COLLOQUE 2001

Femmes regroupées en options non traditionnelles

un réseau, des réseaux

Document publié par :

Femmes regroupées en options non traditionnelles (FRONT)

Rédaction :
Andrée Savard
Isabelle Dugré
Collaboration :
Claire Cousineau
Linda Lavoie
JC Chayer
Marie-Josée Rodrigue
Collaboration spéciale :
Marie-Laure Guillot
Conception graphique :
RouleauPaquin
design communication
Photos :
Sylvie Rouillard
Caroline Hayeur (agence Stock)
Ève Lamont (vidéo)
Impression :

Richard Veilleux Imprimeur

Dépôt légal : 4e trimestre, novembre 2001
Bibliothèque nationale du Québec et du Canada
ISBN 2-9803180-6-X

 

Nos plus sincères remerciements s'adressent à toutes celles et ceux qui, de près ou de loin, ont contribué à la réussite du colloque F.R.O.N.T. : un réseau, des réseaux et à la publication de ce document.

La tenue du colloque et la production de ce document ont été rendues possibles grâce à la collaboration financière de : Développement des ressources humaines Canada, Emploi-Québec et le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

De nombreux collaborateurs ont permis que cet événement soit un succès : le ministère du Travail et de l'Emploi, le ministère de la Justice et responsable de la Condition féminine, le ministère de la Famille et de l'Enfance, le ministère de l'Éducation et de la Jeunesse, le ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie, le ministère des Affaires municipales et de la Métropole, le ministère des Finances, la Commission de la santé et de la sécurité du travail et le Groupe CGI.

De plus, plusieurs employeurs, organismes, associations patronales et syndicales ont défrayé les coûts d’inscription de participantes à ce colloque. Grâce au précieux soutien des animatrices et secrétaires d’atelier, à la participation très active des conférenciers et conférencières et, surtout, grâce à l’appui et aux renforts fournis par notre équipe de bénévoles, ces deux jours d’échange et de formation connurent un succès sans pareil !

À tous et à toutes, merci !

Adresse : 6839A, rue Drolet, bureau 301
Montréal (Québec) H2S 2T1
Téléphone : (514) 273-7668 / 1-877-273-7668
Télécopieur :(514) 273-7621
Courriel : nontrad@front.qc.ca
Site Web : www.front.qc.ca

 

Table des matières

Sommaire

Une organisation du type de FRONT est unique dans la francophonie et, de plus, il semble que la place du non-trad au Québec soit tout à fait particulière. Des Françaises ont participé au Colloque 2001 et un dossier publié récemment dans L'Express international en faisait état. Pourquoi pas, un jour, un FRONT sans frontières, ce que permet dorénavant Internet ?

Avec sa spécificité et son originalité, FRONT est aussi un réseau parmi beaucoup d'autres car maintenant, de tels réseaux, favorisant le maintien des femmes en emploi, commencent à se multiplier : ils se retrouvent dans plusieurs secteurs, dans bon nombre de régions. Leurs alliances, leurs maillages varient également selon leur appartenance. Bref, la diversité les caractérise. FRONT rayonne au Québec, régionalement et localement, le plus près possible des travailleuses et des étudiantes. Tel était le rêve de ses fondatrices : des petits FRONT dans chaque région ! Ce colloque 2001 est venu leur donner raison : des réseaux régionaux prennent naissance depuis quelques années ! Oui, le monde change, mais les réalités exprimées par les femmes qui ont participé au Colloque 2001 indiquent aussi que les préoccupations demeurent les mêmes. Le harcèlement au travail ou à l'école, le besoin d'une mentor, la recherche de l'employeur idéal et tous les autres thèmes des ateliers demeurent des préoccupations d'actualité, ce que confirment la très grande participation au Colloque 2001 et les nombreux témoignages reçus. Encore une fois, les femmes en non-trad ont démontré qu'elles avaient beaucoup d'imagination et de détermination. Le présent document rapporte non seulement leurs questionnements, mais aussi leurs solutions. Le voici publié en espérant qu'il sera une source d'inspiration pour beaucoup d'autres ! Vous trouverez plusieurs compléments d’information sur les différents sujets traités dans le présent document dans les éditions précédentes des actes des colloques de FRONT de 1992, 1996 et 1999.

Introduction

« Bonjour les filles ! Déjà un mois qu'on est rentré, beaucoup de choses à faire et je vous écris seulement aujourd'hui... mais l'écho de vos mots est encore là et merci encore à TOUTES pour le colloque. Je viens de lire les impressions de certaines sur le site et l'ambiance de là-bas revient doucement nous rappeler les moments forts vécus et partagés avec vous. J'ai, hier, fait un compte rendu devant des personnes d'un comité de pilotage pour initier un réseau de non-trads ici; j'ai repris mes notes, fouillé ma mémoire, pour ne rien oublier de la force, de la mobilisation, de l'évidence d'un réseau de ce type. Alors j'ai paru un peu enflammée pour certain(e)s, trop militante pour d'autres peut-être. J'ai voulu convaincre, persuader avec ce que j'ai vu et entendu, que rien ne remplace la formidable énergie des femmes quand elles-mêmes prennent leur vie en main. Que l'égalité professionnelle ne peut se réaliser sans ces femmes qui affirment leur choix et deviennent actrices d'un changement dans leur lieu professionnel. Parce que je crois aujourd'hui plus que jamais à la richesse des échanges, des rencontres, de la parole libérée, et que de là peuvent naître de vraies transformations, par toutes les actions petites et grandes qui s'initient. Merci à toutes, merci d'être ce que vous êtes, merci pour tous les moments échangés, à toutes celles avec qui j'ai parlé, ri et bu un verre, à celles à qui je n'ai pas eu le temps de parler mais que j'ai écoutées, merci à toute l'équipe pour l'organisation, votre simplicité et votre gentillesse, merci aux Québécoises parce que votre langue enrichit la nôtre, merci pour le plaisir et la richesse des rencontres... Un grand soleil brille sur la Normandie, ça sent les vacances en France, alors je vous envoie à toutes un petit rayon de soleil d'ici, le goût d'un doux verre de vin en terrasse, un petit air de vacances et à bientôt chez nous : on va tout faire pour qu'un réseau se crée ici et pour vous faire venir, un de ces matins... Gardez fort votre énergie !! » Mes meilleures pensées, Isabelle Ternat, Mission Optique Égalité Rouen, France

FRONT : un réseau, des réseaux ! Quel organisme est le mieux placé pour parler de réseaux dans le milieu du non-trad ? Organisme national depuis 1992, FRONT rassemble en très grande majorité des travailleuses en emploi non traditionnel et des étudiantes en formation non traditionnelle ! FRONT rayonne aussi à l’extérieur du Québec. En effet, FRONT est le premier et l’unique réseau national regroupant des femmes en non-traditionnel et différents organismes préoccupés par cette question de toute la francophonie ! Ce réseau se veut à l'image de ces femmes : fortes, dynamiques et pleines de ressources pour pratiquer le métier qu'elles aiment et qu'elles ont choisi.

un réseau,

des réseaux

membres de FRONT pour signifier notre appui et notre volonté de voir un réel changement dans les pratiques d’enseignement, d’embauche et de promotion pour les femmes en emploi non traditionnel. Notre action dans ces très nombreux secteurs d’activité vise non pas à amener des femmes vers ces emplois parce que le marché en a besoin mais parce que nous voulons, par la présentation systématique de tous les emplois disponibles, agrandir l’espace de liberté des femmes.

De la nécessité, du comment

et du pourquoi du réseau

Un tel réseau s'est révélé essentiel au début des années 1990 et la décennie qui vient de se terminer est malheureusement venue confirmer sa nécessité et sa pertinence : parce que la seule augmentation du nombre de femmes dans ces emplois ne peut et ne pourra provoquer les changements nécessaires à l'atteinte d’une réelle égalité de fait entre les femmes et les hommes d’un même métier.

Le chemin qu’il nous reste à parcourir pour atteindre l’égalité emprunte les traces de la bataille pour l’équité salariale. La fameuse revendication « À travail égal, salaire égal », même si nos chers collègues de travail nous le refrise derrière les oreilles à chaque semaine, eh ben, ce n’est pas encore vrai. Des preuves ? Allons jeter un coup d’œil sur le site Internet du ministère de l’Éducation, aux pages de l’enquête « Relance en formation professionnelle au secondaire ». On choisit une formation au hasard… techniques d’usinage ? électricité de construction ? Remarquez, c’est tout pareil. Tiens, on s’arrête sur mécanique de tôlerie aéronautique, c’est un métier d’avenir : l’aérospatiale, c’est un secteur en pénurie, original, pas trop forçant... OK ? Les finissantes de 1999 représentent 11 % des finissants. (Pas mal populaire…) L’enquête nous apprend qu’au 31 mars 2000, les hommes ont plus souvent un emploi relié à leur formation que les femmes. L’écart salarial hebdomadaire est très révélateur de l’inégalité à laquelle nous sommes trop souvent confrontées : les femmes gagnent en moyenne 54 $ de moins par semaine, c’est-à-dire 10 % de moins. Oups ! On compare

Allocution d'ouverture du colloque

FRONT : un réseau, des réseaux

À toutes celles qui nous rencontrent pour la première fois, je souhaite un bonjour bien particulier et bienvenue à FRONT.

