COLLOQUE VOLONTÉ POLITIQUE ET PORNOGRAPHIE - "C'EST LE TEMPS D'AGIR AU MOINS POUR PROTÉGER LES MINEURS"

FEDERATION DES FEMMES DU QUEBEC

DOCUMENT DE TRAVAIL

SlÈGE SOCIAL:
1600 RUE BERRI, BUREAU 3115,
MONTRÉAL. QUE.
H2L 4E4
     TEL, 844-7049

Sommaire :

  • Introduction
  • Lise Dunnigan, "Pourquoi dénoncer la por- nographie? Une reformulation du problème s'impose"
  • Maurice Barker, "Pourquoi protéger les mineurs?"
  • Me Andrée Ruffo Mondor, "Paramètres lé- gaux: Exploitation sexuelle des mineurs"
  • Me Nicole Trudeau-Bërard, Dispositions concernant le cinéma.
  • Recommandations
  • Annexes:
  • La  requête  de   la F.F.Q.
  • Liste des associations et organismes qui ont appuyé la requête
  • Liste des membres du comité organisa- teur.

Montréal, le 25 mai 1981

INTRODUCTION

La F.F.Q., soucieuse de prendre part aux débats importants de l'heure et d'intervenir pour améliorer la situation prévalant dans l'ensemble de notre société, s'est penchée depuis quelques années dé- jà, sur le problème de la violence et plus particulièrement, sur les dommages causés par la pornographie chez les enfants et les adoles- cents .

ORIGINE DU COLLOQUE

Dès 1977, à l'assemblée de la F.F.Q., les membres se sont ar- rêtées sur le problème de l'accessibilité de la pornographie aux jeu- nes.  La formation d'un comité ad hoc sur la question avait même alors été recommandée.  Cependant, à cause du choix d'autres priorités, le projet fut mis en veilleuse jusqu'au congrès de 1979, qui portait sur la femme et la violence.  A ce moment, la recommandation a été repri- se à l'instigation de Monica Matte (1) qui avait préparé une pétition pour inciter les gouvernements à interdire la vente aux mineurs et ré- glementer l'étalage public de ce matériel.  À l'automne 79, le comité de la F.F.Q. fut mis sur pied et prépara une requête qui fut adressée aux ministres de la Justice du Canada et du Québec.  Cette requête re- prenait essentiellement les éléments de la pétition de Monica Matte et le texte de la résolution se lisait comme suit:

La Fédération des femmes du Québec prie le Ministre de la Justice du Canada et le Ministre de la Justice du Québec de prendre toute mesure nécessaire, législative ou administrative, afin que la pornographie soit rendue inaccessible aux mineurs et hors de leur vue.

La F.F.Q. propose que ces publications soient:

a)ou bien affichées et vendues dans des établissement spécia- lisés du genre "sex shops" détenteurs d'un permis spécial

à cet effet, et dont l'accès devra être interdit aux mineurs;

b)ou bien qu'elle soit en vente libre dans les établissements commerciaux ou les mineurs ont accès, mais interdites à l'é- talage ou placées dans un étalage spécial de sorte qu'elles ne puissent être vues par quiconque, ni de l'extérieur ni à l'intérieur de l'établissement.

(1) Monica Matte, à cette époque commissaire à la Commission des Droits de la personne, a repris le projet car elle avait été particulière- ment frappée et sensibilisée par une lettre de Me Maurice Marquis qui engageait la Commission a se pencher sur le problème de la por- nographie accessible aux jeunes.

Un appui à la requête fut demandé à la fois à des organismes et a des individus.  Les résultats ont dépassé les espoirs escomptés car plus de 325,000 personnes ont souscrit à cette requête.  En effet, 358 organismes,  2449 participants et participantes aux colloques sur la violence du Ministère de la Justice du Québec et plus de 10,670 si- gnataires individuels se sont montrés d'accord avec les demandes de la F.F.Q..

Cet appui massif manifeste qu'un nombre important de citoyens de divers milieux croient qu'une action de redressement s'impose face à l'envahissement progressif de la pornographie, particulièrement dans le monde des jeunes.  Cette action est attendue avec impatience par u-

 majorité de la population qui fut, jusqu'à récemment, silencieuse face à ce problème.

Pour poursuivre l'action entreprise avec la requête et la pé- tition de même que celle amorcée par les colloques régionaux sur la violence organisés par le ministère de la Justice du Québec, la F.F.Q. a décidé de mettre sur pied ce colloque "Volonté politique et pornographie?"

L'objectif fondamental de ce colloque est de déclencher une volonté politique de changement dans le domaine de la pornographie prioritairement en ce qui touche les mineurs considérés comme consommateurs ou objets, c'est-à-dire participants utilisés dans la production de matériel pornographique.  Des changements sont nécessaires, tant au niveau des lois, des règlements et de la surveillance de leur application, qu'au niveau des mentalités.

La F.F.Q. a voulu rassembler toutes les personnes et les organismes déjà sensibilisés à la question et qui considèrent qu'une ac- tion s'impose.  La F.F.Q. n'a pas la prétention de s'occuper seule de ce dossier:  en effet, de nombreux organismes ont aussi travaillé cet- te matière et en ont fait leur priorité.  A cet égard, nous devons souligner les plans d'action mis de l'avant entre autres par l'AFEAS, les Unions de familles, Parents Secours et le Cercle des Fermières. Nous souhaitons ardemment que ces organismes et de nombreux autres, unissent leurs forces pour faire en sorte que les pressions communes obtiennent des résultats.

RAISONS D'ÊTRE DE NOTRE ACTION

Nous sommes parfaitement conscientes en nous attaquant à ce problème, même si actuellement nos préoccupations sont surtout orien- tées vers les enfants, que nous abordons un sujet difficile et que nous devrons faire face à de nombreuses résistances. Nous savons aussi que de s'attaquer au phénomène de la pornographie, c'est d'abord vaincre "un sentiment généralisé d'impuissance, de cul-de-sac, devant l'ampleur et la complexité du phénomène.  Devant son escalade dans la vie quotidienne" (1). Cependant, nous croyons que le mépris, la haine et la violence qui sont transmis par la pornographie ne peuvent que conduire à une dégradation des rapports humains et sociaux.

Pourrons-nous encore longtemps, sous prétexte de liberté d'ex- pression, laisser libre cours à la bestialité, à la violence, au sado- masochisme et à la perversion qui surabondent dans la pornographie ac- tuelle et qui risquent de devenir la normalité pour la nouvelle gêné- ration?  Pourrons-nous attendre encore longtemps les amendements au code criminel du Canada?  Pourrons-nous encore longtemps, sous prétex- te de ne pas censurer, laisser se hausser le seuil de tolérance et ac- cepter -et même favoriser- une situation dégradante pour les hommes, les femmes et les enfants? Accepterons-nous plus longtemps un tel dé- tournement et une telle déshumanisation de la sexualité humaine? Quand estimerons-nous que notre tolérance devient de 1'irresponsabili- té?

PAS UN REFUS DE LA SEXUALITE

Il n'est nullement question pour nous de refuser la sexualité; nous voulons plutôt que chacun ait la possibilité d'exprimer sa sexu- alité sans influences avilissantes des rapports humains. Nous croyons en une sexualité fondée sur le respect et la dignité de la personne. Nous ne pouvons accepter entre autre, l'état courant, dans la porno- graphie, de domination imposée dans les rapports sexuels et de néga- tion de la sexualité féminine.  La pornographie, qu'elle soit hétéro- sexuelle ou homosexuelle, impose toujours en effet, une relation de dominant-dominé qui la plupart du temps s'exprime par une violence physique ou morale des plus abaissantes.  Est-ce là une valeur que l'on veut transmettre aux générations montantes?

PAS DE VOLONTE DE RETABLIR LA CENSURE

Il n'est pas question pour nous de vouloir rétablir une censure contraignante et répressive.  La libre expression d'une sexualité n'est cependant pas conditionnelle à l'envahissement par tous les systèmes de perversion.  Nous recherchons le respect mutuel et égalitaire des hommes et des femmes, de même que le respect des droits de ceux qui se retrouvent "consommateurs involontaires" de pornographie.

(1)  Rapport, Colloques régionaux sur la violence, 1980, p. 19

ACTION PRIORITAIRE POUR LA PROTECTION DES JEUNES

Notre action s'oriente actuellement prioritairement pour la protection des jeunes sans exclure la condamnation de l'exploitation sexuelle des hommes et des femmes.  Nous voulons, dans un premier temps, assurer à nos enfants et adolescents un environnement sain où ne prédominent pas des influences néfastes qui peuvent hypothéquer leur développement psychologique et sexuel et provoquer des perturba- tions sérieuses.  Nous endossons pleinement Maurice Barker lorsqu'il affirme qu'à l'adolescence, la pornographie répond aux critères de 1'obscénité.

Ce que nous refusons avant tout, c'est que nos enfants intè- grent les modèlesdecomportement que la communication pornographi- que leur présente actuellement.

CONTENU DU DOCUMENT DE TRAVAIL

Vous trouverez dans ce document un texte de Lise Dunnigan qui vous présente la problématique de la pornographie et des voies d'approche possibles du phénomène, un autre de Maurice Barker qui analyse les méfaits et dommages causés aux jeunes par la pornogra- phie et enfin, un dernier de Me Andrée Ruffo-Mondor qui nous indique les paramètres légaux nécessaires pour éliminer l'exploitation sexuel- le des mineurs.

Nous vous soumettons, de plus, des recommandations d'actions précises à engager pour tenter de remédier à la situation actuelle. Nous espérons trouver chez les participantes et participants, l'appui nécessaire pour poursuivre notre engagement commun.

"C'EST LE TEMPS D'AGIR AU MOINS POUR PROTÉGER LES MINEURS"

Le comité organisateur du colloque

POURQUOI DENONCER LA PORNOGRAPHIE?
UNE REFORMULATION DU PROBLEME S'IMPOSE

Lise Dunnigan
Agent de recherche
Conseil du Statut de la femme du Québec

Les débats au sujet de la pornographie ne sont pas nouveaux. La pornographie existe depuis des millénaires et a pris des formes particulières dans chaque société.  Son expansion est devenue plus importante dès le moment où les moyens de communication modernes se sont développés.  Ce qui est nouveau aujourd'hui, ce sont les questions qui sont posées au sujet de la pornographie. Jusqu'aux années 1970, on s'est rarement interrogé sur la signification de ce phénomène à l'intérieur des relations entre les hommes et les femmes dans une société donnée.

En 1975, les Rolling Stones produisaient un album dont la pochette et la publicité représentaient une femme ligotée à une chaise, les jambes écartelées, les vêtements déchirés et le corps cou- vert de marques de coups.  La légende disait: "l'm Black and Blue from the Rolling Stones and I love it!".  Un mouvement se forma aux Etats- Unis pour dénoncer cette sorte de publicité et il donna naissance à un vaste réseau de lutte contre la violence envers les femmes dans la pornographie et les média de masse.

