Le Tour de lire est un groupe d'alphabétisation populaire qui a pignon sur rue, depuis plus de 10 ans, dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve. Il est né de la volonté d'un groupe de personnes de partager deux savoirs indispensables dans une société moderne : la lecture et l'écriture.
Depuis, plusieurs personnes sont passées par le Tour de lire et y ont laissé leur marque.
Des sons en progression, publié en septembre 1989, marquait le point de départ d'un projet de production de trois guides pédagogiques, chacun destiné à un niveau d'apprentissage différent. Depuis, La méthode phonétique au niveau débutant a été publié.
Nous ajoutons aujourd'hui à cette production le présent document : Le niveau intermédiaire... à découvrir. Il saura démontrer notre fidélité à l'égard de l'approche de la découverte.
De la découverte des sons, nous sommes passées1 à la découverte des notions. La méthode conçue par Britt-Mari Barth dans son livre L'apprentissage de l'abstraction nous a facilité ce passage.
À d'autres égards, nous devons mentionner l'importante influence du «Whole Language»2 d'où nous avons puisé ou adapté certaines pratiques.
Avec La méthode phonétique au niveau débutant, le Tour de lire amorçait la production d'une série de trois documents. Notre intention est de fournir avant tout une méthode d'apprentissage et, en second lieu, un contenu pour trois niveaux d'apprentissage de la lecture et de l'écriture en alphabétisation. La méthode, peu importe le niveau, s'inspire des mêmes principes pédagogiques qui nécessitent de simples adaptations selon les contenus d'apprentissages propres à chaque niveau. Quant au contenu, il est distinct pour chaque niveau, mais dans sa globalité, il constitue une démarche complète d'alphabétisation.
Pour arriver à circonscrire le contenu des différents niveaux, il a été nécessaire de se demander où s'arrêtait une démarche en alphabétisation. Pour y arriver, il fallait définir ce qu'est une personne alphabétisée, c'est-à-dire une personne ayant complété un cycle complet d'apprentissage, et dénombrer les compétences correspondantes. Tâche pour le moins difficile puisque la définition d'une personne alphabétisée dépend de l'évolution sociale et que, d'autre part, il est très difficile de faire en sorte que la théorie reflète exactement la réalité. De plus, ce sont d'êtres humains qui ont des besoins et des objectifs d'apprentissage différents dont il est question, et nous croyons avoir le devoir de les respecter et d'éviter de tomber dans le piège que nous tendent facilement les principes, l'idéologie ou encore le système.
Mais les différents objectifs de ces personnes constituent le guide à la fois le plus flexible et le plus sûr pour définir le terme d'une démarche en alphabétisation. La formation la plus longue qu'un groupe d'alphabétisation puisse offrir est celle qui permet le passage aux études présecondaires. Un tel contenu permet de répondre aux différents besoins des apprenants dans le respect de leurs objectifs personnels. Une personne peut poursuivre comme principal objectif l'apprentissage de la lecture en tant qu'outil de développement personnel (faire de la lecture un loisir - avoir accès à tout genre d'information - pouvoir exercer une liberté de choix). Une autre voudra, quant à elle, poursuivre ses études au niveau secondaire. Ainsi, une démarche en alphabétisation, au Tour de lire, se termine là où commence le présecondaire dans les commissions scolaires. Nous offrons donc la possibilité aux apprenants de poursuivre leur démarche et c'est à chacun d'en décider.
Nous n'avons aucun contrôle sur le profil de lecteur et de scripteur des gens qui viennent s'inscrire. Chaque personne a son expérience et ses acquis respectifs. À l'extrême, nous pourrions dire qu'il y a autant de niveaux d'apprentissage en alphabétisation que de personnes analphabètes. Pour des raisons liées à l'aspect social de la problématique et aux principes pédagogiques, le travail se fait en groupes formés sur la base des compétences générales.
Chaque nouvel apprenant passe un test de classement. Suite à ce test, il se joint au groupe avec lequel il a le plus d'affinités au plan de la lecture et de l'écriture et parfois même de sa personnalité. Le classement des apprenants est une étape que nous jugeons fort importante. Il est facile d'imaginer les conséquences d'un mauvais classement (un apprenant trop fort par rapport au reste du groupe ou vice versa), c'est-à-dire de la perte de temps, de la démotivation, voire de la dévalorisation. Le classement est l'étape première où s'actualise le respect des besoins et des compétences de toute personne en démarche d'apprentissage.
Cela dit, il n'existe pas de personne dite intermédiaire. mais il existe un contenu accessible à des personnes ayant un niveau de difficultés correspondant.
Dans la même veine, le contenu que nous proposons doit être adapté au groupe après que nous nous sommes assurées des acquis des personnes qui le composent. Il est possible d'envisager la formation d'un groupe avec des éléments du niveau débutant pour, progressivement, incorporer des éléments du niveau intermédiaire. Il est également envisageable d'entreprendre une démarche à partir d'éléments de contenu intermédiaire pour, progressivement, aborder le contenu avancé.
À cette préoccupation de contenu s'ajoute celle de l'approche. Elle nous apparaît aussi importante, sinon davantage. Elle s'inspire, pour les trois niveaux, des mêmes principes pédagogiques. L'importance que revêt pour nous l'approche de découverte nous a poussées à l'adapter en vue de faire des apprentissages divers. Elle permet une formation plus globale puisqu'elle favorise le développement d'habiletés intellectuelles en plus de l'apprentissage de la lecture et de l'écriture.
Au Tour de lire, la démarche d'alphabétisation commence par l'acquisition d'outils nécessaires à la lecture. Ceci veut dire que les apprenants sont d'abord confrontés à des éléments du code en participant à la découverte de sons et à la lecture. C'est l'étape où ils se familiarisent avec les éléments de base de notre code écrit, ce qui les rend capables, au terme de ce niveau, de lire une phrase simple. C'est alors que peut s'amorcer le niveau intermédiaire. On y poursuit la démarche d'acquisition du code jusqu'à une relative maîtrise de celui-ci pour enfin arriver à l'étape de l'apprentissage de l'écriture. Or, une personne capable de reproduire quelques mots à syllabes simples et capable de lire un court texte simple (du calibre retrouvé dans La méthode phonétique au niveau débutant en fin de démarche) est candidate au niveau intermédiaire.
Certains se demanderont peut-être quelle est la durée d'une démarche d'apprentissage de niveau intermédiaire. Nous ne fixons pas de limite de temps, comme nous ne le faisons pas pour une démarche complète d'alphabétisation. Il est impossible de le déterminer. Nous disions plus haut que chaque personne a son propre bagage d'acquis et nous ajoutons qu'elle a son propre rythme d'apprentissage. Comment est-il possible, partant de cette réalité, de définir le temps requis pour qu'une personne puisse s'alphabétiser?
Au Tour de lire, on ne peut parler d'objectifs généraux sans mentionner que ceux-ci sont sous-jacents à des objectifs qui - quoiqu'ils semblent appartenir à un autre domaine que la pédagogie - forment un tout. Il s'agit d'inclure dans la démarche des procédés qui favorisent le développement de l'autonomie, de la compréhension et du transfert. Ces trois habiletés sont comprises dans la méthode et sont en grande partie favorisées par la formatrice.
D'un point de vue plus près des apprentissages, l'objectif général du niveau vise à rendre les apprenants capables d'écrire seuls une pensée dans une forme simple, en tenant compte de la banque de graphies et de conventions qu'ils maîtrisent et d'un certain nombre de règles grammaticales de base. L'important, à cette étape d'apprentissage, est de permettre aux apprenants de remporter de petites victoires en écriture. Cela développe assurance et fierté, deux sentiments non négligeables pour surmonter, voire faire disparaître, la peur généralement ressentie par les personnes analphabètes face à l'écriture.
La lecture est une activité qui se réalise avec assez d'aisance (c'est-à-dire que le lecteur globalise davantage le mot, ceci par opposition à une lecture syllabique). Pour évaluer les acquis, il s'agit de présenter aux apprenants un texte dactylographié d'environ une page. Les mots ne sont pas choisis en fonction des sons qui les composent mais plutôt en fonction de leur familiarité ou accessibilité.
Véronique à Montréal
Véronique Borduas vit à Montréal depuis 1 an. Elle partage un logement sur la rue Bourbonnière avec une copine qui étudie à l'école Lartigue. Véronique est une personne tranquille. À son arrivée en ville, elle a eu beaucoup de difficultés à s'adapter.
Elle a d'abord cherché un logement. Elle a marché longtemps à travers les rues de Montréal pour en trouver un. Elle a fait plusieurs quartiers comme Rosemont, Centre-Sud, Hochelaga-Maisonneuve. Les logements étaient si chers ou en si mauvais état qu'elle a failli se décourager. Elle a dû se résoudre à en louer un au-dessus de ses moyens. Il fallait bien qu'elle se trouve un toit! C'était au mois de novembre, juste avant les fêtes.
Elle est allée placer une annonce dans le journal Les Nouvelles de l'Est pour trouver un co-locataire qui partagerait les frais du logement. Il s'est présenté trois individus un peu louches qu'elle a refusés. Finalement, Louise Tremblay s'est présentée.
Tout de suite, elles sont devenues amies. Elles ont les mêmes préoccupations : partager les tâches et respecter l'intimité de l'autre. Elles font leurs courses à tour de rôle sur la rue Ste-Catherine. Quelquefois, elles sortent ensemble et vont danser dans une discothèque de la rue St-Denis qui s'appelle «Les Pingouins réchauffés».
Véronique commence à s'habituer à la ville. Mais il lui arrive encore de s'ennuyer de son Lac St-Jean. À Noël, elle va monter une semaine voir sa famille. Elle va y aller par autobus Voyageur. En attendant, elle regarde nager son poisson Chicoutimi dans son petit bocal.
Dans ce texte, nous retrouvons par exemple les sons [s], [z], [in], les deux graphies des sons [eu], [br], [gr], les trois graphies des sons [o], [ui], [oin], [oir], [ieu], qui sont vus au niveau intermédiaire. Nous retrouvons également des chiffres écrits en lettres et des noms propres. Ajoutons que ce texte, du point de vue de son niveau de difficulté, peut servir de test d'entrée pour le niveau fonctionnel. L'objectif d'un niveau devient la condition d'accès au niveau suivant.
Au plan de l'expression orale, les apprenants acquièrent la connaissance de nouveaux mots qu'ils utiliseront ainsi que la capacité de trouver le synonyme ou l'antonyme d'un mot. Ils peuvent s'exprimer devant le groupe, soit pour donner leur opinion, soit pour faire l'évaluation d'une étape d'apprentissage. Concrètement, c'est par l'assurance, la structure et la clarté de la pensée de l'apprenant que la formatrice peut juger de l'apprentissage faite en expression orale.
D'autres éléments relatifs au contenu, à la méthode et à l'approche, donnés dans les prochains chapitres, éclairciront la manière d'atteindre ces objectifs.
Pour arriver à définir un contenu de niveau intermédiaire, le Tour de lire a dû se pencher sur le terme d'une démarche d'alphabétisation, puis définir la place que prendrait le niveau intermédiaire dans l'ensemble du contenu. Dans la continuité du niveau débutant, ce contenu devait préparer au niveau avancé. Nous en sommes arrivées à définir un contenu en fonction de deux grands axes.
Le premier grand axe est caractérisé par la lecture. Les apprenants de niveau intermédiaire, en début de démarche, sont encore malhabiles dans la maîtrise de la technique de décodage. Leur cheminement à travers ce grand axe leur permettra de faire de la lecture une activité de plus en plus accessible, aisée et valorisante. Les apprenants arrivent à un point tournant de leur formation : la lecture se raffine de plus en plus, sans être l'axe principal de leur formation. La lecture cède tranquillement la place à l'écriture.
Notre approche pédagogique de l'apprentissage de la lecture s'inspire de la conception de Frank Smith : «Lire n'est pas exclusivement une activité visuelle. Lire met en jeu deux modes d'information, une qui se trouve devant le globe oculaire, sur la page imprimée, que j'appelle «information visuelle» et l'autre située derrière le globe oculaire, dans le cerveau que j'appelle «information non visuelle». L'information non visuelle, c'est ce que nous savons déjà, sur la lecture, sur le langage, sur le monde en général3». Dans un chapitre ultérieur, nous verrons quelles sont les exigences d'une telle conception et la démarche que nous proposons.
Nous avons parlé précédemment de l'amorce de l'écriture autonome au niveau intermédiaire. Cela constitue le deuxième grand axe. Ainsi apparaît l'importance de l'apprentissage de certaines notions grammaticales, celles relatives à la phrase simple.