Avant d’élaborer sur le thème de la fin de semaine, le réseau, j’ai envie de vous présenter, ou représenter, FRONT. Vous me permettez ?

Supportées par des professionnelles de l’insertion des femmes au marché du travail, FRONT, c’est un moyen que nous, femmes de métier, nous sommes donné pour sortir de l’isolement dans lequel nous travaillons souvent et nous donner une voix plus forte pour proposer, revendiquer et travailler à l’amélioration des conditions d’embauche et de travail pour toutes les femmes qui représentent moins de 33 % de la main-d’œuvre dans leurs emplois et leurs secteurs respectifs d’activité. Nous nous sommes toujours définies comme un regroupement et aujourd’hui nous parlons de réseau. Est-ce si différent ? Regroupement veut aussi dire communauté, identité, ralliement, rassemblement, et ce lieu de rencontre sous-entend nécessairement des échanges. Lorsque je pense à réseau, j’entends aussi association, coopération, maillage. Et là, bien maligne qui saurait démêler les synonymes de l’un ou de l’autre.

Le thème

« Dans mon livre à moé », comme dirait ‘Hean-Paul, « regroupement ou réseau, c’est pas mal la même affaire ! » Je ne vous apprendrai rien en affirmant que ce n’est pas une nouveauté à FRONT. Je dirais même plus : le réseautage, c’est notre moyen de communication, notre outil de persévérance et la force de notre action et ce, depuis la fondation de l’organisme en 1992. Les membres du réseau FRONT sont actives, participent aux réalisations de FRONT; elles sont souvent des militantes — par opposition à membres-usagères — et leur présence de même que leur connaissance de leur environnement de travail sont la base de l’expertise que nous avons développée au fil des ans. Ce sont les liens entre nous, entre travailleuses, entre étudiantes, entre mentors et protégées, les liens et les échanges avec les différents groupes membres qui constituent la force de notre regroupement. Adhérentes de ce réseau, nous partageons un idéal : nous devenons pourtant des finissants avec des finissantes ! Le plus triste, non, ce n’est pas fini, c’est le taux de chômage qui attend les finissantes : 20 % des finissantes sont sans emploi après un an. Pour les gars, c’est super, moins de 6 % sont au chômage. Travail égal, salaire égal ? Quand on entend des directeurs de centres de formation professionnelle dire qu’ils ont des taux de placement de 100 %, ils parlent des gars, pour les gars, et non des filles ! Parlons intégration, maintenant, et prenons en exemple le secteur de la métallurgie. On peut se réjouir que le nombre d’inscriptions féminines en formation ait doublé au cours des cinq dernières années. Les femmes représentaient 2,6 % des inscrits en 1995 et en 2000, 5,1 %. Ça double, sauf que 5,1 %, ça ne fait pas deux filles par classe et, surtout, l’impact réel sur le marché du travail se compte en dixième ou en centième de point de pourcentage. Suivant la cadence du renouvellement de la main-d’œuvre, on pourrait espérer que dans 20 à 25 ans, les femmes représentent 5 % des salariés de ce secteur. À ce rythme-là, on est mieux d’être très patientes et de ranger nos calendriers pour attendre les changements de mentalité, de pratiques d’embauche et de tolérance à la nouveauté. D’où la nécessité d’unir nos forces, d’unir nos voix et de mettre nos expériences, toutes différentes les unes des autres, en commun. Un réseau, c’est tout ça et rien que ça à la fois. Et il existe déjà. Ce que nous ferons cette fin de semaine, c’est explorer différentes façons de créer d’autres réseaux et voir comment les relier à ceux qui existent déjà. Nous ébaucherons la façon dont FRONT peut être le réseau des réseaux des femmes en emploi non traditionnel.

Je me permets de vous transmettre un bref aperçu des bonnes raisons que nous avons de croire et de participer au réseau de FRONT, autant comme personnes que comme groupes :

  • pour dire la fierté que je ressens à faire mon travail, à exercer mon métier;
  • pour dire haut et fort que mon emploi, c’est de mes affaires;
  • pour supporter les paroles et les actions des femmes qui, pour moi, pour d’autres, militent afin d’améliorer notre situation;
  • pour la fierté d’appartenir à un mouvement de changement social;
  • pour appuyer les démarches nécessaires à une réelle égalité entre les femmes et les hommes au travail;
  • parce que j’ai envie de partager, d’échanger, d’apprendre, de lire, de communiquer des trucs et des conseils et ce, avec d’autres femmes, d’autres groupes de femmes ;
  • pour avoir un lieu où réaliser mes projets, faire avancer mes idées;
  • pour appartenir à un groupe où je me reconnais;
  • parce que j’ai envie de rencontrer, j’ai envie de me permettre de rencontrer, d’autres femmes qui pensent comme moi, qui vivent les mêmes choses que moi;
  • parce que j’ai envie que des demandes et des démarches collectives se fassent pour améliorer nos conditions d’étude, d’embauche et de travail;
  • parce que je suis convaincue que la force du nombre est une excellente façon de se faire entendre auprès des différentes instances gouvernementales et privées qui jouent un rôle dans nos conditions de travail;
  • parce que j’ai envie de partager mes connaissances avec d’autres femmes et même de les transmettre : j’ai envie d’être mentor;
  • parce que je suis seule au travail, parce que je vois bien que tout ne se passe pas comme je l’imaginais : j’ai besoin, j’ai envie d’être guidée, de trouver une jumelle, une mentor;
  • parce que j’ai envie de partager mes expériences avec des femmes de toute la francophonie, de tous les pays, par Internet et par la liste de discussion de FRONT;
  • pour apprendre comment faire, comment poser différentes actions afin de changer petit à petit mon milieu;
  • pour avoir accès à des formations complémentaires qui m’aident à comprendre mon environnement;
  • parce que participer au réseau de FRONT, c’est comme signer une immense pétition pour dire à la face du monde que des changements sont nécessaires pour que mon rêve se réalise;
  • enfin, parce que FRONT, c’est aussi le réseau des réseaux de femmes en emploi non traditionnel et de toutes celles qui les appuient !
  • Cela, sans compter les 153 raisons que chacune d’entre vous avez d’être ici ce matin !

Parce que nous sommes 153 à parler réseau ensemble ! Nous sommes sûrement assez nombreuses pour tisser quelque chose de fort, de très fort ! Je vous remercie d’être là aujourd’hui pour nous et pour vous accorder ces deux précieuses journées de fin de semaine à échanger, enrichir notre groupe et partager toute la richesse et toutes les couleurs de vos idées, de vos façons de faire et de vos expériences.

Isabelle Dugré, tuyauteure

Présidente FRONT

Le comité de condition féminine du Syndicat des technologues d'Hydro-Québec (SCFP, section locale 957 de la FTQ)

structure syndicale. Aujourd’hui, onze femmes sont identifiées comme répondantes régionales et représentent l’ensemble des techniciennes à ce comité. Pour plus d’efficacité et pour réduire les contraintes d’éloignement, elles communiquent entre elles par téléphone (conférences) et par Internet. Ces répondantes ont été, notamment, formées à la non-discrimination et au respect des droits en milieu de travail. Lors de la mise en place du comité, ses membres avaient développé un énoncé politique qui affirmait le droit des femmes technologues chez Hydro-Québec à l'égalité, au respect et à la dignité. Encore aujourd'hui, lorsqu'elles se réunissent, elles se remettent cet énoncé en mémoire. De l'éducation reste à faire dans leurs différents milieux de travail, mais les changements commencent à être perceptibles.

Trois expériences de réseaux :

un panel

Ces deux journées mémorables de formation et d’échange ont commencé par la présentation de trois réseaux bien distincts. Trois femmes, réunies en panel samedi avant-midi, nous ont fait part de leurs expériences de réseautage, comme méthode d’action, comme mode d’intervention mais, surtout, comme moyen efficace de décupler nos forces ! À prime abord, rien ne semble les relier directement. Les deux premiers sont des comités syndicaux de condition féminine et le troisième, un regroupement d'intervenantes et de ressources communautaires du milieu régional. Ces trois réseaux ont cependant le même objectif : ils se sont donné pour mission de faciliter la vie de travailleuses qui pratiquent un métier traditionnellement réservé aux hommes.