Au Québec, le coup d'envoi du mouvement fut donné en 1979 par la publication du dossier de la journaliste Micheline Carrier dans la revue Châtelaine, et peu après par la présentation au ministre de la Justice d'une pétition de la Fédération des femmes du Québec et de plusieurs autres associations concernant l'étalage et la vente des revues à caractère pornographique;  en 1979-80, suivirent les colloques régionaux sur la violence à l'intérieur desquels était abordé le thème de la pornographie.  Des réactions assez vives furent observées dans différents milieux face à l'intérêt soudain des groupes de femmes sur cette question.  Des journalistes, des avocats, des psychologues, des producteurs de cinéma [des hommes en majorité] s'élevèrent parfois vio- lemment contre les critiques que des féministes commençaient à peine à formuler.  Même à l'intérieur des groupes de femmes, des confusions et des hésitations profondes côtoyaient un sentiment de révolte grandis- sant.

Plus d'un an après la tenue des colloques sur la violence, de nombreux projets d'intervention ont pris forme, mais la plupart se sont inscrits dans le prolongement des débats qui avaient dominé les collo- ques, c'est-à-dire qu'ils furent axés sur les moyens de contrecarrer ou de contrôler la diffusion de la pornographie.  En ce sens, les moyens et les objectifs de la nouvelle lutte contre la pornographie ne la dis- tinguent pas encore clairement de celles qui se sont déjà déroulées dans le passé.

Pourquoi donne-t-on encore si peu d'importance à la compréhension et à la réflexion sur une question si grave et surtout si complexe? Et pourquoi nous dirigeons-nous si rapidement vers les solutions avant même d'avoir regardé le problème en face?

La raison de cet empressement est peut-être la même qui a fait que les hommes et les femmes surtout, ont longtemps ignoré la pornographie, et préfèrent encore l'ignorer aujourd'hui:  il n'est pas facile de poser un regard attentif sur le contenu de la pornographie.

Il est facile de croire que la pornographie c'est Playboy, les danseuses à gogo et le petit journal jaune à la tabagie du coin. Il est plus pénible de constater que c'est aussi la montée d'une idéologie de violence sexuelle et de l'exploitation des enfants comme objets de consommation, et que le commerce illégal de ce matériel fait roules des sommes d'argent importantes ici même au Québec.

Il est facile de croire que la pornographie intéresse peu de gens, qu'elle permet seulement d'assouvir des hommes aux besoins sexuels trop grands, leur évitant ainsi d'avoir à violer des femmes et des enfants.  Il est plus difficile d'admettre que la pornographie est aussi consommée par des hommes mariés, d'âge moyen, ce qu'on appelle des hommes "normaux", et qu'elle est l'instrument de reproduction d'une sexualité violente et stéréotypée que nous vivons tous à différents degrés.

Bref, il n'est pas facile de regarder la pornographie en face parce qu'elle nous fait peur, qu'elle nous fait mal, qu'elle nous plonge dans un sentiment d'impuissance totale, et qu'en même temps elle nous pose à son tour des questions troublantes.

Il est essentiel de nous confronter à cette démarche d'exploration et de réflexion ne serait-ce que pour d'abord savoir vraiment de quoi on parle.  Les statistiques de toutes sortes peuvent être très utiles pour établir des perspectives, mais elles ne peuvent pas remplacer l'expérience directe du contenu de la pornographie. Il est essentiel ensuite de chercher à savoir et à établir le plus clairement possible pourquoi nous dénonçons la pornographie au départ, quitte à réévaluer ces raisons au fil de notre démarche.

Nous voulons que nos actions aient un impact nouveau et ne soient pas ramenées aux anciennes querelles à l'intérieur desquelles nos droits furent toujours niés et ignorés:  le droit pour les femmes de disposer de leur corps, de définir leur sexualité et de refuser les modèles aliénants auxquels on voudrait les réduire, le droit pour tous d'être non pas des objets passifs ou des consommateurs solitaires mais des êtres sexuels autonomes en relation avec les autres.

Le besoin d'agir nous apparaît urgent et le recours aux lois ou à l'appareil judiciaire peut nous sembler inévitable;  c'est dans un tel contexte qu'il faut voir à ce que nos efforts ne servent pas à d'autres fins que celles que nous poursuivons et que les moyens de contrôle que nous souhaitons ne se retournent pas finalement contre nous, aux mains d'autres pouvoirs.  Car la pornographie est plus que jamais une question de pouvoir.  Son développement actuel n'est pas le signe d'une libération ou d'un affranchissement.  Il correspond plutôt au durcissement d'un pouvoir économique et social qui veut réaffirmer avec violence que la place des femmes dans notre société est encore celle d'objets de consommation et que, comme d'autres biens, elles peuvent être "jetées après usage".

Il faut enfin se rappeler que les tribunaux et les lois ne régleront pas le fond du problème.  Qu'il soit largement étalé ou qu'il circule dans le noir, le message de la pornographie reste le même. Il faudra nécessairement trouver d'autres niveaux d'intervention pour espé- rer un changement fondamental à moyen et à long terme.

Le thème de la protection des mineurs aux plans de l'accès à la pornographie et de l'exploitation des enfants dans l'industrie pornographique est apparu à plusieurs comme une question prioritaire sur la- quelle des actions devaient être entreprises immédiatement.  Les deux raisons invoquées à cet effet sont, d'une part, la vulnérabilité parti- culière des jeunes face aux adultes qui cherchent à les exploiter, et d'autre part, l'impact sérieux des valeurs et des formes de rapports humains véhiculés par le matériel pornographique auprès des jeunes qui, bien souvent, ne bénéficient par ailleurs d'aucune autre source d'information et d'éducation sexuelle.

Sur ce plan encore une fois, il serait inconséquent et surtout illusoire de vouloir retourner en arrière en engageant un combat "pour la moralité" et contre les droits sexuels des jeunes.  Il n'en reste pas moins qu'il faut s'attaquer au problème, et il importe par conséquent de relier nos actions à une nouvelle problématique articulée autour de l'appropriation, de l'exploitation, de l'atteinte aux droits sexuels et à l'intégrité physique, et de la violence que nous voulons dénoncer.  C'est peut-être à cette condition que la lutte contre la pornographie débouchera vraiment sur un mouvement pour l'autonomie physique sexuelle et sociale de chacun de nous .

POURQUOI PROTEGER LES MINEURS?

Maurice Barker
Psychologue
Section aux adolescents
Département de Pédiatrie
Centre Hospitalier Ste-Justine

Alors que le Ministère de la Justice du Québec, le Ministère des Affaires sociales du Québec, le Comité pour la Protection de la jeunesse et le Conseil sur le Statut de la femme organisent des colloques de septembre 79 à janvier 80 sur la violence et la pornographie, il devient maintenant important d'être conséquent et de stimuler une volonté politique d'appliquer les lois et règlements et de surveiller leur application dans le domaine de la pornographie.  La conscience sociale des citoyens exige de leurs représentants qu'ils assument une responsabilité sociale face à la pornographie.

Cette responsabilité sociale devient très réelle dans la pers- pective des mineurs qui, par définition, ne peuvent assumer la responsabilité des effets de la société sur eux.

Pourquoi protéger les mineurs? Non seulement parce qu'ils ne sont pas responsables de la société dans laquelle ils vivent, mais plus encore parce qu'ils sont vulnérables, beaucoup plus vulnérables que les adultes.  Les mineurs sont vulnérables parce que ce sont des êtres en développement et, de ce fait, méritent notre vigilance et notre respect.  Le terme "mineur" est donc abandonné puisqu'il est condescendant et substitué par enfant ou adolescent selon le cas.  Les enfants se développent, c'est une affirmation presque redondante.  Il faut par contre rappeler que spécifiquement la sexualité se développe durant l'enfance qui emmagasine dans sa mémoire une multitude d'expériences, de fantaisies, d'attitudes, de goûts, d'idées et d'émotions qui prendront une très grande importance à l'adolescence.  Les enfants, comme les poissons qui emmagasinent et accumulent le mercure, emmagasinent la pollution pornographique que notre société tolère.

La vulnérabilité des enfants devient visible lorsque la puberté métamorphose biologiquement l'enfant en jeune adulte qu'on appelle adolescent.  Il faut reconnaître que tout organisme qui se développe, déploie beaucoup d'énergie à accomplir sa croissance et donc devient plus vulnérable aux adaptations qu'exige son environnement. Préoccupé à se développer, il devient temporairement une cible plus facile. L'adolescent se développe physiquement, mais il n'y a pas que ce développement.  Il y a de nombreux développements à l'adolescence et chacun rend l'adolescent d'autant plus vulnérable.  Les parents connaissent très bien les inquiétudes que suscitent les transformations majeures au niveau de l'intensité extraordinaire des émotions, des humeurs très variables, du caractère qui se forge une identité personnelle.  Les professeurs connaissent très bien les frustrations et le plaisir de reconnaître l'énorme différence entre les étudiants du primaire et du secondaire, de même que les changements qualitatifs importants au niveau de la pensée qui permettent la progression des Tintins jusqu'aux éditoriaux du Devoir.  Tous les membres de la société identifient immé- diatement les adolescents qui attribuent une importance considérable à leurs amis, qui ont une créativité débordante quand ils ne sont pas blasés, qui s'habillent d'une façon particulière, qui apprécient des genres de musique parfois très singuliers [l'm black and blue and I love it - Rolling Stones].  Les citoyens regardent avec méfiance les bagues multiples, les coiffures, les comportements parfois insultants ou arrogants.  Tous reconnaissent les adolescents et chacun y voit une ou plusieurs dimensions de l'humain en développement, que ce soit la puberté biologique, les émotions, la socialisation, le jugement moral, la sexualité, la personnalité ou l'intelligence. Toutes ces sphères se développent simultanément et souvent avec bien peu d'harmonie. L'adolescent est donc un être en développement et, à ce titre, vulnéra- ble en soi.

En examinant de plus près le développement de la sexualité à l'adolescence, il est utile de la considérer en tant que fonction, fonction comme celle de la respiration ou de la digestion, mais une fonction qui se développe tardivement par rapport aux autres, au plan de la conscience.  C'est la puberté qui éveille cette conscience et l'adolescent est presque gêné d'être le dernier renseigné sur sa sexualité.  Timides au début, ils et elles apprennent les bases dé leur sexualité en se regardant de loin, en s'explorant de plus près, par l'éducation, par imitation, par les modèles parentaux et sociaux, par les amis, par les média  incluant la pornographie.

La sexualité n'est pas fragile en soi, mais le moment que la nature a choisi de l'actualiser par apprentissage correspond aujourd'hui à une adolescence qui s'étend de 12 à 18 sinon 25 ans.  La puberté rajeunit de trois mois à tous les dix ans depuis le début du siècle, tandis que l'autonomie éducative et financière continue à retarder.  Il en résulte une prolongation inquiétante de l'adolescence vulnérable aux modèles d'imitation.

Les adolescents ne sont pas à blâmer ni responsables de leurs explorations et apprentissages. Même les adultes en 1973, en se référant à la Commission d'enquête présidentielle américaine sur l'obscénité et la pornographie, ne pouvaient pas conclure au fait que la pornographie entraîne un comportement déviant ou délinquant. Par contre et heureuse- ment, les conclusions de cette commission basées sur l'absence de recher- ches concluantes ont stimulé un grand nombre de recherches qui sont aujourd'hui concluantes.

