Page couverture de Réflexion sur le financement des groupes populaires

REFLEXION SUR LE FINANCEMENT DES GROUPES POPULAIRES

Par

Marie Pelchat pour le MEPACQ

Mars 1987

TABLES DES MATIERES

I.         PRÉFACE

II.        INTRODUCTION

III.       LE FINANCEMENT FEDERAL

IV. LE FINANCEMENT PROVINCIAL

V.    FACTEURS DETERMINANTS

VI. CONCLUSION

VII. REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

VIII.   REMERCIEMENTS

ANNEXE 1 : LES LIMITES DE CE TEXTE

I. PRÉFACE

Ce texte se veut d'abord et avant tout un document de réflexion sur le financement étatique de nos organisations.

Dans une conjoncture où tous les acquis sont remis en question, il est peut-être utopique de croire que le couperet! gouvernemental ne s'abattera pas dans nos programmes de financement. C'est pourquoi nous croyons qu'il est impératif de relancer dans des termes politiques et de façon collective ce débat. A la veille des dépôts des budgets, le moment est particulièrement propice pour le faire.

Bien sûr, il eut été souhaitable, pour ce faire, de disposer d'un relevé exhaustif de toutes les sources gouvernementales possibles auxquelles ont accès les groupes populaires du Québec. Des données en mouvance, des énergies malgré tout limitées, nous ont permis tout de même de dresser un portrait assez significatif de la réalité.

De plus, comme personne ne peut avoir l'heure plus juste que les principaux concernés, nous nous permettons de croire que vous collaborerez à la remise à jour régulière de ce texte. D'ailleurs nous comptons sur vous.

C'est collectivement que nous avons réussi à obtenir, miette à miette, ce soutien financier de l'Etat et c'est collectivement que nous devrons défendre ces acquis gagnés de hautes luttes.

II. INTRODUCTION

On peut difficilement aborder la question du financement des groupes populaires sans d'abord glisser un mot sur ce qu'ils sont. Pour en faire une brève description, disons qu'ils sont majoritairement des organismes sans but lucratif, contrôlés exclusivement par leurs membres. Ils interviennent dans plus d'une vingtaine de champs d'intervention comme par exemple: les femmes, les jeunes, sur les problématiques du logement et des conditions de vie et/ou de travail.

Ce qu'ils ont en commun ces groupes:

1. Ils rejoignent, dans la très grande majorité, les personnes lesmoins bien nanties de la société québécoise.

2. Ils ont une capacité de rejoindre des personnes que le réseaupublic peut difficilement atteindre à cause de la rigidité de sesstructures.

3. Pour une grande proportion de ces groupes, le travail quotidien est lié à une ou l'autre des politiques sociales.

4. Et, finalement, ils ont tous un problème plus ou moins grand de reconnaissance de leur travail par l'Etat. Non pas que la reconnaissance théorique n'a jamais été admise par l'Etat, c'est la reconnaissance financière qui a fait et fait encore défaut. Pour les groupes une reconnaissance sans les sommes qui pourraient garantir leur survie et leur développement, c'est une paramnésie, un leurre.

Même s'il y a un problème de financement, les sources de "soutien" sont nombreuses. C'est pourquoi nous aborderons ceci principalement par le biais des différents palliers gouvernementaux et des différents ministères. Dans un deuxième temps, nous passerons en revue les facteurs déterminants dans la recherche de subvention. Et enfin, nous tenterons de mieux cerner les tendances actuelles des gouvernements dans ce dossier.

III.   LE FINANCEMENT FEDERAL

Le gouvernement canadien intervient principalement dans le financement de 8 types de groupes populaires via des programmes récurrents et dans les programmes de création d'emploi pour l'ensemble des secteurs.

1. SECRETARIAT D'ETAT

1.1 Volet promotion de la femme

Le budget global de ce programme est de $14,000,000 dont $2,000,000 sont octroyés aux groupes de femmes du Québec. Des argents sont accordés de deux façons:

1.   Financement de soutien (infrastructure)
note:  le financement est difficile à obtenir pour les nouveaux groupes;

2.   Financement par projets: pour la réalisation d'activités spécifiques et ponctuelles.

On assiste présentement à une remise en question, non pas du programme mais des critères de sélection. En fait, une évaluation du programme est faite à tous les 5 ans et la prochaine échéance est en 1988. Et, il semble qu'on en profite du côté gouvernemental pour requestionner la pertinence du critère concernant l'égalité entre les hommes et les femmes. Ce que souhaiteraient les conservateurs, ce serait de financer un groupe parce que ces membres sont des femmes et ce, sans exiger que les projets fassent la promotion de l'égalité. Il est à gager que les pressions et les déclarations des Real Women ne soient pas étrangères à tout ceci (1).

1.2 Volet soutien aux organismes bénévoles

Signalons d'abord que ce programme existait déjà depuis plusieurs années sous l'appellation de "Soutien aux organismes volontaires". Ce volet a été aboli en 86-87 faute de fonds pour être réétabli pour l'année financière 87-88 avec un nouveau nom et une nouvelle idéologie. Avant '85, un montant de $50,000 était disponible pour le Québec pour des projets favorisant le développement des groupes populaires. En 1987-88, pour être admissibles, les groupes doivent démontrer qu'ils ont dans leur mandat un objectif de promotion de l'action volontaire. C'est donc dire que beaucoup moins de secteurs auront accès à un soutien financier de programme.

1.3 Volet Promotion des personnes handicapées

Comme plusieurs autres programmes, le volet Promotion des personnes handicapées est subdivisé en 2 parties:

1. Pour le financement de l'infrastructure des organismes pan-canadiens ou nationaux;

2. Pour le financement de projets spécifiques.

Là où se distingue plus particulièrement ce programme c'est au niveau financier. Pour en donner un bref aperçu disons que l'enveloppe budgétaire de 45,000$ en '85-86 dépasse maintenant le 1/3 de million en '86-87.

