Il y a quatre-vingts (80) Centres de femmes ou Québec. On
peut donc perler d'un véritable réseau. Pourtant, mis
à part les milieux où elles sont implantées, ces
ressources alternatives ne sont guère mentionnées dans
les médias et dans les officines gouvernementales.
Il y a une sorte de parenté entre les Centres et les
femmes qui les fréquentent: les deux sont et se sentent
quasi-Invisibles, oubliés bien souvent des documents
officiels, des projets de politiques et des lieux de
décision.
Conformément à son mandat, l'R des Centres de femmes
du Québec entreprend donc des discussions avec les Instances
décisionnnelles pour obtenir enfin une véritable
politique de financement des Centres de femmes. Sans
remettre en cause l'action volontaire des centaines de femmes
bénévoles qui font vivre les Centres depuis le
début, nous croyons qu'il est légitime d'exiger de
l'État un soutien financier qui assure aux Centres une base
de fonctionnement stable et durable. Mais... ce n'est pas la
première fois que nous écrivons cela.
C'est à partir des années 80 que les Centres de
femmes se sont multipliés dans la province. Nous l'avons dit
souvent, mais 11 nous faut le répéter encore: la mise
sur pied d'un si grand nombre de Centres en quelques années
seulement n'est pas, ne peut pas être, un accident de
parcours. Ce n'est pas l'État qui a créé ces
organismes, ni des institutions en mal de racines dans la
communauté. Ce sont les femmes elles-mêmes.
Chaque Centre a son histoire. La plupart, cependant ont
été mis sur pied par des femmes du milieu, soit
bénévolement, soit à la faveur de programmes de
création d'emplois. Pourquoi ces femmes ont-elles ainsi
donné naissance à des Centres auxquels elles ont
consacré tant de temps et d'énergie? Il ne fait aucun
doute que les idées féministes y sont pour quelque
chose. Ces idées ne sont plus l'apanage d'une minorité,
comme au début des années 70, elles s'enracinent dans
le quotidien. Les femmes commencent à rêver d'une autre
vie où elles ne sont plus les servantes, où elles font
des choix autonomes, où elles ont des droits.
Il est important de comprendre le sens et la portée de la
mise sur pied des Centres de femmes avant d'entreprendre des
discussions sur leur financement. Certain-es, pour simplifier la
prise de décision concernant le financement des Centres,
aimeraient voir le Regroupement choisir les lieux d'Implantation
des centres, définir et préciser jusqu'à
l'excès les besoins des usagères et les terrains et
modalités d'Intervention. À ce stade-ci, Indiquons
simplement que des organismes Issus du milieu, ayant comme
objectifs de favoriser une recherche d'autonomie chez les femmes
et de concourir au changement des mentalités n'ont pas
à se faire imposer une réduction de leurs champs
d'activités. L'esprit même d'un Centre de femmes, c'est
son aptitude à se "coller" aux besoins exprimés "sur le
terrain" par les principales concernées.
Ceci étant dit, l'R des Centres de femmes a tout de
même, entrepris depuis deux ans de clarifier la mission des
Centres de femmes. Le document "Les Centres de femmes parlent
argent - l'état de leur financement", publié en
novembre 1986 est très explicite sur l'origine et la
vocation des Centres ainsi que sur leurs problèmes de
financement. Nous avons aussi participé à plusieurs
commissions gouvernementales dans le but, entre autre de faire
valoir les besoins des Centres de femmes (Commission Rochon,
Commission Parizeau, Commission permanente du Secrétariat
d'État, etc.) À chaque fois, nous avons rappelé
les grandes lignes du cadre de référence qui est
propre aux Centres: Les Centres de femmes sont:
Ces caractéristiques trouvent leur prolongement dons des
activités qui, bien que diversifiées, peuvent être
regroupées en quatre grandes catégories: des services
de soutien individuel et collectif, des activités
éducatives , des actions collectives, de la recherche et de
l'expérimentation. (1)
L'ensemble des interventions reliées à ces
catégories sont considérées par les Centres comme
des outils de changement individuels et sociaux. Nous ne pouvons
donc dissocier, par exemple, le support à une femme en
difficulté et des ateliers sur la violence,
l'auto-défense ou la ménopause. La démarche de
fond est la même:
- Permettre à des femmes isolées, souvent démunies, d'entreprendre avec d'autres femmes, un processus d'autonomie
sur divers plans: économique, affectif, social.
-
Annexe I: Les Centres de femmes parlent
argent,p. 16 et 17.
Une politique de financement des Centres de femmes doit
reconnaître la pertinence de ce cadre global de
référence. Nous accueillons des femmes en tant que
personnes dans leur totalité et notre Intervention est
conséquente. Contrairement à d'autres groupes de femmes
axés sur des problématiques spécifiques, nous
sommes et voulons demeurer des "généralistes". Le
Centre est un carrefour, un lieu de rassemblement, de
réflexion féministe sur la vie des femmes ici et
aujourd'hui, c'est ce qu'il doit demeurer.
La majorité des femmes qui fréquentent les Centres
sont des travailleuses au foyer. Leurs revenus sont modestes,
voire insuffisants. Beaucoup sont cheffes de familles
monoparentales et parmi elles, nombreuses sont celles qui
subsistent de l'aide sociale. Nous accueillons aussi des femmes
de milieux plus aisés vivant des situations de rupture, de
violence ou de solitude.
Les femmes que nous recevons sont âgées
majoritairement de 35 à 50 ans. Elles ont des enfants dont
elles ont la responsabilité quasi-exclusive. Bien sûr,
les Centres accueillent aussi d'autres femmes plus jeunes ou plus
âgées, puisqu'ils sont ouverts à toutes, sans
distinction d'âge, de race, de classe ou de culture.
La clientèle régulière des Centres fait donc
très souvent partie de la génération
charnière, qui a remis en question les rôles
féminins traditionnels, surtout au sein de la famille, mais
n'a pas été outillée pour assumer pleinement de
nouveaux choix. Il faut admettre que depuis 15 ou 20 ans, les
changements ont été brutaux, pour les femmes et pas
nécessairement planifiés. Entreprendre une
démarche personnelle d'autonomie, de conquête de son
espace, individuel et social, c'est une chose. C'en est une autre
que d'être contrainte subitement à l'Indépendance,
suite au départ d'un mari ou suite à l'expérience
traumatisante de la violence ou de l'agression sexuelle.
Les femmes de 35 - 50 ans sont profondément
troublées, désemparées devant l'effondrement des
certitudes de leur jeunesse et devant la responsabilité
qu'elles ont maintenant de repenser toute leur vie et celle de
leurs enfants. De plus, elles se sentent très seules devant
ces difficultés. Depuis nombre d'années, elles n'ont eu
que leur propre famille, comme milieu social et que leur maison
comme milieu de vie. Les acquis des luttes des femmes ne sont pas
encore leurs acquis, souvent à cause des conditions
sociales et matérielles dans lesquelles elles vivent.