Pour n'en citer que quelques-unes, pour rappeler au gros bon sens ce qu'il sait depuis toujours [souvenons-nous que l'astre non décou- vert par 1'astrophysicien existe quand même] voici quelques exemples.

Rappelons : FREUD, S.

- la sexualité est teintée d'agression chez l'homme qui désire séduire.  L'instinct de libido et l'instinct d'agression sont intimement liés dans l'inconscient.

MALAMUTH, N.  [Université du Manitoba]

  • la lecture de passages erotiques entraîne des réac- tions plus agressives que la lecture de passages neutres.
  • être vu visionnant un film extrêmement érotique anxiogène et gênant inhibe l'agression à cause de l'anxiété et de la gêne.
  • une histoire fictive de viol où la victime souffre pour finalement succomber et prendre un plaisir sexuel au viol inhibe carrément les femmes au plan sexuel mais stimule les hommes.
  • une exposition antérieure à du matériel sadomaso- chiste permet à l'homme d'être excité sexuellement à un viol où la victime n'a aucun plaisir, démon- trant ainsi que la pornographie sadomasochiste facilite l'interprétation de la douleur en terme de plaisir sexuel.

Tout ceci se résume facilement pour l'adolescent vulnérable de par ses multiples développements:  la violence erotique s'apparente à un livre ou un film éducatif où la juxtaposition de violence avec excitation sexuelle et satisfaction CONDITIONNE une réponse agressive à un stimulus erotique.  C'est donc dire que la pornographie avec vio- lence montre à nos adolescents, consciemment ou pas, bon gré mal gré, à réagir avec violence dans le domaine de la sexualité.

L'adolescent qui apprend et découvre 1'érotisme fait peu de distinction entre érotisme et pornographie et obscénité.  Même les adultes, comme en témoigne un récent congrès à Vancouver, ont peine à faire ces distinctions.  Mais il est important de répondre à la ques- tion suivante:  la pornographie est-elle psychologiquement malfaisante pour l'adolescent qui se développe? Et si la réponse est affirmative, il faudrait alors conclure que la pornographie est obscène pour les adolescents . La pornographie stimule la lascivité, la pornographie teintée de violence va certes au delà des standards quant à la repré- sentation de la sexualité et enfin si cette pornographie peut conditionner une réponse agressive dans une situation erotique, elle n'a aucune valeur sociale pour l'adolescent.  Il faut donc conclure que la pornographie répond aux critères de l'obscénité à l'adolescence.

Il faut conclure d'une façon plus large que la pornographie est nocive pour les mineurs, qu'elle existe dans notre société, que nous avons les outils juridiques et législatifs pour agir et que donc, il ne nous manque que la volonté politique d'assumer notre responsabilité sociale face aux mineurs. .. Et c'est pour ça qu'il faut protéger les mineurs.

FESHBACH, S., MALAMUTH, N., Sexual aggression: proving the link.  Psychology Today, Nov. 78, 111-122.

COMITE DE LA PROTECTION DE LA JEUNESSE:  La prostitution des jeunes? Connais pas.

DONNERSTEIN, E., HALLAM, J., Facilitating effects of erotica on aggression against women, Journal of Personality & Social Psychology, 1978, 36, 1270-77.

SHEARIN, R.B., Pornography and the adolescent good or bad? Journal of current adolescent medicine, July 1980, p. 11.

FREUD, S., Five essays on sexuality.

PARAMETRES LEGAUX:  EXPLOITATION SEXUELLE DES MINEURS

M Andrée Ruffo Mondor Avocate
Avec la participation de Me Nicole Trudeau-Bérard pour la section concernant le cinéma

Dans le cadre de ce colloque de la FFQ, il nous semble important de prendre connaissance du cadre juridique dans lequel nous évoluons lorsque nous parlons du phénomène de la pornographie en termes d'accès des mineurs au matériel et spectacles pornographiques et de participation de ceux-ci à ces mêmes spectacles et matériel;  nous voulons aussi prendre connaissance du cadre juridique relatif aux phénomènes rattachés à la pornographie comme les danseurs nus et la prostitution des mineurs, etc...

Nous n'avons pas la prétention de faire une étude exhaustive des dispositions légales en la matière, mais plutôt de celles qui nous permettront ensemble de préciser les moyens d'action dont nous disposons pour contrer cette triste réalité et élaborer une stratégie efficace.

Il faut préciser que le législateur a fixé des cadres face à l'exercice de la liberté des citoyens.  Quant aux questions qui nous préoccupent, il convient de se redire que le seuil de tolérance de notre société a été largement dépassé même en tenant compte de l'évo- lution rapide qu'a connue cette communauté depuis les dernières années. Il est également probable que quelques problèmes spécifiques ne se soient soulevés que depuis récemment.  Comment l'application de certaines dispositions législatives peut-elle être efficace dans ces cas-là?

Accès et participation

Vente de matériel pornographique et accès aux "sex-shops"

A notre connaissance, il n'existe aucune disposition spécifique interdisant la vente aux mineurs de matériel pornographique. Il en est de même quant à l'accès des mineurs aux "sex-shops". Il conviendrait

Directive "concernant l'application du Code criminel relative- ment aux revues et journaux pornographiques" émise par le Ministère de la Justice du Québec le 25 novembre 1977.

dans ces cas-là de réglementer spécifiquement la vente et l'accès des mineurs à ce matériel ou aux établissements "spécialisés" dans ce domaine.

Il est à noter qu'il existe une directive concernant l'accès des mineurs dans les "sex-shops".  Une directive cependant n'a pas force de loi;  elle ne lie que les personnes soumises à l'autorité du ministère qui l'émet.  Elle ne lie pas le public en général.

Cinéma

Actuellement, il appartient au Bureau de surveillance du cinéma de décréter quel film ne porte pas atteinte à l'ordre public et aux bonnes moeurs et d'autoriser sa projection en indiquant à quelle catégorie il s'adresse:

a)  "Film pour tous" spectateurs de tous âges;

  • "Film pour adolescents et adultes" spectateurs âgés d'au moins quatorze ans ;
  • "Film réservé aux adultes" spectateurs âgés d'au moins dix-huit ans.

Le Bureau peut aussi, conformément aux règlements, autoriser la projection d'un film offrant un intérêt spécial pour une catégorie particulière de spectateurs, au moyen d'un visa spécial indiquant la catégorie de spectateurs devant laquelle il peut être projeté ainsi que les endroits et les moments où il peut l'être.

Soulignons ici qu'on ignore les critères selon lesquels une autorisation de projeter un film est donnée.  Le système de classifi- cation des films prévu par la Loi sur le cinéma  est essentiellement conçu en fonction de catégories de spectateurs déterminées par l'âge.

La loi prévoit des peines pour le propriétaire de cinéma dans les cas suivants :

a)  projection d'un film sans autorisation;

Loi sur le cinéma, S.R.Q. 1964 1964, c. 55 (modifiée par L.Q. 1967, c. 22).

b)  n'affiche pas la catégorie de spectateurs dans laquelle le film a été classé.

Il est alors passible d'une amende de pas moins de 500$ et, à défaut de paiement de l'amende et des frais, d'un emprisonnement de trois mois.

En ce qui concerne l'accès des mineurs aux salles de cinéma, la loi prévoit que:

art. 19.  Nul ne peut admettre à une séance de projection dans une salle de cinéma:

  • une personne âgée de moins de dix-huit ans s'il y est projeté un film réservé aux adul- tes ;
  • une personne âgée de moins de quatorze ans s'il y est projeté un film pour adolescents et adultes ou un film réservé aux adultes.

Le contrevenant s'expose alors à une peine n'excédant pas 50$ et, à défaut de paiement de cette amende, à un emprisonnement n'excé- dant pas un mois et, en cas de récidive, à une amende d'au moins 50$ et d'au plus 100$ et, à défaut, à un emprisonnement n'excédant pas 2 mois.  Le magistrat peut dans tous les cas annuler la licence.

Cependant, la loi prévoit aussi un moyen de défense qui rend à toute fin pratique l'application de la loi impossible.  En effet, l'accusé n'encourra aucune peine s'il prouve qu'il a usé de diligence raisonnable pour constater l'âge du mineur avant de l'admettre dans la salle de cinéma et qu'il a eu raisonnablement lieu de croire que ce mineur avait l'âge requis pour y être admis.

Dans le projet de Loi sur le cinéma no  20,  la classification reste sensiblement la même mais on augmente les amendes:

art. 126. ... d'une amende d'au moins cent dollars et d'au plus mille dollars dans le cas d'un individu et d'au moins cinq cents dollars et d'au plus deux mille dollars dans le cas d'une corporation ou d'une

Projet de Loi n° 20 sur le cinéma.

société et, en cas de récidive, d'une amende d'au moins deux cents dollars et d'au plus cinq mille dollars dans le cas d'un individu et d'au moins mille dollars et d'au plus dix mille dollars dans le cas d'une corporation ou d'une société.

On remarque cependant que l'alinéa 2 de l'article 21 de la loi actuelle qui permet l'annulation de la licence a disparu dans le nouveau projet de loi.

Affichage

En ce qui concerne l'affichage ou annonces des films, la loi prévoit que:

art. 24.   Il est loisible au lieutenant-gouverneur en conseil d'établir et d'organiser, sous le contrôle et la direction du Bureau, un sys- tème de censure des affiches, panneaux-réclame ou autre mode servant à annoncer une repré- sentation théâtrale ou une représentation ciné- matographique;  d'adopter des règlements à cette fin;  de prescrire les honoraires pour l'examen d'iceux, par le Bureau, et de nommer le personnel nécessaire et de pourvoir à sa rémunération.

Le nouveau projet de Loi sur le cinéma n° 20 prévoit que toutes réclames pour un film notamment au moyen d'un film, annonce ou d'une affiche doivent être approuvées au préalable par la Régie.  "La Régie approuve une réclame si elle est d'avis qu'elle est conforme aux exi- gences de la catégorie 'Tous âges1".  Ce qui pourrait nous sembler être une amélioration nous laisse songeur quand le président du Bureau de surveillance affirme que "le Bureau classifie 'Pour tous' un film (ou annonce) qu'il juge pouvoir être vu par le Québécois-type de tous âges".  Selon le Bureau, "il ne faut pas croire que la catégorie 'Pour tous' convient nécessairement à la famille et aux enfants.... Lorsqu'un film est ainsi qualifié, cela veut dire qu'il n'est pas en mesure de nuire et de causer des traumatismes".

Nous faisons nôtres les commentaires du Protecteur du citoyen

Onzième rapport du Protecteur du citoyen (1979), pp. 51-55.

qui dénonce le fait que des critères de classification soient inexis- tants et trouve regrettable que le Bureau de surveillance, organisme public, ne mette pas par écrit les points de repère qu'il se donne et cela dans un but d'uniformité et de protection tant pour lui que pour tous les citoyens, de sorte qu'il soit possible d'en vérifier la teneur et surtout l'application.

