenir des unités de niveau secondaire V. L'ensemble du programme DPS comporte un but, chacun des volets un objectif général et les cours des objectifs terminaux. Le texte qui suit présente le programme dans sa structure et ses objectifs généraux. Rappelons que ce texte est extrait du "document de travail" et a pu, par la suite, subir des modifications.

Le but du DPS est de "favoriser chez l'adulte sa pleine réalisation comme individu et comme membre d'une collectivité dans une société en changement".

1° volet: Relations interpersonnelles

Objectif général: prendre conscience de sa réalité et de celle des autres afin d'améliorer ses relations interpersonnelles.

Cours 1: Connaissance de soi I

Cours 2: communication

2° volet: Vie en société

Objectif général: se préparer à la gestion de ses affaires, à l'exercice de ses droits et responsabilités au travail et comme citoyen, citoyenne, ainsi qu'à sa participation à la vie communautaire.

Cours 1: Budget et consommation

Cours 2: Droits et responsabilités au travail

3 volet: Santé et sexualité

Objectif général: se préparer à la prise en charge de son bienêtre physique, psychologique et social ainsi qu'à l'intégration harmonieuse des diverses dimensions de la sexualité à sa personnalité.

Cours 1: Vivre en santé et guérir

Cours 2: Vivre en forme

Cours 3: Bien-être et sexualité

4° volet: Perspectives d'emploi et marché du travail

Objectif général: clarifier son objectif professionnel, planifier son projet de formation et préparer son insertion ou sa réinsertion sur le marché du travail.

Cours 1: Bilan et choix professionnels

Cours 2: Planification de son projet de formation

Cours 3: Recherche d'emploi

5° volet: Organisation de ses apprentissages scolaires

Objectif général: mieux gérer ses ressources personnelles et celles de son milieu dans le contexte de la réalisation de son plan de formation.

Cours 1: Initiation au système d'apprentissage individualisé

Cours 2: Processus de recherche d'information

Cours 3: Stratégie d'étude et de passation d'examen

Du premier volet nous avons retenu le cours 2 "Communication"; du deuxième volet, le cours "Budget et consommation" et du troisième volet, le cours "Vivre en santé et guérir". Voyons plus en détail ces cours.

Cours "Communication"

Ce cours nous a intéressé dans la mesure où nous avions identifié chez les femmes l'importance du langage comme moyen de communication interpersonnelle.

Pour le contenu, on propose aux adultes une démarche théorique et pratique axée sur:

  • l'identification et la compréhension des éléments de base dans la communication interpersonnelle. Dans cette partie on retrouve entre autres les formes de communication verbale, non verbale, écrite et symbolique;
  • l'analyse des attitudes et des comportements facilitant ou nuisant à la communication;
  • la découverte de son style personnel et l'appropriation par chacun de ses habiletés et de ses difficultés à communiquer;
  • la formulation d'objectifs personnels visant l'intégration des apprentissages et leur transfert dans la réalité quotidienne.

Ce contenu correspond d'assez près aux préoccupations des femmes exprimées lors des rencontres au sujet de la communication (voir page 26).

Les objectifs terminaux pour le programme DPS sont exprimés différemment des autres programmes. Celui de "Communication" se formule ainsi:

OBJECTIF TERMINAL

Enoncé de compétence:

Expliquer comment certains facteurs peuvent faciliter ou nuire à la communication.

Conditions générales:

A l'aide d'un modèle de communication.

A partir d'exemples de sa vie personnelle.

Aspects observables:

Clarté de la présentation du modèle de communication.

Justesse de la définition des termes utilisées. Clarté des explications.

Enumération des principaux facteurs facilitant la communication.

Enumération des principaux facteurs nuisant à la communication.

Pertinence des exemples." (page 13)

Ce texte nous renseigne sur l'importance accordée à l'expérience personnelle comme source d'apprentissage. Le premier principe directeur de ce volet est d'ailleurs très clair à ce sujet: "L'expérience de vie de l'adulte établira le point de départ de tout apprentissage (page 3).

Cours "Budget et consommation"

Du volet "Vie en société" nous avons retenu le cours "Budget et consommation".

Nous avons déjà analysé dans le programme de Vie économique un cours axé sur la consommation. Dans ce cours-ci, une plus grande importance est accordée à la situation vécue par l'adulte sur le plan financier. Les données théoriques sont étudiées en relation avec la situation financière de l'adulte: notions d'argent, facteurs d'influence de sa situation financière, autonomie financière, consommation, crédit, budget, etc. Ainsi, dans le dernier objectif intermédiaire, on demande à l'adulte de "faire son budget en tenant compte du bilan de sa situation financière" (page 25).

Bien que le contenu soit axé sur l'application des données apprises, l'objectif terminal ramène une dimension plus théorique.

OBJECTIF TERMINAL

Enoncé de compétence:

Décrire les dimensions à considérer ainsi que les étapes à franchir lors de l'évaluation de sa situation financière.

Condition générale:

En se référant au bilan de sa propre situation financière.

Aspects observables:

La présence des principales dimensions personnelles.

La présence des principales dimensions sociales. La logique de la séquence des étapes décrites.