Pour mieux comprendre le phénomène, rappelons qu'en 1981, l'ONU décrétait l'année internationale des personnes handicapées. Ça, tout le monde le sait mais ce que plusieurs ignorent c'est qu'au même moment l'ONU décrétait la décennie des personnes handicapées. Et c'est pour se mettre au diapason (avec 5 ans de retard) que des sommes "massives" ont été injectées par Ottawa dans cette enveloppe.

De plus, il ne semble pas que des rumeurs de resserrements des normes administratives ou de contrôle flottent dans les airs. Bref, la température de ce côté semble au beau fixe pour encore 5 ans.

1.4 Volet Droits de la personne

Les argents investis dans ce programme sont destinés aux groupes qui font la défense des droits des personnes, en lien avec la Charte canadienne des

droits de la personne. Nous avons appris que pour le Québec, la plus grande part de l'enveloppe est octroyée à la Ligue des droits et libertés.

Toutefois, les rumeurs concernant ce programme vont bon train et finalement ne laissent rien présager de bon. D'une part pour 1987-88, il est question de coupure substantielle de l'enveloppe budgétaire. D'autre part, on parle de réaménagement du programme. Semble-t-il qu'à Ottawa on voudrait faire les choses autrement. Ce qui évidemment, n'est pas sans inquiéter les groupes de ce secteur au Québec.

Pour les trois autres programmes du Secrétariat d'Etat, nous fournirons ici seulement les principales données, les détails étant difficiles à obtenir.

1.5 Volet: Citoyens autochtones

II s'agit bien sûr d'un programme s'adressant exclusivement aux groupes d'autochtones ou de métis. Les deux grands secteurs financés sont:

1. Centres d'amitié des autochtones; 2. Groupes de femmes autochtones.

A ce moment-ci, les informations recueillies nous laissent croire que comme pour les autres, il y a financement de l'infrastructure et de projets.

1.6 Volet: Langues officielles

Ce programme vise principalement les Francophones hors Québec et les Anglophones au Québec. Pour avoir des argents, les groupes doivent faire la preuve qu'il sont à part à cause de la langue; comme par exemple, un groupe de locataires anglophones ne pourrait pas avoir accès à ce programme. Pour le Québec, l'argent va essentiellement, pour ne pas dire exclusivement, à Alliance-Québec. Les sommes que reçoit ce groupe totaliseraient 1 million $ par année.

1.7 Volet : Multi-culturalisme

Sans connaître les montants exacts alloués à ce programme, nous savons qu'il s'agit d'une enveloppe relativement importante. Les grands volets du programme Multi-culturalisme sont:

o    Education;

o    Apprentissage;

o    Femmes immigrantes;

o    La culture.

2. CONSOMMATION CORPORATION CANADA

L'enveloppe globale de ce programme était de 1,816,000$ en 1986-87. Pour sa part, le Québec a reçu pour cette même période 121,000 $ environ (soit 15%).

Le financement des groupes de consommateurs et consommatrices a déjà commencé à s'éroder sérieusement. En fait, en 1985-86, 72% des groupes financés au Québec (soit tous les groupes locaux et régionaux) recevaient une missive les avisant que cette subvention devrait être considérée transitoire et finale. C'est donc dire qu'en 1987-88, seules les fédérations nationales de consommateurs et consommatrices recevront des argents fédéraux. Et là encore rien n'est acquis puisque le gouvernement Mulroney évalue la possiblilité, à moyen terme, de financer exclusivement les fédérations pan-canadiennes.

3.    SANTE ET BIEN-ETRE SOCIAL CANADA

Programme Promotion de la santé

Les argents de ce programme sont octroyés à des groupes intervenant sur la problématique de la santé physique et/ou mentale, pour le développement de leurs interventions. Sur les 4 millions $ de l'enveloppe globale, 800,000$ est distribué aux organismes du Québec. Signalons dès maintenant que pour l'année financière 1987-88, le budget sera gelé.

Dans ce programme, les groupes peuvent présenter des projets dont la durée peut varier entre 1 an et 3 ans. Il semble toutefois que l'élaboration des demandes de subvention soit assez laborieuse, ce qui a pour effet, bien sûr, de limiter l'accès à ce type de programme pour plusieurs groupes.

Les groupes-cibles identifiés par Santé et Bien-être social Canada sont les groupes intervenant dans les champs suivants:

o   femmes;

o   enfants et adolescents;

o   personnes âgées;

o   personnes handicapées;

Bref, tout sauf pour les jeunes hommes en santé.

Précisons en terminant les deux modifications majeures qui seront apportées à la version 1987-88 du programme:

1.   Les organismes gouvernementaux ou para-gouvernementaux n'y aurontplus accès (CLSC, CSS, etc.);

2.   Les besoins devront être définis par les populations visées et non   plus par les intervenant-e-s en santé.

Une nouvelle comme celle-là n'est pas sans déplaire aux organisations populaires. Toutefois, comme elles le disent elles-mêmes, ce n'est pas un programme en or pour plusieurs raisons mais principalement parce qu'il n'accorde aucune subvention de base pour l'infrastructure des groupes et, d'autre part, l'enveloppe budgétaire est trop petite pour les besoins.

4. PROGRAMME DE DEVELOPPEMENT DE L'EMPLOI

Le gouvernement fédéral finançait également l'ensemble des groupes via les programmes de création d'emploi. A la fin des années '70, au début des années '80, cela s'appelait les programmes de services communautaires canadiens, les programmes de développement communautaire. Les PSCC ont surtout servi à la mise sur pied de centres ou maisons de femmes; c'était

une subvention décroissante sur 3 ans. Les PDCC, eux, ne pouvaient durer plus d'un an et une des conditions pour l'acceptation de ces projets était qu'il améliore l'intervention sans créer de dépendance des groupes à ce financement.

Ces PDCC se sont transformés pour devenir vers 1982 des Programmes Canada au travail. Leur nom le disait bien: l'objectif premier de ces programmes était la création d'emploi. Leur durée maximale a été fixée à un an. Les groupes s'en sont largement prévalus et ce, pour mille et une raisons: assurer une permanence, développer des outils et dans plusieurs cas plus simplement pour mettre sur pied un nouveau groupe.