Josée Durand du comité de condition féminine du Syndicat des technologues d'Hydro- Québec, nous présente le réseau auquel elle appartient. Chez Hydro-Québec, seulement 5 % des 2 400 technologues sont des femmes, dans les secteurs de la foresterie, de l'automatisme, des télécommunications, du génie civil, de la chimie, du textile, de la mécanique, de l'électricité, de l'instrumentation et du contrôle, ainsi que dans le secteur des projets et du dessin. Formé en 1995, le comité de condition féminine du Syndicat des technologues visait à briser l'isolement de la centaine de techniciennes d'Hydro-Québec réparties sur tout le territoire du Québec, de Montréal à la Baie James. Les débuts du comité n'ont pas été faciles; aucun budget ne lui était accordé. Ses membres ont dû convaincre leur propre syndicat et se trouver des alliés pour s'intégrer à la trois femmes Chez Gaz Métropolitain, à Montréal, un réseau informel de travailleuses a commencé à se développer à partir de 1995. Une de ces travailleuses, Linda Boisclair, membre fondatrice de FRONT en 1992, inspirée par cette première expérience, a été l'instigatrice de ce réseau. Elle nous a fait part de son expérience de réseautage en entreprise. Au début des années 1990, une première femme col bleu était engagée. Aujourd’hui, elles sont une vingtaine de femmes de métier à l'emploi de Gaz Métro sur environ 400 cols bleus. Les rencontres entre les travailleuses ont commencé par des soupers informels, quelques fois par année. De souper en souper, les difficultés vécues par les travailleuses étaient exposées et demeuraient, pour la plupart, non résolues : les vêtements, les toilettes, mais surtout le harcèlement par milieu hostile. En 1997, un comité de condition féminine était finalement élu, mais celui-ci ne peut encore siéger aux instances syndicales locales. Ses revendications faisaient état de beaucoup de frustrations et étaient perçues comme très radicales parce que le syndicat n'avait jamais répondu aux besoins des travailleuses. C'était l'impasse : le comité de condition féminine et le syndicat sont face à face et ce dernier se braque. Il boycotte le comité de 1997 à 1999. Pendant tout ce temps, un troisième réseau se tisse. Par FRONT, Linda rencontre une machiniste à la STCUM qui est aussi une militante syndicale. Des liens se développent entre elles et Linda y trouve beaucoup d’appui. En même temps également, Linda cogne à la porte du comité de condition féminine de la CSN. Les pressions, tant externes qu’internes, font que les relations entre le comité et le syndicat chez Gaz Métro ont pu reprendre : le comité de condition féminine s'est finalement vu reconnaître une certaine crédibilité. Le comité n’a pas encore de siège officiel aux instances du syndicat et relève toujours de la responsabilité du président en vertu de la convention collective. Cependant, les membres du comité de condition féminine entrevoient la possibilité d'obtenir, à moyen terme, un poste à la condition féminine au sein de leur comité exécutif. Il en aura fallu de la patience... et tout n'est pas gagné. Ces pas en avant ont été rendus possibles par l'effort soutenu de quelques travailleuses, mais aussi grâce à tous les réseaux informels évoqués précédemment. « Bien que le comité de condition féminine soit encore dans l'ombre de son syndicat, ses membres sentent des percées de soleil de plus en plus fréquentes », conclut Linda. NDLR : Au moment de mettre sous presse, nous apprenions que Linda était élue comme directrice exécutive aux services techniques, au Syndicat des employés de Gaz Métropolitain inc. (SEGMI). Bravo Linda ! Un grand coin de ciel bleu apparaît !

Le réseautage des travailleuses de Gaz Métropolitain

Danièle Caron, actuelle directrice de Femmes et production industrielle (FPI), nous présente un tout autre type de regroupement, de réseautage. FPI est en quelque sorte un réseau faisant appel à plusieurs autres réseaux. Il a comme mission d'améliorer les conditions socio-économiques des femmes, au moyen de l'augmentation de leur présence dans des activités non traditionnelles, en emploi ou en formation, et de l'implication de tous les partenaires.

FPI se qualifie lui-même de réseau d'expertes composé d'organismes et d'intervenantes oeuvrant auprès des femmes en emploi non traditionnel. Les organismes suivants en sont membres :

  • les tables de concertation du mouvement des femmes de la Mauricie et du Centre du Québec;
  • quatre ressources d'aide à l'emploi pour femmes : le Centre Le PONT de Trois-Rivières, le Centre des femmes L'Héritage
  • de Louiseville, Partance de Drummondville et Services intégrés pour l'emploi de Victoriaville, Nicolet et Bécancour;
  • la Commission scolaire Chemin-du-Roy;
  • le Conseil du statut de la femme;
  • les centres locaux d'emploi (CLE) de l'Érable et de Trois-Rivières.

Dès le début, FPI s'est allié un ensemble de personnes. Ses initiatrices avaient donc conscience non seulement qu'elles ne pouvaient pas composer ce réseau à elles seules, mais elles ne voulaient pas et ne devaient pas le faire seules. Sa difficulté réside dans l'exigence que FPI s'est imposée de réussir un véritable partenariat, dans le respect de tous les organismes impliqués. Ses membres se sont donné comme leitmotiv de ne jamais oublier que ce sont d'abord les femmes qui ont des besoins. FPI existe pour les femmes, mais aussi avec elles !

Femmes et production industrielle (FPI)

un panel

Suite à ce panel, les participantes, regroupées en tables rondes, ont été invitées à partager leurs expériences de réseautage : participent-elles à un réseau ? À quel type de réseau participeraient-elles et comment ? Dans leurs réponses, nous voyons que les participantes ont beaucoup à dire sur leurs réalités. Ces réseaux auxquels elles participent ou encore qu'elles souhaiteraient voir mis sur pied font ou feraient en sorte qu'elles puissent partager sur ces réalités. Plusieurs voient aussi, probablement, l’organisation d’un réseau comme étant beaucoup plus complexe qu'elle ne devrait l’être. Les réseaux peuvent être formés tant de travailleuses, d’étudiantes que d'intervenantes. Quelle que soit leur composition, l'enjeu principal demeure le même : maintenir les femmes en emploi ou aux études dans des secteurs traditionnellement réservés aux hommes et ainsi arriver à une réelle égalité des chances en formation et à l’embauche de même qu’à l’obtention de conditions de travail favorisant le maintien et la progression en emploi.

Un réseau, des réseaux...

Les expériences rapportées par les panélistes sont quelques exemples parmi tant d'autres de ces réseaux auxquels FRONT croit profondément et souhaite donner une impulsion. Une fois présentés, ces exemples montrent non seulement les avantages d'en faire partie, mais surtout, que l’idée de départ et les moyens que ces réseaux ont mis en place pour se rencontrer sont très accessibles : soupers, échange de courriels, mise à profit de lieux déjà existants. Ce qui est considérable, par contre, c'est leur apport auprès des femmes qui y participent, qu'elles soient sur le marché du travail ou à l'école.

« (...) D’abord, l’ambiance fantastique ! Les rencontres magnifiques avec d’autres femmes formidables, pleines d’idées, d’énergie, de générosité ! Ça pétait le feu. Je pense entre autres à Linda Boisclair de Gaz Métro, à Hélène Vachon à la STCUM, aux filles d’Hydro-Québec, à Diane et ses cols bleus, qui m’ont inspirée avec leurs témoignages "véritable coup de pied au cul", pour foncer dans quelque chose qui me semblait compliqué, voire pas faisable et "ragnagnant". L’humour et l’originalité de Josée d’Hydro, qui n’accepte pas un non quand elle a une demande, m’ont particulièrement rejointe. D’ailleurs, elles n’auront pas le choix d’être un peu nos mentors pour nous aider (Nathalie, Anne, Diane, Isabelle et moi) à réunir les filles de la construction... ce dans quoi nous nous sommes embarquées... oh boy ! (...) » Isabelle Jacob, alias ZAZ, soudeure

Différents types de réseaux

Dans certaines entreprises syndiquées, les comités de condition féminine auront été mis sur pied par quelques-unes ou plusieurs des travailleuses, avec l'aide du syndicat ou non. Dans tous les cas, cependant, ces comités s'inscriront dans la structure syndicale, avec plus ou moins de pouvoir sur la prise de décisions dans ses instances. C'est le cas du comité de condition féminine du Syndicat des technologues d'Hydro-Québec ou encore de celui chez Gaz Métropolitain. Dans une vision large des formes que peuvent prendre les réseaux, les comités de condition féminine constituent donc souvent la base de ces réseaux de femmes en emploi non traditionnel dans les entreprises syndiquées. Ces comités peuvent toutefois faire face à de multiples obstacles et parfois ceux-ci viennent des syndicats eux-mêmes. Fort heureusement, tel n'est pas toujours le cas. Les syndicats se doivent d'être alliés et les travailleuses en non-trad ne tirent que des avantages à mieux connaître leurs organisations syndicales et à s'y intégrer. Dans certains autres établissements ou usines, les travailleuses, qu'elles occupent un emploi traditionnellement réservé aux hommes ou non, pourront se retrouver dans un même comité de condition féminine. Les préoccupations spécifiques de certains secteurs ou métiers seront aussi prises en compte.