Voyons rapidement comment nous percevons la place des notions grammaticales. Pour ce, nous devons faire un retour au niveau précédent, soit le niveau débutant. Nous n'avons pas précisé la place de ces notions dans le document qui y est consacré, mais elles sont omniprésentes puisque sous-jacentes à la structure. Nous ne pouvons leur échapper lorsque nous faisons face à l'écrit, même quand il est question de phrases simples. Mentionnons, par exemple, le concept de la phrase qui comprend les conventions de la majuscule au début et du point à la fin et le rôle des mots et leur place, qui confèrent un sens à la phrase. Or, pour le niveau complet, nous abordons globalement ces notions de telle sorte que les apprenants peuvent reconnaître une phrase, une majuscule, un point à la fin de cette phrase (comme éléments faisant partie d'un tout).
Pour le niveau intermédiaire il s'agit de porter au niveau conscient certaines notions acquises par la pratique du langage et par le contact avec l'écrit. Par exemple, les apprenants sont appelés à différencier la nature des mots dans la phrase (nom, verbe d'action et adjectif qualificatif); ils peuvent commuter des mots de même nature dans une phrase; ils peuvent également faire des phrases simples, logiques et grammaticalement organisées. Il s'agit ici d'amorcer la reconnaissance, la discrimination et la généralisation de spécificités qui sont à la base de la structure du code.
Pour réaliser notre choix notionnel, nous nous sommes penchées sur notre expérience et avons consulté différentes grammaires. De plus, nous avons tenu compte du fait que notre démarche propose trois contenus dont chacun doit nécessairement préparer le suivant, et que la suite des trois respecte les besoins requis par une démarche complète d'alphabétisation. C'est ainsi que nous avons établi le répertoire présenté plus loin.
Avant de passer au chapitre de la méthode et de l'approche, nous devons aborder la place du «mot» dans le contenu et ce, sous toutes ses formes (son/structure -signification et nature). Une place particulière lui est accordée sans toutefois le considérer comme un axe de travail distinct, mais plutôt comme étant compris dans les deux autres. Lorsque du travail se fait sur les mots, peu en importe l'aspect, nous rejoignons des besoins reliés soit à la lecture, soit à l'écriture, soit à l'expression orale ou à la compréhension.
Les limites du niveau débutant justifient l'importance de focaliser l'apprentissage, au niveau intermédiaire, sur les sons et la structure des mots ainsi que sur le rôle de ceux-ci afin d'enrichir les acquis des apprenants en décodage et en compréhension. C'est une sorte de boîte à outils qu'ils se construisent progressivement tout en actualisant les mots dans la lecture et, progressivement, dans l'écriture.
L'expression orale est un autre élément non négligeable compris dans le cadre du contenu. L'aspect communication que nous retrouvons soit dans la lecture, soit dans l'écriture, se retrouve également dans l'expression orale et vient compléter les trois pôles majeurs de la communication. Celle-ci s'insère dans les deux grands axes à la manière du «mot» puisqu'elle devient un outil dans l'apprentissage. La fonction principale de l'expression orale est de structurer la pensée. Elle permet de passer à un mode de pensée abstraite. Par le fait même, elle devient un support pour les apprentissages qui nous intéressent. D'autre part, il y a l'expression orale non formelle, celle qui se pratique pendant les pauses et lors d'évaluations de sessions de formation. Dans les deux cas, de nombreux apprentissages se font : l'écoute, le développement du vocabulaire, l'expression plus claire d'une idée et l'ouverture face à des sujets nouveaux.
Dans les documents Sons en progression et La méthode phonétique au niveau débutant, nous avons fait état de l'utilisation, du comment et du pourquoi de la méthode phonétique au Tour de lire , plus particulièrement au niveau débutant.
Nous ne reviendrons pas sur l'ensemble de nos motivations, mais nous voudrions rappeler que la méthode phonétique sert essentiellement de grille d'apprentissage des sons, et que sa force réside surtout dans le fait qu'elle est assortie d'une approche de découverte. La méthode phonétique n'est pas utile pour faire saisir que la lecture est une affaire de compréhension. Cette tâche se réalise grâce à la méthode globale.
En regard de nos deux grands axes, la méthode phonétique est utilisée strictement pour la découverte de nouveaux sons. C'est d'ailleurs dans cette limite que nous la croyons utile. En effet, les apprenants se servent de ce qu'ils connaissent, c'est-à-dire la production de sons, pour arriver à les reconnaître, les discriminer et les généraliser.
La démarche pédagogique du Tour de lire, caractérisée par la méthode phonétique et par l'approche de la découverte que nous avons développée dans le document traitant du niveau débutant, reste valable pour le niveau intermédiaire. Toutefois, telle que présentée dans Sons en progression, la brochette de sons est plus volumineuse et composée de sons plus complexes. Dans le chapitre «Découverte de sons», nous reviendrons sur la démarche de découverte d'un son à plusieurs graphies et nous exposerons, en plus, l'adaptation de celle-ci aux sons soumis à une règle orthographique.
Nous devons voir et saisir la progression qui s'opère du niveau complet au niveau intermédiaire. Au niveau complet, nous pouvons dire, en simplifiant, que l'apprentissage de la lecture se fait globalement et que celle-ci est assistée de découvertes de sons. Quand s'amorce le niveau intermédiaire, il existe une certaine continuité de la démarche du niveau débutant. Le niveau intermédiaire s'actualisera graduellement, par l'augmentation du niveau de difficulté et par l'élargissement de son cadre d'apprentissage.
Le nombre de sons destinés au niveau intermédiaire ne doit pas impressionner. Il doit plutôt faire comprendre la place encore importante à accorder à ceux-ci, en plus d'être vu comme une balise de compétences à acquérir. En effet, cette brochette ne doit pas être considérée comme une liste à égrener. Au contraire, nous considérons qu'un certain nombre de sons s'acquièrent globalement, soit par leur rareté d'utilisation ou par leur grande distinction par rapport aux autres sons. Voici quelques exemples : le «ch» qui fait [k], les «em» et «am» qui font [an] (ici c'est simplement la règle à découvrir, c'est-à-dire celle du «m» devant le «p» et «b» qui est pertinente pour fin d'écriture et non pour la lecture), le «oy» et le «wa» qui font [oi]. Quoiqu'il en soit, comme il est de rigueur en alphabétisation populaire, les acquis du groupe déterminent les choix des sons à faire. Il ne faut pas négliger l'apport, au plan des apprentissages, de la lecture grâce à l'utilisation de la méthode globale. L'expérience a démontré que certains sons ne nécessitent pas ou peu d'investissement, simplement parce qu'ils ont été vus et revus à travers les lectures. Lorsque l'apprenant sera appelé à écrire seul, le besoin de rechercher la bonne graphie se manifestera. Au début d'une démarche d'alphabétisation, l'apprentissage des sons sert à donner des indices sur lesquels les apprenants peuvent s'appuyer pour lire. Plus la démarche progresse, plus cet apprentissage s'éloigne de ce but pour servir davantage le but d'écriture.
Tous les sons que nous retrouvons au niveau intermédiaire et qui n'ont qu'une seule graphie (ex. : «eur») demandent moins d'investissement dans leur apprentissage. Nous relativisons donc le temps à y consacrer. La simple démarche de découverte de son est appliquée. On peut facilement imaginer qu'un seul atelier sera suffisant et que la présence constante de ces sons dans des textes qui suivront permettra d'assurer leur acquisition à long terme.
Pour l'apprentissage des notions, nous maintenons l'importance de l'approche de la découverte. Nous nous sommes inspirées de la méthode pédagogique conçue par Britt-Mari Barth4 pour définir la démarche de découverte d'une notion grammaticale. Nous avons en effet reconnu des principes d'apprentissage dans cette méthode qui rejoignent ceux qui président à la démarche de découverte de sons. Notre conviction est que l'approche de la découverte permet de fixer un apprentissage puisque les apprenants sont appelés à s'engager intellectuellement dans le processus. Leurs compétences intellectuelles sont interpellées. Par exemple, leur attention, leur concentration et leur habileté à analyser et à déduire sont sollicitées. Il s'agit donc de poursuivre le travail d'engagement des apprenants et ainsi, actualiser nos convictions.
Quelques éclaircissements sont nécessaires avant de vous présenter la démarche type de découverte des notions. Le langage et la langue écrite sont conventionnels, c'est-à-dire qu'ils sont des «formes arbitraires qui pourraient être différentes mais qui fonctionnent, parce qu'elles sont l'objet d'un accord mutuel5 ». La grammaire, comme les sons, la formation des lettres, etc., est conventionnelle. Elle est régie par des règles. Chaque règle est, en soi, un concept. On peut voir deux groupes de règles ou concepts : pour le premier, de nombreux exemples peuvent servir à les illustrer alors que pour le second, il n'y en a pas. Cette distinction est importante puisqu'elle joue sur la forme que prendra la démarche de découverte et explique donc les différences que vous constaterez au chapitre VII «Notions grammaticales et démarches». Pour illustrer ce que nous venons de dire, prenons l'exemple de l'ordre alphabétique. Nous ne pouvons fournir d'autre exemple illustrant l'ordre alphabétique que celui caractérisé essentiellement par l'ordre d'écoulement des lettres et qui est le seul reconnu. Nous pouvons certes informer les apprenants de son utilité mais non lui donner une apparence différente. Prenons maintenant le concept de verbe : nous pouvons fournir un nombre infini d'exemples pour l'illustrer tout en respectant, dans tous les cas, les caractéristiques essentielles de ce concept.
Un autre aspect important doit être considéré pour l'élaboration de la démarche de découverte des notions. Cet aspect constitue une limite dans l'opérationalisation de la découverte. Prenons un exemple : si nous voulons faire découvrir la notion de nombre, seul un cadre de phrase peut permettre de couvrir l'ensemble de ses applications et caractéristiques. Le verbe, le nom, l'adjectif, les déterminants sont tous concernés. Or, la limite d'apprentissage prescrite par le niveau intermédiaire ne nous permet pas de considérer l'ensemble du concept. Les déterminants et les noms seulement seront abordés dans la découverte du nombre. Il s'agit de permettre aux apprenants de reconnaître, de discriminer et de généraliser une notion dans sa forme la plus simple avant de la présenter dans sa globalité au niveau avancé.
En conséquence, les principes prônés par la méthode de Britt-Mari Barth sont conservés, mais la démarche a été adaptée. La découverte constitue la colonne vertébrale de cette démarche. Elle s'actualise principalement par le contraste, c'est-à-dire que, d'une part, nous avons l'objet de découverte qui s'oppose, d'autre part, à un objet distinct du premier. De plus, cette démarche engage l'apprenant en lui faisant expérimenter l'analyse qui, avec le temps, se raffine. L'engagement va jusqu'à l'étape du transfert en passant par l'abstraction des découvertes, c'est-à-dire la formulation verbale et écrite des règles découvertes et la réutilisation de celles-ci dans des contextes variés. Le dernier élément fort de cette démarche pour les apprenants est la prise de conscience des opérations intellectuelles impliquées. Celles-ci font partie de ce qu'on appelle la métacognition. Les pédagogues affirment son importance pour tout apprenant. Connaître et reconnaître ces opérations permet de les réutiliser dans d'autres situations d'apprentissage, faisant ainsi appel à la notion de transfert.
Nous venons de préciser les limites dans lesquelles nous avons adapté la démarche/méthode et les principes pédagogiques que nous retenons dans l'adaptation. Maintenant, voyons la démarche type en soulignant à nouveau le fait qu'elle ne sera appliquée que là où la règle le permet.
Nous venons de parler des règles comme étant des concepts, et c'est sur la notion de concept que s'élabore la démarche. Voyons ce qu'est un concept.
Un concept est une pensée abstraite, une étiquette, désignée par un mot. Ce mot globalise et désigne les attributs de ce concept. Les attributs permettent la compréhension du concept et peuvent s'appliquer à des exemples. Les trois éléments clés de la structure sont l'étiquette (le mot), les attributs (les caractéristiques) et les exemples.
Exemple :
[Voir l'image pleine grandeur]
Cette structure servira de canevas pour certaines démarches. Cependant, pour respecter le principe de la découverte dans ces cas, la démarche partira du bas de la structure pour aller vers le haut. Nous partons donc d'exemples desquels nous extrayons les attributs du concept en cause qui permettent aux apprenants de discriminer le concept pour finalement le nommer. Le travail de découverte est fait par les apprenants jusqu'à ce que toutes les caractéristiques du concept, suffisantes à la discrimination, aient été découvertes, réunissant ainsi tous les éléments de sa définition. La formatrice donne alors le nom (l'étiquette) dudit concept.
Mentionnons qu'avant d'utiliser la démarche avec une notion (concept) tirée du programme, il est utile de la pratiquer une première fois avec un concept concret connu des apprenants. On peut, par exemple, faire découvrir le concept de «orange». Pour porter une orange à l'analyse, les apprenants doivent faire ressortir les caractéristiques essentielles de ce fruit :
S'ils disent que l'on peut utiliser ce fruit pour faire du jus, ce n'est pas une caractéristique essentielle puisqu'on peut faire du jus avec plusieurs autres fruits.
