Dans ce document, les termes du genre masculin désignent autant les femmes que les hommes et ce, dans le simple but d'alléger le texte.
Ce rapport présente les résultats d'un projet de recherche sur l'analphabétisme et les besoins en éducation des adultes francophones de la région Tri-Cities, c'est-à-dire: Maillardville (Coquitlam), Port Coquitlam et Port Moody. Cette recherche a été effectuée de novembre 1993 à juin 1994.
Éducacentre, le service d'éducation et de formation des adultes en français en Colombie-Britannique ayant déjà à son actif deux recherches similaires, il a été décidé de ne pas se concentrer uniquement sur les besoins en alphabétisation, mais d'élargir le plan d'ensemble pour englober également les attentes des francophones au niveau de l'éducation des adultes.
Dans un premier temps, vous trouverez dans ce document les hypothèses et objectifs de départ, un bref portrait de la population francophone de Maillardville, les approches et contacts établis en début de parcours.
Par la suite, nous vous présentons le sondage effectué, l'analyse des résultats et les projets spéciaux qui complètent la recherche. Le rapport se termine par des recommandations.
Comme vous pourrez le constater, Maillardville est une ville riche d'un passé intense. Nous posons donc un regard vers le passé, pour nous tourner résolument vers l'avenir avec une communauté qui est prête à apprendre, et à nous apprendre beaucoup en retour.
Au départ, Éducacentre, le service d'éducation et de formation des adultes en français en Colombie-Britannique entrevoyait la possibilité de réaliser un projet de recherche auprès de la population de Surrey. Cette ville de la vallée de la rivière Fraser présente une expansion peu commune et pour le moment, les francophones bénéficient des services d'une seule association. Notre méconnaissance du milieu, autant au niveau des besoins en alphabétisation qu'en éducation de base, pouvait s'avérer un stimulant étonnant dans la mise sur pied d'un tel projet.
Toutefois, selon les exigences inhérentes à une telle recherche, et d'après les recommandations du Secrétariat national d'alphabétisation, nous avons ciblé une autre population francophone susceptible de nous apporter des résultats probants: Maillardville.
À Maillardville, malgré une population francophone élevée (1925 habitants en 1991), il est difficile, voire impossible, de trouver des services en éducation pour adultes en français.
On peut, dès lors, poser l'hypothèse qu'il existe bien des besoins en alphabétisation et en éducation. Reste à définir clairement ces besoins et attentes, afin d'entreprendre des actions correspondant à la réalité locale.
Nous savons, par des études précédentes menées par d'autres organismes, que la population de Maillardville est vieillissante et que nous pouvons rejoindre cette partie de la communauté via les différentes associations existantes. Par contre, nous ignorons tout de la tranche de population des 30-55 ans. Selon les statistiques de l'étude de Formaction1, les 30-55 ans sont nombreux et nous tenterons de les identifier et de cerner leurs besoins réels au niveau de l'alphabétisation et de l'éducation.
Au début du projet, en novembre 1993, n'ayant pas les résultats dé la recherche de Formaction, nous avons entrepris de découvrir qui étaient les analphabètes de Maillardville. Il s'agissait en fait de compléter un profil de la population francophone par le biais d'un sondage, de rencontres, d'entrevues, et de connaître les besoins en éducation pour les adultes de langue française. Nous voulions acquérir une certaine connaissance du milieu en approchant les différents organismes tant francophones qu'anglophones, éducatifs et sociaux.
Il s'agissait en fait d'une approche de sensibilisation auprès de la communauté. Nous voulions mieux connaître la population afin de s'assurer d'implanter des ateliers en alphabétisation et formation de base adéquats.
En janvier 1994, suite à la publication de la recherche Formaction, nous avions désormais plus d'informations sur le profil de la communauté francophone de Maillardville et sur ses besoins relatifs à l'éducation. Nous avons pu redéfinir nos objectifs de recherche et nous concentrer sur la sensibilisation du milieu, sur la reconnaissance en alphabétisation et sur les besoins en éducation des adultes francophones de Maillardville.
Les objectifs restaient sensiblement les mêmes, avec peut-être davantage d'acuité et d'emphase sur la sensibilisation de la population francophone à l'alphabétisation et à l'éducation en français. Nous voulions mettre des visages derrière les chiffres et tenter de comprendre le milieu pour être en mesure d'en tracer un portrait fidèle.
Les objectifs révisés étaient:
Les similitudes entre les populations francophones de Maillardville et Powell River sont nombreuses. Tout comme à Powell River, c'est le travail qui attire d'abord les familles des pionniers. C'est le travail qui leur permettra de gagner leur vie (uniquement en anglais) et même leur sentiment d'appartenance à la Colombie-Britannique se développera par le biais du travail, comme on a pu le constater dans le projet d'histoire orale3.