Beaucoup de femmes n'ont pas d'amies (encore moins d'amis),
pas de réseau, pas de loisirs en-dehors de la famille. C'est
dans un isolement inimaginable en 1987 mais pourtant réel,
qu'elles vivent. Pas de travail, pas d'argent, tout concourt
à faire d'elles des Individues insécures,
dévalorisées, déprimées.
On comprendra alors qu'une grande partie de ces femmes
recourent à des moyens divers pour tenter de diminuer leur
anxiété ou, pour se confier et être aidées.
Parmi ces moyens l'utilisation d'alcool et de tranquillisants
revient souvent. Les nombreuses visites chez le médecin
révèlent des malaises du coeur et de l'esprit beaucoup
plus que des problèmes physiques. Les femmes recherchent
aussi l'aide des psychologues ou des travailleurs sociaux. Des
intervenantes dans les Centres nous disent que plusieurs femmes
viennent au Centre après un ou plusieurs séjours en
hôpital psychiatrique, suite à des
dépressions.
En somme, c'est un portrait peu rose de la réalité
féminine qui nous est révélé dans les Centres
de femmes. Mais, après tout, ce portrait corrobore
parfaitement toutes les données révélées
parles enquêtes les plus récentes, par exemple: la
féminisation de la pauvreté, l'ampleur des
responsabilités des femmes par rapport aux enfants, le haut
taux d'hospitalisation et de traitement des femmes pour
dépressions, la proportion effarante de femmes
violentées et / ou agressées sexuellement, etc.(1)
Si les problèmes majeurs des femmes sont aujourd'hui
connus et répertoriés, les institutions agissant
souvent, elles, comme si les femmes, en tant que personnes
globales, étaient invisibles. Il faut avoir un problème
empêchant à peu près tout fonctionnement normal
et social pour que l'on reconnaisse le caractère urgent
d'une intervention. Même à cela, il s'écoule
souvent beaucoup de temps entre la révélation d'un
problème et le soutien aux organismes (presque toujours
communautaires) qui s'en préoccupent.
1. Annexe II : Quelques statistiques sur la situation
des femmes québécoises
Le malheur, pour ainsi dire, de nos usagères - enfin, de
la plupart d'entre elles - c'est de ne pas être
complètement dysfonctionnelles, pas encore... C'est seule,
entre les quatre murs de sa maison qu'une femme broie des
idées noires, consomme trop d'alcool ou de médicaments,
subit la violence verbale ou physique d'un conjoint, se laisse
déborder par des enfants exigeants... C'est quasi-invisible
et souvent, ça ne laisse pas de traces. Sauf au coeur
d'elle-même.
Nos quatre-vingts (80) Centres rejoignent entre 150 000 et 200
000 femmes par année. (1) Les femmes ne s'adressent pas
toutes au Centre en verbalisant les difficultés que nous
venons de décrire. Nombreuses sont celles qui
téléphonent, en quête d'informations diverses. Les
femmes qui se présentent à l'accueil expriment souvent
le désir de rencontrer d'autres femmes, d'échanger,
d'acquérir de nouvelles connaissances. Par contre, il arrive
aussi qu'une femme demande du support en rapport avec un
problème précis. Dans ce cas, le Centre lui offre
plusieurs possibilités: une aide individuelle, la
référence à un autre organisme, la participation
aux activités du Centre, etc.
L'intervention individuelle pratiquée dans les Centres
est différente de celle des CSS ou des CLSC. Il n'y a pas ou
peu d'entrevues planifiées. On n'ouvre pas de dossier. Cela
ne veut pas dire qu'au Centre une femme n'est pas
écoutée. Au travers des ateliers, des
café-rencontres, des activités collectives, des
discussions informelles ou des actions menées par le Centre
dans le milieu, les femmes parlent de leurs problèmes, se
donnent du support, cherchent ensemble des solutions.
- Annexe III: Statistiques de fréquentation dans
quelques Centres de femmes
L'orientation de l'intervention dons un Centre de femmes,
c'est de privilégier une approche féministe. Il
s'agit de permettre aux femmes de se réapproprier l'ensemble
des choix qui dirigent leur vie, que cela concerne leur
santé, leur bien-être, leur autonomie financière,
leurs relations sociales, leur maternité, etc. Nous partons
du principe que toute femme, même si elle vit des
difficultés Importantes, porte en elle des germes d'espoir
et de changements. Et ce germe peut grandir si l'individue trouve
le soutien qui lui permet d'avancer.
Le Centre se rend responsable de donner cet appui. Les femmes
qui frappent à nos portes ne se verront pas ballottées
d'un endroit à l'autre, comme c'est souvent le cas dans le
réseau Institutionnel. Si nous les référons à
une ressource plus spécialisée, nous nous assurons
qu'elles reçoivent effectivement de l'aide et nous
demeurons, pour elle, un pôle de référence dans
leur milieu.
Un aspect de notre orientation attire beaucoup de femmes dans
les Centres, c'est la globalité de notre analyse et, de
notre Intervention. Pour nous, une femme ne se caractérise
pas principalement par une maladie ou un problème social.
Lorsqu'elle se présente au Centre, on ne lui demande pas de
quel symptôme elle souffre, elle n'est pas
étiquetée. On s'occupe d'elle, comme personne.
On ne lui dit pas "tu es malade", on chemine avec elle vers une
autonomie retrouvée.
Certaines femmes ont besoin d'une aide axée sur des
problèmes spécifiques et plusieurs groupes de femmes ou
organismes gouvernementaux répondent à ce besoin,
à juste titre. Mais il existe d'innombrables femmes, celles
dont nous parlons depuis le début de ce texte, qui vivent un
malaise généralisé se traduisant par une perte
d'estime d'elles-mêmes, un énorme manque de confiance
en elles et un immense sentiment d'isolement.
Les intervenantes des Centres connaissent bien ces
problèmes dont elles ne sont pas exemptes, elles-mêmes.
En effet, quelle femme peut affirmer être à l'abri, une
vie durant, de la violence, du doute, des ruptures, etc. Leur
expérience de vie, associée à une formation
académique et / ou pratique, leurs années de travail
avec et auprès des femmes garantissent la qualité de
leurs interventions. On les dit "non-professionnelles" au sens
peut-être corporatiste du terme, pourtant les
infirmières et travailleuses sociales "professionnelles" des
CSS et des CLSC, de même que des médecins leur
réfèrent beaucoup de femmes. Au fond, si l'on nous
permet de comparer notre situation à celle des
médecins, l'on pourrait dire que nous sommes les
médecins généralistes alors que les
spécialistes se retrouvent dans d'autres ressources
communautaires ou institutionnelles.
Notre expertise, c'est l'intervention féministe.