La démarche est une sorte de jeu. Ses règles doivent être bien expliquées dès le départ pour que les apprenants comprennent clairement la tâche à accomplir. Comme la démarche prend des formes différentes dans certains cas, la formatrice doit s'assurer de définir la tâche avant chaque démarche. Voici, par étapes, ce à quoi cela ressemble : j'ai une idée en tête; je vais vous aider à la découvrir. Je vais vous fournir un premier exemple de mon idée, exemple que vous observerez et sur lequel vous me ferez vos commentaires. J'écrirai tout ce que vous me direz. Je noterai vos commentaires au tableau pour qu'on ne les oublie pas. Puis je vous fournirai un faux-exemple, c'est-à-dire un exemple qui ne représente pas mon idée. Vous observerez ce faux-exemple et le comparerez au vrai. Vous ferez vos commentaires, que je noterai, et vous comparerez le faux-exemple au vrai. Je continuerai ainsi jusqu'à ce que vous ayez trouvé tous les éléments de mon idée. (L'observation d'un vrai par rapport à un faux favorise le développement de l'analyse comparative. Selon Bruner, cité par Britt-Mari Barth : «Le contraste est un des outils puissants dont nous disposons pour organiser nos connaissances6».) Progressivement, le faux-exemple que je vous fournirai ressemblera au vrai sans, toutefois, jamais contenir toutes les caractéristiques du concept. Vous pouvez dire tout ce que vous observez. Dans cette démarche, il est normal de faire des erreurs, puisqu'on ne sait pas ce que l'on cherche et puisque les erreurs font partie de la recherche. On les verra et on les éliminera au fur et à mesure. L'erreur vient même nous aider parce qu'elle nous indique que ce n'est pas dans cette direction qu'il faut chercher : elle vient donc réorienter la recherche. Chaque intervention est commentée par le groupe quant à son applicabilité au sens logique et concret, mais non pas en fonction de l'idée puisque celle-ci n'est pas encore connue. Nous travaillons en collaboration. À chaque nouvel exemple ou nouveau faux-exemple, nous attendons toujours quelques minutes pendant lesquelles tout le monde observe avant de partager les observations. Cela permet à tous et toutes d'observer et de réfléchir sans distraction. Quand tous les éléments de mon idée sont identifiés et, donc, que vous aurez décrit mon idée, je vous dirai le nom que mon idée porte. À la fin, en présence de l'ensemble des caractéristiques de mon idée, nous pourrons être en mesure de les organiser en définition.
L'étape qui suit doit permettre à la formatrice de vérifier le niveau d'acquisition. Pour ce faire, elle fournit des exemples que les apprenants doivent classer soit dans le concept, soit hors de ce concept. Un apprenant doit analyser l'exemple qui lui est soumis et verbaliser les caractéristiques qu'il reconnaît pour valider ou invalider l'exemple. À cette étape-là, on sait si l'on peut continuer la démarche ou si, au contraire, l'on doit récapituler. Vient le moment de généraliser. Là, ce sont les apprenants qui doivent fournir des exemples du concept et les expliquer. Le groupe analyse l'exemple et détermine s'il est conforme ou non au concept, explique pourquoi, se référant ainsi aux attributs (caractéristiques) du concept. La formatrice peut présenter une forme différente de généralisation : soit retrouver dans un texte des exemples dudit concept, soit demander aux apprenants d'écrire des exemples du concept. Ce qui est important, c'est que l'apprenant reconnaisse le concept dans un contexte différent de celui de la démarche encadrée et puisse s'en servir et l'expliquer, ce qui équivaut à le définir. Ce n'est qu'à ce moment qu'on peut prétendre à une réelle acquisition. Après que les apprenants auront connu une notion, il est nécessaire qu'ils soient capables de l'utiliser et de l'expliquer.
Découvrir suppose que des connaissances préalables ont été acquises. Ainsi pour qu'une telle démarche puisse réussir, nous convenons que la formatrice doit avoir confiance dans les acquis des apprenants et dans leur capacité à faire des découvertes. Par ailleurs, le travail à faire pour les apprenants, et avec eux, consiste à classer et à nommer les notions ou concepts. Comme nous le disions, le simple fait de s'exprimer clairement dans une langue, est synonyme de connaissance des règles de cette langue. Ce qu'il s'agit de faire avec une personne analphabète est de la rendre consciente de cette connaissance et de la comprendre. Pour ce faire, il est toutefois nécessaire que chaque nouvel apprentissage puisse s'appuyer, s'intégrer à des acquis. Il s'agit des préalables à chaque nouvel apprentissage. Ainsi, il est nécessaire d'organiser l'enchaînement, la suite des apprentissages.
Cette démarche est également exigeante sur le plan de la préparation : maîtrise de la notion, précision des exemples, définition de l'information générale nécessaire pour la compréhension de la tâche, information particulière pour vérifier les hypothèses (feed-back). La formatrice, par son attitude et ses interventions, doit permettre aux apprenants d'observer, de faire les liens entre différents éléments d'observation; elle doit permettre à chacun de s'exprimer, de donner la latitude nécessaire à l'échange et d'accepter l'erreur comme faisant partie de la recherche, voire de l'apprentissage.
Cette démarche, nous le croyons, permet de pousser plus loin les limites de l'habileté des apprenants à analyser et à acquérir des connaissances nouvelles. Elle pousse à poser des questions, à observer, à faire des hypothèses, à analyser en discriminant les éléments secondaires des éléments essentiels, à faire des liens entre les éléments (la pensée logique en opération) et ainsi, grâce à l'ensemble de la démarche, à prendre conscience d'une démarche intellectuelle.
Voici en clair les quatre étapes, en termes pédagogiques, que suivent les apprenants dans cette démarche. Elles sont les mêmes que dans une démarche de résolution de problème.
Comme dans toute démarche d'apprentissage, nous continuons à respecter les trois étapes du processus d'apprentissage : association - discrimination - généralisation. Nous nous permettons d'insister à nouveau sur l'importance de les respecter. Tout apprentissage doit cheminer, dans l'ordre, par ces trois étapes :
L'absence d'une de ces trois étapes rend l'apprentissage incomplet et il pourrait s'ensuivre un apprentissage par cœur d'une notion. La mémoire a une capacité d'emmagasiner limitée, ce «par cœur» réduit l'apprentissage au court terme et il n'est pas intégré à l'ensemble du réseau de connaissances. Pour sa part, l'étape de généralisation constitue une évaluation, dans l'ensemble du processus, de l'apprentissage d'une notion.
Nous parlons de l'importance du respect des trois étapes d'une démarche d'apprentissage. En fait, un apprentissage n'est complet que lorsque les trois étapes, au plan pratique, sont complétées. D'autre part, nous établissons pour chaque niveau une limite à l'apprentissage des notions grammaticales. Par exemple, la notion de «nombre» n'est vue qu'à travers les articles et les noms. Nous ne voyons pas l'ensemble du concept «nombre»; dans le cas contraire, cela exigerait que l'on voit cette notion autant avec les verbes qu'avec les adjectifs, les déterminants et les noms. On s'attend tout de même à ce que les apprenants puissent généraliser le concept «nombre» dans les limites des articles et des noms.
Pour terminer le présent chapitre, nous aborderons rapidement ce qui constitue un souci constant pour les formatrices : quand, quoi et comment évaluer. Nous voulons simplement rappeler que tout matériel est un outil d'évaluation qui permet, selon le cas, de vérifier si l'apprenant associe, discrimine ou généralise telle ou telle notion. Il suffit de se servir sciemment de matériel construit selon les différentes étapes d'apprentissage, et la formatrice sera assurée que tel niveau d'acquisition est atteint.
De plus, si la formatrice utilise la démarche de découverte dans toutes les étapes, elle peut évaluer la compréhension quand les apprenants doivent fournir des exemples et les appliquer (les justifier). Ajoutons que toute affirmation avancée et justifiée par un apprenant offre à la formatrice une situation d'évaluation. Ainsi demande-t-elle une justification pour toute affirmation.
Nous avons mentionné précédemment que notre approche pédagogique de l'apprentissage de la lecture s'inspirait de la conception de Frank Smith. Il démontre que la lecture n'est pas essentiellement tributaire du code mais que le lecteur ou la lectrice s'investit dans l'activité de lecture avec ses connaissances et son habileté à comprendre (donner un sens clair à quelque chose). Le rôle du code en est un de générateur d'indices sur lesquels viennent s'appuyer les lecteurs. Ils anticipent.
Comment un lecteur peut-il anticiper s'il est seulement au niveau débutant? Les apprenants connaissent les conventions de base de la grammaire, ils savent donner un sens - c'est-à-dire comprendre - et ils peuvent anticiper (anticiper, c'est faire l'hypothèse que le mot qui vient est peut-être le mot juste puisque le sens le prescrit; cela prouve que la lecture est compréhensive, que l'apprenant donne un sens à la lecture). Mais la condition préalable à l'anticipation est de savoir que lire équivaut à donner un sens. Le recours à cette habileté est possible avec la méthode globale. De plus, la formatrice doit fournir des écrits qui font appel au langage vivant afin que le lien se fasse. Afin d'aider les apprenants en lecture, il s'agit de les mettre en situation d'anticipation face au sujet.
Tout lecteur a fait l'expérience, un jour, de lire sur un sujet qui lui était complètement inconnu. Cette expérience démontre la difficulté de s'approprier un tel contenu. En effet, le sens ne vient pas seul ni rapidement. Des outils, tel un dictionnaire, peuvent s'avérer nécessaires. Une seconde, et parfois même une troisième lecture est nécessaire. Il en est de même pour tout le monde et particulièrement pour les personnes en apprentissage. Pour eux, l'insécurité face au code augmente la difficulté à comprendre un court texte. C'est pourquoi nous croyons utile d'aborder la notion de «lecture» et de proposer une démarche.
Cette démarche veut favoriser l'anticipation (c'est-à-dire exclure l'improbable) et l'appréhension (saisir) du contenu de lecture. On peut diviser cette préparation en deux temps :
La formatrice, avant de soumettre le texte, informe les apprenants du sujet. Un échange s'enclenche, permettant à chacun de partager ses connaissances. La formatrice participe à l'aide de questions ou de pistes qui permettent d'identifier le maximum d'angles sous lesquels le sujet peut être abordé. Si le sujet soulève une polémique, la formatrice anime afin de permettre aux apprenants d'exprimer leur opinion. À la suite de cet échange, on fait un remue-méninges des mots qui ont été utilisés et qui sont en lien direct avec le sujet. On fait un travail collectif autour de l'orthographe de ces mots. On fait ensuite des hypothèses sur ce qu'on trouvera comme information dans le texte. Finalement, on passe à la lecture individuelle.
Cette démarche sécurise les apprenants. Ils peuvent embarquer plus facilement puisque, dès le départ, ils connaissent le sujet et poursuivent un but, celui de vérifier leur hypothèse sur le contenu. Le travail sur le vocabulaire facilite le décodage de mots plus complexes ou nouveaux. La lecture globale sera favorisée grâce à cette mise en situation.
La lecture individuelle permet de vérifier les hypothèses par rapport au contenu réel du texte. Les apprenants font un compte rendu oral de cette première lecture. De cette façon, la formatrice peut vérifier la compréhension. Les apprenants auront à corroborer leur version en retournant au texte dans le cas où il y a désaccord. La discussion peut se poursuivre à la lumière des nouvelles données sur le sujet. Comme dernière étape, la formatrice enchaîne avec une lecture à haute voix. On peut, de fait, repérer certaines difficultés par rapport à un son en particulier, ou par rapport à un profil de lecteur : lecture trop rapide qui engendre des erreurs ou lecture trop syllabique qui affecte la compréhension à la baisse. Les deux profils témoignent de l'insécurité face à l'écrit et du besoin d'intervention pour corriger le rythme et/ou hausser le niveau de compréhension et d'assurance. En bref, bien des faiblesses peuvent être identifiées par la lecture à haute voix, mais elle doit être bien cadrée dans un objectif que la formatrice se sera préalablement fixé. Rappelons que le principal objectif poursuivi en lecture est la compréhension. Si l'on s'attarde aux liaisons, aux pauses, l'on s'attarde à la performance du lecteur et non à sa compétence. Ainsi nous posons-nous la question suivante : quelle habileté est principalement interpellée lors d'une lecture à haute voix? Nous faisons l'hypothèse que c'est l'habileté à décoder et que l'apprenant, très conscient de cette donnée, est porté à faire davantage d'erreurs et que son niveau de compréhension est affecté à la baisse. Beaucoup de personnes analphabètes vivent avec la peur de l'erreur. Placées dans un contexte où elles ont à réaliser une tâche dans un groupe, telle que la lecture, cette peur vient entraver la réalisation de l'activité et peut même provoquer des blocages dans l'apprentissage. Or les erreurs faites lors de la lecture à haute voix peuvent être attribuées à cette peur.