«C'est une des pistes que nous avons voulu suivre, puisque l'analphabétisme reflète une division du travail qui se traduit dans le rapport avec l'écriture»4. Une main-d'œuvre peu scolarisée engendre bien souvent un haut taux d'analphabétisme chez une population âgée.
On a d'abord voulu dénombrer les analphabètes de Coquitlam et éventuellement mettre sur pied des ateliers d'alphabétisation qui correspondraient à la réalité régionale de Maillardville.
Avant toute chose, il faut bien connaître la clientèle visée pour offrir les bons services. C'est ce que la recherche de Powell River nous avait permis de découvrir.
Utilisant les expériences acquises des recherches antérieures, il nous semblait essentiel de créer des liens dès le départ dans la population francophone et de mieux saisir la réalité avant d'amorcer tout processus de recherche. Il s'agissait aussi de créer un partenariat avec un organisme francophone de Maillardville. Le but de la recherche étant de déboucher sur des actions concrètes, à priori des ateliers en alphabétisation et en éducation de base, il s'avérait important d'identifier un organisme qui pourrait récupérer le travail. Dès le départ, de par son importance dans la communauté, la Société Maillardville-Uni, mieux connue comme étant organisatrice de Festival du bois, a été approché pour être, dans un premier temps un partenaire de recherche et, éventuellement, un point de service.
C'est ce qui a été fait par l'animateur recherche, M. Louis Beaucage, qui a rencontré les personnes responsables des divers organismes francophones, les porte-paroles des associations ou organismes anglophones de Coquitlam et toute personne des secteurs économique, social, scolaire et municipal afin de saisir un portrait de la population de Maillardville.
Nous voulions également déterminer les possibilités pour Éducacentre de développer des ateliers d'alphabétisation, mettant ainsi à notre disposition des données indispensables pour la mise sur pied d'un tel projet.
Les stratégies d'action se résument ainsi:
En favorisant le plus possible une approche directe, les moyens utilisés pour réaliser les stratégies d'action ont été:
Maillardville est situé à environ 30 kilomètres de Vancouver, au cœur de Coquitlam, à l'est de la métropole. La ville est en bordure de la rivière Fraser, d'où vient sa réputation pour la coupe et la transformation du bois. Étant à proximité du Pacifique, Maillardville jouit d'un climat côtier fort agréable.
De Maillardville se dégage une atmosphère de village canadien-français. Le quartier «francophone» se démarque assez facilement des autres quartiers. On peut le remarquer entourant l'église Notre-Dame-de-Lourdes et s'étirant même jusqu'à l'église Notre-Dame-de-Fatima bâtie en 1946.
Au coin du boulevard Lougheed et de la rue Brunette, on sent de la part des francophones de Maillardville, la tentative de recréer un ancien village. D'ailleurs, la signalisation est bilingue et plusieurs rue portent un nom français comme les rues Lebleu, Poirier ou Brunette. Jusqu'à un organisme anglophone, un centre pour artistes, porte un nom français: La place des arts. L'atmosphère «francophone»est également plus vivante étant donné que les associations et événements de la communauté francophone sont centralisés principalement dans ce quartier.
En jetant un coup d'œil à la carte ci-dessous, vous pourrez localiser Maillardville plus précisément par rapport aux villes et quartiers environnants.
[Voir l'image pleine grandeur]
Maillardville possède une population que l'on pourrait qualifier de stable, avec 82,500 habitants (recensement de 1991). Pour vous donner un aperçu plus fidèle de la population francophone de Maillardville, nous avons reproduit les tableaux de la recherche Formaction6 selon les variables de la langue maternelle, le groupe d'âge et le sexe.
Langue maternelle
Langue maternelle | Total | |
Français simple et multiple Autre langue maternelle simple et multiple Total |
1925 |
2% |
Source: Statistique Canada, Recensement 1991, données non publiées, échantillon de 20%.
En 1991, 1925 (2%) francophones habitaient Coquitlam. Ce qui est intéressant de noter, c'est que 35% (665) des francophones ont entre 25 et 44 ans. C'est le groupe d'âge qu'on veut tenter de rejoindre par le biais de notre questionnaire.
Groupe d'âge
Groupe d'âge | Français simple et multiple | |
0-14 ans |
80 |
4% 100% |
Source: Statistique Canada, Recensement 1991, données non publiées, échantillon de 20%.