Dé-culpabilisation des femmes, réponse à des
besoins diversifiés, prise en charge de l'usagère par
elle-même, socialisation avec les pairs, analyse des
conditions économiques et sociales qui discriminent les
femmes, recherche de solutions collectives, implication dans la
communauté, rapports égalitaires entre intervenantes et
usagères, voilé comment nous travaillons. Les femmes se
rendent enfin compte qu'elles n'ont plus à se sentir
anormales et marginalisées parce qu'elles ont des
problèmes. Elles réagissent "normalement" dans une
société qui, elle, fonctionne souvent de façon
inéquitable et discriminatoire.
Les témoignages que nous joignons à ce texte (1)
expriment éloquemment l'attachement des femmes à leur
Centre. En quelques mois, pour plusieurs, en quelques
années, pour d'autres, des femmes passent d'une situation de
dépendance et de dépression à une vie
transformée. Elles sont capables d'identifier et d'exprimer
leurs besoins et de les faire respecter. Un bon nombre entreprend
un retour aux études et / ou au travail. Elles ont
maintenant des amies et un milieu d'appartenance: le Centre de
femmes. Après un an ou deux, au Centre, les usagères
s'impliquent plus directement dans l'organisation des
activités. Certaines choisissent plutôt de participer
à des comités d'écoles, de faire un pas vers la
vie politique ou, tout simplement, d'effectuer des tâches
bénévoles dans un organisme du milieu.
Bien sûr, ce ne sont pas toutes les usagères qui
agissent ainsi. Mais celles qui n'ont pas d'Implication sociale
ont tout de même changé de façon importante leur
façon de vivre. Elles sont désormais des
personnes capables de prendre leur vie en main.
1. Voir annexe IV: Témoignages
d'usagères.
Nous croyons que oui, et à plus d'un titre. De
façon générale, c'est ce ministère qui a le
mandat de voir au bien-être physique et mental de la
population. C'est une mission gigantesque qui nécessite la
mise en place d'énormes ressources matérielles et
humaines. Le MSSS Intervient, en principe, à partir de la
prévention et du dépistage des problèmes
sanitaires et sociaux, jusqu'à la résolution des
difficultés plus graves.
Dans les faits, cependant, les restrictions budgétaires
des dernières années ont amené le MSSS à
resserrer ses priorités et à privilégier une
approche curative face à des problèmes
particulièrement criants. C'est une façon de
procéder qui est compréhensible, à court terme.
Mais elle a ses limites. Elle freine l'accessibilité aux
services sociaux chez des individu-e-s qui en auraient
éminemment besoin. De plus, comme société, nous
devons être prêts à Investir dans la
prévention des problèmes sanitaires et sociaux si nous
voulons briser le cercle de la dépendance aux
médicaments, aux professionnels et aux institutions.
Venant de là, nous pensons que les Centres de femmes
représentent un lieu privilégié où les
femmes comptent les unes sur les autres pour se prendre en
mains plutôt que sur des "béquilles", que ces
béquilles s'appellent: tranquillisants, alcool, travailleuse
sociale ou psychiatre.
Comment d'un strict point de vue financier, le MSSS
pourrait-il ne pas trouver cette approche intéressante? Sans
parler des résultats sur le plan humain et du droit des
femmes à disposer de leur vie.
De façon plus spécifique, nous aimerions souligner
l'implication des Centres de femmes en rapport avec trois
problématiques qui préoccupent le ministère: la
santé mentale, la violence faite aux femmes, la protection
de la jeunesse.
1, Annexe V. Les Centres de femmes parlent
argent,p. 27
Dans le projet de politique de santé mentale pour le
Québec déposé récemment parle Comité
Harnois, l'existence de problèmes particuliers aux femmes
est reconnu. À la page 160 du document, on remarque que " la
fréquence des dépressions est plus élevée
lorsque les personnes ne travaillent pas à l'extérieur
de leur lieu de résidence...que ce sont les femmes qui en
souffrent plus que les hommes et que les personnes
séparées ou veuves de même que celles qui ont un
niveau d'instruction peu élevé, ce qui correspond en
général à un faible niveau socio-économique,
y sont plus vulnérables."
On reconnaît là plusieurs caractéristiques des
usagères des Centres de femmes. Par ailleurs, le Comité
constate à la page 129 que "les femmes consultent le
médecin, généraliste ou spécialiste, trois
fois plus souvent que les hommes pour des problèmes d'ordre
psychique. Elles reçoivent deux fois plus de traitements
médicaux psychiatriques, elles ont une consommation de
médicaments nettement plus élevée et les
problèmes d'ordre psychique sont une cause d'invalidité
plus importante chez elles,"
Par la suite, le rapport recommande que le Comité de la
Santé mentale du Québec travaille avec le Conseil du
statut de la femme " à l'examen des formes et
modalités d'Intervention les plus adaptées à la
condition des femmes" (page 130). Puisque le rapport mentionne
aussi les multiples initiatives des groupes de femmes dans ce
domaine, nous osons croire que si une démarche "officielle"
d'étude s'enclenche, nous y serons associées.
Nous l'avons démontré dans les pages qui
précèdent, nos Centres accueillent de nombreuses femmes
aux prises avec un "mal-être" profond qui en fait souvent
des bénéficiaires des services de santé et des
services sociaux dispensés par l'État. La démarche
que nous leur proposons est moins coûteuse,
financièrement, pour l'État et la société et
elle rapporte beaucoup. En effet, comment une société
ne profiterait-elle pas de la contribution économique et
humaine de tous les Individus qui la composent, femmes ou hommes?
Encore faut-il favoriser chez toutes et tous l'apprentissage, de
l'autonomie, de la capacité de choisir et d'agir. C'est ce
que nous faisons.
Un dernier mot sur la problématique de la santé
mentale. La vague récente de désinstitutionnalisation a
amené dans quelques-uns de nos Centres, des femmes aux
prises avec des problèmes importants. C'est
particulièrement évident dans les Centres situés
à proximité des hôpitaux psychiatriques. Nos
Centres tentent tant bien que mal de répondre aux besoins de
cette clientèle particulière. Cela ne se réalise
pas sans peine. Nous avons peu de ressources humaines et
matérielles et nous ne recevons aucun support technique et
professionnel des Institutions qui nous réfèrent leurs
expatientes. Il est parfois possible d'Intégrer ces
femmes dans nos activités régulières, pour
d'autres, c'est impossible.
Nous ne voulons ni fermer nos portes à ces femmes en
difficulté, ni être la solution commode pour des
institutions qui visent la réintégration sociale
d'individu-e-s très démuni-e-s. Les Centres
concernés doivent être consultés par ceux qui leur
réfèrent des femmes et ils doivent recevoir un soutien
particulier, sous diverses formes.
En 1985, le MSSS publiait sa politique d'aide aux femmes
violentées, signifiant ainsi toute l'Importance qu'il
accordait à ce dossier. Récemment, le réseau des
Malsons d'hébergement pour femmes victimes de violence se
voyait attribuer des ressources financières accrues.