En 1985, le programme Canada au Travail a été aboli pour faire place au programme de développement de l'emploi. Ce nouveau programme était plus qu'un nouveau nom pour un programme de financement: c'était une virement de cap important pour le fédéral tant au niveau des objectifs qu'au niveau de la clientèle à qui il s'adresse. Les utilisateurs de programme visés par le fédéral n'étaient plus les groupes populaires mais les PME. Ce que voulait le fédéral, du moins officiellement, c'était de favoriser des formations-terrain et ainsi, augmenter, disait-on, le niveau d'employabilité des salariés de ces projets. Le tout a été expliqué aux groupes comme s'ils ne pouvaient s'acquitter adéquatement de ce mandat.

Ce virement de cap des Conservateurs a déstabilisé plusieurs groupes. Les maisons de jeunes ont plus particulièrement subi les contrecoups de cette décision gouvernementale. Ces projets étaient leur principale source de financement. D'autres secteurs ont également été déstabilisés (2).

Rappelons qu'à au moins 95% les projets présentés l'étaient par des groupes. En 1985-86, la proportion s'établissait à 80%, les employeurs des entreprises n'ayant pas répondu selon les espérances fédérales. Cette année, le tir a été corrigé. Le gouvernement Mulroney a débloqué des ressources humaines et financières qu'il a mis à la disposition du patronat et des chambres de commerces dans chacune des régions. Sans aucune ambiguïté, tout est mis en oeuvre pour que dorénavant, les demandes viennent majoritairement des PME.

Ce qu'on dit maintenant aux groupes c'est qu'ils ont largement profité de la manne fédérale et que le temps est venu pour eux de laisser la place aux compagnies privées à but lucratif.

Nous ignorons présentement pour 1986-87, le pourcentage des argents octroyés aux groupes, les données officielles n'étant pas encore disponibles. Ce que nous savons par contre c'est que de plus en plus de groupes ont obtenu des réponses négatives.

5. CONSTATS SUR LE FINANCEMENT FEDERAL

Les constats qu'on peut faire maintenant, à la lumière des informations qui précèdent, sont les suivants:

1. Pour une fois, le fédéral s'est bien gardé d'intervenir dans des champs de juridiction provinciale. En fait, il ne finance que des groupes intervenant sur des problématiques de sa compétence (avec quelques incursions délinquantes le domaine de l'éducation).

2.Nonobstant les priorités internationales, il est facile de comprendre que le gouvernement Mulroney a entrepris un retrait en

douce du financement des groupes, de façon générale. Pour les plus dérangeants, c'est fini le temps des nuances à Ottawa.

3.Les secteurs pour qui les sous ne sont pas remis en question onttous un point commun, il s'agit de secteurs où il est rentablepolitiquement d'intervenir.

4. Le fédéral commence à entonner lui aussi, et plus fort que jamais, les refrains à la gloire du bénévolat.

5. Le resserrement des normes administratives (plus particulièrement des critères de sélection) commence à poindre avec beaucoup d'acuité.

6. La plus grande partie des sommes du fédéral finance des projets et non pas l'infrastructure des organisations populaires. Pour ceux qui reçoivent des argents pour le fonctionnement, le montant est presque toujours dérisoire.

IV. LE FINANCEMENT PROVINCIAL

Signalons d'abord que la majorité des groupes qui oeuvrent dans un champ de juridiction provinciale sont nés à la fin des années '70, au début des années '80. Prenons par exemple les groupes de non-syndiqué-e-es (à l'extérieur de Montréal), les groupes d'alphabétisation, les maisons de jeunes, etc.

A cette époque, presque tous les ministères qui avaient une vocation un temps soit peu "sociale" prévoyaient de l'argent pour le secteur autonome.

Afin de dresser un portrait le plus fidèle possible de la réalité, nous passerons en revue la très grande majorité des programmes provinciaux de financement des groupes populaires.

1. MINISTERE DE LA SANTE ET DES SERVICES SOCIAUX (anciennement MAS)

Programme: Soutien aux organismes communautaires.

Avec une enveloppe de 25M$, le programme SOC est le plus important programme de financement du gouvernement du Québec. Ils sont plus de 2,000 organismes chaque année à présenter des demandes au MSSS: un peu plus d'un millier à recevoir un soutien pour l'infrastructure de leur organisme ou pour des projets plus ponctuels financés par le ministère de Thérèse Lavoie-Roux.

Ces groupes oeuvrent principalement dans les 8 secteurs suivants:

1. femmes: centre de femmes, CAVACS, maisons d'hébergement, centrede santé, groupe de planning des naissances;

2. familles;

3. personnes âgées;

4. personnes handicapées;

5. jeunes;

6. centre de bénévolat;

7. groupes de maintien à domicile;

8. santé physique et/ou mentale.

Du côté du MSSS, l'année '87-83 sera une année particulièrement décisive. Rappelons que l'an dernier Thérèse Lavoie-Roux avait justifié un gel de l'enveloppe budgétaire par le fait qu'elle voulait d'abord prendre possession de ses dossiers. Pour ce faire, elle avait aboli l'indexation par échelon (ce qui fait qu'une maison d'hébergement ou une maison de jeunes, par exemple, voit sa subvention augmenter à chaque année d'existence de plus). Cela était inévitable en fait avec une maintien de l'enveloppe, la majorité des groupes devaient se contenter d'un statu quo.

Maintenant, après plus de 16 mois de pouvoir, c'est le moment pour la Ministre d'annoncer ses couleurs. Elle devra en fait s'impliquer plus clairement en maintenant ce budget, en l'amputant ou en l'augmentant. Quelque soit sa décision, elle teintera sûrement les prochaines années du règne libéral ou minimalement jusqu'à ce que soit déposé le rapport de la Commission Rochon.

Il est évident que la situation est à surveiller de près et les groupes comptent bien le faire. C'est pourquoi, une Coalition des groupes

financés par le programme SOC est à se mettre sur pied.

NOTE: Dans le dépôt des crédits '87-88, on annonce une augmentation de 2$ millions (3).

2. MINISTERE DES COMMUNICATION DU QUEBEC (MCQ)

Programme: PAMBCQ

Pouvaient être financés par le MCQ, les T.V., radios et journaux communautaires. Les argents ainsi octroyés servaient à financer le fonctionnement régulier de ces organismes et quelques fois le développement, c'est-à-dire plus précisément l'achat d'équipement plus moderne.