La présence d'éléments de réflexion sur la nature de ses responsabilités." (page 23)

Lors de l'évaluation des acquis nous croyons qu'il peut y avoir là difficulté pour la personne qui aurait acquis des habiletés dans un contexte différent et qui formulerait son savoir dans des termes différents de ceux utilisés dans le cours.

Cours "Vivre en santé et guérir"

Le cours "Vivre en santé et guérir" appartient au troisième volet du programme DPS.

On y traite des éléments tels que: la santé (concept expérientiel et officiel), les facteurs qui affectent la santé, la prise en charge par l'adulte et les conditions préalables, la prévention, les ressources. On amène enfin l'adulte à intervenir sur un malaise ou un problème de santé qui le concerne en appliquant le savoir acquis.

L'objectif terminal est en fonction de cette prise en charge:

"Enoncé de compétence:

Dresser le bilan de son état de santé actuel et inventorier les moyens de prévention nécessaires au maintien de sa santé.

Condition générale:

Un soutien individuel devrait être fourni au besoin.

Aspects observables:

Bilan": la présence d'éléments de réflexion sur les dimensions suivantes: attitudes, habitudes de vie, conditions physiques, psychologiques, sociales et environnementales; le bien-fondé des liens établis entre ces dimensions.

Inventaire: la pertinence des liens entre les moyens de prévention inventoriés et les diverses dimensions considérées", (page 42)

Nous savons déjà les responsabilités que la plupart des femmes exercent face à la santé de la famille et à elles-mêmes et nous croyons qu'elles possèdent en grande partie les éléments de contenu de ce cours. Nous avons vu que pour elles, l'alimentation, l'activité physique et l'hygiène mentale sont des facteurs déterminants d'une bonne santé. Dans le même volet, on retrouve un cours traitant de l'activité physique "Vivre en forme". Par contre, l'alimentation et l'hygiène mentale ne font pas, pour l'instant, l'objet de cours précis.

Conclusion sur le DPS

Les cours du DPS expriment, par leurs objectifs et leurs contenus, une préoccupation à l'égard des réalités vécues par l'adulte. Les contenus de cours concernent plus directement des aspects de la vie personnelle et sociale à laquelle l'adulte est confronté quotidiennement. Nous y retrouvons une approche pédagogique axée sur le théorique et le pratique, où l'expérience de l'adulte est considérée et sert de référence à l'apprentissage théorique. De plus, dans certains cours (par exemple "Vivre en santé et guérir"), les notions étudiées sont utilisées pour enrichir l'expérience de l'adulte et l'inciter à des comportements nouveaux. Par contre, pour d'autres cours, les objectifs terminaux se traduisent en concepts théoriques reliés aux notions développées dans le cours. La femme voulant faire reconnaître ses habiletés sans posséder le vocabulaire spécifique du cours pourra-t-elle le faire au même titre que l'adulte qui aura suivi le cours?

3. LES COMPÉTENCES NE TROUVANT PAS DE CORRESPONDANCE DANS LES PROGRAMMES

A partir des compétences des femmes rencontrées, nous avons recherché les programmes pouvant correspondre, dans leur contenu et leurs objectifs, aux habiletés qu'elles ont développées. Suite à cette analyse, nous constatons que certaines compétences ne reçoivent pas de correspondance dans les programmes.

Santé:

  • l'alimentation et la santé mentale comme facteurs de santé et d'équilibre.

Education:

  • le développement physique, psychologique et intellectuel de l'enfant et de l'adolescent;
  • les relations parents/enfants;
  • les relations parents/école.

Vie en société:

  • la dynamique du travail en groupe.

Développement personnel:

  • les habiletés en prise de décision et solution de problème;
  • l'identification de son propre processus d'apprentissage comme outil important d'acquisition de connaissances dans la vie quotidienne.

Administration:

  • la gestion et l'administration dans la perspective d'une utilisation permettant de créer sa propre entreprise.

Autres compétences:

  • la mécanique, l'horticulture, la rénovation domiciliaire, la gérontologie.

Il y a aussi toutes les habiletés qui ne se sont pas révélées clairement lors des rencontres et qu'une procédure plus sophistiquée aurait permis de faire émerger.

4. OBSERVATIONS

De cette comparaison entre les compétences des femmes et les programmes de formation, nous pouvons ressortir les observations suivantes au sujet des programmes:

  • Plusieurs compétences développées par les femmes ne reçoivent pas de correspondance dans les programmes.
  • Dans le programme de Secrétariat-commerce, l'acquisition des habiletés se fait à l'école, en vue du marché du travail, alors que les compétences des femmes s'acquièrent en travaillant dans des milieux diversifiés.
  • Dans les cours des programmes de Vie politique et Vie économique que nous avons étudiés, les compétences des femmes se rattachent à une partie du contenu seulement (le troisième objectif terminal).
  • Dans leur approche pédagogique, les programmes de Vie politique, Vie économique et Développement personnel et social (DPS) privilégient l'expérience de l'adulte
  • Les cours de DPS abordent des sujets qui rejoignent d'assez près les compétences des femmes et utilisent une approche où l'expérimentation est incluse.
  • Il existe deux cours traitant de la consommation: "Consommer sans se faire.., consommer" (Vie économique) et "Budget et consommation" (DPS). On peut se demander comment l'adulte voulant faire reconnaître ses acquis en consommation fera le choix du cours lui permettant de faire évaluer son savoir dans ce domaine.