Même si ces ressources sont jugées encore insuffisantes
par les principales concernées, à juste titre, il
semble clair que le Gouvernement du Québec reconnaît
désormais sa responsabilité dans la recherche de
solutions pour enrayer ce fléau social.
Ce qui n'est pas reconnu, cependant, c'est le rôle des
Centres de femmes en rapport avec la violence conjugale. La
politique d'aide du Ministère parle d'activités
préventives mises sur pied par des Centres de jour et le
récent plan triennal de la ministre à la Condition
féminine mentionne les Centres de femmes aussi, à
l'Intérieur des ressources pour femmes victimes de violence.
Cependant, aucune action gouvernementale n'est prévue pour
soutenir ce volet de nos activités.
Soyons claires: nous n’avons pas et nous ne
désirons pas avoir le leadership de l'action auprès des
femmes violentées. Depuis plus de dix ans, le réseau
des Maisons d'hébergement s'acharne à faire
connaître cette réalité. Il a développé
une réflexion Importante et des ressources
Irremplaçables.
Il faut reconnaître cependant que ni les Maisons
d'hébergement ni les institutions telles les CLSC ou les CSS
ne peuvent suffire à l'immense tâche d'aider les 300
000 femmes violentées du Québec. Un autre fait s'ajoute
à ce premier constat: beaucoup de femmes (certainement trop)
hésitent longuement avant d'envisager un départ de la
maison et de couper les liens qui en font les victimes de leur
conjoint. Elles hésitent même révéler la
situation d'agression. Elles la vivent dans la honte et le
silence.
C'est dans ce contexte qu'il faut comprendre le rôle du
Centre de femmes. À travers les conversations informelles,
les activités éducatives ou les entrevues
individuelles, les femmes finissent par parler de la violence
qu'elles subissent. Celle-ci n'est pas toujours physique, mais on
sait que le terrorisme verbal et le harcèlement
psychologique sont souvent le prélude à une situation
où les coups se mettent à pleuvoir. Le Centre aide les
femmes à prendre conscience de ce danger Elles
reçoivent alors le support des autres femmes et des
intervenantes. Comme pour tout autre problème, le Centre
offre aux usagères concernées différentes
possibilités de solutions: la référence à
une Maison d'hébergement vient d'abord mais si les femmes se
refusent pour l'instant à quitter le foyer conjugal, elles
trouvent au Centre une aide et un soutien constant dans la
démarche de remise en question qu'elles entreprennent.
Nous recevons aussi des femmes qui se sont installées
dans un appartement après un séjour en Maison
d'hébergement. Ces femmes se sentent souvent bien seules
dans un nouveau milieu et le Centre leur permet de
s'intégrer à la communauté.
Enfin, plusieurs Centres organisent des cours
d'auto-défense, des café-rencontre sur la violence et
des activités de sensibilisation du milieu, (0 en
collaboration avec des maisons d'hébergement,
principalement, mais aussi avec certaines professionnelles des
CSS et des CLSC. En tout, soixante-quinze pour cent (75%) de nos
Centres sont impliqués dans cette problématique et y
consacrent, en moyenne vint-cinq pour cent (25%} de leur
temps. Ce n'est pas négligeable!
Nous croyons, en conséquence, que le MSSS doit
reconnaître une place aux Centres de femmes au niveau de la
prévention, du dépistage, et du support aux femmes
violentées.
1. Par exemple, production d'un dépliant sur la violence,
rencontrée avec des policiers, recherche sur le lien
pornographie-violence, etc.
Qu'est-ce qu'un Centre de femmes a à voir avec cette
problématique? Beaucoup! Nous voulons ici nous attarder
surtout à la situation des enfants négligés. On
dit qu'il y en a 16,000 au Québec. Ils grossissent les
listes d'attente des CSG sans qu'on puisse mettre fin à ce
phénomène. Par qui sont-Ils négligés ces
enfants? Par leur mère, bien sûr! Le père, lui,
n'est même plus là ou c'est tout comme.
Or qui sont ces mères? toutes les études sur la
question et toutes les Intervenantes qui agissent sur le terrain
disent la même chose: les mères dites
"négligentes" sont des femmes seules, pauvres, démunies
effectivement et socialement.(1) Elles assument une lourde
responsabilité, celle de soigner et d'éduquer des
enfants dans une société exigeante à cet
égard et bourrée de contradictions sur le plan des
valeurs.
- Demers, Dominique. Les enfants battus, in
Actualité, octobre 87, p.70- 80.
Les enfants ont le droit d'être aimés et soutenus
dans le long processus qui fera d'eux et d'elles des êtres
autonomes. Leurs mères aussi ont ce droit. Le Centre
de femmes est ce lieu où une femme peut enfin se sentir
valorisée, aimée, aidée. Au Centre, on lui fait
voir qu'elle a du pouvoir sur sa vie, limité peut-être,
mais présent.
Cet espoir d'améliorer ses conditions de vie ne peut
qu'amener des transformations importantes dans la relation d'une
mère avec ses enfants. On ne donne pas ce qu'on n'a pas.
Quand une femme se sent isolée, blessée, impuissante,
non-aimée, elle ne peut Inspirer à son enfant des
sentiments de confiance, de sérénité, le goût
d'entreprendre et de partager.
Des travailleuses sociales ont compris comment un Centre de
femmes pouvait être bénéfique à une
mère en difficulté et elles nous réfèrent
régulièrement des femmes. Plusieurs Centres ont
d'ailleurs mis sur pied des halte-garderies pour permettre une
plus grande participation des mères aux activités.
Nous souhaitons que le ministère nous reconnaisse un
rôle de prévention et de support auprès des femmes
qualifiées de "mères négligentes".
Nous demandons ou ministère de la Santé et des
Services Sociaux de soutenir l'intervention sociale et
communautaire des Centres de femmes en rapport principalement
avec les problématiques suivantes:
- la santé mentale
- la violence conjugale
- la protection de la jeunesse
Nous lui demandons de reconnaître le rôle
indispensable des Centres dans le soutien qu'ils apportent aux
très nombreuses femmes québécoises en
démarche d'autonomie économique, affective,
intellectuelle et sociale. Ce processus lent et souvent
pénible s'impose dans une société en mutation
où les femmes veulent désormais occuper la place qu'il
leur revient.
Nous demandons que l'ensemble de nos modes d'intervention
soient considérés dans leur globalité, puisqu'ils
s'adressent à des personnes prises comme un tout. Les modes
d'intervention suivants sont privilégiés:
- Des services de soutien individuel et collectif (accueil,
écoute, référence, accompagnement, suivi)
- Des activités éducatives
- Des actions collectives
- La recherche et l'expérimentation
Le MSSS n'est pas notre seul bailleur de fonds. Le MEQ, par le
biais de la DGEA, soutient partiellement les activités
éducatives mises sur pied par les Centres et le
Secrétariat d'État subventionne l'action collective. Le
MSSS n'a donc pas à assumer la totalité des coûts
d'opération d'un Centre de femmes même, si à
notre avis, il doit augmenter substantiellement son aide.