Sexe
Sexe | Français simple et multiple | |
Féminin Masculin Total |
1080 |
56% |
Source: Statistique Canada, Recensement 1991, données non publiées, échantillon de 20%.
Coquitlam est une ville dont l'économie repose majoritairement sur le secteur tertiaire: le commerce, les finances, les transports, les services publiques, hospitaliers, communautaires et éducatifs représentent 74% du marché économique.
La construction à elle seule se situe aux environ de 10%, puisqu'il y a régulièrement plusieurs projets de développement en cours.
Coquitlam a un taux de croissance constant. L'économie est bonne et diversifiée. La scierie Interfor, qui aujourd'hui compte quatre usines, a gardé l'accès aux rives du Fraser et emploie environ 1200 travailleurs dans les différents processus de transformation du bois.
Lors du recensement de juin 1991, 64.5% (1190) des francophones âgés de 15 ans et plus, faisaient partie de la population active.
Au niveau des professions, on constate que 14% (165) des francophones de Coquitlam occupaient en 1991 les trois postes suivants: professeurs aux niveaux primaire et secondaire, secrétaires et sténographes, ainsi que vendeurs.
Professions
Professions | Français simple et multiple | |
Toutes les professions |
1190 |
100% |
Source: Statistique Canada, Recensement 1991, données non publiées, échantillon de 20%.
Le tableau sur les groupes de professions illustre de façon plus détaillée les différents secteurs de travail. On peut donc voir que 31% (370) des francophones travaillent dans les secteurs des services et du personnel administratif. Qu'environ 22% (250) étaient actifs en 1991 dans les secteurs de l'administration et du bâtiment. Et que 8% (95) des francophones se spécialisent dans le domaine de l'enseignement.
En gardant toujours comme référence la recherche Formaction, en juin 1991, 7.6% (90) des francophones recevaient des prestations d'assurance-chômage.
De plus, 24% (285) des francophones percevaient des revenus provenant de sources publiques. Ce pourcentage est assez élevé, mais il ne faut pas perdre de vue que Maillardville a une population vieillissante grandissante. Ce 24% inclut également les bénéficiaires de l'aide sociale. Vous trouverez ces données en consultant aux tableaux suivants .
L'activité et le chômage
Activité | Français simple et multiple | Autre langue maternelle simple et multiple |
Population active Taux d'activité Chômeurs Taux de chômage |
1190 |
46645 |
Source: Statistique Canada. Recensement 1991, données non publiées, échantillon de 20%.
Les sources de revenu
Sources de revenu | Français simple et multiple | Autre langue maternelle simple et multiple | ||
Assurance-chômage |
245 |
21% |
7580 |
16% |
Source: Statistique Canada, Recensement 1991, données non publiées, échantillon de 20%.
La communauté francophone de Maillardville est établie depuis 1909 et est considérée comme étant le berceau de la francophonie en Colombie-Britannique. Sur une population de 82,500 personnes, on compte environ 2000 francophones présentement, et ce nombre grandit de jour en jour, grâce à une activité économique florissante.
Au début du siècle, Maillardville était une ville de coupe de bois. La compagnie Canadian Western Lumber, bien connue aujourd'hui sous le nom de Fraser Mills Interfor, ayant un besoin accru de personnel recruta une main-d'œuvre canadienne-française. Cette main-d'œuvre était réputée pour avoir une grande expérience dans le travail du bois et dans le métier difficile de bûcheron.
Les premiers pionniers arrivèrent à la gare de Fraser Mills le 27 septembre 1909. Environ 200 familles, venant de Hull, Rockland, Sherbrooke et d'ailleurs, vinrent s'installer dans la région emportant avec elles, comme il se doit, leur bagage culturel et leur langue maternelle.
Par la suite, vers 1930, la dépression ainsi que la sécheresse, ont poussé de nombreux agriculteurs à quitter les Prairies pour venir chercher du travail en Colombie-Britannique.
On remarque assez facilement que les francophones établis dans la région se perçoivent avant tout comme étant Canadiens avant d'être francophones. Les francophones qui sont arrivés au début des années 20 parlent toujours un français qu'on pourrait dire satisfaisant et souhaitent pouvoir l'améliorer.
Chez les enfants de ces pionniers, nés dans les années 40, l'assimilation se fait sentir; toutefois, quelques exceptions échappent à la règle. Les petits-enfants des arrivants Canadiens-français ont, quant à eux, subi en majorité l'assimilation.
Il y a également la catégorie des nouveaux venus qui, pour la plupart, ne peuvent soutenir une conversation ou écrire en anglais.