5. CONCLUSION

La comparaison entre les compétences développées par les femmes et les objectifs ainsi que les contenus des cours que nous avons analysés nous amène à faire les commentaires qui suivent.

Dans la conclusion du chapitre précédent nous avons noté que les compétences des femmes s'exprimaient plus spécifiquement en habiletés (savoir-faire) et attitudes (savoir-être). Mis à part le nouveau programme DPS, dont certains objectifs de cours se traduisent par l'application concrète d'un savoir (par exemple, "Vivre en santé et guérir"), les autres cours sont principalement axés sur l'acquisition de notions théoriques.

Cet écart entre le type de compétences développées par l'adulte et celles attendues par le système scolaire se manifeste également dans les contenus. Nous avons identifié dans ce chapitre une liste de compétences développées par les femmes rencontrées et qui ne recevaient pas de correspondance dans les programmes actuels. Il semble que les contenus des apprentissages réalisés par les femmes ne correspondent qu'en partie au contenu de la formation privilégiée en milieu scolaire.

La distance existant entre les compétences des femmes et les cours (objectifs et contenus) peut constituer selon nous un des obstacles à la reconnaissance des acquis extrascolaires pour cette partie de la population. C'est un des sujets dont nous discuterons dans le prochain chapitre.

CHAPITRE V : OBSTACLES ÀLA RECONNAISSANCE DES ACQUIS EXTRASCOLAIRES ET ÉLÉMENTS DE SOLUTION

Nous verrons dans ce chapitre quelques-uns des obstacles rendant difficile la reconnaissance des acquis extrascolaires. Nous procéderons en faisant un parallèle entre cette recherche et le processus même de la reconnaissance des acquis tel qu'envisagé par le système scolaire au niveau secondaire. Cette analyse nous semble importante car les difficultés rencontrées au cours de la recherche constituent, selon nous, un reflet des obstacles liés au processus de reconnaissance des acquis extrascolaires.

Avant de poursuivre, nous donnerons quelques informations sur ce processus de reconnaissance des acquis extrascolaires. Pour ce faire, nous nous sommes inspirées des recherches effectuées en ce domaine depuis quelques années. On retrouve dans toutes ces recherches des étapes qui forment la trame de fond du processus. Ce sont:

  1. l'accueil de l'adulte, qui peut comprendre le dépistage des besoins, l'information, la définition des objectifs poursuivis par l'adulte;
  2. la description et la clarification des expériences puis l'identification des apprentissages qui y sont reliés, la présentation et la justification des acquis. Cette étape peut inclure la rédaction d'un portfolio;
  3. l'étude du dossier présenté par l'adulte y incluant le portfolio;
  4. l'évaluation orale ou/et écrite et/ou pratique;
  5. la construction d'un plan de formation, si besoin est.

1. L'IDENTIFICATION DES APPRENTISSAGES DE L'ADULTE

Revenons maintenant à la comparaison que nous établissons entre cette recherche et le processus. Le premier objectif de notre recherche, l'identification des compétences des femmes, correspond à la seconde étape du processus dans laquelle l'adulte doit, à partir de ses expériences, identifier les acquis ou les apprentissages réalisés. Cette étape se réalise habituellement à l'aide de l'outil appelé portfolio, tel que proposé par la DGEA.

Tout en recueillant les expériences des femmes dans le travail au foyer et le bénévolat, nous avons tenté de leur faire identifier les acquis qu'elles pouvaient relier à leurs expériences. Les résultats furent dans l'ensemble assez peu satisfaisants. Cette difficulté se présente à toute personne qui s'interroge sur les liens entre l'expérience de travail vécue et les composantes de cette expérience, en terme de potentiel investi (attitudes, habiletés et connaissances) pour obtenir un résultat. On peut saisir la complexité de ce problème en se posant la question suivante: par rapport à la semaine qui vient de s'écouler, quelles attitudes, habiletés et connaissances ai-je dû utiliser ou développer pour accomplir mes fonctions?

La question devient encore plus complexe quand elle s'adresse à des femmes dont le travail principal se déroule au foyer. Ce sont souvent plusieurs années de travail qui sont en cause dans des fonctions variées et souvent indifférenciées et dont les tâches reçoivent peu ou pas de valorisation. Ce sont là des conditions qui accentuent la difficulté du processus d'identification des apprentissages.

Considérant cette étape comme fondamentale dans le processus de reconnaissance des acquis extrascolaires et particulièrement difficile à réaliser, nous demandons qu'une attention particulière y soit accordée afin d'en faciliter la réalisation.