De cette analyse tant de la loi actuelle que du projet de Loi sur le cinéma n° 20, on doit constater des difficultés d'application du point de vue du contrôle de l'accès des mineurs aux salles de cinéma, De ce fait, le Bureau de surveillance dans son rôle d'autorisation de projection et de classification des films a une responsabilité sociale importante.  Ce qui nous amène à souhaiter que les critères d'autori- sation et de classification soient énoncés clairement et publiquement et à recommander que la composition du Bureau de surveillance ou de la nouvelle Régie proposée par la Loi sur le cinéma n° 20 soit modifiée de manière à comprendre une représentation adéquate des divers milieux socio-économiques.

Enfin l'autre problème majeur, à notre avis, c'est l'utilisa- tion des mineurs dans la pornographie.

Malgré les dénonciations répétées de cette situation, et malgré le fait qu'il existe des dispositions législatives qui ne demandent qu'à être appliquées, les résultats sont loin d'être spectaculaires.

Nous allons examiner les dispositions législatives en question à travers des situations particulières.  Ceci nous permettra de jauger non seulement la pertinence de ces dispositions, mais aussi la volonté réelle d'intervenir dans des situations éhontées d'exploitation des mineurs.

Nous aborderons plus spécifiquement la situation des spectacles et revues obscènes, et ensuite celle des danseurs(ses) nus(es) et de la prostitution, et ce, à travers les paramètres légaux.

Ceci nous apparaît d'autant plus important dans la mesure où chacun pourra réaliser que de nombreux outils sont à notre disposition et que, malheureusement, personne n'a appris à les utiliser.

1.  Les revues obscènes

De nombreuses personnes se sont penchées sur ce problème, notamment l'ancien sous-ministre à la Justice, Me François Tremblay, et Me Jean-François Dionne, substitut du procureur général du Québec lors d'une mission en Europe, concernant la prostitution et la pornographie.  Cette mission recommandait dans son rapport l'intervention dans les domaines où les mineurs étaient impliqués (p. 63).  Dans les autres cas, le rapport suggérait un statu quo vu la tradition de permissivité reconnue jusqu'alors de nos différentes administrations.

Ceci nous permet de croire que, politiquement, une intervention n'est pas souhaitée.

Cependant, nous reposons la question de la pertinence de la tolérance surtout en ce qui concerne l'accessibilité au matériel pornographique .

L'article 159 du Code criminel crée une infraction pour quiconque rend accessible du matériel obscène ou pornographique:

Art.159 C.cr. (1):  Commet une infraction quiconque

"a"  produit, imprime, publie, distribue,

met en circulation, ou a en sa. posses- sion aux fins de publier, distribuer ou mettre en circulation, quelque écrit, image, modèle, disque de pornographie ou autre chose obscène, ou

"b"  produit, imprime, publie, distribue, vend, ou a en sa possession aux fins de publier, distribuer, ou mettre en circulation, une histoire illustrée de crime.

(2):  Commet une infraction, quiconque, sciem- ment et sans justification ni excuse légitime,

"a"  vend, expose à la vue du public, ou a en sa possession à une telle fin, quelque écrit, image, modèle, disque de pornographie ou autre chose obscène,

"b"  publiquement expose un objet révoltant ou montre un spectacle indécent,

"c"  ...

Rapport de Mission en Europe concernant 1'obscénité et la pornographie chez les mineurs, Me J.-F. Dionne, 1977.

"d"  annonce quelque moyen, indication, médicament, drogue ou article ayant pour objet, ou représenté comme un moyen de rétablir la virilité sexuelle, ou de guérir des maladies vénériennes ou maladies des organes génitaux, ou en publie une annonce.

Art.159 C.cr. (8): Aux fins de la présente loi, est réputée

obscène toute publication dont une carac- téristique dominante est l'exploitation indue des choses sexuelles, ou des choses sexuelles et de l'un quelconque ou plu- sieurs des sujets suivants, savoir:  le crime, l'horreur, la cruauté et la vio- lence .

Art.161 C.cr.    : Commet une infraction quiconque refuse de

vendre ou fournir à toute autre personne des exemplaires d'une publication pour la seule raison que cette personne refuse d'acheter ou d'acquérir de lui des exemplai- res d'une autre publication qu'elle peut, dans son appréhension, considérer comme obscène ou comme histoire illustrée du crime.

Art.163 C.cr. (1): Commet une infraction, quiconque, étant le

locataire, gérant ou agent de théâtre, ou en ayant la charge, y présente ou donne, ou permet qu'y soit présenté ou donné, un spec- tacle, un divertissement ou une représenta- tion immorale, indécente ou obscène.

(2): Commet une infraction, quiconque participe comme acteur ou exécutant, ou aide en n'im- porte quelle qualité, à un spectacle, à un divertissement ou à une représentation immo- rale, indécente ou obscène, ou y figure de la sorte, dans un théâtre.

Notion d'obscénité

L'on emploie souvent, pour parler de publication ou de spectacle, le mot pornographique que l'on ne retrouve pas cependant dans le Code criminel.  Lorsque le Code criminel emploie indifféremment les mots obscène, indécent, ou immoral, il faut noter que seul le mot obscène y est défini [voir plus haut définition de l'article 159 (8). Cette dernière définition ne fut introduite au Code criminel qu'en 1959.  Avant que le législateur n'ait formulé cette définition, les Cours de justice, lorsqu'elles devaient déterminer les caractères obscènes ou non obscènes d'une publication, s'appuyaient sur la déci- sion rendue dans Rex vs Hykling (1868) 11.L.R.3Q.B.360.  Le critère de cette décision était la tendance à corrompre; il est formulé à la page 360 de ladite décision;  il est devenu, par la suite, un test classique.  Depuis que le législateur a défini le mot obscène dans le Code criminel, le critère établi dans la cause Rex vs Hykling n'a plus cours.

Pour qu'une publication soit obscène, il faut donc que la caractéristique dominante de celle-ci soit "l'exploitation indue des choses sexuelles, ou des choses sexuelles et de l'un quelconque ou plusieurs des sujets suivants:  le crime, l'horreur, la cruauté, et la violence".

Il est intéressant de remarquer que le Code criminel emploie indifféremment les mots immoral, obscène ou indécent, alors que ces trois mots ne sont pas synonymes;  il existe en effet une différence de degré entre les trois.  Dans l'arrêt de La Reine vs Roger Soublière 1976 C.S.P. page 1014, le juge Roger Lagarde écrivait à ce sujet:

Dans l'échelle des concepts, "indécent" serait placé au bas de l'échelle, de sorte qu'un spec- tacle indécent n'est pas nécessairement obscène. Alors qu'un spectacle obscène doit être indécent. Un acte ne devient pas non plus immoral parce qu'il est indécent.  A la page 1014, le juge Lagarde poursuit en disant:

Selon Robert, "l'indécence" c'est ce qui est contraire à la décence;  c'est ce qui "choque", blesse, déplaît ou offense la décence;  c'est également synonyme de "déplacé", "grossier", "inconvenant".

On doit enfin se référer aux standards cana- diens de la décence dans la communauté au Canada et non se référer au mot "obscène" prévu à 1'article 159(8) .

Le test de l'indécence consiste à se demander si le spectacle offert offense les standards recon- nus canadiens de décence.

Ce ne sont pas ceux qui font preuve du plus mauvais goût ou d'un manque d'intérêt à la communauté, pas plus que ceux d'ailleurs qui sont rigides ou austères qui forment les nor- mes de la société.  On doit découvrir ce que la communauté canadienne dans sa majorité pense et ressent.

Comment alors déterminer les standards canadiens contemporains?  Dans l'arrêt La Reine vs Philippe Prud'homme C.S.P. No. 724691, Monsieur le juge Paul Bélanger exprimait les difficultés inhérentes à cette détermination:

Il est évident que le problème le plus difficile en appliquant la définition de l'obscénité est de déterminer les standards de tolérance de la communauté actuelle.

Le tribunal est bien au fait qu'il doit se garder de faire prévaloir ses goûts personnels en pareille matière et d'ériger ses opinions en principes juridiques, qu'il doit distinguer très nettement ses propres goûts d'avec les standards de tolérance de la communauté.

Dans un jugement maintenant devenu une autorité en la matière, l'Honorable Juge Freedman de la Cour d'Appel du Manitoba a déterminé les critères que l'on doit rechercher pour définir ces stan- dards canadiens.  Il s'agit de l'arrêt The Queen vs Dominion News & Gifts (1962) Ltd. (1963) 2 C.C.C. 103, 40 C.R. 109.

Le juge Freedman dans la détermination de ses critères s'est référé au concept exprimé par le juge Lagarde à l'effet "qu'on doit découvrir ce que la communauté canadienne dans sa majorité pense et ressent".

Le juge doit donc se demander si la communauté actuelle a atteint un seuil de tolérance relativement à ces publications ou spec- tacles .

Application de la loi

Ceci revient à dire qu'il appartient au juge de définir les normes de la communauté canadienne.  Il faut sérieusement poser la question de la prévention, de préférence à la répression.

Un comité représentatif de la communauté pourrait établir des normes acceptables quant à la vente, la distribution, la publication et l'importation d'un tel matériel avant que quiconque ne se retrouve dans l'une des situations énumérées aux articles 159 à 163 du Code criminel.

Il semble, en effet, qu'il serait légitime pour quiconque de demander l'intervention du tribunal en cas de désaccord. Ceci nous apparaît d'autant plus logique que ces dispositions trouvent rarement application dans la pratique.

Qui oserait, dans ce contexte, porter plainte, sans passer pour un rétrograde, un puritain outré?  Cependant, lorsque la porno- graphie est illustrée dans un contexte de violence et de cruauté, nous nous permettons d'être étonnés devant l'inaction flagrante de nos représentants.  Comment prôner l'égalité de tous et, du même coup, permettre que l'on insulte et bafoue des personnes, des enfants et de plus en plus des hommes sous prétexte de libéralité?  La société doit choisir ses priorités.

La directive de l'ancien sous-ministre associé aux Affaires criminelles, Me François Tremblay, émise en janvier 1978, limite sin- gulièrement l'application du Code criminel et confirme nos prétentions et nos préoccupations à ce sujet:

D-l  Lettre annexée aux "directives"

QUEBEC, 24 janvier 1978

AUX DISTRIBUTEURS DE JOURNAUX Messieurs,

Nous vous faisons parvenir une copie de cer- taines directives que nous avons adressées aux substituts du Procureur général.

Nous vous demandons votre coopération afin de suivre ces directives, et je vous prie de vous gouverner en conséquence.

Le sous-ministre associé aux affaires criminelles,

FRANÇOIS TREMBLAY

"Directives" proprement dites

ANNEXE POUVANT ETRE DISTRIBUEE S'IL Y A LIEU CONCERNANT LES REVUES ET JOURNAUX PORNOGRAPHIQUES

Nous allons diviser les catégories de revues et journaux en trois parties, afin de mieux déter- miner dans quels cas il y aurait lieu de procéder devant les tribunaux ou non.

A.   Les catégories d'obscénité ci-après définies sont considérées comme une violation évidente des valeurs traditionnelles et des moeurs de la société et peuvent faire l'objet de pour- suites :

  • Toute publication qui contient des images d'actes sexuels accompagnés de violence (incluant le sadisme, le masochisme et autres actes de même nature);
  • Toute publication qui contient des images de bestialité;
  • Toute publication qui contient des images d'activités sexuelles impliquant les en- fants .