Les francophones de Maillardville, comme nous l'avons mentionné précédemment ont comme point commun le travail. Ils sont tous venus, ou viennent encore s'installer à Coquitlam pour le travail.
«Tu sais, quand je suis arrivé ici avec mes parents, c'était pas un problème, je parlais les deux langues. Je n'ai pas terminé mes études, le travail y en avait à plein. On était bien trop occupé à travailler, mais j'ai gardé mon français et je suis fier d'être Canadien-français. C'est dommage, il y en a du monde qui ne voulait même plus le parler en public. Us sont gênés, et on ne peut pas trop les blâmer, on s'est tellement fait pointer du doigt. U y avait un temps que parler français, c'était comme si on avait une maladie contagieuse.»
Citoyen - 50 ans
Les personnes âgées de plus de 70 ans éprouvent davantage de difficultés financières, puisqu'ils ne bénéficient pas, contrairement aux retraités de 60 ans et moins, de programme de pension alloués par un employeur.
On peut aisément remarquer qu'il n'existe pas à proprement parler, de cours ou d'ateliers disponibles pour les adultes francophones qui désirent améliorer leur français. Tous les services présentement offerts dans la région, ne correspondent pas aux besoins et attentes d'une clientèle adulte francophone.
À titre d'exemple, nous pouvons mentionner que Simon Fraser University offre des cours de français langue seconde, donc inadéquats pour des adultes dont la langue maternelle est le français. Il y a quelques écoles d'immersion française au niveau primaire et secondaire, mais encore là les cours ne sont pas conçus pour des adultes.
D'autres programmes existent comme The Literacy Public Awareness Program via les services sociaux. On peut trouver la documentation dans tous les bureaux d'aide sociale, mais ce programme se donne uniquement en anglais. Toujours en anglais, Douglas Collège offre également un programme d'alphabétisation et de formation de base: I-CARE.
S'il existe un milieu viable pour l'éducation, il est assuré par la présence d'écoles offrant le programme cadre. Si on observe les données statistiques concernant la clientèle scolaire du programme cadre, on peut remarquer, pour l'école élémentaire Millside, une augmentation du nombre d'élèves.
Année | Nombre d'élèves |
1985-86 |
14 |
Pour notre projet de recherche, ces chiffres, plutôt prometteurs, nous laisse croire que la clientèle que nous tentons de rejoindre, soit la catégorie des 30-45 ans est de plus en plus importante à Maillardville.
Mis à part le centre Bel-âge, lieu de rencontre pour aînés francophones, à Maillardville il n'y a pas de centre communautaire et c'est une situation qu'il faudrait à tout prix changer pour les prochaines années. Les francophones de Maillardville ont besoin d'un point de ralliement qui offre, non seulement des activités sociales et culturelles, mais surtout qui favorise la circulation d'informations et de services.
La Société Maillardville-Uni joue un rôle primordial pour le moment. Elle offre un bureau central pour ses 13 associations membres8. Quelques organisations possèdent un bureau, un lieu de rencontre, tel que la Branche 86, Village Crédit Union, les Dames de Notre-Dame de Lourdes, les Chevaliers de Colomb et le Foyer Maillard.
Les autres associations se regroupent souvent chez des individus et n'ont pas pignon sur rue. L'état de santé de ces organisations est bonne, mais précaire, en partie à cause des critères de base établis; pour être membre on doit être francophone et catholique. C'est la raison pour laquelle la moyenne d'âge des bénévoles et des membres de certaines associations est de 65 ans. Ces critères de base font fuir la nouvelle génération.
La Société Maillardville-Uni a joint les rangs de la Fédération des francophones de la Colombie-Britannique qui lui offre un support pour le Festival du Bois. C'est surtout grâce au Festival du bois, que la SMU s'est fait connaître dans la région. Quoique le Festival attire chaque année de nombreux visiteurs, il ne faut pas oublier les citoyens qui ne participent pas forcément aux activités de ce genre et que l'on ne semble pas rejoindre.
Même si toutes les associations de Maillardville trouvent leur place et sont fort importantes, il ne faut pas oublier la Société d'éducation Gareau qui malgré peu de moyens, réussit à demeurer dynamique et promouvoit ardemment l'éducation en français. La Société a été formée à partir d'un comité de parents qui a contribué au développement du programme cadre à l'élémentaire et au secondaire. Par exemple, l'an dernier, la Société Gareau a déposé auprès de la commission scolaire un projet pour créer une école française. Projet qui, malheureusement, n'a pas eu de suite faute d'appui des conseillers scolaires.