Tout au cours de ce travail, nous nous sommes interrogées sur les éléments qui pourraient faciliter cette étape du processus chez les femmes. La démarche que nous proposons ne vise pas à remplacer à tout prix un processus individuel d'identification des apprentissages par un processus collectif; nous croyons toutefois que plusieurs formules devraient exister, afin que l'adulte puisse choisir celles qui lui conviennent. Voici les éléments que nous proposons:

  • construire et offrir pour cette étape, une démarche de groupe afin de soutenir la motivation des participantes tout en permettant une exploration plus large et plus approfondie des expériences et des acquis;
  • former des animatrices et des animateurs pour ces groupes et pour la démarche individuelle; les personnes devront être sensibilisées à la problématique du travail au foyer et du bénévolat chez les femmes et se familiariser avec le processus d'apprentissage expérientiel de l'adulte;
  • élaborer une démarche de groupe qui permettrait une analyse détaillée des diverses composantes de l'expérience de l'adulte (temps, lieux, objets, actions, etc.) par un questionnement approprié. Ces composantes seraient ensuite analysées à l'aide de diverses grilles adaptées au projet de l'adulte (retour aux études, marché du travail ou besoins personnels). De l'analyse précédente, faire ressortir et nommer les constantes pouvant constituer des habiletés génériques applicables à diverses situations. Traduire ces habiletés en termes applicables au secteur (travail, éducation) choisi par l'adulte.

Nous croyons important de mentionner ces éléments dans la mesure où ils peuvent aider l'adulte à repérer, dans son expérience, les apprentissages qu'elle a faits, et à les traduire en acquis. Car ce ne sont pas les expériences mais bien les acquis de ces expériences qui seront évalués. Cela suppose donc que l'adulte puisse prendre du recul par rapport à son expérience, pour en extraire les éléments significatifs. C'est bien là la démarche que l'adulte se doit d'accomplir, le bout de chemin qu'on lui demande de parcourir pour que ses acquis soient reconnus.

2. LES OBJECTIFS ET LES CONTENUS DE COURS

Nous nous interrogerons maintenant sur une autre des difficultés rencontrées dans cette recherche. Celle-ci concerne plus particulièrement les programmes. Cette difficulté se traduit dans les termes suivants: comment faire la concordance entre des compétences acquises par la pratique quotidienne se traduisant plus particulièrement en savoir-faire et des objectifs de programme qui font surtout référence à des contenus de cours se traduisant en savoirs? Une grande partie des difficultés rencontrées au cours de l'analyse des programmes se rattache à ce point.

Selon nous, la formation générale est particulièrement touchée par ce problème, car elle est axée sur l'acquisition de notions théoriques et générales. On veut faire acquérir à l'adulte des notions de base, des concepts globaux, qui vont lui permettre une meilleure compréhension de sa réalité et qui pourront avoir une application éventuelle dans sa vie quotidienne. Or, nous avons vu que c'est précisément du côté de cette application aux situations quotidiennes que se retrouvent bon nombre des habiletés des femmes et que ces habiletés se manifestent dans des actions spécifiques et concrètes.

Pour illustrer cette distance entre savoirs et savoir-faire, rappelons, par exemple, que pour certains cours en sciences humaines, c'est au dernier objectif terminal que correspondent les compétences identifiées chez les femmes et que c'est dans leurs réalisations, dans leurs actions qu'on peut voir ces correspondances. Les objectifs généraux des cours se rapportent plutôt au contenu théorique et global du cours.

Nous voyons ainsi le peu d'attention accordé aux savoir-faire et la prépondérance des savoirs en formation générale, malgré l'intention clairement formulée d'utiliser les expériences vécues de l'adulte pour appuyer l'acquisition des connaissances. On se sert de ses expériences comme point de départ, mais on ne les retrouve plus à la ligne d'arrivée (objectif général).

De même que l'adulte doit accomplir une démarche pour traduire ses expériences en acquis, de même le système scolaire a aussi une démarche à réaliser: à l'intérieur du système scolaire, on devrait reconnaître, comme témoin des apprentissages, autre chose que la maîtrise de concepts ou de connaissances théoriques.

Il est donc important que l'évaluation des acquis en formation générale s'appuie sur des objectifs se référant à des compétences à maîtriser et que ces compétences soient définies aussi bien en termes d'habiletés concrètes que de connaissances théoriques.

Afin de faciliter cette opération, il serait pertinent de se questionner sur les compétences que doit posséder l'adulte ayant complété un DES général. L'objectif général de la formation générale selon le Cahier II de la DGEA se lit comme suit: "Faciliter à l'adulte l'acquisition des connaissances, des habiletés et des comportements nécessaires à son développement personnel et à celui de son milieu" (p. 58). Habiletés (savoir-faire) et comportements (savoir-être) y ont donc leur place, et devraient être inclus dans les compétences à maîtriser. Ces compétences précisées en terme de connaissances et d'habiletés pourraient servir de critères d'évaluation pour des compétences acquises par une formation de type scolaire ou acquises par l'apprentissage expérientiel.

3. CONCLUSION

Les obstacles à la reconnaissance des acquis extrascolaires que nous avons identifiés se situent donc aussi bien au niveau de la démarche de l'adulte qui doit traduire ses expériences en acquis qu'au niveau des contenus et objectifs d'apprentissage des cours. Nous avons proposé dans ce chapitre des éléments de solution; d'autres peuvent être pensés. Il reste que, déjà, certaines modifications devront être apportées au processus de reconnaissance des acquis extrascolaires que l'on est à mettre en place dans les commissions scolaires du Québec, si Ton veut réellement tenir compte des besoins des femmes, et de tous les adultes dans ce domaine.