Dans le document "Les Centres de femmes parlent argent"
(p.35), nous réclamions la mise en place d'un comité de
concertation MSSS - MEQ - S.É -afin de coordonner les
efforts pour la consolidation des Centres de femmes . Cette
demande est plus que jamais d'actualité et nous souhaitons
non seulement que ce comité voit le jour mais que l'R des
Centres de femmes y soit étroitement associé.
Le budget minimum d'un Centre de femmes se chiffre
à 70 000 dollars, tel qu'expliqué en page 35 du
document "Les Centres de femmes parlent argent. Ce budget
comprend les items suivants:
- Frais d'opération: 10000$
- Frais de soutien: 5 000$
- Frais d'activités: 5 000$
- Salaires: 50 000$
Ceci constitue une base minimale pour assurer un
fonctionnement décent et stable à chacun des Centres
de femmes. Par ailleurs, nous pensons que tous les Centres, quel
que soit l'endroit où ils sont implantés ont besoin
d'au moins deux intervenantes.
- En région éloignée, le Centre de femmes est
très souvent la seule ressource pour femmes en
difficultés, à des kilomètres à la ronde. Le
Centre dessert alors non seulement les femmes de sa localité
mais aussi celles des localités environnantes. Les
intervenantes sont isolées et ont besoin de se donner un
appui mutuel.
- En régions urbaines, la densité de la population
est très grande et justifie un minimum de deux travailleuses
par Centre pour organiser les activités et recevoir les
Centres.
En plus des subventions gouvernementales, les Centres
recueillent de l'argent au sein de la communauté, demandent
une contribution modeste aux usagères ( inscriptions aux
activités, cartes de membres), utilisent certains programmes
d'emplois, sans compter les nombreuses heures bénévoles
données par les usagères et les travailleuses, etc...
Les Centres explorent aussi des possibilités de soutien
matériel et technique de la part des institutions et des
municipalités.
Nous demandons au MSSS de fournir environ les deux-tiers du
montant global de 70 000$, c'est à dire 50 000 dollars.
Nous croyons qu'il s'agit lé d'une part équitable du
budget de 70 000 dollars étant donné les
responsabilités importantes des Centres en matière de
santé et de services sociaux.
Nous demandons qu'un montant de 25 000 dollars soit
accordé aux Centres dès leur ouverture. En
effet, aussitôt qu'un Centre est Incorporé (ou en vole
de l'être), qu'il a trouvé un local et qu'il a un plan
de travail, il doit pouvoir compter sur une permanence stable et
efficace. Il faut constituer un réseau de
bénévoles, l'encadrer, développer les
activités, etc. Par la suite, les Centres disposeront de
deux permanentes, ce qui leur permettra d'organiser efficacement
l'ensemble des services, de répondre aux demandes
grandissantes du milieu, de mettre des projets sur pied et de
développer d'avantage leur expertise.
Nous demandons aussi que les subventions du MSSS soient
versées pour trois ans à partir de la deuxième
année d'opération.
Si la reconnaissance du travail accompli par les
Centres de femmes n'est pas qu'un mot, elle doit absolument, et
dès maintenant, se traduire par un soutien financier
adéquat de la part du gouvernement du Québec.
Les Centres de femmes ne sont pas des salons de thé pour
femmes désoeuvrées. Ce sont des lieux chaleureux et
dynamiques où beaucoup de femmes retrouvent une raison de
vivre, de croire en elles-mêmes et d'espérer. Ces
Centres ont le droit de demander qu'on leur permette de
travailler dans une relative sécurité et ce qu'ils
demandent est bien peu, comparé aux ressources dont dispose
le réseau public des Services Sociaux et de Santé.
Nous espérons trouver auprès du Ministère de la
Santé et des Services Sociaux et de la Ministre, Madame
Thérèse Lavoie-Roux, une oreille attentive à nos
besoins et la compréhension que nous estimons
mériter.
- Que le Ministère de la Santé et des Services
sociaux soutienne l'intervention sociale et communautaire des
Centres de femmes, en rapport principalement avec les
problématiques suivantes:
- La santé mentale
- La violence conjugale
- La protection de la Jeunesse
- Que nos modes d'intervention soient considérés dans
leur globalité puisqu'ils s'adressent à des personnes
prises comme un tout. Les modes d'intervention suivants son
privilégiés:
- Services de soutien Individuel et collectif
- Activités éducatives
- Actions collectives
- Recherche et expérimentation
- Que le MSSS prenne l'initiative de mettre sur pied un
comité de concertation avec le Ministère de
l'Éducation (Québec) et le Secrétariat d'État
(Ottawa) afin de coordonner les efforts pour la consolidation des
Centres de femmes. Que l'R des Centres de femmes du Québec
soit étroitement associé à cette
démarche.
- Que le MSSS contribue au financement de chaque Centre de
femmes du Québec pour un montant minimum de 50 000 dollars
annuellement.
- Que dès la première année d'ouverture, le MSSS
accorde 25 000 dollars au Centre.
- Qu'à partir de la deuxième année le Centre
reçoive 50 000 dollars par année et ce, pour trois
années consécutives après quoi le Centre aura
à produire une nouvelle demande de subvention pour trois
ans.
- Que le MSSS augmente l'enveloppe destinée au
Regroupement, lui permettant ainsi de mieux remplir son rôle
de support et de formation auprès des Centres.
La participation des femmes aux activités des Centres,
à titre de participante, de bénévole ou de membre
du conseil d'administration constitue en elle-même un moyen
de s'exercer à l'autonomie et l'affirmation de soi et
de combattre la dépendance et la victimisation. Rien de
mieux que de mettre la main à la pâte pour apprendre et
du même coup, constater ses possibilités, jusque
là insoupçonnées.
Une ressource locale polyvalente, légère et
accessible
L'évolution des besoins des femmes de même que la
spécificité des besoins locaux justifient le
caractère polyvalent des Centres. Parce qu'ils sont
collés aux femmes du milieu, les Centres, et les
femmes qui y travaillent, peuvent offrir les services et les
activités qui répondent aux véritables besoins.
Ils sont des antennes locales.
C'est l'accessibilité du Centre, sa souplesse et sa
polyvalence qui ont permis à Madeleine de faire un
cheminement échelonné sur plusieurs années et des
apprentissages diversifiés, dans un milieu cohérent et
global. On l'a accueilli avant tout comme une femme, non comme un
«cas», une «patiente», une
«bénéficiaire» ou une «cliente». On
a justement empêché que Madeleine ne devienne un cas
nécessitant l'intervention d'institutions et de traitements
aussi lourds que coûteux.