Pour donner une idée plus précise, voici comment se répartissaient les 2,3 M$ du PAMECQ:

1. Journaux communautaires :    7%

2. TVC:     40%

3. Radios oommunautaires: 53%

De façon générale, il ne fait aucun doute que le Parti libéral vise à se retirer à très court terme du financement des organismes communautaires de communication.

Déjà, en août '86, le ministre French annonçait dans le cadre d'une tournée au Saguenay-Lac St-Jean qu'à compter de '87-88, les T.V. et journauxcommunautaires ne pourraient plus compter sur un soutien financier du MCQ. Les radios communautaires étaient, quant à elles, épargnées pour un an au moins.

Devant les pressions exercées par les regroupements de T.V.C. et de médias écrits, le ministre a consenti à deux éléments.

1. Les regroupements pourront être financés par un nouveau programme, appelé programme d'initiative en communication (PIC). Il y a des sommes disponibles pour des projets spéciaux allant plus spécifiquement dans le sens des perspectives d'autofinancement des médias communautaires. De ce nouveau programme découlera un contrôle accru pour les organismes financés. Ce qui est déplorable c'est que le MCQ tente de plus en plus d'obliger les regroupements nationaux à dévier de leur mission première de défense de leurs membres pour se travestir en lieux de réflexion sur l'auto-financement.

2. Certains groupes pourront bénéficier d'une aide financière de l'OPDQ (Office de planification et de développement du Québec). Ce financement équivaudrait à 40% des argents de '86-87; il ne serait accessible qu'à une dizaine de TVC. Les argents octroyés devraient être utilisés pour l'amélioration de l'équipement technique. Rien ne serait prévu pour l'infrastructure ou les salaires. Aux dernières nouvelles, l'OPDQ est un peu réticente à assumer la facture pour le MCQ.

3. MINISTERE DE L'EDUCATION (MEQ)

Programme OVEP.

Le programme OVEP, contrairement à ce qui se passe dans d'autres ministères ne s'adresse pas seulement aux groupes d'éducation au sens pur du terme comme les groupes d'alphabétisation ou les centres de formation et d'éducation populaire. Avec une enveloppe de 7,9 M.$ ce programme est accessible à "tous" les groupes qui réalisent des activités éducatives, du moins ceci est vrai théoriquement. Il faut savoir qu'en '84, le MEQ limitait l'accès au programme par l'imposition d'un moratoire. En '86-87, 660 groupes recevaient des argents et 450 attendaient toujours une levée du moratoire. Certains, parmi eux, travaillent en alphabétisation et ne reçoivent rien du MEQ. Pour les autres, ils interviennent sur plus d'une vingtaine de problématiques qu'il sera peut-être long et fastidieux d'énumérer.

Depuis '84, les groupes demandent une ouverture du programme accompagnée d'une injection substantielle d'argents neufs pour faire face à la demande.

Ce n'est certes pas en '87-88 qu'ils obtiendront une réponse positive à leurs demandes, M. Ryan ayant déjà annoncé le statu quo sur cette question. Pour les budgets, rien ne semble acquis. Depuis décembre dernier,les rumeurs de coupures vont bon train et à quelques jours à peine avant le détail des crédits, celles-ci sont toujours présentes (4).

Les tendances du MEQ depuis l'élection du PLQ se définissent de plus en plus clairement. Monsieur Ryan a de ses vilains lapsus lorsqu'il désigne les groupes d'éducation populaire et que l'appelation ressemble à "organismes bénévoles". Congruent avec cette perception, il s'oppose à tout support financier du MEQ pour l'infrastructure des groupes même pour ceux qui oeuvrent exclusivement en éducation. C'est "l'équité" pour tout le monde, on ne finance que des projets éducatifs (5).

De plus, les décisions qu'ont annoncées les fonctionnaires ne laissent rien présager de bon. Deux tendances s'articuleront dans le concret à très court terme:

1. resserrements des normes administratives;

2. augmentation du contrôle de la qualité des réalisations.

En lisant entre les lignes, il est facile de percevoir que le MEQ veut faire un retrait en douce du financement des activités éducatives des groupes et ce, même si c'est l'unique source de financement pour ce type d'activités et que les propos de notre ministre étaient plus engagés lorsqu'il siégeait dans l'opposition. Maintenant, un gel de budget qui perdure, cela ne l'offusque plus.

4. MINISTERE DE LA JUSTICE

Office de la protection du consommateur (OPC)

Ce ministère finance principalement les groupes de consommateurs via l'OPC. Une enveloppe d'environ 600,000$ (gelée à ce montant depuis 1980) est mise à la disposition des organismes pour l'infrastructure. Cette année, il semble qu'on assiste à une remise en question qui risque d'être lourde de conséquences pour les groupes.

Du côté du ministère, l'enveloppe budgétaire est à repenser (à la baisse), on veut resserrer les critères d'éligibilité et à court terme, on pense s'orienter vers un financement par projets en remplacement d'un financement plus statutaire.

Pour les argents qui sont distribués plus directement par le MJQ, ils sont majoritairement destinés à l'expérimentation de projets-pilotes et quelques fois à certains groupes qui travaillent sur des lois à condition que le travail soit réalisé par des avocats ou autres professionnels de la justice. Quand on parle de projets-pilotes, cela peut prendre la forme d'accompagnement à la Cour pour un divorce, de projets de réinsertion sociale des détenu-e-s, etc.

D'après nos sources, les subventions ainsi accordées sont relativement minimes.

5. OFFICE DES PERSONNES HANDICAPEES DU QUEBEC

L'OPHQ est un organisme para-gouvernemental relevant directement de la ministre Lavoie-Roux et non pas du MSSS comme nous serions portés à le croire.