CHAPITRE VI : RECOMMANDATIONS

Les recommandations qui suivent s'inspirent des observations que nous avons faites sur la base des rencontres avec les femmes, des lectures qui nous ont éclairées et des questions qui ont surgi tout au long de cette recherche.

En premier lieu, nous retrouvons une recommandation générale sur la reconnaissance des acquis extrascolaires.

La deuxième partie regroupe les recommandations impliquant le système scolaire et en particulier le DES et les programmes, l'information et le personnel engagé dans la reconnaissance des acquis extrascolaires et, enfin, les recherches et expérimentations.

Dans la troisième partie, nous nous plaçons du point de vue de l'adulte, pour rappeler la place et le support à lui accorder dans la démarche de reconnaissance des acquis extrascolaires.

A. PERSPECTIVE D'ENSEMBLE SUR LA RECONNAISSANCE DES ACQUIS EXTRASCOLAIRES

1. Plusieurs recherches sont actuellement en cours sur différents aspects de la reconnaissance des acquis extrascolaires et certains éléments sont actuellement mis en place dans les services d'éducation des adultes. Nous croyons primordial de rappeler que la reconnaissance des acquis extrascolaires ne doit pas se limiter à l'application d'une procédure mais doit être animée d'un esprit qui vise le respect de l'adulte dans sa globalité.

Nous recommandons que l'ensemble du processus de reconnaissance des acquis s'inscrive dans un esprit visant à respecter les capacités d'auto-apprentissage des hommes et des femmes et à valoriser la réappropriation de leur savoir. Dans cette optique, il semble nécessaire de réaffirmer, si besoin est, que les différents modes ou méthodes d'apprentissage ont leur valeur propre et qu'il incombe au MEQ de s'assurer que le système scolaire dispose des moyens nécessaires pour évaluer et reconnaître les apprentissages auxquels ils donnent lieu.

B. RECOMMANDATIONS IMPLIQUANT LE SYSTÈME SCOLAIRE

a) Les programmes et le diplôme d'études secondaires

2. Dans le chapitre précédent nous avons vu que l'étude des programmes en rapport avec les compétences soulevait de nombreuses questions, plus particulièrement lors de la comparaison entre les habiletés acquises par la pratique et les objectifs de cours reliés à des concepts théoriques.

Nous recommandons que les objectifs des cours et des programmes soient définis en terme de connaissances théoriques à acquérir et d'habiletés concrètes à maîtriser.

3. Selon le cahier de la rentrée du ministère de l'Education {septembre 1986), le DES c'est: "Le seuil minimal de formation qui permet de garantir une insertion socio-économique relativement stable". Prenant en considération que cette formation se situe au niveau secondaire, nous recommandons:

  • que soient définies, pour le DES, les compétences indispensables à l'adulte qui désire poursuivre des études ou avoir accès au marché du travail;
  • que cette définition soit large pour englober les compétences réellement acquises par l'adulte, peu importe son cheminement (cours et programmes ou apprentissage expérientiel ).

b) L'information et le personnel

4. La reconnaissance des acquis extrascolaires s'adresse aux adultes voulant faire reconnaître officiellement par le système scolaire les apprentissages réalisés lors de leurs expériences de travail et de vie. Afin que les adultes soient en mesure d'utiliser le mieux possible les services offerts, nous recommandons qu'une information complète et précise soit diffusée au public sur les possibilités offertes en reconnaissance des acquis extrascolaires et sur le processus lui-même.

5. Nous avons illustré précédemment par un exemple (page 47) les conséquences négatives engendrées par un manque d'information chez une adulte en formation. Nous recommandons que les services d'information scolaire et professionnelle et d'orientation offerts aux adultes disposent des ressources nécessaires pour répondre adéquatement et avec diligence aux besoins de ces adultes.

6. En ce qui concerne les différentes étapes devant conduire l'adulte à la reconnaissance de ses acquis extrascolaires, nous recommandons :

  • que la formation dispensée au personnel intervenant dans ce domaine comporte des volets consacrés aux problématiques du travail au foyer et du bénévolat chez les femmes et aux processus d'apprentissage expérientiel de l'adulte;
  • que le personnel soit en nombre suffisant pour assurer une réponse rapide aux demandes des adultes.

c) Recherches et expérimentations

7. Nous avons vu dans le chapitre précédent quelques obstacles rendant difficile l'évaluation des compétences. Nous avons entre autres démontré que l'identification des apprentissages à partir des expériences demeure une étape complexe. La DGEA a actuellement développé une démarche individuelle s'appuyant sur l'utilisation d'un portfolio. Connaissant la diversité des antécédents et des conditions de vie des adultes, nous recommandons que soient développées d'autres approches individuelles susceptibles de répondre à la pluralité des situations vécues par les adultes.

8. Les échanges en groupe favorisant une exploration plus large et plus approfondie des expériences et des acquis, nous recommandons, pour l'étape d'identification des apprentissages, la mise au point de démarches de groupes; les démarches pourront être menées parallèlement aux démarches individuelles et en liaison avec elles.