Les apprenants qui forment le groupe intermédiaire, qu'ils viennent du niveau complet ou qu'ils soient nouveaux, ont des compétences minimales en lecture. Ils ont une certaine maîtrise de la technique de décodage. Ainsi, nous pouvons aborder, dès le début, la lecture de textes relativement substantiels tout en tenant compte de la fragile assurance qu'ils ont. Les premiers textes ressemblent à ceux qu'un groupe de niveau complet aura abordé en fin de démarche.
Exemple
Denis a déménagé. Il décide de découvrir les alentours. Il va sur la rue Ontario.
Il s'arrête devant une grosse bâtisse. Elle est belle. Il va la visiter.
Denis découvre des livres partout. Il y a aussi des sofas. Les gens parlent tout bas.
Denis comprend. Il est dans une bibliothèque.7
Petit à petit, le niveau de difficulté augmentera. Les apprenants sont en mesure de l'assumer puisque la lecture fait partie de la routine de l'atelier (chaque atelier consacre un temps à la lecture; les apprenants sont appelés à lire chez eux). Plus les apprenants lisent de mots, plus ils peuvent en lire de nouveaux.
De façon générale, au Tour de lire, les textes fournis en atelier du niveau intermédiaire sont, soit :
Les apprenants peuvent avoir le choix du type d'écrit qui les intéresse le plus ou la formatrice peut utiliser les trois types par souci d'offrir un matériel varié.
Différentes formules de démarche peuvent être suivies.
Chacun des trois formats présentés offre des avantages différents. Le texte renouvelé à chaque semaine permet d'aborder un grand nombre de thèmes. Conséquemment, les sujets de discussion seront plus variés. On peut aborder une grande variété de mots relatifs à des sujets différents. Pratiquement, cette façon de faire permet d'intégrer plus facilement les nouveaux apprenants car ils n'auront pas à rattraper le fil de l'histoire. L'autre modèle, celui qui occupe quelques semaines, permet de développer la capacité d'enchaînement, la mémoire à plus long terme, la capacité de résumer la partie déjà lue. De plus, le texte dans cette forme plus longue permet à l'apprenant de démystifier le texte long et d'apprendre à l'aborder par étapes. La dernière forme confronte particulièrement les apprenants à un volume important d'écrits. On peut parler de démystification de l'écrit. La mémoire à plus long terme et la capacité de faire un résumé sont également des apprentissages que font les apprenants. Cette victoire en lecture permet de soutenir la motivation et de développer à long terme l'intérêt personnel pour la lecture. Cette dernière formule est davantage envisageable vers la fin du niveau intermédiaire, puisque la somme de difficultés graphiques comprise dans un tel texte risque de dépasser les capacités des apprenants qui sont en début de démarche intermédiaire.
La formatrice offre les formules qu'elle croit à la hauteur du défi que le groupe est en mesure de relever et elle est consciente des objectifs d'apprentissages poursuivis. Idéalement, une démarche progressive est souhaitée. Ceci signifie que le groupe commence par le petit texte puis expérimente le texte un peu plus long pour enfin se sentir prêt à s'engager dans un petit roman. Cette démarche s'appliquerait à un groupe intermédiaire faible, alors qu'un groupe plus avancé pourrait, dès le début, travailler avec des textes du deuxième type.
Il s'agit d'analyse d'éléments de texte puisque le travail exige de la recherche pour associer, pour discriminer et finalement généraliser les notions à l'ordre du jour. L'aspect compréhension se retrouve presque partout et non seulement en regard du texte. Elle peut être vérifiée au plan des mots, des phrases, du texte dans son ensemble ou encore au plan des notions déjà vues.
Au fur et à mesure que l'apprentissage de nouvelles notions se fait, les exercices autour du texte sont plus nombreux, puisqu'ils intègrent ces nouvelles notions à l'ensemble des autres. Ceci permet aux apprenants de mettre constamment en application les notions apprises dans des contextes toujours renouvelés.
L'exercice dit «Questions de compréhension» est toujours présent, comme au niveau débutant, mais il comporte une exigence de plus en plus grande face à l'écriture. Au début, un simple mot peut suffire pour répondre aux questions. Puis la formatrice exige que le déterminant accompagne le nom ou, selon le cas, que le nom de la personne accompagne le verbe. Finalement, les apprenants doivent répondre avec une phrase complète. C'est la formatrice qui contrôle les questions et qui peut faire en sorte que les apprenants écrivent toujours un peu plus.
De plus, cet exercice permet d'acquérir, sans que l'apprenant n'en soit conscient, la capacité de focaliser sur les idées principales d'un texte. Cela est possible si la formatrice s'exerce à ne questionner que les éléments essentiels du texte au détriment des éléments secondaires. Tant dans les questions sur le texte que dans un compte rendu oral de lecture, l'attention ne doit pas porter sur les aspects secondaires. La formatrice qui écoute doit questionner pour faire ressortir les éléments essentiels; à la fin de l'exercice, la formatrice les reprend pour que l'apprenant reconnaisse, dans un bloc, les éléments essentiels à retenir.
Exemple d'ensemble d'exercices qui pourront se retrouver à la suite d'un texte à la fin du niveau intermédiaire, c'est-à-dire quand toutes les notions ont été vues.
Faire de la lecture un loisir : un défi
N'est-ce pas là le grand objectif en apprentissage de la lecture? Mais il est difficile d'y arriver. Le cadre de formation est souvent le seul moment où les apprenants lisent. Les formatrices ont beau vanter l'importance de la lecture en dehors des moments de formation, cela n'est pas suffisant pour que la lecture se déniche une petite place, tranquillement, dans leur vie quotidienne.
Un projet en collaboration avec la bibliothèque du quartier nous a permis d'avancer quelques hypothèses sur ce qui peut réussir à stimuler le goût de lire chez les apprenants.
Le premier avantage de ce projet, qui est peut-être gage de réussite, c'est que la bibliothèque vient à nous et non le contraire. De plus, le choix des livres qu'elle offre est constamment renouvelé. Dans le passé, le Tour de lire avait une bibliothèque. On y retrouvait une certaine variété de titres, mais le choix n'était pas renouvelé. La consulter un jour n'offrait rien de plus que la veille. L'apprenant qui n'avait pas été piqué de curiosité pour un livre ou un autre ne pouvait l'être le lendemain.
Le fait que les livres changent régulièrement dans la bibliothèque actuelle offre plus de chances qu'un livre arrive à éveiller l'intérêt du plus récalcitrant.
À cela s'ajoute le fait que les formatrices intègrent une activité autour de la bibliothèque. Il s'agit d'avoir le souci des lectures que font les apprenants. Chaque apprenant qui a fait une lecture est appelé à faire un court rapport de lecture et dire s'il en recommande la lecture ou pas, et pourquoi. La formatrice peut faire une sorte de jeu de rôle où elle interview le lecteur-critique. Ainsi elle dirige et soutient l'apprenant dans la pratique de critique. Ses questions permettent de faire le tour des différents aspects qui peuvent faire l'objet d'une critique. La formatrice prend note des critiques car cela oriente la bibliothécaire dans le choix des livres nouveaux dont elle enrichira la bibliothèque. Les apprenants peuvent faire des demandes spéciales sur des sujets particuliers.
Ce projet, que nous souhaiterions voir s'implanter de façon permanente, constitue une première étape vers l'utilisation de la bibliothèque. Il permet aux apprenants d'acquérir de l'assurance quant à leur capacité de lecture, à leur apprivoisement du «livre», et à la façon de choisir un livre. Alors ils seront plus à même de devenir des utilisateurs de la bibliothèque du quartier, donc de faire de la lecture un loisir.
Qu'est-ce qui nous motive à introduire l'écriture à ce niveau et pourquoi l'est-elle simultanément aux notions? Voilà deux questions sur lesquelles nous croyons devoir vous fournir des explications.
Sous l'angle du contenu, le niveau intermédiaire poursuit l'apprentissage de la lecture et amorce la mise en place des bases nécessaires à l'écriture. Au mitan du niveau intermédiaire, les apprenants devraient être mis en situation d'écriture. Ils ont suffisamment d'acquis au plan du code pour faire leurs premières armes.
La maîtrise complète de la lecture n'est pas une condition pour l'apprentissage de l'écriture. Ces deux activités mettent en œuvre des processus relativement différents. Pour lire, le lecteur doit connaître et reconnaître les conventions du code écrit, les mettre en rapport et en fournir le sens. Le scripteur doit également connaître les conventions de même qu'il doit connaître, comprendre et appliquer les règles de grammaire relatives à la structure du code. C'est plus facile de reconnaître que de reproduire en l'absence de modèle. Une phrase est plus facile à lire qu'à écrire. Frank Smith dit à cet égard :
«La lecture exige moins du système de traitement de l'information que l'écriture. Le lecteur n'a pas besoin, pour comprendre, d'identifier chaque mot ni même chaque phrase. Tandis que le scripteur est tenu de produire chaque lettre8».
C'est la grammaire qui nous fournit les règles d'usage nécessaires à la langue écrite. Ce n'est donc pas pour soutenir la lecture que la grammaire est utile : elle l'est quand vient le moment d'écrire de façon autonome. C'est pour cela qu'au niveau intermédiaire nous voyons apparaître l'apprentissage des notions de base de l'écrit.
L'école, développée sur des principes pédagogiques aujourd'hui révolus, a institué une façon de faire qui était basée sur le cours magistral suivi d'exercices pratiques. On demandait aux étudiants de faire principalement appel à leur mémoire. Depuis plusieurs années, grâce aux efforts convergents de la linguistique, de la psychologie et de la pédagogie, de nouveaux courants pédagogiques ont vu le jour qui mettent de l'avant l'importance de répondre aux besoins des apprenants. Ce nouveau concept bouleverse la façon de faire. Il ne s'agit plus de créer des besoins mais bien d'y répondre. Les apprenants sont donc placés dans des situations d'apprentissage qui font émerger leurs besoins. La mise en situation pour l'apprentissage de l'écriture est donc de faire écrire les apprenants. Os feront face à différents problèmes qui nécessiteront des solutions qui, elles, résident dans l'apprentissage de certaines notions. C'est ce qui explique l'apparition de l'écriture autonome simultanément à l'apprentissage des notions grammaticales.
De plus, nous pensons qu'il est non seulement possible, mais souhaitable d'apprendre à écrire en écrivant. Malgré la priorisation de la lecture depuis le début de la démarche, il n'en demeure pas moins que les apprenants ont fait des acquisitions qui peuvent leur servir pour l'écriture. Par exemple, ils ont appris à écrire des mots isolés dans des exercices de compréhension sur des textes. Ils connaissent la graphie de plusieurs sons et ont la compétence du langage. Partant de ces acquis, nous proposons une démarche progressive qui permet aux apprenants de cheminer vers l'écriture autonome. Elle est présentée plus loin.
Il existe toutefois une condition importante pour permettre aux apprenants de s'approprier l'écriture. Cette condition réside dans le droit à l'erreur, c'est-à-dire le droit de faire des fautes. Les apprenants en alphabétisation entretiennent le mythe que savoir écrire signifie ne pas faire de faute. Les personnes analphabètes ont toujours vu l'écrit dans sa forme finale sans soupçonner les étapes de travail qui l'ont précédée. Ils ont passé par le système scolaire où la dictée, largement utilisée, a engendré la croyance qu'écrire se faisait sans faute dès le premier jet. De plus, ils ont cette peur sclérosante de l'erreur qui est née des échecs passés. Pour ces raisons, la formatrice a la tâche importante et globale en apprentissage de l'écriture de briser ce mythe et cette peur. Nous disons «globale» parce qu'atteindre un tel objectif prendra beaucoup de temps. L'activité du «modèle scripteur», expliquée plus loin, et l'évocation d'expériences quotidiennes d'écriture auront besoin d'être répétées. Ce sont autant d'occasions qui contribuent à cette démythification.