Le champ d'intervention des Centres de femmes est la condition
féminine dans son ensemble qui prend une couleur
locale dans chaque Centre. Jusqu'à maintenant, les Centres
ont privilégié le domaine de la santé
globale et la prévention de la violence puisque les besoins
y sont nombreux. La condition économique des femmes est
aussi une des préoccupations majeures.
Les Centres sont des ressources complémentaires aux
autres ressources alternatives pour femmes qui s'occupent de
problématiques ou de groupes spécifiques. Pour des
problèmes de violence conjugale par exemple, les Centres
vont référer les femmes aux maisons
d'hébergement. Les Centres de femmes ne remplacent pas
les autres ressources, leur rôle est différent.
Du fait qu'ils forment un large réseau, ils sont souvent
le seul pôle de référence des femmes dans
certaines petites villes. Leur polyvalence n'est pas seulement
une nécessité cependant, elle est surtout un choix.
Dans dix ans, dans quinze ans, que seront les besoins des femmes?
Bien d'autres choses encore, si on prend les quinze
dernières années comme témoins du changement
à venir. La polyvalence et la souplesse des Centres leur
aura permis, s'ils ont les moyens financiers pour continuer leur
action, de s'enraciner encore plus dans la communauté et de
s'ajuster aux besoins de l'heure.
CADRE DE RÉFÉRENCE
Le Secrétariat d'État a répertorié plus de
65 activités différentes. Celles-ci s'organisent autour
de trois principaux volets: les services, l'éducation et
l'action qui sont des modes d'intervention,
c'est-à-dire des façons d'intervenir dans les
problématiques choisies, auxquels s'ajoutent la recherche et
l'expérimentation.
Modes d'intervention
Les Centres privilégient les modes d'intervention
suivants:
- Les SERVICES apportent un soutien individuel et
collectif:
- accueil et référence
- écoute active
- consultation individuelle
- accompagnement dans les démarches (avocat, aide sociale,
médecin)
- suivi individuel (alcool, médicaments, menaces de
violence)
2. Les ACTIVITÉS ÉDUCATIVES visent la
sensibilisation et l'acquisition de connaissances propres à
donner des outils de changement:
- ateliers, cours, dossiers sur la condition féminine:
pornographie, inceste, violence conjugale, harcèlement
sexuel, santé mentale, condition économique
- implication des femmes à la gestion collective du
Centre, à l'accueil et au soutien
3. Les ACTIONS COLLECTIVES concernent les gestes posés
collectivement pour sensibiliser et changer les mentalités
et revendiquer les droits des femmes:
- campagne contre la pornographie et l'obtention de
règlements municipaux sur l'étalage des revues
pornographiques
- groupe d'action en santé mentale
- sensibilisation large: interventions médias, 8 mars,
publications, etc.
- actions pour la mise en place des programmes d'accès
à l'égalité, pour le maintien de l'indexation des
allocations familiales, pour la création des maisons de
naissance, etc.
- création d'autres ressources alternatives
4. La RECHERCHE ET L'EXPÉRIMENTATION visent
l'exploration de problématiques nouvelles ou de nouvelles
approches:
- recherches-action sur la santé, recherches sur la
pornographie et! la violence conjugale, sur l'autonomie
financière à l'intérieur du couple, jeu sur la
famille moderne, etc.
- nouveaux services et cours tels "Obsession de la minceur",
"Les Chanceuses", etc.
QUELQUES EXEMPLES DE COURS ET D'ATELIERS
- Odyssée-ménopause
- Médicaments et alcool
- Se reconnaître comme femmes
- Obsession de la minceur
- Les Chanceuses-Cheffes de familles monoparentales
- Nouveau départ
- Gestion du stress
- Femme et économie
- Mieux vivre dans son corps
- Partage des tâches
- Droit matrimonial et familial
- Notre sexualité
- Le marché du travail apprivoisé
- Vivre sa solitude
• Préparation psychologique à la retraite
Le quotidien de la violence Femmes et lois Wendo —
Auto-défense Mécanique automobile Droits de la famille
Auto-santé
Massage et gymnastique douce Ateliers d'écriture Les
aînées — vieillissement Femmes et l'argent
Relations mère-adolescente Pornographie Autonomie
financière
Approches privilégiées
- l'entraide et le groupe
- la dévictimisation
- la prise en charge
Modèle de développement
Les Centres de femmes se sont développés en grand
nombre guidés par le besoin de créer une ressource
locale et accessible. Le modèle de développement tend
vers la décentralisation régionale. Dans des grandes
régions comme la Gaspésie et l'Abitibi, les Centres
s'acheminent vers la création d'antennes dans les nombreux
villages, éloignés les uns des autres. Le modèle
de grand Centre régional serait tout à fait contraire
à la dynamique actuelle. Les Centres de femmes ne
veulent pas devenir de grosses boîtes et fuient
l'institutionnalisation, la hiérarchie et la
bureaucratie.
QUELQUES STATISTIQUES SUR LA SITUATION DES FEMMES
QUÉBÉCOISES
Le revenu moyen des Québécoises était de 11
758$ en 1985, celui des Québécois était de 21
139$.
En 1985, 45,6% des femmes cheffes de famille gagnaient moins
de 10 000$ par année
En 1981, selon un sondage Gallup, 37% des femmes
considéraient que leur mari participait
régulièrement aux tâches ménagers.
En 1985, au Québec, on estime à près de 300 000
femmes, le nombre de femmes de plus de quinze ans, victimes de
violence conjugale.
Chiffres tirés de:
Gingras, Anne-Marie et Hélène Sarrazin. Portrait
socio-économique des Québécoises et des
Canadiennes, Fédération des femmes du Québec,
mars 1987.
Ministère des Affaires sociales. Une politique
d'aide aux femmes violentées, Québec,
2°trimestre 1985.
QUELQUES STATISTIQUES DE FRÉQUENTATION DES
CENTRES DE FEMMES
Les Centres de femmes n'ont pas encore mis au point un
système uniformisé de statistiques. Toutefois, nous
tenons à Introduire ici quelques éléments
statistiques produits par des Centres de femmes
représentatifs. Ces chiffres indiquent que les Centres de
femmes rejoignent un grand nombre de femmes et donc
répondent à des besoins réels.
Centre des femmes de Shawinigan
- Appels: 1 950 femmes (relation d'aide, références,
informations,etc.)
- Visites: 900 femmes
- Cafés-rencontres: 540 femmes
- Programme pour femmes cheffes de familles: 25 femmes
- Atelier sur la ménopause: 30 femmes
Centre d'information et de référence du Lac
Mègantlc
- 1 116 femmes
La Maison des femmes des Bois-Francs
(Victoriaville)
- Ateliers, rencontres de formation: 300 femmes
- Appels: 2 500 femmes (relation d'aide, références,
info., etc.)