Le volet le plus connu de l'OPHQ est celui dont les journaux ont abondamment parlé soit un soutien financier aux personnes handicapées elles-mêmes. L'autre volet c'est un soutien financier à des organisations de personnes handicapées. C'est ainsi que l'OPHQ octroie des argents à des groupes locaux, régionaux ou nationaux dont le CA est composé majoritairement de personnes handicapées ou de membres directs de la famille. Le montant de l'aide accordée varie entre 5,000$ pour un groupe local et 25,000$ pour un groupe ou un regroupement national. Les subventions accordées doivent servir à la promotion et à la défense des personnes souffrant d'handicaps.

Cette petite enquête nous a permis de savoir qu'au cours des dernières années, il y a eu un resserrement des normes administratives (par exemple, un groupe national qui aurait plus de 50,000$ d'autre sources ne serait plus éligible à un soutien financier de l'OPHQ; l'OPHQ ne finance plus les associations provinciales de multi-handicap mais les groupes locaux oui).

D'autre part, du côté de l'OPHQ, on nous assure qu'on se garde bien de faire de l'ingérence dans les groupes. Les groupes, eux, ont une version divergente sur ce pointu Certains affirment que les organismes qui sont les moins bien perçus par l'OPHQ voient leur demande scrutée à la loupe et refusée sur des détails. D'autres disent que l'OPHQ s'est déjà servi de son pouvoir pour tenter de les influencer.

6. MINISTERE DES LOISIRS, CHASSE ET PECHE (MLCP)

Le ministère d'Yvon Picotte finance quant à lui et intervient principalement dans le financement de deux types d'organisation soit:

1. les fédérations de loisirs;

2. les centres d'éducation populaire.

6.1 Les fédérations et le groupes de loisir

Elles sont environ 80 au Québec. Jusqu'à l'an dernier, chacune avait droit à un financement de base de 62,000$ annuellement plus l'accès à un financement plus ponctuel pour des projets spéciaux ou encore la réalisation de mandats spécifiques demandés par le ministère. De plus, l'ensemble des fédérations bénéficiaient d'un secrétariat central financé par le MLCP. L'année '86-87 devait être le début d'une longue série de coupures. En fait, en '86-87, chacune voyait son financement de base fondre de 10%. Cette animée, l'arrivée du printemps a provoqué une autre fonte de 11% avec des annonces de coupures de 10% par année jusqu'à la fin du présent mandat du PLQ. Pour les projets spéciaux, les prévisions gouvernementales laissent présager une autre coupure importante. Idem pour le secrétariat du Regroupement-Loisir Québec qui devra combiner dorénavant avec une perte nette de un demimillionde dollars en '87-88.

Pour résumer brièvement les décisions du MLCP,nous vous présenterons un aperçu des annonces faites à ce jour pour l'année '87-88:

1. retrait du financement des auberges-jeunesse?

2. retrait du programme Découverte du Québec géré par les CLSC pour les familles à faible revenu;

3. coupure de 50% dans le budget Kino-Québec;

4. retrait sur 5 ans du financement des bases de plein air;

5. abandon du programme "Manifestation socio-culturelle".

Dans la même envolée, le ministère a des intentions bien précises quant au resserrement de normes administratives, plus particulièrement sur la part d'auto-financement que devront aller chercher les groupes.

De façon générale, bien que les fédérations de loisirs soient des OSBL, on ne les identifie pas toujours aux groupes populaires. Toutefois, il ne faudrait pas omettre non plus que quelques-unes de ces fédérations défendent le droit au loisir des personnes à faibles revenus.

6.2 Les centres d'éducation populaire

Programme d'assistance financière aux centrescommunautaires de loisirs.

Ces centres ont des interventions inportantes dans le domaine du loisir. C'est pourquoi ils peuvent recevoir des subventions du MLCP. Pour certains, l'aide ne totalise que 5,000$; pour d'autres elle peut se chiffrer à près de 76,000$. Bref, l'écart-type est grand et il dépend en bonne partie du moment où sont nés ces groupes.

La place des centres d'éducation populaire dans le programme d'assistance financière aux centres communautaires de loisirs semble de plus en plus remise en question à cause de leur double mission: éducation et loisir.

Nous terminerons ce chapitre en précisant que le budget global de ce programme est de 1.4M$ et qu'il est fixe depuis '85-86.

7. MINISTERE DES AFFAIRES CULTURELLES

Ce ministère finance plus largement que les groupes populaires bien sûr. Cependant, certains groupes comme les troupes de théâtre populaire, les groupes d'intervention vidéo réussissent à obtenir des argents. Ils n'ont pas une enveloppe particulière qui leur est réservée. Chaque groupe fait sa demande au niveau régional, la gestion étant décentralisée, et son projet est étudié au "mérite".

Ces groupes populaires nous assurent que leur situation est précaire, leur financement aléatoire. Gela dépend en grande partie des personnes qui siègent aux comités régionaux.

8. MINISTERE DES COMMUNAUTÉS CULTURELLES ET DE L'IMMIGRATION

Dans le ministère de Louise Robic, il existe deux programmes de financement s'adressant aux organismes sans but lucratif:

1. soutien aux organismes;

2. rapprochement avec la communauté francophone.

Selon les informations fournies par le MCCI, il est possible pour un groupe de recevoir des argents pour le fonctionnement et la réalisation d'activités spécifiques. Mesure assez particulière: la première année qu'un groupe présente une demande, il n'a pas droit à des argents pour l'infrastructure, il doit d'abord faire ses preuves, dit-on.

Le deuxième programme vise le rapprochement entre les communautés culturelles et les Francophones. Les clientèles-cibles identifiées par le ministère sont les femmes et les communautés visibles. D'ailleurs, en février dernier, la ministre Robic annonçait un nouveau programme de francisation pour les femmes (majoritairement parrainées) et pour les réfugiés en attente de statut (400,000$).

La majorité des groupes financés par ces programmes sont des groupes d'immmigrant-e-s au sens pur du terme. Les autres sont des groupes qui comptent parmi leurs usagers et leurs usagères une bonne proportion d'immigrant-e-s. Ces derniers sont principalement situés à Montréal. La caractéristique commune à l'ensemble de ces organismes est qu'ils offrent tous des services de première ligne.