On ne peut passer sous silence le fait que la plupart des bénévoles des associations sont âgés, épuisés par les tâches accomplies. Ils aimeraient céder la place, mais n'osent pas. Suite à plusieurs revers, ils sont devenus craintifs et rébarbatifs aux idées nouvelles. Ce sont les piliers de la communauté, et certains d'entre eux portent plusieurs chapeaux. Le problème c'est qu'on ignore la façon d'attirer les plus jeunes, les emmener à s'impliquer et à rester actifs dans le milieu associatif.
Maillardville est considérée comme étant un secteur bilingue de la région Tri-City. Toutefois, dans la pratique la réalité est toute autre. Le gouvernement fédéral n'a même pas vu l'importance de déclarer le bureau d'assurance-chômage bilingue pour la région.
Après plusieurs plaintes déposées à la Société canadienne des postes, on a finalement embauché, en juin '94, un employé bilingue au bureau de poste de Maillardville. Mentionnons qu'au Ministère de la Justice on peut facilement trouver des personnes bilingues, ainsi qu'au bureau de la Gendarmerie royale du Canada.
Dans le domaine de la santé, il y a quelques médecins, infirmiers et infirmières spécialisés qui peuvent s'exprimer en français. Au niveau de la gestion, on retrouve des comptables, techniciens comptables, des commis de bureau, des administrateurs et directeurs de certaines entreprises qui parlent français.
Comme partout ailleurs en Colombie-Britannique, les services provinciaux destinés à la population sont uniquement offerts en anglais. Même chose pour la ville de Coquitlam qui fournit des services en anglais seulement. Cependant, la communauté reçoit un appui généreux de la municipalité. Le maire et ses conseillers ont compris l'importance des francophones dans la région. Ils sont conscients de l'intervention des francophones au début des années 1900 dans la croissance économique prospère de leur ville9. Par exemple, chaque année la municipalité apporte une aide financière et technique pour la tenue du Festival du bois.
Avec les données de Formaction, il nous a été plus facile d'élaborer un questionnaire susceptible d'aller chercher les éléments voulus de façon spécifique, c'est-à-dire d'identifier des gens ayant des besoins en éducation de base. Nous savions donc que la population a un besoin réel et on connaît mieux les différentes caractéristiques de la communauté. L'équipe d'Éducacentre a donc élaboré un questionnaire qui permet de déceler l'habileté de la langue, le niveau de calcul et nous aide à identifier les personnes analphabètes, le degré d'intérêt et les besoins réels en éducation pour la population francophone de Maillardville10.
Un premier essai du questionnaire est fait lors d'une soirée pour les bénévoles. Sur 60 personnes présentes, 12 personnes ont répondu au questionnaire. On s'aperçoit qu'une question porte à confusion. On apporte les corrections nécessaires et le questionnaire est imprimé.
Notre but étant de sensibiliser l'ensemble de la population de Coquitlam à ce projet et de s'assurer de la participation de personnes qui ne fréquentent pas les associations francophones de la région, nous devions viser une distribution substantielle à l'échelle de Maillardville.
Dans un premier temps, nous transmettons l'information via le journal local le Tri-City. Il était convenu de faire un questionnaire bilingue et de l'insérer dans le journal, pour une distribution de 52,000 copies. Malheureusement, les coûts inhérents sont largement trop élevés. Il est donc décidé de publier le questionnaire uniquement en français, réduisant ainsi les dépenses et se limitant à la clientèle visée: la population francophone11.
Un article paraît une semaine avant la distribution du questionnaire, avisant la population qu'un sondage pour l'éducation des adultes sera fait auprès des francophones du Tri-City12. Un éditorial suivra le questionnaire la semaine suivante en précisant les buts, objectifs et l'importance du sondage.
La deuxième partie favorisait davantage une approche directe auprès des membres de la communauté francophone. On a fait la distribution auprès de 505 francophones, ciblant davantage les répondants potentiels. Nous avons, entre autres, été présents à la "Village Crédit Union" pendant deux jours avec notre kiosque.
On a également distribué des questionnaires aux endroits suivants:
École Fatima |
115 |
Sur 515 questionnaires distribués: 97 ont été dûment complétés, 20 partiellement complétés et 2 retournés incomplétés. Se référer au tableau, pour une vue d'ensemble.
La participation | Nombre | Pourcentage |
Questionnaires complétés |
97 |
18,8% |
Les effets de la sensibilisation auprès de la population francophone n'ont pas tardé à se faire sentir. Rappelons que pour diminuer les frais, le questionnaire a été publié en français uniquement.