Les comités de condition féminine (entreprises syndiquées)

un réseau

Réseautage en entreprise sans comité formel

Dans d'autres entreprises, des travailleuses pourront être organisées en réseaux et supportées sans qu'il y ait un comité de condition féminine. Ou les femmes ne sont pas encore assez nombreuses, ou elles choisissent un type de regroupement moins structuré. Une première activité peut simplement être annoncée dans les vestiaires : les rencontres peuvent être à l’extérieur du milieu de travail, regrouper les femmes d’un seul département, etc.

Des réseaux régionaux

Depuis quelques années, nous assistons à l’éclosion de réseaux de femmes en non-trad dans différentes régions du Québec. La plupart du temps, ces réseaux ont été implantés par des groupes communautaires ou des organismes voués au développement de l'emploi. Dans ces cas, ce sera une intervenante de l'organisme qui le coordonnera. Plusieurs de ces réseaux ont été présentés lors du colloque. Pensons à :

  • ELANT (Entraide pour L'égalité à l'Accès dans le Non-Traditionnel) a été créé et est supporté par le Centre Le PONT à Trois-Rivières, depuis 1992.
  • FIERTÉ (Femmes Investissant Énergie pour Réussite dans un Travail Égalitaire) dessert la région de la Beauce et a été créé par l'organisme Passeport travail de Beauce en 1999.
  • CIME (Centre d'intégration au marché de l'emploi) a mis en place un réseau à Sherbrooke.
  • Passage non traditionnel à Granby organise aussi des activités pour démarrer un réseau.
  • Les Exceptionnelles constituent un réseau qui a été mis sur pied par l'organisme COFFRE (Centre d’orientation et de formation pour femmes en recherche d’emploi) à Saint-Jean-sur-Richelieu.

Ces réseaux regroupent tous des travailleuses de différents secteurs ou encore des étudiantes, d'une même ville ou d’une même région. Elles se réunissent surtout lors de « 5 à 7 », « 6 à 8 » ou « 7 à 9 », selon une fréquence régulière ou occasionnellement. Les rencontres sont pour la plupart informelles et ont des objectifs variés, allant de l'échange jusqu'à la préparation d'outils pour supporter les travailleuses en passant par la promotion de leur réseau. Les femmes sont rejointes par l’affichage dans les usines ou chez les employeurs, par le biais d’articles et de publicités dans les journaux locaux et notamment, par la liste de discussion de FRONT. Les hauts et les bas de la participation des femmes ont été identifiés comme étant une des difficultés communes à ces réseaux. Ce qui motive plus particulièrement les femmes à participer, c'est leur intérêt à témoigner sur le métier qu'elles pratiquent. Un avantage commun ? Ces réseaux régionaux sont aussi des lieux pour raconter le plaisir d'avoir gagné quelque chose (l’une, des gants à la bonne taille, l’autre, un horaire variable, etc.), pour partager des trucs et se soutenir mutuellement.

Quelques engagements pris par des participantes lors du colloque pour développer d’autres types de réseaux

  • Un groupe de travailleuses de la construction s'est engagé à tout faire pour mettre sur pied un réseau des travailleuses de la construction.
  • Des participantes souhaitent que des réseaux régionaux se mettent en place; d’autres sont prêtes à s'impliquer à leur démarrage, à leur organisation. FRONT est invité à se joindre à elles !
  • Des activités sont annoncées lors du colloque même pour rejoindre des travailleuses, entre autres un pique-nique et une épluchette de blé d'Inde.
  • Plusieurs travailleuses se sont engagées à retourner dans leur centre de formation professionnelle et à y parler de FRONT avec les étudiantes actuelles.

des réseaux

Bien que ces femmes puissent être totalement différentes par leur éducation, le métier qu'elles pratiquent ou encore par leurs idées, ce qui les rassemble est commun : elles partagent une même situation spécifique, une même volonté de faire changer les choses et éprouvent le besoin de se regrouper. Avant de véritablement former un noyau, les fondatrices tirent avantage à se donner un ou des objectifs communs. Ceux-ci pourront être de l'ordre de la recherche d'emploi, de l'obtention de vêtements ou d'équipements de sécurité, d'une implication syndicale, d'une lutte contre le harcèlement sexuel dans un milieu de travail. Tout simplement, vous choisirez peut-être l'organisation d'activités ou de loisirs en commun. Les objectifs devront être réalistes pour en retirer rapidement de la satisfaction. Ça prend du temps pour organiser un réseau et il faut se permettre de prendre son temps. Trouver des non-trads, c'est parfois facile mais rejoindre les plus isolées d’entres nous, ce n’est pas toujours évident ! Assez souvent, nous sommes bien cachées au fond d’un parc industriel ou seules dans un véhicule de service ! Réunir ces travailleuses isolées demande une certaine organisation : une chaîne téléphonique est une façon de se partager le travail, en plus de permettre le développement de liens plus personnalisés. Répondre aux besoins des membres du réseau demandera un peu plus : organiser des activités, trouver un local, un téléphone, un télécopieur, un ordinateur. La collaboration avec d'autres organismes est donc profitable, que ce soit pour trouver les non-trads et leur transmettre l'information, sensibiliser la population en général, trouver du financement ou étendre son réseau de partenaires. Contactez les employeurs de votre région, les syndicats, les commissions scolaires, les centres de formation professionnelle, les médias locaux, les centres de femmes et les groupes sociaux féminins, les organismes de développement de l'emploi, de recherche d'emploi et les centres locaux d'emploi (CLE).

Démarrer un réseau

L'initiative d’amorcer un réseau pourra venir d'une travailleuse, d'une étudiante ou encore d'un organisme, que ce soit pour faire la promotion des métiers non traditionnellement féminins, s'entraider ou échanger sur sa réalité, ou encore agir pour changer les mentalités des milieux dans lesquels vous travaillez.

Quand deux femmes se rencontrent, c’est déjà un réseau. Convaincues de l’utilité d’un réseau comme moyen d’entraide et de changement, ces premières femmes risquent d'être les piliers de votre réseau. Elles en formeront le cœur et favoriseront la participation des autres non-trads. Patience et ténacité sont des mots clés pour la durée du démarrage car, il ne faut pas se le cacher, ça prend souvent quelques années à se consolider !

Quelques trucs pour obtenir du succès :

  • y aller à petits pas en se donnant des objectifs réalisables,
  • tenir ses rencontres dans un endroit convivial et sympathique,
  • fuir la routine et les réunions trop structurées,
  • organiser un service de garde lors de certaines activités,
  • imaginer des activités pour développer un sentiment d'appartenance
    (nom, logo, bulletin, chaîne téléphonique, etc.),
  • entretenir des liens avec d’autres réseaux.

Prenez votre temps. Un réseau, c'est long à créer. Ne vous découragez pas ! Lorsque vous entendrez dire : « Quand est-ce qu'on se revoit ? À bientôt ! »... C'est parti !

En Outaouais, un comité régional de partenaires en non-trad a été créé. Le comité a entre autres comme projet de former des agentes et des agents, de les sensibiliser à la réalité des femmes en emploi non traditionnel dans les centres locaux d'emploi (CLE) de la région, ce qui permettrait de défaire des préjugés face au non-trad. La mise en place du comité fait en sorte que les organismes ne sont plus seuls à porter le dossier, ce comité étant formé tant de représentantes et de représentants des organismes communautaires de la région que de la direction régionale d'Emploi-Québec. Dans deux autres régions, le Centre du Québec et la Mauricie, via Femmes et production industrielle (FPI), c'est aussi un comité régional qui a été mis en place, le comité d'implantation de la Stratégie d’intervention à l’égard de la main-d'œoeuvre féminine.