B.   Quant aux revues reconnues comme "Hardcore" (i.e. foncièrement pornographiques, outra- geant, répugnant à tous) qui ne sont pas englobées par les critères ci-dessus mention- nés :

  • Ces revues ne peuvent être vendues à des mineurs ou leur être accessibles;
  • Ces revues vendues dans certains établis- sements doivent être enveloppées de façon à ce qu'elles ne peuvent être feuilletées au comptoir.  Ces commerces doivent s'assu- rer que l'étalage de ce matériel n'est pas à la vue du public de l'extérieur du maga- sin .

G.   Quant aux revues reconnues comme "Softcore" (i.e. pornographiques mais acceptables par une bonne partie de la population), ces re- vues ne doivent pas être vendues ni être accessibles aux enfants de moins de 14 ans.

La protection des mineurs étant notre souci premier, nous comptons sur la collaboration des commerçants afin d'atteindre les buts que nous nous sommes fixés.

Vous êtes priés de noter que l'on doit interdire complètement l'accès aux mineurs dans les établissements spéciaux dits "sex shops".

QUEBEC, 25 novembre 1977.

FRANÇOIS TREMBLAY

Sous-ministre associé aux affaires criminelles.

Dans la cause La Reine vs Claude Perron, cause numéro 1810723 de la Cour municipale, la défense s'est même appuyée sur ladite direc- tive pour convaincre le juge de son innocence.  Cette directive a pour effet de rendre non applicable la partie de l'article 159 du Code criminel relative aux publications obscènes, indécentes ou immorales, autres que celles qui ont trait à des actes sexuels accompagnés de violence, de bestialité ou encore contenant des images sexuelles impli- quant des enfants.  Ce qui veut dire que les revues reconnues comme "Hardcore", foncièrement pornographiques, outrageantes, répugnantes en tout, non comprises par les critères énumérés, à savoir:  violence, bestialité, ou enfant, pourront circuler librement.  Il est cependant recommandé que ces revues ne soient pas vendues aux mineurs et que lorsqu'elles sont vendues dans certains établissements qu'elles soient enveloppées de façon à ce qu'elles ne puissent être feuilletées au comptoir, et qu'elles ne puissent être vues du public de l'extérieur du magasin.

Ce qui sous — entend que, lorsqu'on satisfait aux conditions énumérées au paragraphe b) de ladite directive, ces revues pourront être vendues et les personnes soumises à ces directives ne pourront saisir le matériel.  En conséquence, les revues reconnues comme "Hardcore" pourront être vendues, et effectivement sont vendues à des adultes, et ces revues à cause de cette directive ne seront pas saisies et aucune accusation ne sera portée.  Et pourtant, ces revues sont nettement obscènes, nettement indécentes, nettement immorales. L'on continue, grâce à une directive administrative d'un sous-ministre, à vendre ces revues, et à en faire un étalage public.

Il nous apparaît donc impérieux qu'une telle directive soit immédiatement retirée, puisqu'elle a pour effet la non-application du Code criminel.

Encore une fois, doit-on se dire, surtout à la lecture d'une directive semblable, que la volonté politique de faire cesser cette situation est inexistante?  Que faut-il pour convaincre nos dirigeants?  Il y a eu des dénonciations publiques, la population s'est prononcée, il y a eu les colloques sur la violence, il y a des péti- tions signées par des milliers de personnes, et encore ces revues continuent à circuler!

A ce colloque, nous donnerons-nous enfin des moyens d'action efficaces, réalistes, pour que cesse l'exploitation sexuelle de nos enfants?

2 .  Les danseurs(ses) nus(es)

Cette situation n'est ignorée de personne.  Nos représentants ont été saisis depuis longtemps de cette question.  Les journaux, la télévision, la radio, les mouvements de femmes, les groupes de parents ont non seulement sensibilisé ceux qui sont chargés de faire les lois et de les appliquer, mais aussi la population entière.

Nous sommes encore a nous demander où se situent les résultats .

Il est certes difficile d'agir lorsque nous avons affaire à une clientèle comme celle-ci, surtout caractérisée par son nomadisme.

Nous reprenons ici le portrait de ces jeunes qui, pour la plu- part, sont en fugue du foyer, et dont l'âge varie de 13 à 17 ans.  Ils sont engagés pour travailler comme danseurs(ses) nus(es) ou serveurs(ses) dans des débits de boisson.  Ils se présentent généralement à des agen- ces de placement qui les "bookent" dans différents hôtels de province. Ils travaillent 2 ou 3 jours dans tel hôtel, pour ensuite être conduits dans une autre région pour encore 2 ou 3 jours.

Ces jeunes voyagent habituellement par avion ou par autobus; ils sont parfois conduits en voiture par des employés de l'agence qui leur a trouvé ce "contrat".  L'agence reçoit un pourcentage du salaire du jeune, plus, dans certains cas, un montant forfaitaire du proprié- taire de l'hôtel.  Leur travail consiste à servir aux tables, danser nu ou presque, c'est-à-dire à faire 1, 2, 3 et même parfois jusqu'à 5 "strip-tease" durant la même soirée.  Les heures sont de 15hOO à 2hOO ou 2h30 du matin.

Ces jeunes, en quête d'aventures, certes, mais surtout à la recherche d'une identité, d'une autonomie, se voient propulser dans un monde où ils serviront à satisfaire les besoins des autres;   ils trouveront rarement une satisfaction aux besoins les plus fondamentaux qui n'ont pas été comblés dans leur famille, c'est-à-dire être voulus, aimés, respectés, valorisés.  Au contraire, la société, maladivement parfois, permettra que l'on exploite ces enfants.

Comment ne pas être sensible à la vue de ces jeunes qui se retrouvent presque toujours seuls dans un monde où le "métier de dan- seurs à go-go ne constitue en somme qu'un monde de production de la nudité la plus fraîche possible",  où cet enfant verra son jugement foncièrement faussé sur la hiérarchie des valeurs et confondra la véna- lité avec le fruit d'un travail honnête?2

Ces jeunes gagnent parfois de 800$ à 900$ par semaine et ne réussissent parfois jamais à épargner le moindre sou.   Les cachets alléchants offerts aux jeunes mineurs pour s'exhiber en public constituent de puissants appâts pour de nombreux adolescents et notamment pour l'enfant en fugue.4

Comment peut-on les convaincre de changer de milieu de travail?  Qu'auront-ils alors en partage?

La Reine vs Hôtel Victoria Lasarre Inc., No. 605-42-00001678 2La Reine vs Pierre Doyon, No. 500-42-000438-77.

3Rapport:  Colloques régionaux sur la violence, p. 72: "Elles deviennent vite asservies à la drogue, ce qui les contraint à poursui- vre leurs activités".

4Idem, p. 72:  "Elles sont difficilement récupérables lors- qu'elles ont pris goût à l'argent et à la drogue".

Dans notre mode de vie actuel, il est généralement considéré et admis que danser nu est un acte immoral1 et expose sérieusement un enfant à des dangers physiques et moraux.  Comment peut-on expliquer l'inertie des autorités, la complicité des adultes "bon père de famille" avec les personnes impliquées, l'impuissance des parents, la tolérance de cette société qui décrète l'année internationale de l'en- fant, et de ce législateur qui promulgue des lois pour le respect des droits de l'enfant?

Les lois

Les lois nous permettent d'agir.  De nombreuses dispositions législatives nous permettraient d'intervenir au niveau des enfants exploités;  elles n'ont malheureusement pas ou peu été utilisées à ce jour.  Rappelons la Loi des bureaux de placement où il semble clair que toutes les agences de placement s'occupant de trouver des con- trats aux jeunes dansant nus n'ont pas le permis requis par la loi et agissent illégalement.   Et pourtant, ces agences continuent toujours à opérer impunément.

La Loi des établissements industriels et commerciaux

Plusieurs articles de cette loi pourraient trouver application au niveau des mineurs exploités, par exemple, l'article 6 où l'on pré- cise que tout membre du personnel d'un établissement doit être âgé d'au moins 16 ans, l'article 15 qui stipule que les membres du personnel de moins de 18 ans ne peuvent travailler plus de 9 heures dans une journée; cette journée de 9 heures ne devant pas commencer avant 7 heures du matin, ni se terminer après 6 heures de l'après-midi. Que penser des jeunes qui commencent à travailler à 22 heures?  La presque-totalité de ces danseurs(ses) travaillent après 6 heures de l'après-midi.

La Loi sur les permis d'alcool

Suite à une intervention de Monsieur Claude Forget, ancien ministre des Affaires sociales, l'Assemblée nationale a amendé la Loi

1Cause R.J., un enfant, No. 0006123-783.

Cause de Claude Vignon vs Procureur général de la Province de Québec, No. 27002784769, en appel numéro 36, No. 0000028-772.

de la commission de contrôle des permis d'alcool afin de permettre des sanctions réalistes lorsqu'un jeune est trouvé dans un endroit où l'on vend des boissons alcoolisées.

Cette loi précise en effet à l'article 103.1 et 103.2 que:

  • Un détenteur de permis ne peut vendre des boissons alcooliques à un mineur.  Il ne peut non plus en vendre à une personne majeure s'il sait que celle-ci en achète pour un mineur.
  • Un détenteur de permis de brasserie, de taverne ou de bar ne peut admettre un mineur, permettre sa présence, l'employer, lui permettre de présenter un spectacle

ou d'y participer dans une pièce ou sur une terrasse de son établissement où des boissons alcooliques peuvent être vendues.

Dans les poursuites intentées en vertu de ces articles, le détenteur du permis devra prouver qu'il a agi avec diligence raison- nable pour constater l'âge de la personne et qu'il avait un motif raisonnable de croire que celle-ci était majeure.

Reconnu coupable d'avoir contrevenu à cette loi, ou à l'article 135 de la Loi sur la protection de la jeunesse ou encore à l'article 33 de la Loi sur les jeunes délinquants, le détenteur pourra voir son permis révoqué, ou suspendu (art. 86).  La Régie pourra aussi refuser de renouveler ledit permis (art. 55).

Bien que les jeunes ne puissent fréquenter des débits de bois- son, aucune disposition législative n'empêche ces jeunes d'assister à des spectacles à caractère pornographique (strip-tease, donné bénévo- lement pour cause philanthropique [hôpitaux], parades de mode erotiques, etc...) si ces endroits ne sont pas licenciés.

3.  La prostitution chez les mineurs

Bien que l'objet de notre colloque ne comporte pas spécifique- ment la prostitution, nous savons par ailleurs que généralement la pornographie favorise la prostitution et avons jugé utile à titre d'information, d'apporter quelques données sur cette problématique.

Le Rapport du groupe de travail sur la prostitution chez les mineurs1 nous permet de tracer un portrait qui indique que les filles font la prostitution pour trois raisons concurrentes:  la recherche de gratification, la satisfaction sexuelle, et la satisfaction affective.

La prostitution est organisée en réseaux par des adultes ou prend la forme de l'échange et de la circulation des jeunes filles entre adultes.  La prostitution est généralement hétérosexuelle et se fait autant dans des lieux privés que publics.  Il existe toutefois une prostitution homosexuelle chez les filles.