Du côté de ce ministère, on semble peu habitué à fournir le budget global destiné aux groupes. D'ailleurs, il nous a été impossible de le savoir. Néanmoins, nous avons quand même réussi à savoir que le budget de ces deux programmes a diminué depuis '84 à raison d'un pourcentage X par année. C'est donc dire que les groupes reçoivent de moins en moins depuis 3 ans.

De plus, il semble que des volets du programme ont disparus pour être remplacés. la première impression qu'on peut avoir c'est l'instabilité constante pour les groupes parce que tout semble directement lié aux priorités politiques et peu aux besoins des communautés culturelles.

9. SOCIETE D'HABITATION DU QUEBEC

Programme Logi-pop.

Il faut d'abord rappeler que depuis 1977, les groupes de ressources techniques en habitation (GRT) recevaient une subvention de base de 50,000$ annuellement. La situation actuelle est que les GRT urbains reçoivent toujours le même montant et qu'une légère augmentation soit 4,000$ a été consentie aux GRT en milieu semi-urbain ou semi-rural en 1982-83.

Comme nous le soulignions au début, les argents sont gérés par la SHQ. Récemment, celle-ci procédait à une réévaluation pour l'ensemble du réseau. Suite à cet exercice, on a décidé de s'orienter vers une "rationalisation" des ressources. Pour les GRT, cela signifie bien concrètement une remise en question qui menace la survie des GRT en milieu urbain surtout mais pas exclusivement.

Comme plusieurs GHT ont développé un financement autre, certains pourront probablement survivre. Toutefois, les choix de Québec les obligeront à laisser tomber entre autre, la représentation et les projets de coop de 12 logements et moins parce qu'ils ne couvriront pas leurs frais lors de la facturation des services.

Le 1,784M$ qu'il y avait pour 37 GRT au Québec ne ressortira pas intact de l'exercice financier de 1987-88. Plus d'une quinzaine de groupes sont menacés et ils connaîtront finalement le sort définitif qu'on leur réserve le 30 juin prochain.

10. CONSTATS SUR LE FINANCEMENT PROVINCIAL

Nous pouvons faire les constants suivants:

1.  Le resserrement des normes administratives et une augmentation du contrôle sur les pratiques des groupes.

2. Une tendance de plus en plus marquée à soumettre les programmes de financement des groupes aux priorités gouvernementales, et ce, Indépendamment des besoins exprimés par les usagers et les usagères de ces organisations

3. Une relance un peu inquiétante du discours sur le bénévolat.

4. Une volonté d'abolir le financement des organisations qui, selon eux, constituait une concurrence déloyale parce que subventionnée à l'entreprise privée (ex/: médias communautaires vs Bebdo A-I, coops d'habitation vs spéculateurs immobiliers). Bien qu'officiellement, le discours gouvernemental invoque mille et une autres raisons pour faire un retrait du financement de ces organisations.

5. Du coté du MSSS plus particulièrement, et dans d'autres ministères, dans une moindre mesure, on sent de la part du gouvernement une volonté d'utiliser, de récupérer les services offerts par les groupes, de leur faire assumer à rabais les services sociaux dont Québec veut se décharger.

6. Les montants alloués à l'infrastructure sont très en dessous du minimum vital, dans la très grande majorité des cas. De plus, il y a un glissement du financement de base vers un financement par projet.

V. FACTEURS DETERMINANTS

Nous avons vu jusqu'à maintenant qu'en matière de financement des organisations populaires, malgré quelques constantes, rien n'est vraiment uniforme. De nombreux facteurs influent sur notre capacité d'aller chercher ou non les argents nécessaires à notre survie. Nous en avons identifié 6 qui sont, selon nous, les principaux.

1. Niveau d'intervention

2. Secteur d'intervention

3. Région d'appartenance

4. Groupe de lutte ou de service

5. Affiliation ou non à un groupe national

6. Capital politique possible.

1. NIVEAU D'INTERVENTION DE NOS GROUPES (6)

En effet, selon qu'on intervienne au niveau local, régional ou national, notre approche du financement est différente.

1.1 Les groupes locaux

Comme nous l'avons vu plutôt, les groupes locaux ont accès à plusieurs sources de financement. Plusieurs ministères, plus les sources privées, la multitude de sources de financement présentent toutefois le désavantage de son avantage.

Au début des années '80, on évaluait qu'un groupe local passait 30% de son temps à la recherche de financement. En 6-7 ans, selon l'estimation que nous pouvais faire, la recherche occupe 40% du temps de travail. La principale raison et non pas la seule) est selon nous que les montants ont diminué d'importance.

1.2 Les groupes régionaux

Bien qu'ils soient peu nombreux, les groupes régionaux sont certainement les plus désavantagés. Comme par exemple dans la majorité des ministères, il n'existe que 2 statuts: groupes locaux ou nationaux. Les groupes régionaux sont assimilés aux groupes locaux.

Lorsque nous parlons de groupes régionaux nous faisons référence aux groupes ayant pignon sur rue. Cette nuance est importante dans la mesure où il y a des regroupements nationaux qui ont des structures régionales de concertation. Des rencontres mensuelles ont lieu mais ces groupes n'assurent pas de locaux et de permanence régionale. Il est donc évident que ces structures régionales n'ont pas les mêmes besoins financiers.

Les groupes régionaux, sont toujours au prise avec un problème de découpage territorial. Comme par exemple, peut exister 2 Centraide 6 commissions scolaires, 6 comtés dans leurs régions. L'objectif est en général que dans un même réseau, tout le monde s'entende sur la part de chacun. Autant dire que dans la majorité des cas, on peut parler de fiction.

Les tables régionales membres du MEPACQ, par exemple, pour la grande majorité, doivent assurer une présence régionale avec moins de 20,000$ par année (7).

1.3 Les groupes nationaux

La plupart des regroupements nationaux ou fédérations ont accès à un budget de fonctionnement. Ces budgets peuvent venir du gouvernement fédéral mais majoritairement du gouvernement provincial et dans de rares cas les 2.

Les doléances de ces groupes sont toutefois nombreuses. Leurs budgets sont estimés insuffisants et insastisfaisants. Il faut bien comprendre que tous n'en ont pas. Ce sont les structures nationales dans les secteurs d'éducation populaire autonome, du logement locatif, de la défense des droits sociaux: chômeurs, accidentés et assistés sociaux.