Cette Stratégie d’Emploi-Québec prévoit, entre autres choses, encourager l'accès des femmes à des secteurs d'emploi traditionnellement réservés aux hommes. Certains moyens administratifs, des ententes spécifiques par exemple, peuvent aussi s'avérer efficaces. La volonté de diversifier les choix de carrière pour les filles a servi de fondement à l’une de ces ententes spécifiques en Montérégie. Le ministère des Régions (MDR), le conseil régional de développement (CRD), la direction régionale d'Emploi-Québec, le ministère de l'Éducation (MEQ) et le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation (MAPAQ) en sont les signataires avec les ressources communautaires. Avant sa signature, un organisme en non-trad avait dû fermer ses portes. L'entente spécifique a permis de le remettre sur pied et de créer une nouvelle ressource dans une autre ville. Un réseau des cinq organismes en non-trad, le RMONT, et ces cinq organisations sont elles-mêmes financés par l'entente spécifique. Des projets impliquant entre autres des signataires de l'entente sont réalisés. Un de ces projets, initié par FRONT et réalisé par des organismes montérégiens, la campagne d’affichage Chez nous, la relève c'est notre fille, vise à interpeller les propriétaires d'entreprises agricoles soucieux de s'assurer d'une relève au sein de leur famille afin de les amener à considérer les femmes qui les entourent comme une main-d'oeuvre potentielle de qualité.

Des organismes membres de FRONT se rencontrent

Le dimanche matin, les représentantes d'une douzaine d'organismes de femmes préoccupés par le non-trad ont profité de l'occasion pour échanger sur leurs besoins et les liens à développer. Le texte qui suit constitue un extrait du compte rendu de leur rencontre. Il porte plus particulièrement sur quelques lieux que se sont donnés les organismes pour supporter régionalement les travailleuses et les étudiantes en non-trad.

Les groupes membres de FRONT et tous les autres groupes intéressés par le non-trad peuvent aussi échanger entre eux grâce à une liste de discussion qui leur est réservée. Un organisme veut savoir si tel projet ou telle activité a déjà été organisé ailleurs ? Un autre désire partager ses expériences, ses préoccupations ? Un autre encore a besoin de savoir où se procurer tel outil ? Ces groupes voient là une façon très rapide de faire circuler les informations et d'en obtenir.

L'Internet, un réseau chez soi

Internet, un réseau aux mille et une possibilités, ouvre sur le monde. Allez à http://www.front.qc.ca et le monde des femmes en non-trad s'ouvrira à vous.

Par ce site, nous rejoignons des femmes de plusieurs nationalités ! Le site de FRONT est à son image, dynamique et riche des expériences de toutes les femmes qui le construisent au fil de leur participation, entre autres par le cybermentorat !

Des ministères et d’autres organisations collaborent au cybermentorat de FRONT. Un autre moyen d'y contribuer est de participer à la liste de discussion des non-trads. Ce qu'est une liste de discussion ?

C'est un moyen de communiquer avec un groupe de personnes sur un thème donné par l'intermédiaire du courrier électronique. Chacune écrit à l'adresse de la liste et un logiciel se charge de faire parvenir les messages à toutes les personnes inscrites.

Sur la liste de discussion des non-trads, vous pourrez échanger sur vos expériences de travail, à l'école ou dans la vie, vous donner des trucs, vous soutenir dans les moments difficiles et finir par rire des histoires qui vous arrivent plutôt que d'en pleurer. Pour vous abonner à la liste de discussion, rendez-vous sur le site de FRONT.

L'employeur idéal existe. Si vous le rencontrez, vous le reconnaîtrez par les traits distinctifs suivants :

L'offre d'emploi modèle

Le titre de l'emploi sera inscrit dans les deux genres ou sous une forme neutre. Il se peut aussi que ce soit la fonction, par exemple la mécanique diesel, qui soit nommée. L'offre spécifiera alors que le poste est ouvert aux femmes et aux hommes. Si un programme d'accès à l'égalité est en place dans l'entreprise, celui-ci sera mentionné dans l'offre.

L'entrevue modèle

L'employeur évitera de poser toutes les questions interdites par la Charte des droits et libertés de la personne ou les dispositions équivalentes au fédéral. Les questions à éviter ont toujours trait à l'un ou l'autre des motifs de discrimination interdits par la Charte québécoise (art. 10). Par exemple, un employeur ne pourra pas vous poser des questions, directement ou indirectement, reliées à votre intention d'avoir un ou des enfants, à votre situation familiale, à votre force physique ou à votre âge.

L'examen médical

L'employeur modèle devrait vous demander de subir un examen médical seulement à la suite d'une offre d'embauche formelle, offre qui serait conditionnelle aux résultats de l'examen. Cependant, aucune disposition légale ne l'y oblige. Quant aux résultats de l’examen médical, ceux-ci seront consignés dans des dossiers distincts pour préserver la confidentialité et ne seront accessibles qu’aux seules personnes tenues au secret professionnel. Toute divulgation d'un renseignement ne devra être faite qu'à la suite d'une autorisation écrite de la personne concernée.

Les agences de placement

Plusieurs femmes de métiers spécialisés ont recours à des agences de placement. Comme tout employeur, les agences ou bureaux de placement ne peuvent eux aussi exercer de discrimination lors de la réception ou du traitement d'une demande d'emploi. Une agence ne peut donc agir de manière discriminatoire en raison des exigences d'un employeur et, à l'inverse, devrait être informée des mesures adoptées par un employeur pour favoriser l'accès des femmes à l'emploi dans son entreprise. Une agence pourra aussi adopter une politique en matière de non-discrimination et la faire connaître, tant auprès des entreprises qui ont recours à ses services que des personnes qui recherchent un emploi.

Trouver l’employeur...

La plupart des femmes en emploi non traditionnel se retrouvent dans des petites et moyennes entreprises où le recrutement se fait surtout par le bouche à oreille. Participer à un réseau, c’est aussi améliorer ses possibilités d’embauche ! Vous y développerez de nombreux contacts pour connaître des employeurs, pour savoir lesquels ont déjà embauché une ou des femmes, etc.

Les informations suivantes sont extraites d'un document de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse intitulé Guide d’application de la Charte des droits et libertés de la personne à l’intention des employeurs. Ce guide pourra vous être utile, entre autres pour détecter l'employeur idéal.

Le texte qui suit est extrait du compte rendu de l’atelier qui a été donné par le CRAN des femmes, organisme qui oeuvre en prévention de la violence et en autodéfense.

Pourquoi un atelier en autodéfense pour les femmes pratiquant un métier non trad ?

Parce que dans un milieu traditionnellement réservé aux hommes, les femmes peuvent subir maintes pressions, parfois subtiles et parfois moins, pour qu’elles comprennent bien qu’elles sont des femmes et qu’elles ne sont pas à leur place. Cette violence est le reflet des stéréotypes et des préjugés qui ont la vie dure dans notre société. Mais pire encore, elle vise à dénigrer les femmes et à les enfermer dans un statut moindre. Sous forme de jokes – en fait, c’est souvent de cette façon que les hommes justifient leurs sarcasmes –, cette violence ne fait pas partie de la game ou de la job.

Les femmes sont soumises à diverses peurs : peur du jugement, de la culpabilité, de décevoir, de faire mal, d’avoir peur. Il importe d’abord de briser ce stéréotype du rôle de la femme qui la maintient dans la vulnérabilité physique et psychologique. L’atelier veut aussi (re)donner aux femmes le droit au respect, à l’égalité et à l’intégrité. En plus d’aider les femmes à identifier les formes de violence, il vise à permettre aux femmes d’affirmer leur propre force morale et physique, de reprendre confiance en elles-mêmes ainsi qu’en leurs intuitions souvent niées par leur éducation.

C’est donc par l’affirmation que le CRAN peut agir sur le sentiment d’impuissance vécu par les femmes.

Que peut-on faire personnellement pour survivre et continuer à exercer un métier qu’on aime ?