Les apprenants doivent savoir que tout processus d'écriture part d'un brouillon. En conséquence, tout écrit exige une étape de correction. On peut leur expliquer, par exemple, la démarche poursuivie par un écrivain. Ou encore comment on procède pour écrire des lettres officielles dans un organisme. Une foule d'exemples peuvent venir illustrer le fait que tout écrit n'est pas le fruit d'un premier jet, sauf des écrits personnels comme un journal intime. Mais le moyen le plus efficace pour y arriver, ou à tout le moins pour amorcer concrètement une démythification, c'est l'activité appelée «modèle scripteur» que nous avons évoquée plus haut. Elle se déroule de la façon suivante : lors d'un atelier, les apprenants se consultent pour définir un sujet - ils le soumettent à la formatrice - et celle-ci doit, devant les apprenants et de façon spontanée, écrire sur ce sujet (ce peut être une histoire, une lettre). Pendant qu'elle écrit, la formatrice doit penser tout haut : poser les questions d'accords, d'orthographe, de vocabulaire, elle doit biffer et se reprendre quand elle se rend compte d'une erreur, dire qu'elle cherchera l'orthographe de tel mot dans le dictionnaire, se relire à la fin et se corriger en biffant et en réécrivant au-dessus. Il s'agit en fait de rendre visible l'ensemble des opérations intellectuelles comprises dans la tâche d'écrire. C'est rendre compte qu'écrire n'est pas affaire de perfection dès le premier jet. C'est un travail qui demande un questionnement, une recherche, une autocorrection et/ou une correction par une autre personne. Cependant, une mise en garde s'impose : il est important d'être crédible et ainsi ne pas exagérer ce qui prendrait la forme d'une démonstration par l'absurde. Ce n'est pas l'objectif de la démarche. C'est simplement d'offrir un modèle honnête.
Cet exercice démontre deux choses aux apprenants. D'abord, que le point de départ d'un écrit est le brouillon qui nécessite une étape de correction. Ensuite, que la tâche d'écrire exige des questionnements.
Par ailleurs, nous croyons utile et nécessaire d'évaluer la pratique de la dictée. Nous sommes conscientes qu'elle est revendiquée par les apprenants. Une des explications que nous retenons est liée à leur expérience vécue à l'école où la dictée était très courante, ce qui leur a fait croire que c'était là une façon très efficace d'apprendre. Elle peut être utilisée comme appoint (et non comme «pivot») à la démarche d'écriture autonome, bien que sa valeur pédagogique nous semble très douteuse. Selon nous, participer à une dictée n'est pas écrire. Cela entraîne comme conséquence, d'autre part, le renforcement de l'importance de l'erreur. Écrire, c'est, à notre avis, traduire dans un code une pensée, une idée, etc. qui sera peut-être lue par d'autres. C'est dans cet esprit que nous voulons que les apprenants s'approprient l'écriture. Il s'agit de faire en sorte que l'écriture autonome soit reconnue par les apprenants comme une sorte d'autodictée très efficace pour apprendre à écrire.
Certaines activités proposées, en l'occurrence les deux premières, se retrouvent au niveau débutant. Elles sont reprises pour rassurer les apprenants et par souci de continuité, c'est-à-dire partir de là où l'on a arrêté. Les derniers exercices du niveau débutant deviennent les premiers du niveau intermédiaire. Il ne faut pas oublier que l'été sépare les deux années et que cette pause entraîne un recul pour certains. Il est donc utile de faire un rapide retour en arrière.
[Voir l'image pleine grandeur]
2. a) Il s'agit, pour les apprenants, de compléter les phrases (nouvelles) avec le bon mot (vu à travers la découverte d'un son). La formatrice lit la phrase au complet en donnant le mot manquant. Les apprenants l'écrivent. Ils s'autocorrigent de la même façon que dans l'exercice précédent. Nous ne fournissons pas de modèle pour cet exercice puisque le premier document en contient un exemple et que le modèle pour l'exercice suivant peut servir aux fins du présent.
2. b) La même feuille d'exercice peut servir différemment. La formatrice suggère oralement trois mots possibles pour compléter chaque phrase. Elle énonce ceux de la première phrase. Elle laisse les apprenants compléter cette phrase puis suggère les trois mots pour la deuxième, et ainsi de suite. Parmi les trois choix, il peut y avoir, parfois, deux réponses possibles. Cette façon de faire permet de comprendre que plusieurs réponses sont bonnes. C'est important, dans une situation d'apprentissage, de saisir qu'il peut y avoir plus d'une réponse vraie pour favoriser l'ouverture dans la recherche et, conséquemment, éliminer le stress qu'engendre la recherche de la bonne réponse. Puis les apprenants s'autocorrigent; lors du retour en groupe l'accent est mis sur le sens que chacun a donné en complétant les phrases.
Notez que nous suggérons d'expérimenter oralement chaque forme différente d'exercice que la formatrice utilise afin que chacun saisisse bien ce qui est attendu de lui. De cette façon, il sera aisé d'identifier ceux qui ne comprennent pas et de les aider. Chacun a sa perception de ce qui est dit, c'est-à-dire sa façon de traiter l'information reçue. Il n'est donc pas étonnant qu'une ou plusieurs personnes n'aient pas compris ce que la formatrice croit clair. Si une ou plusieurs personnes ne comprennent pas, ce n'est pas toujours dû à un manque de clarté de la part de la formatrice; la perception de chacun peut en être la cause. L'expérimentation de l'exercice à l'oral nous semble un moyen supplémentaire pour vérifier la compréhension et ainsi pallier les différences de perception.
Les mots que nous avons utilisés en vue de l'exemple d'exercice sont ceux que nous retrouvons dans le premier exercice.
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3. Cette fois, la formatrice exige davantage des apprenants. On peut dire que c'est ici l'amorce de l'écriture autonome. Elle propose un début de phrase que les apprenants complètent selon leur propre idée ou expérience. Avant de procéder à la première expérience de cet exercice par écrit, nous suggérons de l'expérimenter oralement et de se servir du tableau afin que tous saisissent très bien ce qu'on attend d'eux.
Pour cet exercice, la formatrice écrit le début de la phrase au tableau. Les apprenants la transcrivent sur une feuille de leur cartable dans une section qui pourrait s'appeler «J'écris» ou «Écriture» où chacun a des feuilles mobiles réservées à l'écriture autonome. Ou alors, chacun a un cahier spécial pour cette activité. L'essentiel est que l'apprenant regroupe ses écrits dans un même cahier afin qu'il lui soit possible, en tout temps, d'y référer à titre d'outil et de s'en servir comme témoin concret de son cheminement.
Quand tout le monde a terminé, le groupe est divisé en sous-groupes de deux où chacun lit à l'autre ce qu'il a écrit. Celui qui a écouté commente le travail de l'autre du point de vue de la structure et du sens. Si, par exemple, l'auditeur n'a pas bien saisi un passage parce qu'il manque un ou des mots exigés par la structure, ou encore, un élément qui compléterait le sens, il questionne le scripteur. L'auditeur n'a pas de rôle à jouer quant aux fautes d'orthographe. Il doit également se garder de faire des jugements de valeur sur le contenu. Il aide seulement le scripteur à arriver à un contenu bien structuré et clair. Quand le scripteur lira son écrit, il réalisera peut-être de lui-même certaines omissions de mots ou de syllabes. Il réalisera la pertinence de se relire pour se corriger.
Ce type d'exercice peut être répété plusieurs fois avec des débuts de phrases qui suggèrent un contenu différent. Voici quelques exemples :
Ce ne sont que quelques exemples. L'important, c'est de permettre aux apprenants d'expérimenter différentes formes de récits. Dans le premier exemple, la chronologie peut être importante alors que dans le deuxième, il est question de rêve ou de projet. Pour le troisième, l'apprenant doit raconter une anecdote réelle ou fictive. L'imagination peut intervenir. Quant au dernier, il exige de respecter un ordre logique.
Ces exemples traduisent une progression. Compte tenu des compétences et de l'audace des apprenants du groupe, la formatrice décide du nombre de fois qu'elle répétera une expérience moins exigeante avant de passer à une autre tout en respectant le rythme du groupe. Elle peut changer à volonté les débuts de phrases et même consulter les apprenants pour des suggestions.
De toute évidence, les apprenants peuvent compléter les deux premiers exemples sans beaucoup écrire. Le résultat de la première expérience se résumera probablement à une phrase : «En fin de semaine, j'ai fait du ménage.» Ou la formatrice est satisfaite de cela ou, selon l'apprenant, elle voit à faire développer davantage. Elle pratique l'intervention aidante pour stimuler la personne à donner des exemples, à parler de ce qu'elle a utilisé comme outil, ou encore du temps qu'elle y a consacré. Elle procède par questions pour faire réaliser l'abondance des informations supplémentaires que le scripteur pourrait ajouter : quel jour as-tu fait cela? combien de temps as-tu pris? dans quelles pièces as-tu fait du ménage? dans telle pièce, qu'as-tu fait? quels outils as-tu utilisés? Cela permet au scripteur d'apprendre à développer un sujet sous différents angles. Le côté émotif prend également sa place : qu'est-ce que tu aimes dans ces tâches-là? peux-tu expliquer pourquoi tu aimes cela? qu'est-ce qui te déplaît le plus? fais-tu le ménage seul? Ce type de questions est adaptable à n'importe quel sujet et à n'importe quelle étape de l'apprentissage de l'écriture. Cette pratique permet à la formatrice d'offrir un modèle aidant pour l'écriture et ainsi prépare à une étape différente.
Le rôle aidant que la formatrice a joué avec chacun des apprenants doit être maintenant assumé par les apprenants eux-mêmes. Avant de procéder à l'expérience, la formatrice aborde le sujet avec les apprenants. Ils ont à échanger sur la façon dont elle intervient quand elle travaille avec l'un d'entre eux. Les attitudes, les comportements et les interventions doivent être identifiés. Ils pourront prendre conscience des attitudes qui favorisent l'aide et le support. Un modèle d'intervention non aidante serait : «Tu as oublié de dire quand cela se passait.» Cette intervention porte un jugement et ne laisse pas au scripteur le temps de réaliser l'importance de situer le contenu. Un modèle aidant serait : «Quand cela se passe-t-il?» À cela le scripteur peut réaliser de lui-même l'importance de le mentionner, puisque l'auditeur a manifesté cette curiosité. Ce travail en paire doit se dérouler sous forme d'échange et d'entraide. Il exige donc d'être bien clair, tant dans sa forme que dans ses objectifs.
Les apprenants doivent pouvoir choisir la personne avec qui ils veulent partager ce qu'ils ont écrit. Au début, les apprenants acceptent plus facilement de partager ce qu'ils ont écrit s'ils ont le choix de la personne sur la base des affinités. Puis, ces expériences développent chez le participant la confiance nécessaire pour livrer à d'autres personnes le fruit de son travail. Il peut alors choisir son partenaire en fonction des compétences qu'il lui reconnaît et de ses propres besoins. Le choix en fonction des habiletés en relation d'aide favorise le développement de celles-ci chez tous les participants. Entre apprenants, l'aide est centrée sur le sens et la structure. La formatrice se réserve la tâche d'intervenir davantage sur l'application des règles de grammaire et de l'orthographe.
L'écriture porte sa gratification dans l'action et dans son aboutissement. Dans l'action, les apprentissages se font et sont reconnus. Les apprenants, en écrivant beaucoup, n'ont de cesse de généraliser. La fréquence de certains mots, le rappel constant des règles font qu'ils apprennent en contexte d'écriture. Ils apprennent à écrire en écrivant (la récurrence amène la permanence des apprentissages).
On peut imaginer une multitude d'issues aux écrits des apprenants. Ils peuvent être présentés à d'autres groupes de même niveau ou de niveaux différents. À la fin d'une année, on peut faire une soirée de présentation des productions écrites des apprenants volontaires. Chaque apprenant en présenterait une de son choix, tirée de l'ensemble des productions de l'année.
Dans le cas d'une telle issue, la formatrice fait les corrections relatives à des règles hors programme et met au propre, à la dactylo ou à l'ordinateur, les textes des apprenants. Ces derniers auront en main un produit fini dont ils seront fiers.
Dernier élément à aborder en écriture, plus technique celui-là : la graphie. On s'attend à ce que les apprenants terminent un cycle intermédiaire avec l'habileté de lire à la fois dans la forme script et cursive. Ils auront fait l'expérience de lire des textes écrits à la main par d'autres apprenants.
Les personnes qui ont complété un niveau «débutant» au Tour de lire ont appris à écrire en script et, généralement, arrivées au niveau intermédiaire, elles réclament d'apprendre à écrire en lettres attachées (écriture cursive). La formatrice voit à les soutenir individuellement en leur fournissant des outils adaptés (modèles) afin de leur permettre de pratiquer cette technique différente d'écriture. Cet apprentissage se fait parallèlement et individuellement, et non en groupe. D'ailleurs, les formatrices du niveau intermédiaire utilisent la graphie script pour assurer une continuité. Cela évite de mettre une pression supplémentaire sur les apprenants par l'apprentissage de la graphie cursive. Pour ce qui est des apprenants, ils écrivent dans la graphie de leur choix.
Dans toute formation, une des responsabilités des formatrices est de fournir le maximum d'outils et de moyens pour que les apprenants puissent profiter des apprentissages et les généraliser. La méthode, l'approche sont importantes, voire déterminantes à la réussite d'un apprentissage. Elles doivent cependant être soutenues par des outils complémentaires.