Sur 52,000 copies distribuées, seulement 20 réactions négatives sont parvenues au bureau de la Société Maillardville-Uni. Les commentaires visaient surtout l'unilinguisme du questionnaire. La distribution du questionnaire en français seulement, a malheureusement provoqué certaines tensions dans la population de Coquitlam. C'est la raison pour laquelle il n'y a pas eu d'éditorial dans le journal local tel que prévu au départ. Le journal Tri-City a reçu des appels demandant comment un hebdomadaire régional pouvait laisser publier un questionnaire en français dans une ville anglophone. Mais il ne faut pas perdre de vue que l'objectif premier était de rejoindre tous les francophones et plus particulièrement les 35-50 ans qui ne s'impliquent pas dans le milieu de la francophonie.
Mais le sondage n'a pas eu que des effets négatifs, bien au contraire. Le sondage a, d'une certaine façon, redoré le blason de la Société Maillardville-Uni. La population de Coquitlam ne perçoit désormais plus la Société de la même façon.
Je ne savais pas que la Société Maillardville-Uni pouvait nous offrir différents services. Je croyais que la Société sortait une fois par année pour faire le Festival du bois. Je vois que vous vous tenez plus occupés que je pensais. Félicitations et beaucoup de succès.
Citoyenne de Maillardville
Même si peu de personnes ont rempli le questionnaire, il n'en demeure pas moins qu'ils en ont entendu parler et que la première démarche de sensibilisation semble fort prometteuse pour l'avenir.
Tu sais le sondage qui a eu lieu au début de l'été, j'ai pas participé, mais j'aimerais quand même savoir si vous avez assez de noms pour débuter les cours? Tu sais, peut-être que je connais quelqu'un qui serait intéressé...
Citoyenne de Maillardville
C'est au niveau de la sensibilisation que nous pouvons affirmer que le sondage réalisé a porté ses fruits. Il était essentiel de rejoindre le plus grand nombre de citoyens possible pour les amener à se poser des questions relatives à l'éducation en français.
La Société Maillardville-Uni a pu, grâce à ce projet, élargir son champ d'action en collaborant avec Éducacentre, le service d'éducation et de formation des adultes en français en Colombie-Britannique. L'association semble mieux outillée maintenant pour se pencher sur la question des services offerts à la communauté en terme d'éducation.
De plus, la sensibilisation faite auprès de la population de Coquitlam est considérable. La distribution du questionnaire a soulevé différentes réactions et a donné l'occasion aux francophones d'exprimer leur attachement à leur langue.
Nous exposons les résultats, en terme de pourcentage, pour chaque question posée. Une copie du questionnaire se trouve en annexe.
1- Quelle(s) langue(s) pouvez-vous parler, lire et écrire?
Français et Anglais: 87.6%
Français seulement: 7.2%
Anglais seulement: 5.2%
2- Selon vous, vos habiletés en lecture, écriture et calcul sont-elles suffisantes dans la vie de tous les jours?
Oui: 52.5%
Non: 3.0%
Pas toujours: 18.5%
3- Connaissez-vous des gens qui auraient des difficultés au niveau de la lecture, de l'écriture ou du calcul?
Oui: 29.8%
Non: 37.1%
Ne sais pas: 2.1%
4- Êtes-vous personnellement intéressé à suivre des cours?
Oui: 54.6%
Non: 22.6%
Ne sais pas: 18.5%
Si OUI, cochez les choix et la langue qui vous intéressent:
1- Informatique: 14.4%
2- Perfectionnement du français: 3.4%
3- Perfectionnement de l'anglais: 9.2%
4- Gestion des petites entreprises: 10.3%
5- Mathématiques: 3.0%
6- Atelier d'écriture: 21.6%
7- Atelier de lecture: 16.4%
8- Rédaction d'un curriculum vitae: 5.1%
9- Technique de recherche d'emploi: 6.1%
10- Technique de bureau: aucun
11- Premiers soins: 10.3%
12- Autres: aucun
5- Dans quel but vous inscririez-vous à des cours?
Pour obtenir un diplôme secondaire: 2 %
Pour mon développement personnel: 44.3%
Pour avoir l'opportunité de rencontrer: 22.6% d'autres francophones
Pour développer de nouvelles habiletés: 24.7%
6- Seriez-vous intéressé à vous impliquer comme bénévole dans un projet d'éducation des adultes?
Oui: 23.7%
L'échantillonnage effectué en terme de pourcentage couvre uniquement les questionnaires remplis lors de l'approche directe (voir tableau de participation). Cependant, les résultats recueillis semblent être le miroir sur une plus grande échelle des besoins en alphabétisation et en éducation.