  • Ne pas nier la réalité au risque de paraître ridicule et, à tout le moins, ne pas minimiser ce que nous ressentons. Nous pouvons donc prendre notre temps pour réagir à une situation ou décider de ne pas le faire immédiatement. Qu’est-ce qu’une victoire ? Ce n’est pas d’avoir le dernier mot, mais de garder sa dignité ou ne plus laisser le pouvoir à l’autre de nous affecter, mettre nos limites et décider de ce que nous allons vivre et accepter, à nos conditions aussi.
  • Ne pas attendre la preuve de l’agression pour réagir.
  • Identifier ses alliées et alliés, briser l'isolement en dénonçant la situation auprès du syndicat et de l’employeur.
  • Ne pas hésiter à voir un médecin pour l’informer de la situation et obtenir une preuve médicale des impacts de la situation sur nous, preuve qui pourra être utilisée au besoin.
  • Nommer les choses, dire la vérité dans le moins de mots possibles, sans se justifier.
  • jokes game job
  • Être en forme
  • Gérer le stress
  • Être de meilleure humeur
  • Disposer de plus d'énergie
  • Bénéficier d'antidépresseurs naturels
  • Régulariser ses émotions
  • Faciliter toutes les autres activités
  • Recueillir le plus d'informations possibles au moyen, par exemple,
    de lectures, de rencontres de témoins, de recherches sur les ressources et les cas similaires.
  • Présenter les demandes aux personnes en position d’autorité qui pourront
  • prendre les décisions, et s'assurer d'une réponse claire avant d'aller plus loin.
  • Sensibiliser le plus de personnes possibles à notre cause (l'entourage, la famille, les médias).
  • Mobiliser les personnes et les ressources qui nous appuient.
  • Maintenir ses pressions sur les personnes en position d’autorité,
    susceptibles de prendre les décisions.
  • Publiciser la cause pour rompre le silence.
  • Évaluer les résultats.

Pour une bonne forme physique et mentale

De nombreux emplois demandent des efforts physiques, que ce soit de façon continue ou plus intermittente. De plus, après dix ou quinze ans de métier, nous sommes plus fortes mais aussi plus vieilles ! Lucie Charbonneau, spécialiste de la mise en forme, nous propose des conseils.

Quand votre sens de l'humour n'est plus capable d'en prendre…

Les caractéristiques du harcèlement sexuel

  1. Une conduite à connotation sexuelle
  2. qui est non désirée et
  3. qui présente un effet de durabilité ou harcelant, c'est-à-dire qui cause un traumatisme continu par sa répétition ou par ses conséquences.
Les travailleuses en non-trad disposent de plusieurs moyens pour agir dans leur milieu

de travail afin que cesse le harcèlement sexuel. Encore une fois, faire partie d’un réseau de travailleuses ou d’étudiantes peu être d’un grand secours : pour bien identifier ce que l’on vit, dédramatiser à l’occasion, pour l’entraide, des références et, surtout, pour y trouver des alliées !

Les informations suivantes sont extraites de la Boîte d'outils pour combattre le harcèlement sexuel au travail de Liza Novak et Josée Néron, qui ont animé l’atelier sur ce sujet. Le droit québécois et fédéral interdit le harcèlement fondé sur le sexe et reconnaît la responsabilité de la personne qui harcèle et de l'employeur. De plus, l'obligation d'assurer un milieu de travail et de formation sain est aussi prévue. Différentes ressources existent pour vous conseiller sur les recours possibles et vous guider dans le choix de la solution juridique la plus appropriée, s'il y a lieu de le faire. Mais en même temps que ces recours vous sont offerts, vous avez des moyens d'agir pour recouvrer un milieu de travail sain, exempt de harcèlement.

Une stratégie d'action

  1. Se donner un but. Ce but pourra être, par exemple, d'obtenir un milieu
    de travail exempt de harcèlement.
  2. Se fixer un ou des objectifs. Ces objectifs devront être mesurables et réalistes.
    Un de ces objectifs pourra être de faire cesser le harcèlement.
  3. Se fixer un échéancier pour atteindre nos objectifs.

Il existe de multiples formes de harcèlement sexuel en milieu de travail. Mais quand est-ce du harcèlement ? Les caractéristiques

qui suivent sont reconnues par les tribunaux. Si vous retrouvez ces trois caractéristiques, vous en subissez fort probablement.

  • Bénéficier d'anti-inflammatoires naturels
  • Améliorer sa santé mentale
    en étant davantage positive et disciplinée
  • Prendre soin de soi
  • Obtenir une meilleure concentration
    et une meilleure mémoire
  • Rehausser son image et son estime de soi

Plusieurs bonnes raisons pour faire de l'exercice

Quelques conseils

  • Rester lucides face aux différents produits offerts sur le marché, par exemple les vitamines et les suppléments, tout en expérimentant ceux
    qui semblent intéressants ou qui nous ont été conseillés. Des spécialistes peuvent être consultés, par exemple une naturopathe.
  • « Magasiner » les thérapeutes que nous voulons consulter. La médecine dite traditionnelle dispose souvent de peu de moyens pour régler
    les problèmes de santé, entre autres ceux qui sont reliés aux muscles, aux articulations ou aux nerfs, qui se limitent à prescrire des anti-inflammatoires
    ou à opérer. D'autres types de soins pourraient permettre de régler certains problèmes à la source.
  • Proposer, adapter, inventer et/ou exiger de l'équipement ergonomique et adapté aux femmes, adapté à toutes les statures.

Quelques difficultés

  • Des travailleurs ou des collègues font des blagues sur le dos des femmes.
  • Des travailleurs, des étudiants ou des professeurs voudront surprotéger
    leurs collègues féminines.
  • Plusieurs des difficultés évoquées ont trait à du harcèlement de différents types.
  • Des collègues tenteront de mettre à l'épreuve la patience des femmes
    en non-trad.
  • Plusieurs d'entre elles sont perfectionnistes et par cela, certaines veulent prouver
    quelque chose.
  • Des non-trads se sont imposées d'être les meilleures et les plus performantes,
    même au point de s'en rendre malades.

Apprivoiser le non-trad

« J’ai été au colloque parce que j’avais l’intuition que j’y verrais plus clair par la suite. Je ressentais le besoin de faire le point après deux ans de formation professionnelle. Les ateliers m’ont donné cet espace de réflexion, les témoignages, vos paroles m’ont fait réfléchir. Je suis ressortie du colloque un peu plus nuancée qu'à mon arrivée, mieux informée et, bien sûr, avec l'élan que procure le sentiment de n'être pas "tu'seule de sa gang".

Hélène Guérin, mécanicienne de machines fixes

Lors du colloque, les deux ateliers présentés sur ce thème ont réuni très majoritairement des femmes en non-trad. Celles qui sont les mieux placées pour parler des difficultés qu'elles vivent font également part de certaines solutions qu'elles ont trouvées pour continuer à exercer leur métier ou à se former. Bien qu’il n’existe pas de solutions uniques et miracles, elles vous en transmettent quelques-unes.

Quelques solutions

  • Elles suggèrent d'abord d'en parler en privé aux auteurs des blagues pour avoir une meilleure écoute de leur part plutôt que de répondre agressivement.
  • Elles suggèrent de refuser d'être surprotégées en expliquant les raisons du refus et en tenant compte, dans la façon de le faire, que cela part d'une bonne intention.
  • Plusieurs stratégies peuvent être utilisées pour y faire face. Il en est question plus particulièrement dans le texte intitulé

Quand votre sens de l'humour n'est plus capable d'en prendre…

  • D'abord, il faut savoir que vous serez testées. Elles suggèrent donc d'avoir confiance en soi et de se savoir appuyées, par exemple par une ou un mentor, un réseau ou, plus près de vous encore, vos collègues de travail ou de formation.
  • Être perfectionniste n'est pas un défaut, mais une mise en garde s'impose. En général, la performance ne sera pas jugée de la même façon chez les femmes que chez les hommes.

Elles leur suggèrent de ne pas se transformer et de reconnaître leurs limites. Les réseaux sont des lieux fertiles pour le mentorat. Ils le favorisent et permettent de l'implanter en mettant en contact des femmes ayant vécu des expériences diverses et prêtes à en faire profiter d'autres femmes. Le mentorat est complémentaire au support que peuvent offrir des réseaux. Il permet d'établir une relation privilégiée entre deux personnes, la ou le mentor et une travailleuse ou une étudiante. Le mentorat est soutenu par la passion et basé sur des échanges relationnels. Comme il y a encore très peu de femmes dans plusieurs secteurs d’activité, de nombreuses femmes de métier ont eu des hommes comme mentor professionnel. Ce sont elles qui, aujourd’hui, s’offrent aux nouvelles venues, aux apprenties, aux étudiantes. Mais outre cela, les mentors bénéficient aussi de leurs relations parce que les échanges se font dans les deux sens et qu'elles en ressortent avec une plus grande estime d'elles-mêmes.

Au sein de FRONT, le mentorat est vécu et expérimenté dans toute sa richesse : du conseil au tutorat, du jumelage au marrainage, du partage d’expériences quotidiennes au support de projets demandant plus d’investissement. Dans notre organisme, les mentors ne seront pas nécessairement dans le même milieu que les travailleuses ou étudiantes. Souvent, elles ne pratiquent pas le même métier : en plus du transfert des connaissances, c'est aussi et surtout un savoir-être qu'elles transmettent.