Le contenu notionnel du niveau intermédiaire commande un outil où sont regroupées les notions apprises. La consignation de celles-ci en des termes définis par et pour les apprenants contribue à asseoir les notions. Un tel outil amène d'autres apprentissages, comme celui de se servir de ressources accessibles pour résoudre un problème. De plus, la dépendance souvent forte face à la formatrice s'amenuise graduellement. Bref, cet outil participe à la création d'un contexte d'autocorrection et de prise en charge de l'apprentissage, en l'occurrence l'écriture.
Au niveau intermédiaire, une grammaire définie par les apprenants est d'une pertinence indiscutable. Cette grammaire leur permet de synthétiser une règle et de la traduire dans leurs mots, ce qui en rend l'accès et la compréhension plus faciles encore. Cela rend en effet plus facile sa compréhension à la relecture. Voici comment, par étapes, nous voyons la création de cette grammaire :
quand? après une découverte, donc lorsque tous les éléments essentiels à la définition de la notion sont présents, après que la formatrice aura vérifié la compréhension :
Pour rendre ce procédé opérationnel, un contexte de référence constante doit être mis en place. L'autocorrection doit faire partie du processus de l'écriture autonome. La formatrice stimule les apprenants à consulter leur grammaire plutôt que de corriger dès le premier jet les erreurs qui relèvent des règles vues.
Des moyens mnémotechniques peuvent se joindre à cette grammaire. En plus d'énoncer une règle, appuyée d'un exemple, les apprenants sont appelés à se faire une image personnelle du concept qui stimulerait la mémorisation. L'exercice est présenté comme tel, en expliquant ce que l'on attend d'eux afin que cette pratique intellectuelle inconsciente devienne consciente. Ce faisant, ils actualisent la prise en charge de leur apprentissage en reconnaissant et comprenant un mécanisme qui intervient pendant un apprentissage, et en constatant la possibilité de l'utiliser consciemment dans d'autres contextes d'apprentissage.
Pour développer le réflexe du recours à ce procédé, il faut y accorder une période de temps bien définie. Avec la répétition de cet exercice, le recours à ce moyen deviendra automatique. Une ou deux fois sont insuffisantes.
Comme nous le disions, nous nous appuyons sur le principe selon lequel l'écriture s'apprend en écrivant. Lorsque la formatrice arrive à l'étape concrète des notions, c'est qu'elle a entrepris la tâche de l'apprentissage de l'écriture avec les apprenants. C'est à travers leurs écrits que les notions prennent leur sens. Petit à petit, ils auront à appliquer les notions apprises. La démarche est progressive. Nous vous donnons un exemple : une première moitié de l'atelier est consacrée à l'écriture autonome; la deuxième est consacrée à la découverte d'une notion. Chaque nouvel apprentissage doit être intégré par l'apprenant dans sa pratique de l'écriture. Quand ils se relisent, leur attention doit porter sur une notion et la formatrice s'attend à ce qu'elle soit appliquée. À chaque fois que l'occasion se présente, la formatrice rappelle cette notion car la répétition est nécessaire pour tout nouvel apprentissage, elle en assure la permanence. On doit espacer les nouveaux apprentissages notionnels. Il faut éviter de surcharger la mémoire des apprenants par l'empilade de nouvelles notions car cela empêcherait l'intégration de chacune d'elles à leur réseau de connaissances et empêcherait une bonne assimilation.
La progression va du général au particulier. La phrase comme un tout est abordée, puis ses composantes le sont une à une. La responsabilité des apprenants est de les appliquer au fur et à mesure et d'apprendre à se relire et à se servir de leur cartable comme aide-mémoire afin de s'assurer qu'ils ont respecté les règles.
Pendant l'expérience, de nombreux besoins se manifestent au plan de la forme ou de l'orthographe. Pédagogiquement, il est préférable de répondre à des besoins plutôt que de les créer. Notre hypothèse est que l'apprentissage est motivé par le besoin et que le besoin qui se manifeste en contexte réel entraîne la motivation et le souci d'apprendre. Ceci n'exclut toutefois pas le besoin de revenir sur certaines notions. Mais plus il y a de situations d'écriture, plus les notions deviennent des automatismes. Certaines formatrices sont insécures à l'idée de consacrer trop de temps à l'écriture, puisqu'elles pourraient croire qu'elles négligent la lecture. Il ne faut pas oublier que les apprenants, en écrivant, sont forcés de se lire. Ils doivent vérifier le sens et la forme de l'écrit, et ils devront vérifier s'ils ont respecté les notions. Ils lisent également lorsque, par paire, ils s'entraident à améliorer leur texte (démarche précédemment vue).
Nous cernons également une autre source d'inquiétude pour les formatrices. Elle vient du fait que dans une démarche où les apprenants écrivent seuls et beaucoup, les balises notionnelles sont difficiles à déterminer. Il est nécessaire que la formatrice définisse à l'avance la ou les notions à l'ordre du jour, la ou les notions à appliquer par les apprenants, et de s'y limiter pour ne pas se perdre dans l'ensemble de la grammaire. Une grille de notions est à notre avis nécessaire, de la même façon que nous avons cru bon de définir une grille de sons. Cette grille notionnelle vient déterminer quelle notion est retenue par la formatrice lorsqu'elle chemine avec les apprenants dans leur apprentissage de l'écrit. Ce qui déborde du cadre d'apprentissage pour le niveau intermédiaire est systématiquement corrigé par la formatrice. Et malgré les limites de leurs compétences, les apprenants ont en bout de ligne un produit sans faute dont ils sont fiers. L'apprenant ne peut focaliser sur plus d'une nouvelle notion à la fois. Mais lorsqu'une notion a été bien vue dans toutes ses étapes - association, discrimination et généralisation - la formatrice peut passer à une autre notion. Au fur et à mesure que les notions sont apprises, les apprenants les notent dans leur cahier et se servent de cette liste comme grille d'autocorrection. Le contenu de leur cahier devient leur grammaire qu'ils peuvent, en tout temps, consulter. Cela n'oblige pas la formatrice à suivre ce répertoire à la lettre. Si une demande se fait pressante sur une notion plutôt que sur celle prévue dans l'ordre du répertoire, la formatrice peut répondre à ce besoin à condition que cet apprentissage n'anticipe pas sur celui d'une notion à venir. Les explications et les justifications, que vous retrouvez pour chaque notion dans le répertoire, vous éclairent sur l'utilisation de ce répertoire.
Comme nous l'avons mentionné dans le précédent document, l'expression orale fait partie du contenu global des apprentissages. Elle est présente à tout moment, dans toutes ses formes. Nous croyons qu'elle est un moyen efficace de structuration de la pensée. Que ce soit par la capacité d'exprimer une interrogation, de décrire une chose, de raconter un fait divers, ces pratiques sont aussi importantes que celle de la discussion où se fait l'apprentissage de l'expression et de l'explication d'une opinion. L'expression orale intervient comme exercice préparatoire à l'écriture et, tel que nous l'avons démontré, dans la démarche d'écriture. Elle permet d'explorer le sujet d'écriture sous des angles multiples. Tout comme dans la démarche en lecture, l'expression orale permet l'anticipation du texte.
Tout le cheminement au niveau intermédiaire, ponctué d'expériences et d'accumulation de compétences, donne accès à des contenus plus variés qui, par le fait même, deviennent des déclencheurs de discussion.
L'expression orale permet aussi d'apprendre à poser des questions quand une explication n'est pas claire ou lorsqu'un exercice n'est pas compris. Elle permet aussi de dire ce qu'on aime ou pas dans le fonctionnement de l'atelier quant au contenu, au groupe ou à la formatrice. Des moments consacrés à l'évaluation d'une étape et le suivi individuel sont des moments privilégiés qui favorisent cette expression.
S'exprimer requiert de la logique, de l'ordre - chronologique et événementiel -dans les idées et l'utilisation des mots justes. La formatrice poursuit un objectif chaque fois qu'elle planifie une activité d'expression orale. Ceci lui confère un rôle d'animation important lors de chaque discussion ou échange. La qualité de l'animation permet à chacun de s'exprimer (éviter les contrôles par une personne) et maintient le groupe dans le cadre de la discussion; elle favorise l'identification des idées essentielles du sujet et les distinguera des idées secondaires. La formatrice accorde une attention particulière au vocabulaire.
Nous vous présentons maintenant le répertoire regroupant les notions que nous considérons comme étant à la base du code. Elles sont présentées dans un ordre, comme nous le disions, qui va du général au particulier. Dans un objectif d'écriture autonome, la phrase est le général et les différentes règles sont le particulier. L'objectif est d'amener les apprenants à la fin du niveau intermédiaire à produire, dans une forme simple, un petit texte qui respecte les notions de base de l'écrit répertoriées ci-dessous.
Objectif :
Les apprenants pourront produire oralement et par écrit une phrase simple. Il pourra y avoir des fautes d'orthographe, mais elle sera grammaticalement organisée.
Explications :
Ce n'est pas un hasard si la notion, le concept de phrase dans sa forme simple (sujet avant le verbe, et composée d'un seul verbe) apparaît en premier lieu. Elle est notre unité de base pour le travail notionnel. Elle confère une propriété au mot, c'est-à-dire sa classe d'appartenance. C'est dans la phrase que les mots se réalisent grâce à l'ensemble organisé logiquement et grammaticalement. De plus, la phrase simple fournit à elle seule un nombre suffisant de notions pour le niveau intermédiaire. Cela permet également aux apprenants de partir de ce qu'ils connaissent, puisqu'ils l'utilisent à l'oral. Il s'agit de faire le lien entre le connu (phrase orale) et le non-familier (phrase écrite). Ils abordent l'écriture avec ce qu'ils peuvent exprimer oralement, et cela peut constituer le matériel nécessaire aux apprentissages des notions.
Pour permettre aux apprenants de découvrir ce concept, il faut bien saisir ses caractéristiques : la phrase est un ensemble de mots organisés logiquement et grammaticalement. Les apprenants ont à découvrir l'aspect «sens» qui n'existe que lorsque la suite, l'enchaînement des mots, respecte un ordre spécifique. Finalement, ils ont à découvrir la majuscule au début et le point à la fin de la phrase. La formatrice doit pouvoir formuler des questions qui permettent aux apprenants de découvrir le sens, l'ordre des mots et les signes.
Pour l'exercice de découverte, nous n'utiliserons que la phrase simple afin de réduire la difficulté de reconnaissance (mots au nombre de deux ou trois et de nature spécifique : nom - verbe -adjectif; nom - verbe - nom; nom - verbe). Dans les observations qui seront faites par les apprenants, on peut s'attendre à ce qu'ils découvrent que la phrase simple dit d'un être ou d'un objet ce qu'il fait ou subit, ce qu'il est ou qui il est et dans quel état il est; mais ceci nous conduit à la nature des mots qui ne sera abordée que plus tard. Disons que l'occasion leur permet de reconnaître une première fois ce qu'évoquent les différentes classes de mots, sans plus. Disons que la limite de la phrase simple favorise une vision plus claire du concept. Dans une phrase à plusieurs propositions, la place de chacun des mots perdrait de sa clarté.
Démarche :
Lorsque toutes les caractéristiques de la phrase sont découvertes, la formatrice doit s'assurer qu'elles sont bien comprises. Elle fournit un exemple et les apprenants doivent dire s'il est vrai ou faux en justifiant leur réponse. Elle répète l'expérience à quelques reprises.
N.B. Nous vous avons fourni 8 ensembles d'exemples oui/non, mais vous aurez peut-être besoin d'un plus grand nombre d'exemples. Ce qui est important à retenir, c'est le canevas de la démarche. Nous vous suggérons d'en préparer un nombre suffisant, quitte à ne pas les utiliser tous si le rythme de découverte est plus rapide.
Tous les commentaires notés sont épurés au fur et à mesure de la démarche car la logique, la déduction et l'analyse verront à éliminer les observations soit sans importance, soit fausses. Ce n'est pas la formatrice qui refuse un commentaire, mais elle pose les questions pertinentes qui permettent aux apprenants d'établir la logique qui s'impose et elle fournit les exemples permettant l'analyse. Elle appuie ainsi le raisonnement des apprenants.
En fin de démarche, les attributs (caractéristiques) découverts constituent les éléments de la définition du concept. Il peut arriver qu'un apprenant, en cours de démarche, identifie le concept en cause, en l'occurrence la phrase. Cela n'empêche pas de poursuivre la démarche, car connaître le nom d'un concept ne signifie pas nécessairement le comprendre. La formatrice demande si ce dernier peut le définir ou elle peut simplement dire : «Très bien, nous continuons la démarche afin de vérifier si ce que nous découvrirons sera vraiment ce que tu poses maintenant comme hypothèse.»
Dans le cas où personne ne pose d'hypothèse en cours de démarche sur le concept recherché et quand tous les attributs ont été découverts, elle nomme le concept et dit que tout ce qu'ils ont découvert, c'est à toutes fins pratiques la définition de ce qu'est une phrase.