- Relation d'aide: 67 femmes
- Soupes-midi: 12 femmes par semaine
- Activités collectives: 350 femmes -Membres: 180
femmes
Centre femmes d'aujourd'hui: (Québec)
- Appels: 6 343 femmes (relation d'aide, références,
Informations, etc.) -Visites: 1 831 femmes
- Cafés-croissants: 500 femmes
- Cafés-rencontres: 1 050 femmes
- Groupes d'entraide: 35 femmes
- Ateliers: 133 femmes
- Principaux problèmes: dépression, violence,
santé mentale.
Centre des femmes du Plateau Mont-Royal
(Montréal)
0 Age de la clientèle: . 18-29 ans: 15% .
30-39 ans: 35% . 40-49 ans: 265% . 50 ans et plus: 24%
0 La majorité des femmes qui fréquentent
le Centre vivent seules: . 55 %: ne vivent pas avec d'autres
adultes . 22%: sont cheffes de famille monoparentale
0 La situation financière des femmes est
précaire:
. 37%: bénéficiaires de l'aide sociale
. 10%: chômeuses
. 42% salariées (bas revenu)
. 5%: revenu du conjoint
. 5%: rentières
. 55% ont un revenu annuel inférieur à 10 000$
. 80% ont un revenu annuel Inférieur à 20 000$
0 Les principales raisons qui amènent les
femmes au Centre: . Isolement, rupture conjugale,
dépression, toxicomanie. Accessibilité: le Centre est
près de chez elles et les coûts
d'inscription sont minimes
. Ambiance: elles aiment l'ambiance accueillante et
chaleureuse . Etre entre femmes: elles aiment se retrouver et
échanger entre femmes et créer des nouveaux liens
0Statistiques téléphoniques
. 4 000 appels par année (relation d'aide,
références, info, etc.)
-centre des femmes de verdun inc.
STATISTIQUES DE FREQUENTATION 1986-1987
ANNEXE 1
ANNEXE 2
RELEVE DES APPELS ET VISITES DE L'ACCUEIL 1985-86
ANNEXE 3
Statistiques tirées du manifeste De la reconnaissance:
oui du financement aussi, publié par la Table de
concertation des groupes de femmes de l'est du Québec,
région 01
ANNEXE 1
PORTRAIT DE LA PRATIQUE DE L'ENSEMBLE DES CENTRES DE FEMMES
DE LA REGION AU COURS D'UNE ANNEE
Nous estimons à environ 15,000 le nombre de femmes
rejointes directement par le biais d'activités
collectives.
TEMOIGNAGES
Vous trouverez ici quelques témoignages écrits par
des femmes qui fréquentent actuellement les Centres de
femmes. Nous avons dactylographié les textes manuscrits en
ne corrigeant que les fautes d'orthographe et la ponctuation.
Nous n'avons touché ni aux contenus, ni au choix des mots,
ni à la structure grammaticale.
Soupes-midis... Commentaires
"S.M. " comme "santé mentale ", priorité de la
Maison des femmes. C'est fini, du moins pour
l'été... Les soupes du mercredi, c'est d'la santé
mentale "alternative", alternative à l'isolement par
l'échange qu'on y a vécu, par l'écoute et
l'accueil qu'on y a reçus. C'est pas compliqué, sans
cérémonie: à 4 à 12 ou 20, on se rassemblait
autour d'une table et on découvrait nos ressemblances; on se
rapprochait malgré nos différences d'âge,
d'occupation et de préoccupations.
Des soupes qui te sortent de la maison et de l'ordinaire
pour venir faire un brin de causette et peut-être
vivre ...des amitiés nouvelles...j'ai l'âme
à la tendresse... "
À bientôt!
Montréal, Je 7 octobre 1987
J'écris ces quelques mots pour vous parler de
Info-femmes, qu'est-ce que ça m a apporté. Je
trouve gué je me sens bien dans ma peau, mieux qu'un an
auparavant et je suis capable de m'exprimer mieux. Je peux dire
ce qui fait pas mon affaire au lieu de garder ça pour moi
j'aime beaucoup aller à mes cours affirmation de
soi.
Quand j'ai commencé à aller à Info-femmes,
j'étais après faire une dépression nerveuse
et elles m'ont beaucoup aidée à m'en sortir. J'avais
fait une hémorragie cérébrale et j'avais de la
misère à accepter ça à .52 ans.
Maintenant, j'accepte ma maladie et je m'encourage pour
après. Je remercie celles qui m'ont fait
connaître Info-femmes et j'espère que ça va
continuer parce que j'ai toujours hâte d'y retourner Ça
me fait du bien et je retrouve d'autres gens qui ont des
problèmes eux aussi.
Pauline Carrier
Le 21 octobre 1987
A qui de droit,
Je suis une des nombreuses femmes faisant partie du Centre
des femmes du Plateau Mont-Royal. Je spécifie
(ou)je tiens à dire que cet endroit m'est
vraiment d'une utilité certaine, pour ne pas dire
"nécessaire "pour différents besoins, services
et utilités et de même que ses activités gui ne
sont pas sans répondre à des besoins
majeurs.
Étant donné que j'espère toujours retourner
sur le marché du travail, via le retour aux études,
démarches entreprises. Pendant le temps
d'intermédiaire, je profite donc
commeje le mentionnais plus haut, entre autres des
activités présentes gui, je dois le dire,
m'apportent cette aide morale tout en me renseignant de
façon précise, ce qui est très important et
mefait éviter, dans une certaine manière,
l'isolement et de contempler mes quatre murs. Car, il va
sans dire que le fait de n'être pas surle marché
du travail amène l'isolement. Alors, pour combattre
cela, je vais chercher à ce Centre les appuis et
distractions nécessaires à ma survie morale.
J'ajoute ici que sais pertinemment, très bien, que beaucoup
d'autres femmes comme moi et de tous âges se
réconfortent à l'idée que cette maison existe
toujours dans le but d'aller chercher "l'outil"
nécessaire.
Si ce Centre n'existait pas, beaucoup trop de femmes,
hélas!se retrouveraient bien démunies
lorsqu'elles voudraient se "sortir " de leur isolement.
Micheline Mailloui
Centre des femmes du Plateau Mont-Royal
Centre d'éducation et d'action des femmes de
Montréal
Montréal, décembre 87
MA MA
Ta vie est changée
"Mama, qu'est-ce que tu fais? Mama c'est "platte",je veux
de l'eau."
"Pouf" Quand t'es une mère...voir la maison
tranquille... ça n'arrive pas souvent. Le Centre des
femmes m'aide à sortir un peu du foyer.
C'est très important de prendre l'air. Ne vous trompez
pas, je vous aime très gros, mes enfants. Mais, J'ai besoin
de m'oxygéner de temps en temps.
Vous qui me lisez, vous ne pouvez pas entendre mon accent,
mais je suis anglaise, et j'ai besoin de voir d'autres
femmes, de tous les âges, de parler avec les plus
vieilles pour leur sagesse, avec les plus jeunes pour que leur
jeunesse me rappelle que je n'ai que 25 ans.