Ce qui nous amène directement à parler des secteurs d'intervention.

2. SECTEUR D'INTERVENTION  (8)

Les secteurs les plus désavantagés sont sans aucun doute ceux-ci:

1. les centres de documentation

2. les groupes logement

3. les groupes travaillant sur la problématique de l'emploi ou del'absence d'emploi (accidenté-e-s du travail, non-syndiqué-e-s,chômeuses et chômeurs, assité-e-s sociaux)

4. les groupes d'éducation

5. les groupes de défense des droits des détenus

Nous avons vu plutôt que ces groupes n'ont droit à aucune subvention de fonctionnement. Ce qu'il faut comprendre c'est qu'en ce moment, avec le retrait gouvernemental du financement, avec les débats publics, certains groupes deviennent extrêmement fragiles. Pensons entre autres aux centres de santé des femmes, aux groupes qui travaillent sur l'accès à l'égalité des femmes, aux médias communautaires.

La plupart de ces groupes traitent de problématiques qui ne font pas un consensus social et c'est de là que vient leur fragilité. Four les autres, malgré une demande croissante, il n'entre pas dans les priorités gouvernementales. Ex.: éducation populaire avec la priorité accordée à la formation qualifiante.

3. REGION D'APPARTENANCE (9)

Selon une étude effectuée en 1983 par Henri Beauchemin pour le compte du MEPACQ, il est dit que les régions éloignées sont défavorisées au niveau du financement, soient (10):

o    Abitibi-Témiscamingue

o    Saguenay/Lac-St-Jean

o    Bas-St-Laurent/Gaspésie

o    Cote-Nord

Une des explications possibles c'est que souvent les enveloppes budgétaires de chaque programme sont calculées selon le prorata de la population. Or, ces régions sont immenses mais la population peu nombreuse.

Nous croyons qu'il faut tout de même un minimum de nuances. Il est évident qu'intervenir dans des régions rurales, semi-urbaines ou urbaines, c'est différent. En région, il y a la distance, dans les centres urbains, une densité de population. Cette dernière affirmation ne refait pas toutefois l'équilibre entre les régions.

4. GROUPE DE LUTTE OU DE SERVICE (11)

Ce dernier facteur transcende les réalités régionales.

4.1 Groupe de service

Dans un contexte de privatisation des services sociaux, l'Etat veut faire assumer à certains groupes les services dont lui veut se débarasser. Quelques-uns ont déjà reçu des offres, des propositions de sous-traitance pour les services directs qu'ils offrent à la population. Ces contrats quoi qu'alléchants risque toutefois de remettre en question l'autonomie réelle de ces groupes. Le discours de l'Etat à ce sujet est très éloquent: les groupes peuvent assumer à moindre coût les services directs. Ce n'est pas une reconnaissance du travail et des interventions faites par le groupe. C'est la récupération des services offerts par ceux-ci.

4.2 Groupes de lutte

L'action politique est un obstacle au financement au point que certains groupes sont maintenus à bout de bras par des permanents, des militants, faute d'un financement adéquat. Et certains dérangeaient les bailleurs de fonds et décideurs politiques.

Ce qu'ils ont en commun ces groupes c'est de se battre pour tenter de modifier les règles actuelles, ce qu'on peut appeler la lutte.

Rares sont les groupes qui ne font que cela. Prenons l'exemple d'une association de locataires qui dénonce les hausses de logement abusives. Cette association répond également au locataire vivant un problème de logement.

Les bailleurs de fonds et décideurs politiques se basent exclusivement sur les interventions publiques. Et pourtant, quand on voit l'apparition des boubou-macoutes, les recomandations de la Commision Forget, les rapports Portier-Soowen et Gobeil, la remise en question de l'universalité,

l'imposition par décret de la loi 160, la levée possible du moratoire dansle domaine du logement locatif, etc., est-il encore possible de penser que les groupes doivent se cantonner dans des services?

Si eux ne font pas savoir haut et fort ce que leurs usagers et usagères vivent, qui le fera? Malheureusement, ce n'est pas la vision des bailleurs de fonds et ces groupes sont les plus pénalisés.

Le facteur groupe de lutte ou de service est quant à nous un des facteurs les plus importants qui influence le financement des groupes.

5. AFFILIATION OU NON A UN GROUPE NATIONAL

II va de soi que lorsque notre groupe appartient à une fédération ou à un regroupement national, nous pouvons profiter d'un réseau d'échange sur la question du financement (sources, façons de faire les demandes, demandes uniques, etc.).

De plus, comme il est dans le mandat de nos structures nationales de nous représenter politiquement, cela nous permet de participer aux discussions sur le sujet, de les alimenter et de faire savoir de façon concertée à nos bailleurs de fonds actuels ou éventuels quels sont nos besoins, nos réalités.

Dans une conjoncture comme celle que nous vivons présentement où tous les acquis semblent s'effriter, nous ne croyons pas qu'un groupe ait les moyens de se priver de tels lieux d'échange et de représentation.

6. CAPITAL POLITIQUE POSSIBLE

Comme "nos" élus doivent faire face à une élection générale aux 4 ou 5 ans, ils ont tout intérêt à donner l'illusion qu'ils se préoccupent de la réalité du peuple. Pour le faire, ils disposent de mille et uns moyens dont l'appui à des luttes ou des revendications qui ont déjà fait un consensus social assez large.

Pour illustrer ceci, nous fournirons l'exemple des luttes féministes. Il est très rentable pour un député de dire que son gouvernement est intervenu, avec dollars à l'appui, pour soutenir les maisons d'hébergement, et qu'il a mis en vigueur une nouvelle législation sur la violence conjugale. Par contre, il est à parier que ce député n'invitera pas la presse à assister à la remise d'un chèque à un centre de santé où se pratique des avortements. Dans des cas comme celui-ci, il se dira probablement que Poste Canada fera l'affaire.