9. Pour l'ensemble des approches individuelles ou de groupes qui seront élaborées, nous recommandons:

  • que ces démarches amènent l'adulte à identifier non seulement les habiletés spécifiques acquises mais également les habiletés génériques;
  • que soient proposés à l'adulte des moyens lui permettant de faire le lien entre ses expériences et les connaissances théoriques qui y correspondent;
  • que le personnel soit sensibilisé aux problématiques du travail au foyer et du bénévolat des femmes.

10. La reconnaissance des acquis extrascolaires s'intéresse aux acquis de travail et de vie de l'adulte. On ignore encore en grande partie le processus qui sous-tend ces apprentissages. Afin d'être mieux en mesure de comprendre et d'évaluer ces apprentissages, nous recommandons qu'une recherche soit réalisée sur le processus d'apprentissage expérientiel de l'adulte.

11. En étudiant le programme de français, nous avons relevé le caractère ambigu du test de classement qui peut, en certaines circonstances, servir de test d'équivalence. Nous recommandons de vérifier la pertinence du test de classement en français en tant que test d'équivalence. Selon les résultats de cette étude, on devra adapter le test de classement à des fins de reconnaissance ou créer un nouvel instrument uniquement axé sur la reconnaissance des acquis en langue.

12. Nous aurions aimé, dans cette recherche, identifier les habiletés en mathématiques et en sciences développées par les femmes, car nous croyons que ces habiletés existent et sont préalables à d'autres compétences. Dans ces domaines en particulier, les femmes étant peu habituées à nommer leurs habiletés, cela aurait exigé une démarche différente de celle que nous avons utilisée. Nous recommandons de réaliser une recherche afin d'identifier les habiletés en mathématiques et en sciences développées par les femmes au foyer et dans les activités bénévoles.

C. MESURES DE SUPPORT À L'ADULTE

13. Les adultes étant les premiers concernés par les services de reconnaissance des acquis extrascolaires, nous recommandons que les adultes, en tant qu'usagers potentiels et effectifs des services, demeurent consultés sur l'ensemble du processus une fois les structures mises en place.

14. Connaissant la complexité du processus de reconnaissance des acquis extrascolaires qui se met en place et ce que cette situation peut présenter d'inhabituel pour l'adulte qui entreprend cette démarche, nous recommandons que l'adulte reçoive le support et l'assistance d'un personnel compétent qui l'accompagnera tout au long du processus: de l'accueil à la formation manquante.

15. L'évaluation des acquis constitue un moment important du processus de reconnaissance des acquis extrascolaires. Cette situation peut comporter des difficultés pour l'adulte qui n'est pas familier avec la démarche habituelle, un examen oral ou écrit. Nous recommandons:

  • que l'adulte ait la possibilité de se préparer adéquatement à l'évaluation, en consultant les personnes et/ou les documents pouvant faciliter cette préparation à l'évaluation;
  • que, lors de l'évaluation, la façon dont l'adulte exprime ses connaissances soit respectée.

16. A la suite de l'évaluation de ses acquis expérientiels, l'adulte peut avoir à compléter sa formation, pour atteindre son objectif. Nous recommandons:

  • que l'adulte soit informée de la formation manquante, en rapport avec son objectif personnel;
  • qu'on offre à l'adulte différentes formules lui permettant d'acquérir la formation manquante, en rapport avec son objectif personnel.

CONCLUSION

Cette recherche portait sur les besoins des femmes en reconnaissance des acquis extrascolaires. Nous avons procédé par la comparaison entre les compétences développées par un certain nombre de femmes dans leur travail au foyer et dans leurs actions bénévoles d'une part, et les programmes existants au niveau secondaire d'autre part. En procédant ainsi, nous pouvions évaluer dans quelle mesure la reconnaissance des acquis extrascolaires devenait applicable pour cette partie de la population. Les difficultés rencontrées au cours de cette recherche nous ont amenées à identifier des facteurs rendant ardue l'application de la reconnaissance des acquis extrascolaires. Ces difficultés se rattachaient aux points suivants:

  • la distinction établie entre l'expérience conduisant à un apprentissage et l'acquis résultant de cet apprentissage nous a amené à réaliser que le passage menant de l'une à l'autre impliquait une démarche complexe. Il faut donc créer les conditions facilitantes qui vont permettre à l'adulte de préciser ses acquis à travers ses expériences;
  • en procédant à la comparaison entre les acquis et les objectifs de programmes nous avons constaté que nous nous trouvions le plus souvent face à deux réalités différentes: des habiletés concrètes et pratiques qui s'exprimaient dans divers champs d'activité et des connaissances théoriques reliées à des contenus de cours précis. Comment alors faire la comparaison entre ces deux réalités? Que l'adulte fasse la démarche permettant de traduire ses expériences en acquis (habiletés et connaissances) et que le système éducationnel traduise à son tour ses objectifs d'apprentissage en habiletés et connaissances sont les conditions qui devraient permettre selon nous la rencontre entre le bagage de l'un et les exigences de l'autre.

En poussant plus loin notre réflexion, nous en sommes venues à nous interroger sur le diplôme d'études secondaires. La reconnaissance des acquis extrascolaires conduit, selon nous, à un questionnement sur les objectifs et le contenu du DES, puisqu'il représente l'objectif final de la démarche de l'adulte en reconnaissance des acquis extrascolaires et la pierre de touche de la formation au niveau secondaire.