La démarche ne s'arrête pas là. Nous devons retrouver des exercices oraux ou écrits qui permettent de vérifier si les apprenants ont bien compris. Le premier exercice de vérification est de demander à chacun de produire oralement une phrase. L'apprenant écrit sa phrase au tableau aidé par la formatrice pour l'orthographe; l'auteur explique son exemple à l'aide de la définition et le groupe approuve ou non, tout en justifiant. C'est à ce moment que la formatrice décide si elle doit faire un retour sur les étapes précédentes de la démarche ou si elle peut aller de l'avant. Si l'exercice démontre que tout le monde a bien compris, elle fournit d'autres exercices de généralisation qui favorisent l'utilisation du concept dans des contextes différents et nouveaux : repérage de phrases dans un nouveau texte en faisant une barre après chacune; composition de deux ou trois phrases, individuellement ou deux par deux selon la capacité des apprenants; suggestion de quelques phrases qui ont besoin d'être complétées ou corrigées (majuscule et point manquant - mots manquants). Pour ces derniers exercices, on ne suggère pas de réponse : les apprenants doivent se laisser guider par le sens, caractéristique importante de la phrase.
Comme nous le disions précédemment, seule la phrase simple est abordée. Toutefois, en lecture, nous retrouverons des phrases interrogatives et négatives. Elles ne feront pas l'objet d'apprentissage. Nous en restons donc au stade de la reconnaissance de ce type de phrases.
Les textes comprennent des paragraphes dès le début de l'apprentissage de la lecture. Cette notion /concept est vue globalement dès le niveau débutant. En fait, il est simplement reconnu que chaque bloc de phrases s'appelle un paragraphe. Il ne s'agit pas de définir la fonction du paragraphe dans le texte. Cela viendra lorsque les apprenants travailleront la structure du texte.
Objectif :
Les apprenants seront capables de mettre des mots en ordre jusqu'à la troisième lettre et de placer les lettres en ordre alphabétique.
Explications :
L'ordre alphabétique ne peut être représenté par des exemples. Il est ce qu'il est et ne peut prendre une forme différente. C'est une convention établie pour faciliter le classement, une convention pratique qui ne se prête pas à des exemples. On ne peut donc pas procéder par la découverte. La démarche est donc différente. Pour l'apprentissage de l'ordre alphabétique, il suffit de faire des exercices pratiques et mnémotechniques (comme de replacer en ordre certaines séquences de lettres de l'alphabet). La formatrice fournit, sur une feuille, l'ordre alphabétique. Cet aide-mémoire sert lors des exercices de mise en ordre des lettres et des mots. Les apprenants doivent le mémoriser pour arriver à compléter des séquences de l'ordre alphabétique.
Ils font des exercices sur l'ordre alphabétique. Dans une démarche progressive, les apprenants réussissent à classer des mots à partir de la première lettre, puis de la deuxième et, finalement, de la troisième lettre.
Cette convention doit être apprise à ce niveau puisqu'elle constitue un prérequis à l'utilisation du dictionnaire, laquelle se fera au niveau fonctionnel.
Toutefois, les apprenants découvriront le dictionnaire et son organisation à partir de l'ordre alphabétique. Ils comprendront alors l'importance de faire cet apprentissage. Pour le niveau intermédiaire, nous le rappelons, il ne s'agit pas que les apprenants puissent se servir d'un dictionnaire, mais bien plutôt qu'ils saisissent globalement comment il fonctionne. S'il arrive qu'un apprenant du groupe sache s'en servir, la formatrice peut lui demander de le présenter et d'expliquer ce qu'il en comprend. Le groupe, soutenu par la formatrice, peut tenter de compléter les informations par l'observation.
Si vous avez un ordinateur à votre disposition, nous vous proposons un jeu qui consiste à fournir un message codé, c'est-à-dire traduit en caractère «mobile» (Word - Microsoft). Vous fournissez les 26 caractères dans l'ordre du «mobile» à l'aide de quoi les apprenants doivent faire l'association : le premier caractère est le sixième dans l'ordre et il correspond à la 6e lettre de l'alphabet, c'est-à-dire à «F», et ainsi de suite. C'est une façon agréable de travailler avec l'alphabet. On peut y recourir pour leur souhaiter bonnes vacances ou joyeux Noël.
Objectif :
Connaître les deux groupes de lettres en nommant les voyelles et en les distinguant des consonnes dans un mot.
Explication :
Pour plusieurs raisons, nous croyons qu'il est nécessaire de distinguer les voyelles des consonnes. Tout d'abord, parce que les apprenants commencent à écrire. Cette connaissance est indispensable afin de faire les choix graphiques requis par certaines règles, par exemple : l'élision (les mots commençant par une voyelle seront précédés du «l'») le «c» dur et le «c» doux, le «g» dur et le «g» doux. Nous croyons, de plus, que la distinction entre consonne et voyelle permet de mieux saisir, voire illustrer, la structure des mots.
Démarche :
La démarche de découverte des voyelles s'inspire du jeu bien connu «Master mind» où l'enjeu est de découvrir les couleurs choisies et cachées par un des deux joueurs. Le jeu consiste, ici, à découvrir les six (6) lettres que la formatrice a choisies parmi l'alphabet. Le jeu de lettres du «Scrabble» peut être utilisé à cette fin. Un premier apprenant fait une première hypothèse sur les 6 lettres. La formatrice les écrit au tableau; elle note le nombre de voyelles dans ces six lettres. Un deuxième apprenant fait à son tour une nouvelle hypothèse et la formatrice la note. La formatrice fait les interventions appropriées pour aider à faire les liens. Les apprenants doivent observer et toujours tenir compte des séries déjà notées pour faire leur choix, chacun à leur tour. Avant de faire un autre tour, la formatrice fait également une hypothèse qui donnera des indices; elle peut choisir trois voyelles et trois consonnes et les noter. Chaque apprenant fait un nouveau choix, et ainsi de suite jusqu'à ce qu'ils aient trouvé toutes les voyelles. La formatrice doit encourager l'entraide et la discussion autour des choix. Cette démarche permet d'apprendre à faire des hypothèses, des déductions, des liens entre deux énoncés ni complètement faux ni complètement vrais. L'habileté à analyser et la pensée logique interviennent. Ce genre de jeu structure la pensée et développe l'habileté à analyser et ce, de la même façon que dans la démarche de découverte du concept de la phrase. Cette approche ludique permet d'apprendre d'une façon plus détendue et agréable. La situation de recherche et le travail de collaboration invalident la notion d'erreur.
Quand les six lettres sont identifiées, la formatrice dit que ces six lettres portent, comme groupe, le nom de voyelles. Elle explique que l'alphabet est divisé en deux groupes : un premier, appelé les voyelles, et un deuxième, les consonnes.
Avant de commencer le jeu, la formatrice doit s'assurer que tout le monde le comprend bien et sait ce qu'elle attend d'eux. En effet, si le but n'est pas bien compris par les participants, cela cause souvent l'échec d'une situation d'apprentissage.
Pour vérifier l'apprentissage, la formatrice écrit dix mots au tableau ou autant de mots qu'il y a d'apprenants dans le groupe, chacun devant identifier les voyelles d'un mot. À côté de chaque mot, on note les voyelles pour bien visualiser leur répétition et l'impossibilité d'avoir un mot sans voyelles, et pour constater qu'il est possible d'avoir un mot composé uniquement de voyelles, par exemple «oui». Si l'on encercle les voyelles de ces mêmes mots, on illustre la structure des mots. Un apprenant demandera peut-être en quoi ces lettres/voyelles sont différentes des autres. On peut simplement dire qu'elles sont les seules dont le son correspond à son nom quand elles ne sont pas comprises dans un son complexe (ex. : au, eau, ou...). Le «y» fait évidemment exception.
Objectif :
Les apprenants sauront par l'utilisation du déterminant le genre du mot dont il est question.
Discussion :
Cette notion est l'occasion d'aborder les déterminants «le» et «la», «un» et «une» comme indices déterminant le féminin et le masculin. Oralement, les apprenants doivent être capables de trouver le féminin de certains noms. Il est question de permettre aux apprenants de faire le lien entre «le» et «un» qui témoignent du masculin et «la» et «une» qui indiquent le féminin. C'est la limite dans laquelle nous abordons le genre. Globalement, d'autres aspects du concept se greffent, mettant en place la base nécessaire pour pousser plus loin l'apprentissage.
La démarche que nous vous proposons permet de découvrir à la fois le féminin et le masculin. Nous procédons par analyse comparative. Nous fournissons dans un premier temps cinq noms de personnes féminins accompagnés de l'article. Après la cueillette des commentaires sur ce premier bloc, la formatrice fournit un bloc de noms masculins de personnes. Progressivement, comme la démarche le démontre, des noms d'animaux, de choses et d'idées sont introduits dans les blocs féminin et masculin.
Lorsque vous abordez le genre, si les trois natures des mots ont déjà été vues, vous pouvez utiliser le contexte de phrase dans la démarche. Par exemple, vous donnez une première phrase au féminin, puis une phrase au masculin. Ainsi, la notion de genre est vue dans son ensemble dans la mesure où les adjectifs aussi doivent adopter le genre du nom.
La femme est nerveuse. L'homme est nerveux.
Dans le cas contraire, il est préférable de procéder avec le nom accompagné de son article. Évitez les mots commençant par une voyelle nécessitant l'élision, puisqu'il est difficile pour les apprenants d'identifier le genre sans l'aide du dictionnaire.
Dans le choix des mots qui serviront à la démarche, la formatrice doit tenir compte des compétences du groupe en décodage. Lire un mot isolé est plus difficile que de lire un mot en contexte (dans une phrase). Les mots doivent être connus (sens) et déjà vus (lus) pour éviter le drainage de trop d'énergie dans le décodage. Pour vous assurer de la compréhension de tous et toutes, faites une lecture des mots avant de passer à l'analyse.
Démarche :
Dans un premier temps, les apprenants font ressortir le fait que chaque mot du premier exemple réfère à des femmes. Dans le deuxième bloc d'exemples féminins, les mots réfèrent à des métiers et à des femmes. La troisième liste réfère à des femmes, à des métiers et à des objets. De même pour les blocs de mots masculins. Mais là ne sont pas les attributs principaux (essentiels) du féminin : ils sont secondaires (non essentiels). Ce que nous voulons faire ressortir, c'est que les noms sont classés en deux grands groupes : un groupe féminin qui se reconnaît par l'utilisation de «la» et «une» et un groupe masculin, par l'utilisation de «le» et «un». C'est là l'essentiel de l'apprentissage du genre au niveau intermédiaire.
Dans la démarche, nous avons privilégié, dans un premier temps, les noms qui sont liés à des femmes et à des nommes afin de favoriser la création d'une image mentale des termes féminin et masculin. Progressivement, nous nous en sommes détachées pour élargir le concept.
Au début, nous nous sommes limitées à l'utilisation de «la» et «le»; puis nous avons inséré «un» et «une» afin que se fasse le rapprochement entre «un» et «le», et «une» et «la».
Lorsque les apprenants ont fait ressortir les deux regroupements, c'est le moment où la formatrice nomme ce qu'ils viennent de découvrir.
Par la suite, la formatrice fournit oralement un nom à chaque apprenant; ce dernier doit dire s'il est féminin ou masculin. Puis, chacun fournit un nom en précisant le genre; le groupe juge si l'exemple est bon ou non.
Les apprenants doivent compléter un texte troué. Ils le complètent à l'aide de «le» ou «la», «un» ou «une». Un autre exercice pourrait consister à remplacer «le» et «la» par «un» ou «une». De ce texte troué, la formatrice identifie quelques noms et demande de quel genre ils sont. Oralement, les apprenants, en groupe ou deux par deux, trouvent le féminin de certains noms, particulièrement avec des noms de métier. Sur une feuille, deux colonnes de noms, d'une part féminins et d'autre part masculins, doivent être associées : par exemple, travailleur et travailleuse, boulanger et boulangère, mère et père, frère et sœur, etc..
La formatrice doit toujours avoir le souci d'insérer chaque nouvelle notion dans la suite d'exercices suivant le texte et, occasionnellement, les représenter au tableau. Cette récurrence favorise la permanence de l'objet d'apprentissage.
La formatrice demande aux apprenants de réfléchir sur ce qui les aiderait à se souvenir du signe du féminin. Ce pourrait être : féminin réfère à femme; on utilise «la» avec femme, donc si on utilise «la» avec un autre mot, ce dernier est féminin. Ils acquièrent alors une façon de généraliser le féminin. En plus, dans leur grammaire, celle qu'ils bâtissent au fur et à mesure des apprentissages, ils retrouveront l'énoncé de la notion de genre appuyé d'un exemple.