FRONT fait les jumelages par téléphone, par courriel, en personne à l’occasion des différentes activités organisées et même par Internet. De plus, nous sommes en contact avec d’autres organisations pratiquant le mentorat au Québec. En effet, FRONT gère un programme de cybermentorat auquel d’autres organismes participent. À ce jour, plus d’une vingtaine de mentors y sont inscrites dans onze secteurs différents (www.front.qc.ca). De plus, plusieurs abonnées de la liste de discussion viennent y trouver des conseils, des pistes de solution ou célébrer une réussite toute particulière : annoncer la réussite d’un examen redouté, une promotion en emploi ou l’aménagement d’un vestiaire à l’usine !

« Si je n'avais pas eu l'aide d'une mentor, je n'aurais jamais persévéré. » Cette phrase en dit long sur le rôle des mentors en non-trad. La formule est implantée : il reste à la faire connaître pour qu’un nombre encore plus grand de femmes en non-trad puisse en profiter.

Le mentorat à FRONT, comment ?

Les pionnières en emplois non traditionnels sont habituellement très disponibles etsouhaitent aider celles qui les suivent : non seulement elles ouvrent la voie, mais elles donnent aussi le relais ! Elles désirent témoigner de leurs expériences. Cette constatation, si elle ne peut garantir le succès du mentorat en soi, est sûrement un encouragement à poursuivre les démarches entreprises par FRONT et par d'autres organismes pour le développer.

La gestion des équipes mixtes

Le Centre Émersion de Baie-Comeau a conçu un nouveau programme qui s’adresse aux entreprises désireuses d’intégrer des femmes dans des équipes de travail exclusivement masculines. Au colloque de FRONT, l’atelier a permis de faire connaître ce programme.

Pourquoi un programme sur la gestion des équipes mixtes ?

Le but du programme sur la gestion des équipes mixtes (GEM) est non seulement d’intégrer, mais surtout de maintenir les femmes dans des emplois non traditionnels. Le programme vise donc à sensibiliser les dirigeantes et dirigeants d’entreprises et les contremaîtres, à l’intégration des femmes dans des équipes de travail exclusivement masculines et à les former à la gestion de ces équipes.

Bien qu’il ne constitue pas une panacée, GEM est un nouvel outil de sensibilisation qui s’ajoute aux moyens déjà offerts pour favoriser l’intégration et le maintien des femmes en non-trad dans les équipes de travail. Les groupes en développement de l’emploi sont associés étroitement au programme parce qu’il constitue un nouveau moyen mis à leur disposition pour intervenir auprès des entreprises.

Qu’offre-t-il en pratique ?

Cinq cahiers ont été élaborés : le programme, le cahier pour les dirigeantes et dirigeants d’entreprises, le cahier pour les contremaîtres, le cahier de formation des formatrices et des formateurs, et le recueil de textes constitué de lectures suggérées. La durée de la formation est de six heures pour la direction des entreprises et de douze heures pour les contremaîtres.

L’entrée en vigueur toute récente de la Loi sur l’accès à l’égalité en emploi dans des organismes publics (projet de loi 143) a fourni à FRONT une nouvelle occasion pour mettre de l'avant les programmes d’accès à l’égalité (PAÉ). Encore, diront certaines. Eh oui ! Bien des fausses idées courent toujours sur les PAÉ et quoi de mieux que l’information sur ceux-ci pour les rendre plus populaires. Les PAÉ constituent bel et bien un atout pour les femmes en non-trad.

L’accès à l’emploi grâce à un PAÉ n’implique pas qu’une personne visée par le PAÉ soit embauchée à compétences moindres, mais plutôt qu’à compétences égales, cette personne admissible au PAÉ sera privilégiée. Il s’agit donc d’une idée faussement répandue que les personnes embauchées ayant bénéficié d’un PAÉ seraient moins compétentes. Les PAÉ permettent notamment de hausser le nombre de personnes appartenant aux groupes cibles. Ces programmes sont essentiels entre autres parce qu’un nombre encore trop grand de femmes ne peuvent trouver un emploi relié à leurs compétences.

Des femmes croient qu’il y en a partout, des PAÉ !

Non, il n’en existe pas partout. Alors que des PAÉ existaient dans la fonction publique québécoise et canadienne, cette nouvelle loi est venue étendre leur application aux 700 organismes publics québécois qui comptent 100 employés et plus. Il s’agit notamment de municipalités, de commissions scolaires, d'universités, de sociétés d'État et de la Sûreté du Québec.

Le secteur privé n’est pas visé par la loi, mais les entreprises bénéficiant de contrats ou de subventions de 100 000 $ et plus et qui emploient 100 personnes et plus, sont déjà soumises au programme dit d'obligation contractuelle. Sinon, la mise en oeuvre de PAÉ dans le secteur privé demeure volontaire.

Pour plus d'informations, le site de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse peut être consulté (www.cdpdj.qc.ca) ou encore adressez-vous au (514) 873-5146 ou au 1-800-361-6477 (numéro sans frais).

FRONT : Madame Bastien, qu’est-ce qui peut être fait pour que les PAÉ favorisent

réellement l’accès à l’égalité ?

Du nouveau dans les programmes d'accès à l'égalité

Monique Bastien : S'informer, poser des questions et rester alertes. Deux ans s'écouleront avant que les programmes soient mis en place. Certains des organismes visés par la loi appliquaient déjà des programmes volontaires et ces derniers se poursuivent. Mais pendant cette période, tous les organismes visés ont dorénavant une obligation légale de débuter le processus devant mener à l'implantation d'un PAÉ. Les personnes responsables à contacter se trouvent dans les directions des ressources humaines des organismes visés. Elles devront voir à ce que le processus prévu dans la loi soit réalisé. Les directions des organismes visés devront se sentir concernées et seront outillées en conséquence par la Commission. Les travailleuses déjà en emploi doivent s'attendre à être sollicitées pour remplir un questionnaire d'identification qui visera à produire un portrait des effectifs et, entre autres, à déterminer le pourcentage de femmes dans les métiers visés. Ce portrait devra être soumis pour consultation, précise la loi, au personnel ou à ses représentantes ou représentants. Donc, bien que les résultats découlant de la nouvelle loi ne seront tangibles que d'ici deux ans, les prochaines étapes seront cruciales et méritent que les travailleuses et les syndicats y portent attention. Quant aux étudiantes, la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi dans des organismes publics représente un espoir pour ces travailleuses de demain.

Que faire pour que ça marche ?

Nous avons posé la question à madame Monique Bastien, de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, présente au colloque de FRONT pour présenter le projet de loi 143.

égalité

L'industrie de la construction a son propre programme d'accès à l'égalité, mais celui-ci gagnerait à être plus connu, entre autres de la part des femmes pratiquant des métiers de la construction.

Quelques dates

1995 Les femmes constituent 0,2 % de la main-d’œuvre dans la construction. La ministre du Travail de l'époque, Louise Harel, demande à la Commission de la construction du Québec de mettre en place des mesures pour faciliter l'accès et le maintien en emploi pour les femmes dans l'industrie de la construction.

1996 La Commission de la construction du Québec instaure un programme d'accès à l'égalité pour les femmes, programme qui comporte 18 mesures. Un résumé de ces mesures est reproduit dans les actes du colloque de FRONT de 1996.

2000 Une travailleuse représentant les femmes de l'industrie est nommée au conseil d'administration de la Commission de la construction du Québec.

2001 La proportion des femmes dans le secteur de la construction est passée à 0,5 %. Plus précisément, au 31 mai 2001, le secteur de la construction faisait travailler 97 324 personnes; de ce nombre, 511 étaient des femmes. Six travailleuses de la construction, participantes au colloque de FRONT, annoncent qu'elles mettront tout en œuvre pour créer un réseau des travailleuses de la construction.

2006 Selon les objectifs de résultats fixés dans le PAÉ, les femmes compteront pour 2 % de la main-d’œuvre dans le secteur de la construction. S'il n'y a pas 2 000 femmes dans l'industrie, les entreprises ayant dix salariés et plus devront embaucher une femme lors d’une prochaine ouverture de poste.

Des constats

Il y a progression, de 0,2 % à 0,5 %, mais le nombre réel de travailleuses dans l'industrie de la construction demeure très faible par rapport au total des salariés. Certaines des mesures proposées sont appliquées. Par exemple, l’une de ces mesures prévoit que lors de l'embauche, une travailleuse n'a plus à s’assurer d’une garantie de 150 heures de travail de la part de son employeur pour obtenir un certificat de compétence, certificat qui sera valide pendant deux années alors qu'il l'est pendant un an pour les travailleurs. Mais, de toute évidence, ce programme souffre des mesures non appliquées.

Que faire pour que ça marche ?