La reconnaissance des acquis extrascolaires touche à des aspects fondamentaux de l'éducation: les modes d'apprentissage, les objectifs et les contenus des cours, des programmes et du diplôme d'études secondaires. Elle amène à interroger le système éducationnel luimême et à remettre en cause certaines de ses composantes. La recon-

naissance des acquis extrascolaires devient donc un agent de changement, d'où l'importance de continuer à interroger ses principes, tout comme sa mise en application. Ce questionnement doit toujours se faire à partir des adultes. A cette condition, la reconnaissance des acquis extrascolaires restera une structure vivante, qui saura évoluer en accord avec les besoins des adultes et permettra ainsi au système scolaire de s'adapter et de progresser.

ANNEXES

ANNEXE I : NORMES DE CERTIFICATION POUR L'OBTENTION DU DIPLÔME D'ETUDES SECONDAIRES (DES)

Normes de certification actuelles (1987-1988) Un total de 54 unités est exigé dont:

  • 18 unités obligatoires:
    • 12 obligatoires en langue maternelle de niveau secondaire V
    • 6 obligatoires en langue seconde de niveau secondaire V;
36 unités optionnelles dont un minimum de 18 de niveau secondaire V et un maximum de 18 de niveau secondaire IV;

Normes de certification probables après 1988 Un total de 54 unités dont;

  • 29 unités obligatoires:
    • 8 en langue maternelle de niveau secondaire V
    • 6 en langue seconde de niveau secondaire IV ou V
    • 3 en mathématiques de niveau secondaire IV ou V
    • 3 en sciences (chimie-physique) de niveau secondaire IV ou V
    • 6 en sciences humaines (géographie, histoire, économique) de niveau secondaire V
    • 3 en développement personnel et social
25 unités optionnelles

P.S. Une unité correspond à 15 heures d'apprentissage.

ANNEXE II OBJECTIFS TERMINAUX DU PROGRAMME DE FRANÇAIS POUR LE SECONDAIRE V

GFR 551 Savoir écouter

Suite à 2 auditions, résumer une communication orale et visuelle d'au moins 2 minutes et demie, en identifiant:

1. quant au contenu

  • l'idée directrice et quatre idées principales,
  • le ou les auteurs des propos rapportés;

2. quant à la forme

a) le type de communication et le genre d'information de la communication, en justifiant sa réponse.

GFR 552 Savoir écouter

Commenter une communication orale ou orale et visuelle d'environ quatre minutes;

1. en donnant les idées essentielles de cette communication;

2. en faisant à son sujet des remarques:

  • sur le contenu,
  • sur le but ou -la portée;

3. en prenant position face aux idées de la communication

GFR 553 Savoir écouter

Suite à deux auditions, faire la synthèse d'une communication orale ou orale et visuelle d'environ quatre minutes et demie.

GFR 554 Savoir écouter

Suite à deux auditions, comparer de façon structurée et cohérente, deux messages oraux ou oraux et visuels de deux à six minutes chacun et portant sur un même sujet en identifiant des similitudes et différences entre ces messages relativement:

  • au genre d'information;
  • aux idées directrices;
  • à des faits ou à des arguments;
  • au but et au ton avec justifications.

GFR 551 Savoir parler

Faire oralement un compte-rendu d'au moins deux minutes et demie sur un sujet de son choix, en utilisant:

  • des termes français,
  • des phrases complètes.

GFR 552 Savoir parler

Faire oralement, pendant au moins trois minutes une description (tableau ou portrait) sur un sujet de son choix, en utilisant:

  • des termes français,
  • des phrases complètes.

GFR 553 Savoir parler

Faire oralement un exposé d'au moins quatre minutes sur un sujet de son choix, en utilisant:

  • des termes français,
  • des phrases complètes.

GFR 554 Savoir parler

Pendant au moins cinq minutes, faire oralement une critique portant sur un sujet de son choix, en utilisant:

  • des termes français,
  • des phrases complètes.

GFR 551 Savoir lire Donner:

  • suite à la lecture d'une oeuvre, une présentation cohérente et structurée de l'ouvrage;
  • selon le contexte, la définition de dix mots après avoir identifié et donné le sens de leur(s) racine(s) et/ou affixe(s).

GFR 552 Savoir lire Présenter:

  • suite à la lecture d'une oeuvre, un compte-rendu structuré et cohérent
  • selon le contexte, la définition de dix mots après avoir identifié et donné le sens de leur(s) racine(s) et/ou affixe(s).

GFR 553 Savoir lire Présenter:

  • suite à la lecture d'une oeuvre de la littérature québécoise, une critique de l'ouvrage;
  • le sens des mots de liaison.

GFR 554 Savoir lire

Suite à la lecture d'oeuvres portant sur un même sujet, présenter:

a) une comparaison d'oeuvres relatives aux ressemblances et aux différences:

  • de thèmes,
  • de personnages,
  • de situation,
  • de vocabulaire et/ou de style, en justifiant chaque réponse I l'aide d'extraits;

b) selon le contexte, la définition de mots contenus dans des phrases après avoir donné, s'il y a lieu, le sens de leur{s) racine(s) et/ou affixe(s).