Mon implication au journal m'a permis d'améliorer mon
français, tellement que le monde de Montréal me
comprend. Même ailleurs, je suis capable de me
débrouiller: dans les magasins, les hôpitaux, au
téléphone et même dans la famille de mon
mari qui est français!!!
Je commence à prendre en main ma vie et je cherche les
moyens de me trouver car depuis quelques années je me
suis perdue...
Ça peut paraître égoïste,
mais,paspourKylie, c'est la première
fois de ma vie que je pense à moi et que je ne me
sens pas coupable. Si je suis heureuse, mes enfants le seront
aussi.
À force d'écrire, de parler, d'être avec les
Québécoises, mon français s'améliore
et je prends déplus en plus confiance en moi. Et demain, je
serai plus forte.
kylie
Linda Hundle. Travaux communautaires
TEMOIGNAGE
J'étais désespérée et un appel au Centre
Avec des Elles m'a redonné espoir. J'étais une femme
violentée, je voulais mourir au lieu de révéler
mes souffrances à mes amies. J'ai téléphoné
au Centre. On m'a écouté, on ne m'a pas fait la
morale. On a attendu que je prenne moi-même la
décision de partir, sans me bousculer, en respectant ma
rationalisation.
Après environ six mois, j'étais prête à
partir. Sur mon appel, une animatrice du Centre est venue me
chercher chez moi pour me conduire à une maison de
transition.
Le pas à franchir est tellement effrayant qu'il faut
absolument du support pour franchir les étapes une à
une. Il faut avoir quelqu'un à qui se confier quand la
souffrance est trop difficile à supporter. Il faut discuter
des décisions qu'on a à prendre quand on n'est plus
sûr de son jugement et de sa valeur.
Ça fait maintenant presque un an que j'ai pris la
décision de ne plus me faire violenter physiquement et
moralement. J'ai beaucoup de batailles légales à
livrer, je dois réapprendre à vivre seule, à me
valoriser, à me traiter en douceur. Ce sont mes amies du
Centre qui m'aident à survivre et à revivre.
Jeanne-Marie
desquels nous pouvons évaluer la rentabilité? Le
Petit Robert nous donne une définition simple mais
intéressante. Rentable: qui donne un bénéfice
suffisant, des résultats et vaut la peine. Synonymes:
fructueux et payant. Nous parlons donc ici de rentabilité
sociale des Centres de femmes, dont l'impact
socio-économique est réel mais, malheureusement, encore
sous-estimé ou peu visible.
L'activité des Centres de femmes est rentable de
plusieurs façons:
- En intervenant sur la santé mentale et physique des
femmes et en prévenant la violence, elle empêche que
des problèmes sociaux s'accentuent et
dégénèrent en "cas lourds" qui coû
teraient beaucoup plus cher à la société, non
seulement en argent mais en perte de qualité de vie. La
progression des maladies mentales au Québec est un signe de
cette dégradation des rapports sociaux dans une
société d'abondance. Or, à peine 5% du budget
consacré à la santé va aux activités de
prévention.
- Les Centres contribuent à améliorer la qualité
de vie des femmes en favorisant des appren tissages
multiples et intégrés dans un cadre humain et familier.
On peut parler de prise en charge globale qui va de
l'identification des causes d'un problème à la
participation active des femmes pour trouver des solutions pour
elles-mêmes, puis s'impliquer dans des actions collectives
de changement. Il s'agit d'une approche globale ou holistique qui
a le mérite de s'intéresser aux femmes pour ce qu'elles
sont en entier et non en morceaux.
- Les coûts d'opération d'un Centre de femmes —
de $20,000 à $25,000 en moyenne — sont beaucoup moins
élevés que ce qu'il en coûte dans les
institutions. Parce qu'il est une res source souple et
légère, le Centre de femmes peut faire beaucoup avec
peu. Les coûts du séjour d'une femme en psychiatrie
à l'hôpital Louis-Hippolyte Lafontaine était de
$180 par jour en 1982, soit $32,850 par année.
- Enfin, donnée non négligeable, les Centres de
femmes sont créateurs d'emplois et de servi ces, ce
qui a une incidence positive sur l'économie.
Faut-il ajouter ici que l'objectif des Centres de femmes n'est
toutefois pas d'être rentable. i La rentabilité des
Centres est une conséquence de la poursuite d'un objectif:
l'autonomie des (femmes, guidé par la recherche
d'égalité et d'équité.
Le nécessaire soutien gouvernemental
Nous espérons avoir démontré qu'un soutien
gouvernemental substantiel, à la mesure des besoins
réels des Centres de femmes, est nécessaire et
constitue un investissement rentable pour le mieux-être des
femmes.
Tout le monde sait bien que sans mise de fonds, il est
difficile de faire fructifier ses affaires. Comment un Centre de
femmes peut-il aller de l'avant, faire des prévisions
budgétaires, investir dans la formation du personnel et des
bénévoles, faire des plans triennaux, et même
investir dans la recherche de financement sans savoir si dans six
mois il aura l'argent nécessaire pour payer le loyer et
embaucher des intervenantes? Bref sans argent, il est impossible
de se développer, tout est toujours à recommencer ou
presque.
La recherche de financement absorbe actuellement le tiers du
temps et en supposant que celle-ci est faite par les
travailleuses rémunérées, elle absorbe le quart
des revenus. Sur un budget total de $70,000 dont 70% soit
$49,000 est consacré aux salaires — budget-type d'un
Centre, toutes subventions confondues — il en
coûte donc $16,000, soit le tiers du temps salarié,
pour générer $54,000. C'est donc 23% du budget qui
passe à la recherche de fonds, ce qui n'est absolument pas
rentable, ni du point de vue gestion financière, ni du point
de vue gestion des ressources humaines.
Il en coûterait moins cher pour les Centres d'embaucher
des leveurs de fonds payés à 10% des sommes recueillies
et de consacrer toutes les énergies au travail du Centre.
Situation purement fictive cependant, puisque, comme nous
l'avons déjà démontré, il est tout à
fait impossible de financer complètement les Centres de
femmes par des fonds privés. S'il y avait des excep-
Comité de la politique de santé mentale. Pour un
partenariat élargi, projet de politique de santé
mentale pour le Québec, Québec, 3° trimestre
1987.
Demers, Dominique. Les enfants battus, In
Actualité, octobre 1987, p. 70 -80.
Gingras, Anne-Marie et Hélène Sarrazin. Portrait
socio-économique des Québécoises et des
Canadiennes/Fédération des femmes du Québec,
mars 1987.
L'R des Centres de femmes du Québec, Les Centres de
femmes parlent argent, l'état de leur
financement, novembre 1986.
Ministère des Affaires sociales. Une politique d'aide aux femmes violentées, Québec, 2° trimestre 1985.
Santé, Bien-être social Canada. Actes du colloque
national sur les femmes et la toxicomanie, 1986.