La prostitution des filles prend la forme du rapport sexuel direct;  cependant, pour de nombreux intervenants, elle se manifeste également dans la pornographie, les danses nues avec service aux tables, et certaines activités de photographie.  Le groupe ajoute que l'on ressent une frustration devant les propriétaires de club et d'agence de placement de danseuses nues qui, souvent, n'hésitent pas à envoyer les filles travailler à l'extérieur, en province, ce qui les rend plus facilement exploitables.

Le portrait du garçon prostitué nous permet une première cons- tatation:  il s'agit de la double réalité, prostitution pédophilie. La prostitution homosexuelle a ses règles propres et ses lieux.  On ne peut pas dire que les clubs gais constituent des réseaux de prostitution, mais plutôt qu'ils invitent à ce genre de rapport.

En général, les garçons se prostituent pour les mêmes trois raisons que les filles, soit: la gratification, la satisfaction sexuelle, et la satisfaction matérielle et affective.  Le garçon pros- titué est soit call-boy, serveur aux tables, danseur nu, ou encore le préféré d'un homosexuel qui le passe à d'autres adultes.

Comme nous pouvons le voir, la question d'exploitation sexuelle des danseurs nus est reliée aux problèmes de la prostitution.

En vertu du Code criminel, la prostitution des adultes n'est pas interdite;  c'est la sollicitation qui est plutôt défendue.  Le Code criminel mentionne à l'article 195.1 que:

toute personne qui sollicite une autre personne dans un endroit public aux fins de la prostitution,

1-Rapport du groupe de travail sur la prostitution chez les mineurs.  Service des impressions en régie. Ministère des communica- tions, Gouvernement du Québec, mars 1981.

est coupable d'une infraction punissable sous déclaration sommaire de culpabilité.

Cependant, lorsqu'on connaît la situation des jeunes s'adonnant à la prostitution, on est surpris que si peu de choses soient faites pour enrayer cette situation au niveau des adultes qui exploitent de telle façon les jeunes.  Il suffit de penser à l'article 33 de la Loi sur les jeunes délinquants relatif à la contribution à la délinquance impliquant l'immoralité sexuelle.  A notre connaissance, aucune plainte n'a encore été portée contre des adultes qui favorisent la prostitution des jeunes.

Au contraire, les jeunes eux-mêmes font l'objet de poursuites non pas en vertu de l'article 195.1 C.cr., mais plutôt en vertu de l'article 195.2 C.cr.  Combien de jeunes filles ont été accusées de tenir une maison de débauche parce qu'un adulte complaisant leur louait une chambre à bon prix?  Que fait-on des dispositions pertinentes con- cernant ces adultes?

Egalement, nous n'avons qu'à examiner l'article 195 h) et i) afin de nous convaincre qu'il faut avant tout décourager les adultes de ces pratiques :

Art. 195.1 C.cr.  Est coupable d'un acte criminel et

passible d'un emprisonnement de dix ans quiconque:

h)    aux fins de lucre, exerce un contrôle, une direction ou une influence sur les mouvements d'une personne de sexe féminin de façon à démontrer qu'il l'aide, l'encourage ou la force à s'adonner ou à se livrer à la prostitu- tion avec quelque personne en particu- lier ou d'une manière générale;

i)    applique ou administre, ou fait pren- dre à une personne du sexe féminin, quelque drogue, liqueur enivrante, matière ou chose, avec l'intention de la stupéfier ou de la subjuguer de manière à permettre à quelqu'un d'avoir avec elle des rapports sexuels illicites.

Face au phénomène grandissant de la prostitution chez les jeunes garçons, nous considérons que l'article 195 devrait être amendé de façon à les protéger.

Nous devons donc réaliser qu'il existe de nombreuses disposi- tions qui nous permettraient de pénaliser les adultes qui exploitent les jeunes .

Nous devons cependant constater que la volonté d'intervention est presque inexistante en ce qui regarde la participation des adultes à ce niveau.

CONCLUSION

Cet aperçu nous a permis de nous rendre compte de l'immense silence de nos représentants en terme d'action concrète, et ce, malgré l'éventail d'outils depuis longtemps mis à notre disposition.

Nous exigeons que des gestes concrets soient posés afin que soit respectée la personne dans toute sa dignité. Notre société qué- bécoise ne saurait tolérer de voir ses valeurs ainsi bafouées.

Nous exigeons également, en tant que parents responsables, que soient appliquées strictement les lois relatives aux adultes exploitant honteusement les enfants.

RECOMMANDATIONS

PRÉAMBULE

ESTIMANT que la pornographie est une question de marche et qu'un mar- che ne tient pas compte de l'intérêt public;

ESTIMANT que la pornographie attaque des valeurs essentielles:

  • en glorifiant le mépris et la violence,
  • en agressant la liberté de ceux qui ne veulent pas être des consommateurs involontaires de pornographie,
  • étant directement ou indirectement reliée à d'autres phénomè- nes comme la drogue, la prostitution et le crime organisé,
  • contrecarrant la liberté des parents à élever leurs enfants et le droit des enfants a être élevés dans un environnement qui leur permet un développement sexuel respectueux de la di- gnité humaine;

ESTIMANT que les mineurs, en raison même de leur âge, ne sont pas suffisamment mûrs pour être exposés à cette pollution, et qu'ils ont besoin d'une protection spéciale en cette matière;

ESTIMANT que l'Etat assure déjà à la jeunesse une protection spéciale dans d'autres domaines, notamment la consommation des boissons alcooliques, la possession d'armes a feu, le cinéma, le permis de conduire, la publicité destinée aux enfants, etc.;

ESTIMANT que les recommandations que nous vous proposons constituent un élément majeur de la protection des enfants du Québec;

Le comité organisateur du colloque "Volonté politique et pornographie?" propose à l'assemblée, une série de recommandations qui tiennent compte des aspects légaux du problème, des changements de mentalités, et du rôle de surveillance à assurer dans ce domaine.  Nous vou- lons que ces recommandations déclenchent une volonté politique d'action.

Nous demandons aux autorités fédérale, provinciale et municipa- les, selon leurs compétences respectives, de prendre les mesures néces- saires afin d'assurer que la pornographie soit rendue inaccessible aux mineurs, hors de leur vue et que l'utilisation des mineurs dans la com- munication pornographique soit strictement interdite.

ACCÈS A. VENTE, ÉTALAGE PUBLIC ET AFFICHAGE

CONSIDÉRANT qu'il n'y a aucune disposition légale spécifique qui inter- dise la vente aux mineurs de toute publication ou matériel à caractère pornographique ;

CONSIDÉRANT qu'il n'y a aucune disposition légale spécifique qui inter- dise l'accès des sex shops aux mineurs;

CONSIDÉRANT que les dispositions de l'article 159 du code criminel re- latives à la vente a l'étalage et à l'affichage ne sont pas appliquées;

NOUS RECOMMANDONS:

a)  ou bien que la vente des publications et du matériel à caractère pornographique soit interdite dans les établissements autres que les sex shops,

Que l'accès des sex shops soit interdit aux mineurs;

Que les propriétaires des sex shops soient détenteurs d'un permis spécial et que des sanctions rigoureuses soient prévues pour les contraventions à l'accès des mineurs à ces établissements;

b)ou bien que la vente des publications à caractère pornographique soit permise dans les établissements commerciaux où les mineurs ont accès,

Que ces publications soient interdites à l'étalage ou placées dans un étalage spécial et sous une forme spé- ciale, de sorte qu'elles ne puissent être vues par quiconque, ni de l'extérieur, ni à l'intérieur de ces établissements,

Que la vente de ces publications soit interdite aux mineurs;

Que la vente de tout autre matériel à caractère porno- graphique ne soit permise que dans les sex shops.

CONSIDÉRANT qu'il y a des placards, des affiches, des enseignes et d'autres formes de publicité qui transmettent le même message que les publications à caractère pornographique;

NOUS RECOMMANDONS:

Que les placards, les affiches publicitaires et les autres formes de publicité a caractère por- nographique transmis par les médias et/ou affichés dans les lieux publics accessibles aux mineurs, soit interdits.

CONSIDÉRANT la directive émise par le sous-ministre associé aux affaires criminelles en date du 25 novembre 1977;

CONSIDÉRANT que cette directive a pour effet la non-application d'une partie du code criminel

NOUS RECOMMANDONS :

Que le Ministre de la Justice retire cette direc- tive émise par son ministère.

B. SPECTACLES

CONSIDÉRANT que les dispositions de la loi sur les permis d'alcool - relatives à l'accès des mineurs dans les endroits où l'on vend des boissons alcooliques -  ne sont pas appliquées avec suffisamment de rigueur;

CONSIDÉRANT qu'il n'y a aucune disposition légale spécifique qui inter- dise l'accès des mineurs à des endroits où l'on présente des specta- cles à caractère pornographique lorsque ces spectacles sont présentés dans des établissements non licenciés;

NOUS RECOMMANDONS:

Qu'une législation spécifique interdise l'accès aux mineurs de tous les endroits où l'on présente un spectacle à caractère pornographique,

Que des sanctions rigoureuses soient prévues pour les contrevenants et particulièrement, les tenan- ciers de ces établissements;

CONSIDÉRANT l'influence du cinéma dans le processus d'intégration chez les jeunes des valeurs autant positives que négatives et des attitudes humaines ;

CONSIDÉRANT l'importante responsabilité sociale qui incombe au Bureau de surveillance du cinéma du Québec qui administre la loi sur le cinéma;

NOUS RECOMMANDONS;

Que l'accès des mineurs aux films classés "18 ans et plus" soit strictement contrôlé;

Que le Bureau de surveillance se donne des critères de classement des films et qu'il les fasse connaître au public;

Que le Bureau montre plus de vigilance au classement des films de même qu'aux autori- sations qu'il donne pour projeter des films qui peuvent porter atteinte à "l'ordre pu- blic et aux bonnes moeurs", et des autorisa- tions concernant les affiches, panneaux- réclames, annonces publicitaires des films autorisés.

PARTICIPATION ET UTILISATION DES MINEURS DANS LA COMMUNICATION PORNO- GRAPHIQUE  (revues, spectacles, films, etc.).

CONSIDÉRANT qu'il y a un nombre sans cesse croissant de mineurs utili- sés dans les spectacles (serveurs(ses) nus(es), strip-tease, etc.) et dans la production du matériel pornographique;

CONSIDÉRANT que l'article 135 de la loi sur la protection de la jeu- nesse et l'article 33 de la loi sur les jeunes délinquants, ainsi que les lois sur les établissements industriels et commerciaux et sur les permis d'alcool ne sont pas appliqués ou ne sont pas appliqués unifor- mément sur tout le territoire du Québec;

NOUS RECOMMANDONS:

Qu'une loi spécifique interdise toute utilisa- tion des mineurs dans la production de tout ma- tériel ou spectacle à caractère pornographique,

Que des sanctions sévères soient prévues pour les contrevenants (et spécialement pour ceux et celles qui utilisent ces mineurs -agences, intermédiaires de toutes sortes, propriétai- res d'établissement, photographes, etc.);

Qu'en attendant, les lois existantes soient ap- pliquées rigoureusement à la grandeur du Québec.