On remarque que le plus haut taux de demandes pour les cours, se situe au niveau de l'amélioration du français (avec 34%) et des ateliers susceptibles de renforcer la connaissance de la langue française; comme les ateliers d'écriture (21.6%) ou des ateliers de lecture (16.4%).
Il ne semble pas y avoir d'intérêt marqué pour l'obtention d'un diplôme d'études secondaires, mais par contre l'enrichissement personnel obtient facilement 44.3% et le développement de nouvelles habiletés 24.7%.
Selon le sondage, à la question 3, 29.8% des répondants avouent connaître des personnes éprouvant des difficultés au niveau de la lecture, de l'écriture ou du calcul. C'est un nombre assez important pour que l'on puisse y déceler un besoin d'implantation de services en alphabétisation.
Manifestement, il existe un intérêt réel de la population francophone pour des cours et ateliers en français. À la question 4, 54.6% des répondants se sont dits intéressés à suivre des cours. Les répondants ont en fait signifié que le français est pour eux une priorité et qu'ils investiraient d'abord du temps et de l'énergie au perfectionnement de la langue française.
Bien que 87,6% des répondants affirment pouvoir parler, lire et écrire dans les deux langues, au moins 7,2% des répondants ne s'expriment qu'en français. Connaissant le milieu du travail où tout se passe en anglais, certains doivent éprouver des difficultés de communication.
C'était la première fois que se faisait une diffusion large du questionnaire. Le but de l'opération était d'avoir une grande diffusion et de joindre des francophones qui ne sont pas dans le circuit des associations francophones. Bien entendu, ce qu'on appelle l'approche directe a porté fruit; mais ce sont des gens qui sont déjà sensibilisés à l'importance de la vitalité du français et qui utilisent déjà les services existants en français par le biais des différentes associations francophones..
Que:
Éducacentre, le service d'éducation et de formation des adultes en français en Colombie-Britannique poursuive l'effort de collaboration entrepris avec la Société Maillardville-Uni, afin d'assurer le développement du programme d'alphabétisation et d'éducation des adultes à Coquitlam.
Que:
Éducacentre, le service d'éducation et de formation des adultes en français en Colombie-Britannique offre une formation continue aux différents formateurs et les soutienne dans leurs recherches de matériel didactique et leur assure un appui technique constant.
Que:
Éducacentre, le service d'éducation et de formation des adultes en français en Colombie-Britannique délègue un responsable du développement régional en alphabétisation et en éducation des adultes dans le but de planifier et de coordonner divers projets.
Que:
Une campagne dé sensibilisation à l'éducation en français soit organisée afin de rejoindre la clientèle ne faisant pas partie du milieu associatif de Maillardville.
Que:
La Société Maillardville-Uni et Éducacentre, le service d'éducation et de formation des adultes en français en Colombie-Britannique organisent ponctuellement des projets spéciaux pour sensibiliser la population de Coquitlam à l'importance d'une éducation de base en français.
Que:
Des ateliers en alphabétisation et des cours de perfectionnement du français soient mis sur pied en réponse aux besoins et attentes des adultes francophones de Maillardville.
Que:
Les outils de promotion pour les ateliers soient diffusés sur l'ensemble du territoire de Coquitlam et les personnes intéressées soient conseillées adéquatement par une personne-ressource.
Que:
Des questionnaires sur les besoins en éducation soient toujours à la disposition de la communauté francophone pour connaître ainsi les intérêts réels et les besoins en éducation de la communauté.
Que:
La Société Maillardville-Uni, appuyée par Éducacentre poursuive les démarches entreprises, afin de s'assurer de l'appui des organismes sociaux de la région.
Que:
Un centre culturel et communautaire francophone soit créé à Maillardville.
Dans cette recherche sur l'analphabétisme et les besoins en éducation des adultes francophones de Maillardville, nous avons tenté surtout de rejoindre la population francophone des 30-45 ans. Malheureusement, nous n'avons pas récolté de résultats très satisfaisants de ce côté.
De façon plus positive, ce projet nous a permis d'explorer des méthodes différentes de recherche, notamment en rédigeant un questionnaire plus court qui nous offrait la possibilité de faire davantage un survol sur les besoins en éducation des adultes francophones et en le diffusant sur une grande échelle.
Une importante distribution de questionnaires a été effectuée: plus de 50,000 questionnaires distribués dans les foyers de Coquitlam. Les résultats ont été peu probants et nous favoriserons désormais l'approche directe, qui donne sans contredit de meilleures possibilités.
Les rencontres avec les personnes-ressources des différents organismes, la participation à différentes activités communautaires nous ont permis de constater que les services en éducation déjà existants ne répondent pas toujours aux besoins de la population francophone.