Toutefois, il faut bien dire que ce n'est pas le Pérou même pour ceux qui ont des causes "en or". Ces groupes doivent souvent attendre les deux dernières ou la dernière année d'un mandat pour que les engagements et les promesses se concrétisent. La situation actuelle des maisons d'hébergement à ce sujet est très révélatrice.

VI. CONCLUSION

II faut d'abord se rappeler que les groupes populaires ont très souvent été les premiers, à cause de leurs liens avec la population, à identifier les "nouvelles" problématiques sociales. N'eusse été de leurs interventions, il aurait fallu attendre longtemps avant que les gouvernements reconnaissent ces réalités et interviennent pour développer des ressources. Les groupes, eux, n'ont pas tardé à intervenir, à développer des réponses originales pour permettre à leurs usagères et leurs usagers de reprendre un peu plus de contrôle sur leurs conditions de vie et/ou de travail.

Les dernières années ont été particulièrement difficiles pour les organisations populaires qui ont vu de plus en plus de gens affluer vers leurs locaux pour réquérir des services, des informations et un soutien pour défendre leurs droits.

Durant cette même période, par malheur, nous avons en droit à l'élection de 2 gouvernements à la solde des entreprises. Ils se vautrent dans leurs discours de privatisation et rationalisation, jouant aux aveugles quand il est question de problèmes sociaux auxquels il faut répondre. Leur négation n'a pas tardé à les amener à remettre en question les quelques miettes qu'ils accordaient aux organisations populaires.

Bien sûr, les déclarations officielles sont élogieuses mais nous devons néanmoins constater la dichotomie entre la théorie et la pratique.

Dans la réalité nous sommes en mesure de nous apercevoir que le scénario d'un ministère à l'autre, d'un gouvernement à l'autre se déroule avec les mêmes constantes:

1. d'abord remise en question de nos enveloppes budgétaires, le tout copieusement arrosé d'un discours faisant l'éloge du bénévolat et de ses vertus;

2. une volonté de plus en plus évidente de soumettre nos programmes de financement à des priorités gouvernementales qui, disons-le, ne sont pas toujours très en contact avec la réalité. On tente ainsi de subordonner notre travail à leurs décisions.

3. Viennent ensuite les inévitables resserrements des normes administratives et la "trouvaille" du financement par projet au détriment du financement de base.

4. Comme ils sont de "bons gestionnaires" il leur faut savoir à quoi servent les quelques dollars qu'ils nous octroient au sou près. Pour ce faire, ils augmentent le contrôle. Et pourtant, ils ne se donnent pas tant de mal pour savoir où vont les nombreux millions qu'ils accordent aux entreprises.

Il va donc sans dire, que pour les organisations populaires, les enjeux sont de taille. Les groupes de service devront faire preuve d'une vigilance toute particulière d'une récupération qui leur feraient assumer à rabais les services dont l'Etat veut se débarasser. D'autre part, la survie des groupes qui ont plus des pratiques d'actions ou des services qui dérangent "nos" décideurs politiques est menacée» Ils devront probablement reprendre la lutte là où elle avait commencé, c'est-à-dire sur leur importance sociale, en lien avec leurs usagers et leurs usagères.

Chose certaine, il nous faudra profiter du fait que les campagnes pré-électorales ne sont pas si loin et que durant cette période, les politiciens font preuve d'une largesse toute intéressée.

Les groupes devront également réapprendre tous les sens du terme solidarité.

VII. REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

BEAUCHEMIN, Henri, L'état de la situation sur le financement des groupes populaires au Québec (1981-1983), MEPACQ, Montréal, 12 mai 1983.

COALITION DES ORGANISMES COMMUNAUTAIRES DU QUEBEC, Communiqué de presse, "Réaction aux programmes fédéraux - recul sans précédent des organismes communautaires", Montréal, 19 novembre 1985.

DIRECTION GENERALE DE L'EDUCATION DES ADULTES, Note de service pour les membres du comité national de révision du programme d'aide aux OVEP, janvier 1987.

GOUVERNEMENT DU QUEBEC, Conseil du trésor, Budget 1987-1988, Crédits, 25 mars 1987, pp. 11-7, 27-11.

MEPACQ, Mémoire sur le financement du réseau MEPACQ, octobre 1986, 8 pages.

PELCHAT, Marie, "Vue d'ensemble sur le financement", L'Ardoise, automne 1986, pp. 12-13-14.

PRESSE CANADIENNE, "L'opposition est extrêmement déçue". Le matin, 26 mars 1987.

ROWEN, Renée, "Chronique Féminin Pluriel: Le rapport "Egalité pour tous", trop féministe pour les "vraies femmes". Le Devoir, 13 janvier 1986.

VIII. REMERCIEMENTS

Nous remercions pour leur collaboration à cette réflexion:

Au bas de l'échelle

Centre d'éducation des adultes St-Henri/Petite Bourgogne

Centre des femmes de Verdun

CORAH

Fédération nationale des associations de consommateurs

FRAPRU

Institut canadien d'éducation des adultes

Ligue des droits et libertés

Ministère des communautés culturelles et immigration

Mouvement action-chômage de Montréal

Mouvement québécois des camps familiaux

Mouvement des consommateurs handicapés du Québec

Nous nous intégrons en commun

Office des personnes handicapées du Québec

Regroupement des T.V. communautaires du Québec

Regroupement des ressources alternatives en santé mentale

Regroupement des maisons de jeunes du Québec

Santé et bien-être social Canada

Secrétariat d'Etat (Montréal):  responsables des programmes Promotion de la femme et Soutien à l'action volontaire

Union des travailleurs et travailleuses accidentés de Montréal

ANNEXE 1 : LES LIMITES DE CE TEXTE

II nous a été inpossible d'évaluer les conséquences et l'impact du retrait gouvernemental (retrait des programmes de financement, privatisation, etc.) pour chacun des secteurs d'intervention, non seulement pour les groupes mais également pour les usagères et les usagers de ces groupes. D'autre part, certains secteurs sont passés sous silence (ex.: groupe travaillant sur la solidarité internationale).

C'est pourquoi nous en profitons pour vous inviter une fois de plus dans chacun de vos secteurs à nous faire connaître au fur et à mesure les nouvelles données les conséquences vous concernant.

NOTES