ORGANISMES DE SURVEILLANCE

CONSIDÉRANT que l'application des lois et règlements relatifs à la pornographie et a l'obscénité est presque impossible à cause de la dif- ficulté d'identifier les "normes" et le "consensus social" qui servent de base à la définition de ces termes;

NOUS RECOMMANDONS :

Que soit mis sur pied par les Ministères de la Justice fédéral et provincial, un comité conseil para-gouvernemental auprès des autorités judici- aires et autres organismes concernés, formé de représentants de divers milieux et groupes socio- économiques et des Ministères concernés, qui re- présenterait le plus fidèlement possible la société entière, et dont le mandat consisterait:

  • à définir ce qui est pornographique, pour sta- tuer dans tous les domaines qui peuvent être touchés (films, publications, spectacles, disques, etc.) et auxquels les mineurs ont accès,
  • à recevoir des plaintes et à en assurer le suivi,
  • à signaler aux autorités compétentes toute in- fraction aux lois et règlements concernant la pornographie,
  • à faire connaître au public ses avis,
  • à conseiller les Ministres dans toutes ques- tions se référant à son mandat.

CHANGEMENT DES MENTALITÉS, PRÉVENTION

CONSIDÉRANT qu'un changement de mentalité face au matériel pornogra- phique en général est essentiel, nous endossons la recommandation 75 du rapport des colloques régionaux sur la violence.

NOUS RECOMMANDONS;

Que les Ministères de la Justice fédéral et provincial, en collaboration avec les autres ministères concernés et des organismes privés, entreprennent une campagne d'information et de sensibilisation sur:

  • les lois et règlements touchant la pornogra- phie;
  • les possibilités de plaintes et de recours;
  • le phénomène de la pornographie;
  • l'escalade du phénomène et ses liens avec d'autres formes de criminalité;
  • la tolérance et l'encouragement de la porno- graphie .

CONSIDÉRANT que dans une société comme la nôtre, qui n'est pas de type autoritaire, l'Etat ne peut intervenir efficacement que dans la mesure où il reçoit un appui populaire concret;

NOUS RECOMMANDONS;

Que les associations et groupes qui ont appuyé la requête de la F.F.Q. et tous les autres inté- ressés par la protection des mineurs dans le do- maine de la pornographie, forment un front com- mun pour établir les stratégies d'actions néces- saires afin d'assurer que la pornographie soit rendue inaccessible aux mineurs, hors de leur vue, et que l'utilisation des mineurs dans la communica- tion pornographique soit strictement interdite.

ANNEXES

REQUÊTE

soumise par la FÉDÉRATION DES FEMMES DU QUÉBEC aux Ministre de  la Justice du Canada, Ministre de la Justice du Québec,

Hon.  Jacques Flynn Hon.   Marc-André  Bédard

au sujet de la réglementation de la vente  aux

mineurs et de l'étalage public des publications pornographiques

PROJET S'INSÉRANT DANS LE CADRE DE L'ANNÉE INTERNATIONALE DE L'ENFANT

Novembre 1979

Monsieur le Ministre,

Nous aimerions vous soumettre un problème qui nous préoccupe depuis bien longtemps:     soit celui des  journaux et des magazines  à caractère pornographique dont  l'étalage nous  crève les yeux chaque  fois que nous  entrons  dans  certains lieux publics,   spécialement les  tabagies,  les dépanneurs et les pharmacies.

Notre  démarche n'a pas pour but de se prononcer sur la nature pornographique ou non pornographique  de  cette littérature, non plus que  sur son caractère  légal ou illégal eu égard aux dispositions  du Code criminel.

Nous ne préconisons donc aucune  forme  de  censure dans  ce  domaine.    Nous  voulons établir ce  fait clairement dès le début.

Même  si nous  sommes  très sensibles,  au nom du respect de  la dignité humaine   (art.   4  de  la Charte  des  droits et libertés de  la personne),   à  l'utilisation de  la femme et de l'homme comme  simples objets  de  satisfactions  sexuelles,  notre propos n'est pas  de porter sur cette  difficile question  un jugement de valeur.     D'autres commencent,  heureusement,   à se pencher sur ce problème.

Par contre, nous sommes grandement préoccupés par le droit des enfants et des adolescents à un environnement qui leur permette un développement sain.

Or,  il  est impossible  à un enfant qui  veut  acheter du pain, du lait ou une  tablette  de chocolat de  ne pas  voir cette littérature  abondamment illustrée, et  toujours facilement  acces- sible  et bien en vue  tandis que  les bandes  dessinées et la littérature pour enfant sont  souvent  à l'abri  sur les  derniers rayons.

Les  "Playboys"   d'il y  a cinq  ans  sont devenus presque de  la littérature  "rose"   à côté  des   revues spécialisées  en  sodomie, flagellation,  bestialité,   sadomasochisme, nécrophilie qui ont littéralement  inondé  le  marché dernièrement.

Il   faut s'opposer  à  ce  que,  en  ce   domaine,   et surtout pour l'enfant,   le quotidien ne  devienne  la normale,   et  la normale 1a  norme.

Nous  pensons,   en  effet,  que  l'éducation  sexuelle revient,   de droit,   aux parents qui  doivent  la partager  avec l'école  et non  au colporteur de  matières  obscènes qui.pratique  une exploitation  indue  des choses  sexuelles.

L'étalage public de ce matériel aux yeux des enfants entre clairement en conflit avec ce droit; il en est de même de la vente et de la distribution aux enfants de ces matériaux.

L'article  39  de la Charte des droits et libertés de  la personne  affirme:     "Tout enfant  a droit  à la protection,   à la sécurité et  à l'attention que doivent  lui apporter sa famille ou les personnes qui en tiennent lieu".

C'est notre obligation en  tant qu'adultes de permettre aux enfants  d'atteindre  à la maturité  avec le plus  de chances  de l'obtenir;     or,   l'obscénité  représente l'immaturité.     Elle contrecarre  le  développement personnel.

Le Comité de recherche sur l'obscénité de la Commission de Réforme du Droit du Canada s'exprime en ces termes:

"C'est à bon droit que pour leur bien,  nous empêchons les bambins de  jouer avec  le  feu.     Ne pourrait-on tenir le même raisonnement  à propos de l'obscénité? Car même  si,  en dernière  analyse,  on doit choisir ses propres priorités et  s'engager comme on  le désire, encore  faut-il posséder assez   de maturité  pour ce faire.     Les  enfants  n'ont pas  encore  atteint ce degré de maturité et en  les exposant à l'obscénité on  risquerait peut-être  de  les  empêcher de l'atteindre  un jour. Le  libre  choix doit être protégé  de  toute influence susceptible  de  l'entraver".     Or,   "...   une exposition prématurée  à  l'obscénité  risque d'hypothéquer  les  options prises   à  l'âge  adulte.     Dans   ce  sens,   une forme  restreinte de paternalisme n'est pas en  conflit  avec  la liberté individuelle;     de  fait,   elle  contribue  à l'étayer".

Les  enfants  sont traités  différemment des adultes.     A l'heure actuelle,   il  sont protégés contre  l'exploitation et  la corruption  sur le plan moral  dans   certains  domaines  par  la loi  ou le pouvoir réglementaire.     L'accès  à certains   films,  par exem- ple,   leur est  refusé;     ils  ne peuvent,   avant  un certain  âge, acheter ou consommer des  boissons   alcooliques,   du  tabac, posséder une  arme  à  feu et  obtenir un permis  de conduire,   etc... La publicité  commerciale qui   s'adresse  aux enfants  sera interdite  à partir du 1er mars  1980.

Si  l'obligation  individuelle  de  protection  des  enfants   revient avant  tout  aux parents,   il  existe  aussi  une obligation collective  à assumer.     C'est pourquoi   la collaboration  de tous   ceux qui  y  croient est nécessaire  de  même que  celle  du gouvernement.

L'année 1979 est l'Année Internationale de l'Enfant.    Cette protection doit être une préoccupation constante des citoyens et citoyennes que nous sommes et des gouvernants que nous élisons .

La  réglementation de  la vente  et de  l'étalage public du matériel obscène permettra de montrer à nos  enfants que nous   les aimons  et  les  respectons  assez pour ne pas  accepter,   sans interdit,  qu'on leur présente  la sexualité  humaine départie  de ce qu'elle  a de  magique,  pour la réduire  à un phénomème  animal, mécanique,   violent,   souvent déviant, dépourvu de  respect,  de dignité et de  sensibilité.

Nous proposons  donc que  les  autorités provinciales, régionales et municipales  adoptent en matière  d'octroi  de permis, de  zonage et  de protection des  enfants,   des  lois,   des règlements,  en vue  de  s'assurer que  les  enfants et les adolescents n'auront pas  accès  au matériel pornographique.*

Cette proposition est dans  l'esprit des  recommandations provisoires  de  la Commission de Réforme  du Droit du Canada,   de la Commission  américaine  sur l'obscénité  et  la pornographie de  1970  et  dans   les  recommandations  du Rapport  du Comité permanent de  la Justice  et des questions   juridiques  de  la Chambre des Communes  en  1978.

Connaissant  l'état du droit et de  la  jurisprudence, nous  sommes  conscients  du  fait que  le Code  criminel  n'est pas actuellement d'un  grand secours pour remédier aux abus que nous dénonçons.     C'est pourquoi  nous  vous recommandons  d'agir dans le  cadre  de  vos   juridictions   respectives:     au niveau fédéral, un  amendement  au Code  criminel  s'impose,   et en matière d'application,   nous  demandons   au législateur québécois   d'agir en se basant  sur les pouvoirs  de  la province.     Celle-ci   a clairement  juridiction pour  légiférer en matière  de droit  de  la  famille,   de  protection de  la  jeunesse,   de  droit  civil et de  toute matière  d'intérêt  "purement privé, local"   et même   "provincial".

Cependant,   en tant que  citoyens   responsables,  nous insistons pour que   ces  publications   soient:

a)   ou bien   affichées   et  vendues   dans   des établissements   spé- cialisés,   du  genre   "sex  shops"   détenteurs  d'un permis spécial  à  cet  effet,   et  dont  l'accès  devra être  interdit aux mineurs;

* Tiré  du  "Troisième  Rapport sur  la Pornographie  à  la Chambre des Communes",   Fascicule  n°  18   (22  mars   1979)   par le Comité permanent  de   la Justice  et  des questions - juridiques. Recom- mandation    n°  8,  p.   10.

b)   ou bien qu'elles soient en vente libre même dans les établissements commerciaux où les mineurs ont accès, mais interdites  à l'étalage ou placées dans  un étalage spécial de sorte qu'elles ne puissent être vues par quiconque,  ni de  l'extérieur ni  à l'intérieur de  l'é- tablissement.

Copies de  cette  lettre et de cette  résolution sont expédiées au Solliciteur Général, Me Allan Lawrence;   au ministre du Revenu national du Canada,  Hon.  Walter Baker;   au ministre chargé de  la Condition  féminine,  Hon.  David MacDonald;   au ministre d'Etat à la condition féminine,  Hon.   Lise Payette; au ministre des Finances,  Hon.   Jacques Parizeau;   au ministre de l'Industrie et  du Commerce du Québec,  Hon.  Yves Duhaime; ainsi qu'au président de  la Commission de Réforme  du Droit, M.   Frank Muldoon,  c.r.