Nous avons donc décelé de nombreuses pistes à explorer. Nous voulons, entre autres, mettre sur pied des ateliers d'alphabétisation, en collaboration avec la Société Maillardville-Uni. Des ententes sont en cours de réalisation.
Enfin, Maillardville par sa situation particulière de premier village français en importance en Colombie-Britannique, a fait l'objet de nombreuses recherches par des sociologues, historiens et toute une pléiade de spécialistes piqués de curiosité par cette communauté francophone. D'où une réaction parfois négative de la population francophone du type "Pas encore une recherche sur nous autres". Il eut été plus utile de consacrer argent et effort pour étudier une région parfaitement inconnue du monde de l'éducation en français et de ses bailleurs de fonds.
Cette recherche confirme que chaque communauté francophone de la Colombie-Britannique a une réalité bien différente en ce qui concerne l'alphabétisation et l'éducation. On peut appliquer quelques règles fondamentales mais, dans la mise sur pied de programmes d'alphabétisation, on se doit de posséder une très bonne connaissance du milieu.
Beaucage, Louis, Recherche sur les besoins en alphabétisation et en éducation de base des adultes francophones de Powell River en Colombie-Britannique.
Cowley, Glen, Le fait français en Colombie-Britannique. Vancouver: Société Historique Franco-Colombienne, 1979.
FORMACTION
«French Canadian Traditions Kept Alive at Maillardville» in The Vancouver Sun, 8 novembre, 1950.
Howarth, Denis, The Story of Coquitlam. Unpublished, 1991.
Riou, Jean, «Une histoire qui a 75 ans: Maillardville!» in Programme Souvenir 1909-1984. Maillardville. Maillardville: Maillardville en fête, 1984.
Document audio-visuel:
Grenier, Pierre, Un lieu qui en dit long, de Nuance production et de l'ONF, 1986.
Questionnnaire: Éducation des adultes
Savez-vous que....
- Coquitlam est une ville de 82,405personnes et que 1925 d'entre elles sont francophones.
- Sur 1925 francophones: 765personnes n'ont pas termimé leurs études secondaires.
- 71 % des francophones n 'ont aucun diplôme ou certificat d'études secondaires.
- Parmi eux 330 sont considérés comme étant analphabètes.
Il faut combien de temps pour remplir le questionnaire?
Environ 5 minutes.
Les réponses sont-elles confidentielles?
Oui, elles ne serviront que pour la programmation des cours.
Nous vous demandons de bien vouloir compléter le questionnaire et nous le faire parvenir à l'adresse suivante: 3-901, Lougheed HWY, Maillardville, C.-B., V3K 3T3 Tél: 936-0039. Ceci nous permettra de vous offrir des cours en français adaptés à vos besoin dès septembre 1994.
[Voir l'image pleine grandeur]
Service offer adult education
Did you know that
- Out of 82,405 inhabitants in Coquitlam 1925 are francophones?
- 765 of them did not finish their High School studies?
- 71% of Coquitlam's francophones do not have any diploma?
- 330 of them are illiterate?
How long does it take to answer to this survey?
About 5 minutes.
Are the answers confidential?
Yes and they will be used only for the compilation of this program.
Please complete all sections of this survey and send it before June 17th, 1994 to the following address: 3-901, Lougheed HWY, Maillardville, C-B., V3K 3T3 Tel: 936-0039 This survey will allow Société Maillardville-Uni to respond to the need of the population and we will be happy to give the population adequate courses to serve you best.
[Voir l'image pleine grandeur]
La Société Maillardville-Uni est l'association parapluie qui regroupe 13 différentes organisations francophones:
Les auteurs tiennent à exprimer leurs remerciements les plus sincères à tous les organismes francophones de Maillardville pour leur collaboration.
Nous tenons à remercier particulièrement:
Mme Henriette Sévigny, présidente de la Société Maillardville-Uni
M. Léon Lebrun, vice-président de la Société Maillardville-Uni
Mme Diane Dupuis de la Société Gareau
Mme Suzanne Tkack, du Centre Bel-âge
M. Daniel Roy, président des Scouts et Guides francophones de la Colombie-Britannique
et le Secrétariat National à l'alphabétisation, pour son support financier
Encadrement, suivi et appui technique
Éducacentre
Approche, promotion et recherche
Louis Beaucage
Ginette Denis
Réalisation des outils de promotion
Éducacentre
Louis Beaucage
SMU
Rédaction
Ginette Denis
Johanne Cordeau
Louis Beaucage
Révision et mise en page
France Vachon