FRONT s'intéresse à l'industrie de la construction depuis plus de 10 ans. Son expertise du non-trad a été reconnue au moment de l'élaboration du PAÉ et, par la suite, lorsque la ministre d'alors, Diane Lemieux, a procédé à la nomination d'Isabelle Dugré, tuyauteure et actuelle présidente de FRONT, au conseil d'administration de la CCQ. Nous lui avons posé la question.

FRONT : Qu’est-ce qui peut être fait de plus pour que le programme visant l’accès des femmes à l'industrie de la construction, entré en vigueur en 1996, favorise réellement l’accès à l’égalité pour les travailleuses de la construction ?

ISABELLE DUGRÉ : La seule augmentation du nombre de femmes ne saurait résoudre le problème du maintien des femmes dans l'industrie. En effet, 2 % d'une population, ce n'est pas une masse critique pour agir sur le changement des mentalités ! D'où l'importance de tenir différentes activités de sensibilisation, auprès des employeurs et des syndicats, à la présence des femmes sur les chantiers et à la qualité de la main-d'œuvre féminine. Par exemple offrir une formation sur les mythes et réalités associés à la présence des femmes dans l'industrie de la construction. Un appui concret à la mise sur pied d'un réseau de femmes oeuvrant dans l'industrie de la construction, par l’injection de ressources humaines et financières, est aussi absolument nécessaire. Une fois organisées et supportées, ces dernières sauront adapter et pousser plus loin les mesures proposées dans le programme pour l’accès des femmes à l'industrie de la construction. Depuis 1992, FRONT remplit ce rôle avec plaisir et offre son réseau aux travailleuses de la construction. C'est pourquoi nous sommes convaincues de la nécessité d’un réseau de femmes de la construction et du rôle actif qu’il pourrait jouer.

L'accès à l'égalité dans l'industrie de la construction

Nous vous présentons ci-dessous un aperçu des échanges lors de cet atelier.

Des difficultés rencontrées

  • Des étudiantes font état qu'elles sont exclues de certains enseignements et qu'elles doivent terminer leurs cours sans toutes les connaissances requises.
  • La discrimination et le sexisme demeurent les plus grandes difficultés rencontrées
  • par les femmes en formation.
  • Trop souvent, les professeurs et les directions des écoles invoquent qu'ils ne peuvent rien faire face au problème posé par des étudiants ou des professeurs qui font du harcèlement.

Quelques moyens pour soutenir les étudiantes en non-trad

  • Instaurer et maintenir un degré de tolérance zéro face au sexisme, au harcèlement
  • et à toutes les formes de discrimination envers les étudiantes et les enseignantes en non-trad.
  • Sensibiliser les professeurs et les directions des écoles à prendre position pour favoriser la présence des femmes en formation professionnelle, dans un environnement d'étude qui est sain et exempt de harcèlement.
  • Présenter des conférences-témoignages de femmes oeuvrant dans leur domaine d’étude.
  • Faire connaître leurs difficultés pour que les autorités concernées (commissions scolaires, directions des établissements, employeurs, etc.) instaurent des pratiques plus égalitaires.

La formation professionnelle, un club sélect réservé aux hommes ?

Encore une fois, quelles sont les personnes les mieux placées pour parler des difficultés vécues pendant la formation professionnelle et des moyens pour changer la situation ? Bien entendu, les étudiantes, les enseignantes et les femmes qui sont passées par là.

Les échanges ont débuté après une brève présentation d’une enquête réalisée par FRONT en 1999 dans trois centres de formation professionnelle sur les conditions d’étude et de placement des étudiantes dans les secteurs de l’aérospatiale, de l’automobile et de la construction. Cette enquête est complétée par une série de mesures pouvant améliorer les conditions d’étude des étudiantes.

Une vidéo traitant des mythes et réalités liés aux femmes en formation et en emploi non traditionnel viendra boucler ce projet triennal.

La présentation de l’enquête Relance au secondaire en formation professionnelle, du ministère de l’Éducation, a aussi suscité de vives réactions. En apprenant qu’en mars 2000, les finissantes en mécanique automobile, par exemple, gagnaient 60 $ de moins par semaine que les finissants et que la différence entre le taux de chômage des apprentis-mécaniciens et celui des apprentiesmécaniciennes est de 15 %, il y a matière à discussion !

« (…) Le sentiment qui me tient le plus à cœur en ce moment est d’avoir partagé avec vous, sans avoir été jugée ou contestée. Tellement différent des attitudes que nous vivons trop souvent dans le métier. Les filles, vous m’avez rafraîchie ! (…) »

Chandra Labelle, étudiante en mécanique de véhicule lourd routier, spécialité autobus

La plénière du Colloque 2001 de FRONT aura été un des moments les plus fertiles en émotions et en engagements de la part des participantes elles-mêmes. En effet, après deux journées de formation et de discussion, autant sur leurs conditions d’étude et de travail que sur le thème des réseaux, les femmes présentes au colloque FRONT : un réseau, des réseaux étaient mûres pour s’impliquer à leur tour dans le regroupement des forces ! Durant plus d’une heure, les participantes se sont relayées aux micros pour annoncer et prendre différents engagements. Bien que certains apparaissent plus sensationnels que d’autres, ils sont cependant tous réalisables, à la mesure de leurs auteures ! Et surtout, tous ces engagements découlent d’une volonté commune : celle de contribuer à rejoindre d’autres étudiantes, d’autres travailleuses, encore isolées, celles-là ! Des exemples ? Les unes se sont engagées à distribuer des cartes postales de FRONT à toutes les étudiantes de leur centre de formation et les autres à fonder un réseau semblable à FRONT en France ! Des travailleuses de la construction convieront leurs consœurs à démarrer un réseau dans leur secteur et d’autres s’activeront à jeter les bases de réseaux régionaux ! On nomme les lieux que sont les syndicats dans lesquels les travailleuses doivent s'impliquer et trouver des alliés, femmes ou hommes. Besoin d’une salle, d’un local pour une activité ? Pourquoi pas les centres de formation professionnelle ? Quelques enseignantes présentes au colloque sont prêtes à vous en faciliter l'accès. Contactez des organismes en développement de l'emploi, des centres de femmes de votre région, qui sont à l'origine d'activités permettant aux travailleuses et étudiantes, tous secteurs confondus, de se rencontrer. Et, bien sûr, FRONT !

À ces lieux physiques, ajoutez Internet ! Et ce qui demeure essentiel, c'est l'implication dans FRONT. Faire connaître l’organisme aux autres femmes, défaire les préjugés accolés à un regroupement féministe, pour répondreaux besoins des travailleuses et des étudiantes en non-trad, pour continuer d'avancer. Participer à un réseau, participer à FRONT ?

Toutes ces femmes y voient un appui formidable pour pratiquer le métier qu'elles ont choisi. Plus que jamais, FRONT se renforce et crée des alliances par l'énergie et la volonté de ses membres. Une participante lance un défi aux 152 femmes présentes : que chacune trouve une autre femme pour le prochain colloque de FRONT en 2003, ou peut-être avant !

À très bientôt !

La plénière

« (…) Grâce à l'organisme FRONT (entre
autres), j'ai pu m'accrocher à ma passion,
à mon rêve d'être une non-trad qui me
coule dans les veines probablement depuis
ma conception, tout en laissant évacuer
la pression de temps à autre. Cela m'a
aussi permis de poursuivre une troisième
recherche d'emploi avec succès (…)
J'ai décroché un emploi dans mon
domaine, dans un endroit pas mal,
pour quelques mois et, depuis mars 2001,
j'ai changé d'emploi (et cela pour le
mieux) suite à une application faite sur
un emploi affiché sur le site Internet de
FRONT. Ma vie s'est améliorée à 100 %
à tous les niveaux ainsi que mon estime
personnelle parce qu'entre autres, je fais
enfin ce que j'ai toujours voulu dans des
conditions saines et j'en suis fière.
(…) Quelquefois, il y a beaucoup de
temps qui s'écoule avant d'avoir un premier
contact avec FRONT pour différentes
raisons : d'où l'importance de continuer
d'afficher, d'en parler et de sensibiliser
notre entourage à propos de l'organisme
FRONT et cela partout dans la province
(même au-delà de l'Atlantique). On sait
toutes le bien que cela peut faire de
se sentir appuyées par des gens qui comprennent
ce qu'on peut vivre. La solidarité
entre femmes est une force incroyable
qu'il ne faut pas négliger, car elle nous
permet d'aller très loin.
Merci à FRONT et à toutes les non-trads que
j'ai rencontrées jusqu'à maintenant, pour la
passion de leur travail, notre vie quoi ! »
Lucie Desrochers, assembleure