Sheila Abbey-Finestone

Présidente de la FÉDÉRATION DES FEMMES DU QUÉBEC

RÉSOLUTION

CONSIDÉRANT QUE la distribution et la vente des publications

pornographiques s'effectuent, au Québec, dans un grand nombre d'établissements commer- ciaux où les mineurs ont accès;

CONSIDÉRANT QUE ces publications sont étalées bien à la vue

du public, et donc des mineurs;

CONSIDÉRANT QUE les mineurs, en raison même de leur âge, ne

sont pas suffisamment mûrs pour être exposés à cette pollution;

CONSIDÉRANT QUE l'article 39 de la Charte des droits et

libertés de la personne du Québec décrête que:

"Tout enfant a droit à la protection, à la sécurité et à l'attention que doivent lui apporter sa famille ou les personnes qui en tiennent lieu.";

CONSIDÉRANT QUE la jeunesse a besoin d'une protection spéciale en cette matière;

CONSIDÉRANT QUE  l'Etat assure déjà à la jeunesse une protec- tion spéciale dans d'autres domaines compa- rables, notamment la publicité, la consomma- tion des boissons alcooliques, la possession d'armes a feu, le cinéma, le permis de conduire, etc.;

CONSIDÉRANT QUE l'année 1979 a été déclarée l'Année Inter- nationale de l'Enfant;

CONSIDÉRANT QUE  la pornographie incite à la violence envers

les femmes et les enfants;

CONSIDÉRANT QUE  la législation que nous vous proposons peut

constituer un élément majeur de la protection des enfants du Québec;

CONSIDERANT QUE  la F.F.Q. et de nombreux individus et associations appuyant ce projet, sont conscients de leur responsabilité et entendent l'assumer pleinement;

SUR RÉSOLUTION DÛMENT PROPOSÉE ET ADOPTÉE À L'UNANIMITÉ; IL EST RÉSOLU QUE:

La Fédération des Femmes du Québec prie le Ministre de la Justice du Canada et le Ministre de la Justice du Québec de prendre toute mesure nécessaire, législative ou administrative, afin que la pornographie soit rendue inaccessi- ble aux mineurs et hors de leur vue.

La F.F.Q. propose que ces publications soient:

  • ou bien affichées et vendues dans des établissements spécialisés, du genre "sex shops" détenteurs d'un permis spécial à cet effet, et dont l'accès devra être interdit aux mineurs;
  • ou bien qu'elles soient en vente libre même dans les établissements commerciaux où les mineurs ont accès, mais interdites à l'étalage ou placées dans un étalage spécial de sorte qu'elles ne puissent être vues par quiconque , ni de l'extérieur ni à l'intérieur de l'établissement.

Et vos requérantes ne cesseront de veiller!

LISTE ALPHABÉTIQUE D'ORGANISMES ET ASSOCIATIONS QUI ONT APPUYÉ LA REQUÊTE DE LA FFQ.

GROUPES MIXTES;

  • Association Canadienne Pour la Santé Mentale
  • Association des Centres de Services Sociaux du Québec
  • Association des Commissions Scolaires de la Région de Montréal
  • Association des Commissions Scolaires de la Vallée du Richelieu
  • Au Coup de Pouce Inc.
  • Bureau de Consultation Jeunesse Inc.
  • Carrefour Le Moutier
  • Carrefour Orléans
  • Centraide Richelieu Yamaska
  • Centre Communautaire Pour Personnes Agées
  • Centre d'Accueil Cartier
  • Centre d'Accueil Cité des Prairies
  • Centre d'Amitié et d'Entraide de Brassard
  • Centre de Santé Bois Bouscoche, Lac-des-Aigles
  • Centre des Services Sociaux de l'Estrie
  • Centre des Services Sociaux de l'Outaouais
  • Centre de Services Sociaux du Centre du Québec
  • Centre de Services Sociaux Richelieu
  • Centre des Services Sociaux du Nord-Ouest Québécois
  • Centre Educatif Communautaire René Goupil Inc.
  • Centre Le Puits
  • Centre Mariebourg
  • Centres Marronniers
  • Cercle St-Charles Borromée
  • Cercle Bonne Entente, St-Camille
  • Club des Familles de Demain Inc.
  • Commission Scolaire Régionale Lapointe
  • Comité d'Ecole Maria Chapdelaine
  • Comité de Parents, C.S.R. Lapointe
  • Comité d'Ecole, Polyvalente d'Arvida
  • Comité d'Ecole, Polyvalente de Jonquière
  • Comité de Parents d'Arvida
  • Conseil de la Famille Richelieu Yamaska
  • Conseil Québécois des Pré-Maternelles Coopératives
  • Corporation Professionnelle des Conseillers d'Orientation du Québec
  • Corporation Professionnelle des Psychologues du Québec Corporation des Conseillers Sociaux du Québec
  • Corporation Professionnelle des Travailleurs Sociaux du Québec
  • CRAIC
  • Entraide A Chez-Nous
  • Entraide Sacré-Coeur
  • Envol Inc.
  • Family Life Dept. Catholic Community Services
  • Fédération de la Famille de Québec
  • Fédération de l'Âge d'Or du Québec
  • Fédération des Comités de Parents de la P.Q.
  • Fédération des Organismes Familiaux
  • Fédération des Organismes Familiaux De Lanaudiêre
  • Groupe de Professeurs de l'Ecole Rosemont
  • Habitat Soleil
  • Institut de la Famille de Montréal
  • Institut Dominique Savio
  • L.A.C.E. de la C.T.C.U.M.
  • Laval Citizens Advisory Council
  • Loisirs Amitié Inc.
  • Manoir Notre-Dame-de-Grâce
  • Marée Montante
  • Office Diocésain de la Famille
  • Petits Frères des Pauvres
  • Regroupement d'Action Communautaire
  • Rendez-Vous Croissance du Couple
  • Service d'Animation à La Réparation
  • Service d'Entraide, Regroupement et Solidarité
  • Service d'Information Inter-Communautaire
  • Société d'Aide aux Enfants souffrant de Troubles Emotifs
  • Société de St-Vincent-De-Paul
  • Société Québécoise Pour Enfants Autistiques
  • Syndicat Professionnel des Infirmières et Infirmiers de Québec (SPIIQ)
  • The Salvation Army Men's Social Service Centre
  • ASSOCIATIONS FÉMININES :
  • Les Abeilles  - St-Jérome
  • AFEAS -  Association Provinciale
  • AFEAS -  203 cercles individuellement
  • AFDU (M) Association des femmes diplômées d'université, Montréal
  • Association des Diplômées en Economie familiale
  • Association des veuves de Montréal Inc.
  • L'Autre Parole (femmes chrétiennes), UQAM
  • Ayer's Cliff Women's Institute
  • Centre d'Information et de Référence pour Femmes - CIRF - Montréal
  • Centre de Références et d'Information - CIRF - Granby
  • Centre de Santé des Femmes de Québec
  • Centre des femmes de St-Lëonard
  • Centre Rosalie Jette
  • Cercle des Châtelaine Inc.
  • Cercle des femmes journalistes
  • Cercle des Fermières
  • Cercle des Rencontres du Mercredi Inc.
  • Cercle fémina - Ste-Agathe
  • Cercle Social Marguerite d'Youville
  • Châtelaines Thetford Inc.
  • Club de la femme active
  • Club des Femmes d'Aujourd'hui de Laval
  • Club des femmes de carrière de Shawinigan
  • Club des femmes de carrière - Victoriaville

    Comité d'action politique des femmes du Parti Québécois Comité féminin de la Caisse- St-Jovite Comité féminin Société St-Jean-Baptiste - Sherbrooke Comité national d'Action

    Comité d'étude sur la situation de la femme cadre ou pro- fessionnelle à l'Université de Montréal - Association des cadres et professionnelles de l'Université de Montréal (ACPUM)

  • Comité de la condition féminine - CSN Conseil des femmes de Montréal
  • Conseil Provincial des Associations des Femmes Diplômées des universités (Q)
  • Conseil régional Saguenay - Lac St-Jean - FFQ
  • Conseil régional Thetford-Mines - FFQ
  • C.S.M.D. - Section Notre-Dame des Champs
  • Darnes Hélène de Champlain - Pointe Gatineau
  • Dames Hélène de Champlain - Ste-Agathe
  • Echo féminin de Shawinigan Inc.
  • Editions Remue-ménage
  • Etudiantes en travail social de l'UQAM
  • Eveil féminin
  • F.D.F.D.Q. - St-Lin-des-Laurentides
  • Femmes du Québec
  • Femmes illimitées
  • Gaspé County Women's Institute
  • Groupe féminin de St-Laurent
  • Horizon-femme
  • Information-femme Inc.
  • Junior League of Montréal
  • Laval au Féminin
  • Librairie des femmes
  • La Ligue des citoyennes de Jonquiëre
  • Madame - prend - congé
  • Montréal Lakeshore (University Women's Club)
  • Mouvement des femmes chrétiennes - Québec
  • Mouvement des femmes chrétiennes - Paroisse St-Ambroise Mouvement femmes chrétiennes - Paroisse St-Pierre-Claver Mouvement des femmes monoparentales - Baie St-Paul Regroupement des Femmes Québécoises
  • Réseau d'Action et d'Information pour les femmes de Montréal (RAIF)
  • RAIF - La Tuque
  • Richelieu Valley University Women's Club
  • Y.W.C.A. Montréal
  • FAMILLES MONOPARENTALES;
  • Carrefour des Associations de familles monoparentales du Qué- bec Inc.
  • Carrefour monoparental Orléans - Beauport Carrefour Familles Monoparentales de Québec Familles monoparentales - Beloeil - St-Hilaire Association des familles monoparentales de Montmagny Association Parents uniques de Laval Inc. Association Familles Monoparentales du Lac Mégantic
  • Association Familles Monoparentales - Paroisse St-Jean- Baptiste-de-la-Salle
  • Association Familles Monoparentales de l'Estrie
  • CENTRES DE BÉNÉVOLAT:
  • Association des Centres de bénévolat - Membres du Québec
  • Centre de Bénévolat de Farnham Inc.
  • Centre de Bénévolat de Shawinigan
  • Centre d'action bénévole de Québec,  Ville Vanier, Québec
  • Centre de bénévolat des Trois-Rivières métropolitain Inc.
  • Centre de bénévolat d'Iberville, Québec
  • Centre de bénévolat Vallée du Richelieu Inc.
  • Centre de bénévolat de Marieville Inc.
  • Centre de bénévolat de St-Jean
  • Centre de bénévolat Le Colibri, La Tuque
  • Centre de bénévolat de Granby
  • Centre de bénévolat de Cowansville
  • Centre de bénévolat de St-Hyacinthe
  • Les auxiliaires bénévoles, Centres hospitaliers, Jonquiëre
  • Service bénévole aux personnes âgées de St-Hubert
  • Nous nous excusons auprès de ceux et celles qui auraient pu être omis par mégarde.