GFR 551 -552553 -554 Savoir rédiger, orthographe

Orthographier tous les mots de phrases simples et complexes données oralement. On s'intéresse ici aux cas:

  • d'orthographe grammaticale,
  • d'orthographe lexicale,
  • d'homophonie.

GFR 551 Savoir rédiger

Rédiger un compte rendu d'événements d'au moins trente lignes, en respectant les caractéristiques propres à ce type d'écrit.

GFR 552 Savoir rédiger

Rédiger une lettre d'opinion du lecteur d'au moins trente-cinq lignes, portant sur un des sujets donnés en respectant les caractéristiques propres à ce type d'écrit.

GFR 553 Savoir rédiger

Rédiger un commentaire d'au moins quarante lignes portant sur un des sujets donnés en respectant les caractéristiques propres à ce type d'écrit.

GFR 554 Savoir rédiger

Rédiger un récit d'au moins soixante-quinze lignes en respectant les caractéristiques propres à ce type d'écrit.

ANNEXE III PLANS DE FORMATION DANS LE SECTEUR SECRETARIAT-COMMERCE

ANNEXE IV OBJECTIFS DE CERTAINS COURS EN SECRETARIAT-COMMERCE

CAR 341 ART DE LA RECEPTION

Accueillir et guider le visiteur qui se présente à l'entreprise.

CCL 141 CLASSEMENT

Identifier, classer et repérer des documents selon les principaux systèmes de commerce: alphabétique, numérique et idéologique.

CMC 141 MATHEMATIQUES COMMERCIALES, FACTURATION ET PAYE

Maîtriser une technique de calcul rapide. Calculer le pourcentage d'un nombre. De plus, l'adulte calcule le montant d'une facture et le salaire net hebdomadaire d'un-e employé-e à partir de sa carte de pointage et ses exemptions personnelles.

COB 141 ORGANISATION DE BUREAU

Planifier et exécuter les différentes tâches se rattachant à l'organisation de bureau: recevoir et transmettre des messages téléphoniques, effectuer divers envois par la poste, organiser un voyage d'affaires. De plus, l'adulte maîtrisera les diverses étapes requises pour l'organisation d'une assemblée.

COE 141 -ORGANISATION DE L'ENTREPRISE

Connaître les notions de base qui se rattachent aux formes juridiques d'entreprise et aux services habituellement retrouvés dans une grande entreprise. L'adulte pourra lire un organigramme et identifier les différents départements d'une structure donnée.

CPT 351 PROTOCOLE DU TELEPHONE

Recevoir ou transmettre un appel téléphonique.

CTC 141 TRANSACTIONS COMMERCIALES

Utiliser divers documents commerciaux d'usage courant: conciliation de banque, paiement de factures, rédiger une note de crédit, petite caisse, divers journaux (vente, achat, etc.), bon de commande, requisition, divers bordereaux, etc.

CTL 141 TENUE DE LIVRES, ENTREPRISE DE SERVICE

Effectuer le cycle comptable d'une entreprise de service à propriétaire unique: bilan, journal, grand livre, balance de vérification, chiffrier, état des recettes et déboursés, écritures relatives aux salaires et les entrées relatives à la comptabilité de paie.

CVE 353 VENTE (TECHNIQUE)

Appliquer les techniques de la vente dans une situation donnée.

ANNEXE V PROGRAMME DE VIE POLITIQUE

Cours 2: Qui décide quoi? de l'Etat à l'électorat

Objectif général :

Comprendre le fonctionnement des systèmes politiques québécois et canadien afin de mieux cerner les processus décisionnels et électoraux.

Objectifs terminaux:

  • distinguer la fonction de chacune des institutions politiques au Québec et au Canada en situant les principaux lieux de pouvoir;
  • expliquer les principales caractéristiques du système électoral au Québec et au Canada;
  • décrire les différentes étapes dans la tenue d'une élection.

Cours 3: Le pouvoir invisible: de la dynamique politique

Objectif général :

  • Situer le rôle des partis politiques et des groupes de pression à l'intérieur de la dynamique des forces politiques à l'échelle canadienne, québécoises et locale.

Objectifs terminaux:

  • expliquer la scène politique fédérale, provinciale et locale en se référant aux variables qui façonnent la dynamique sociale et politique;
  • expliquer le rôle des partis politiques dans le système politique tant à l'échelle fédérale, provinciale que locale;
  • expliquer le rôle des groupes de pression dans le système politique tant à l'échelle fédérale, provinciale que locale.

BIBLIOGRAPHIE

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Reconnaître lesacquis expérientiels à l'université...Pourquoi? Comment? , Actes du colloque tenu à l'Université de Sherbrooke, Ed. de l'Université de Sherbrooke, Sherbrooke, 1986.

NOTES

1 Gouvernement du Québec, Un projet d'éducation permanente. Enoncé d'orientation et plan d'action en éducation des adultes, Québec, 1984, 75 p.

2 Gouvernement du Québec, Op. cit.

3 Gouvernement du Québec, Op. cit.

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