Objectif :
Que les apprenants utilisent le «l'» devant les mots commençant par une voyelle.
Explications :
Comme l'élision est appliquée devant les mots commençant par une voyelle, sa place dans l'ordre d'apparition des notions s'explique facilement. À notre avis, elle vient consolider la distinction entre deux groupes de lettres dans l'alphabet. Elle permet de focaliser une deuxième fois sur ce groupe et justifie la pertinence de les avoir identifiés et classés. Dans la démarche, nous n'inclurons pas le «h» muet, mais des mots fournis ultérieurement, commençant par un «h» muet, seront donnés. Comme ces mots laissent entendre à l'audition qu'ils commencent par une voyelle, du même coup, les apprenants apprendront en les voyant que certains mots ont un «h» muet au début. Nous ne croyons pas qu'il est nécessaire de faire une démarche d'apprentissage sur le «h» muet. Il peut être introduit globalement, sans insistance particulière. Les apprenants devront se souvenir que certains mots commencent par un «h».
Puisque l'apostrophe tient lieu de «e» ou de «a» selon qu'elle est placée devant un mot féminin ou masculin, la formatrice est tenue de tenir compte de la notion de genre. L'élision devra donc être abordée après le genre.
Démarche :
Nous procédons par analyse comparative pour faire découvrir l'élision du «e» et du «a» devant les mots commençant par une voyelle. Pour ce faire, nous fournissons 20 mots sur une feuille. Dix d'entre eux commencent par une voyelle, dix autres commencent par une consonne différente. Chacun est précédé de l'article requis : «le», «la», «l'» et n'est pas classé. Individuellement, les apprenants lisent les mots avec consigne de bien observer. Alors que tout le monde a eu le temps de lire et d'observer, la formatrice recueille le fruit de leurs observations. Elle demande si un des éléments d'observation permet de classer les mots en deux groupes. Quand les apprenants ont identifié le fait que certains mots sont précédés de «la», de «le» et d'autres du «l'», elle demande alors comment ils pourraient faire un classement de ces mots. Ils suggéreront le classement en deux ou en trois groupes : par l'article «le» et «la» dans une même colonne et les mots précédés du «l'» dans la deuxième; ou une colonne de mots avec «le», une colonne avec les mots précédés de «la» et, finalement, les mots précédés de «l'». La formatrice demande aux apprenants de prendre quelques minutes, en silence, pour observer le classement afin de découvrir pourquoi il y a d'une part le «Il» et d'autre part le simple «la» ou «le». Un autre moment est accordé à l'observation avec la consigne de réduire le classement à deux colonnes. La distinction entre le «l'» et les autres articles ressort bien à ce moment. Enfin, la formatrice oriente le dernier moment d'observation afin de découvrir dans quelle situation le «l'» est utilisé. Le prérequis à cet apprentissage est la voyelle. Ils sont donc prêts à faire la découverte de l'élision. Un premier groupe de mots commence par une consonne et un deuxième commence par une voyelle. Quand ils l'ont découvert, ils formulent, en groupe, la règle. La formatrice en prend note, la met au propre dans une forme standardisée. Les apprenants l'insèrent dans leur cahier/grammaire à la suite des autres. Ils doivent également voir que «l'» remplace «e» ou «a» selon le genre du mot qu'il précède.
Pour vérifier s'ils ont saisi, la formatrice demande à chaque apprenant de fournir un mot devant lequel il devra utiliser le «l'», puis un mot où il utilisera «le» ou «la». C'est précisément à ce moment que des mots commençant par un «h» muet sont susceptibles d'apparaître. C'est alors que la formatrice amène cette particularité en expliquant que ce qu'on entend au début du mot, ce n'est pas le «h» mais bien la voyelle. Dans certains cas, on utilise le «l'», dans d'autres cas, on utilise «le» ou «la». L'expérience de l'écriture et de la lecture, l'utilisation du dictionnaire au niveau avancé, contribueront à l'intégration de cette particularité. Ceci est sans compter sur la compétence langagière qu'ils peuvent mettre à profit.
Objectif :
Que les apprenants puissent remplacer dans une phrase un verbe d'action par un autre verbe d'action, un nom par un autre nom et un adjectif par un autre adjectif.
Explication :
Les groupes de mots qui sont vus sont limités aux noms, aux adjectifs et aux verbes d'action. Mentionnons que les déterminants sont vus lors de la découverte du genre et du nombre. C'est une suite du niveau débutant où, nécessairement, ils ont été reconnus sans qu'un travail ait été fait dessus. Mentionnons que toute personne, par le simple fait de parler une langue, prouve qu'elle en connaît les règles. L'apprentissage de la lecture amorcé au niveau débutant implique qu'ils ont eu à reconnaître la structure dans son rapport avec l'écrit, la phrase, la place des mots et leur importance. On ne peut lire sans se rendre compte (plus ou moins consciemment) de l'importance des mots et de leur place. Si l'on faisait lire à des apprenants : «La mange du vache foin», ils verraient tout naturellement l'illogisme de la construction. Disons que, par la lecture, ils prennent conscience que la structure de l'écrit est intimement liée à celle de la langue parlée et que tout cela est régi par un ensemble de règles. Donc, discriminer les noms, les adjectifs et les verbes est, à notre avis, la deuxième étape d'apprentissage dans la poursuite du niveau complet (débutant). La démarche doit permettre de faire ressortir les différences aux fins du classement. C'est la première occasion de nommer les éléments que nous voulons porter à leur attention et, donc, d'utiliser la terminologie de rigueur en grammaire. Il serait inutile, voire plus exigeant, d'utiliser des termes que nous supposons plus faciles à retenir pour, ensuite, avoir à défaire cet apprentissage en vue d'utiliser le terme juste. L'exemple le plus courant est le suivant : au lieu de parler de «verbe», parler de «mot d'action». N'oublions pas que certains apprenants poursuivront peut-être leur démarche à l'école et qu'il sera nécessaire pour eux de connaître cette terminologie. Ce qui est le plus difficile, ce n'est pas de retenir le terme juste, mais de bien comprendre la notion. Le défi se situe davantage dans le choix de la méthode d'apprentissage et de l'approche.
La raison pour laquelle nous avons fait le choix de ces trois groupes réside dans le fait qu'ils sont à la base de la structure de l'écrit et que, en conséquence, ils sont très fréquents. En effet, une phrase très simple peut être composée de trois mots, chacun d'un groupe différent, ou de deux mots, soit un nom et un verbe.
Pour l'apprentissage des trois classes ou groupes de mots (nom-verbe - adjectif), nous croyons qu'il est nécessaire de procéder par étapes. La première étape est consacrée soit au nom, soit au verbe. Nous les présentons dans l'ordre suivant : nom - verbe -adjectif. Nous pensons que le nom est plus accessible puisqu'il ne change pas de forme comme le fait le verbe. Seuls son genre et son nombre peuvent altérer sa forme. Le verbe, lui, est en quelque sorte le moteur de la phrase. Finalement, l'adjectif, comme il complète le nom, doit nécessairement arriver après celui-ci.
a) Le nom :
Les noms communs désignent des personnes, des animaux, des choses ou des idées. C'est ce que les apprenants doivent découvrir. Avec cela, ils voient que ces noms ont toujours un genre et qu'ils sont presque toujours précédés d'un déterminant.
1. La formatrice écrit au tableau des noms de personnes, d'animaux, de choses et d'idées en nombre égal. Ce sont en effet ceux que les apprenants doivent reconnaître et discriminer. Les quatre groupes que nous vous présentons ci-dessous sont d'abord présentés sans être classés. Ce sont les apprenants qui ont à les classer.
On commence par leur présenter, amalgamés, les noms de personnes et d'animaux. Ils les classent en deux et précisent les raisons de ce classement. D'une part il y a des noms de personnes et d'autre part des noms d'animaux.
le singe | l'écrivain |
le chat | la chanteuse |
le chien | le navigateur |
la vache | le boxeur |
l'abeille | la nageuse |
l'éléphant | l'enfant |
le serpent | l'aveugle |
le cheval | l'actrice |
la poule | le voleur |
le canard | la femme |
la laveuse | l'amour |
le logement | la générosité |
la table | l'amitié |
la pomme | la bonté |
la laitue | la souffrance |
la porte | l'idée |
le ciseau | la tristesse |
la plume | la joie |
l'efface | le temps |
La tâche réside dans le fait que les apprenants doivent découvrir le caractère abstrait d'un des groupes. Les apprenants sont appelés à réfléchir sur le sens, la signification de ces mots. Le but est d'arriver à les classer en deux groupes. Par la voie de la définition des mots, ils doivent arriver à faire ressortir le caractère non palpable, non concret des noms d'idées. Ils peuvent également les comparer avec la série de noms de choses. La formatrice peut suggérer de comparer la définition de l'amour et le sens de table.
Quand les quatre catégories sont identifiées, on compare une série de noms comprenant les quatre groupes afin d'arriver à dégager, par comparaison avec le verbe, le sens général, le caractère nominatif des noms et le fait qu'ils peuvent toujours être précédés d'un article.
la sensibilité | déplacer |
le garage | bâtir |
le fleuriste | magasiner |
le soleil | laver |
la gentillesse | lire |
la nièce | bercer |
l'orage | travailler |
Les formatrices ont un rôle d'animation important à jouer ici, comme dans toute autre démarche de découverte. Les questions qu'elles posent sont la clé du succès de la découverte. L'important est d'axer l'attention sur le sens, la signification des mots.
Maintenant que les noms ont été reconnus et classés, la formatrice donne un nom et demande de quel type il est : nom de personne, d'animal, de chose ou d'idée? Puis, chacun doit donner un nom et dire à quel groupe il appartient. Finalement, la formatrice donne des mots qui seront alternativement des noms et des verbes et chaque apprenant devra dire si c'est un nom et, si oui, de quel groupe et l'utiliser avec l'article.
La formatrice écrit une phrase au tableau et demande à un apprenant de souligner le ou les noms qui s'y trouvent. Elle procède de même avec chaque apprenant. Elle peut leur demander si c'est un nom de personne, d'animal, de chose ou d'idée. Ou elle peut fournir un exercice sur papier tel que l'exemple qui suit.
Nom : ____________
Date : ____________
À côté de chaque nom commun indique ce qu'il nomme :
la joie | le cheval | la poire |
le barbier | l'auto | la poule |
le singe | l'amour | l'amitié |
la tristesse | la tortue | la ménagère |
le bureau | le chauffeur | la cousine |
l'apprenant | la tasse | le chien |
l'allumette | le chien | l'entraide |
b) Le verbe :
Le verbe est le noyau de la phrase. C'est autour de celui-ci qu'elle se construit. Au niveau intermédiaire, comme l'objectif d'apprentissage l'indique, nous ne travaillons pas sur le temps, le mode ou la personne, mais bien sur la discrimination du verbe à partir du sens. Par une démarche de découverte, les apprenants ont à le définir comme un mot qui suggère l'action; qu'il est indispensable dans une phrase; qu'il dit le temps où cela se passe; qu'en son absence, il n'y a pas de phrase.
Pour faciliter la démarche, on devra éviter les verbes d'état qui seront vus au niveau fonctionnel; éviter également l'utilisation des auxiliaires avoir et être parce que cela rend la reconnaissance du verbe plus difficile. Ainsi, les exemples peuvent être au présent, à l'imparfait ou au futur.
oui : Je marche dans la rue. non : Le bûcheron l'arbre.
On peut offrir en faux exemple les mots qui entourent le verbe dans l'exemple «oui» : Je dans la rue. Il peut être plus évident qu'on ne sache pas «ce que je fais dans la rue». Cela amène sur la piste de l'action.
oui : Tu parleras à Hélène,
non : Le chien l'aveugle.
oui : Les fleurs poussent vite,
non : Je un vêtement.
oui : L'enfant joue,
non : La neige.
oui : Il lit un roman,
non : Jean sa voiture.
oui : Les enfants vont à l'école,
non : Le jardinier les fleurs.
oui : Ce travail fatigue Jeanne,
non : Marcel une histoire drôle.
oui : Nous travaillons à l'usine,
non : L'industrie ses portes.
oui : Vous vendez de beaux légumes,
non : Tu un dessert.
Le verbe est absent dans chacun des faux exemples. Cela suscite à chaque fois une curiosité sur ce qui arrive, sur ce qui est. Ce que les apprenants observeront probablement, c'est l'absence d'un mot qui s'apparente à un mot présent dans la phrase qui est un exemple vrai. Sans dire que le verbe manque, ils pourront suggérer un exemple qui complétera la phrase en respectant la structure grammaticale. On leur demande quel effet entraîne l'absence de ce type de mot. Cela cerne le rôle qu'il joue et son importance dans la phrase.
Nous venons de voir la démarche de découverte du verbe. Elle sera suivie de nombreux exercices visant la généralisation : encercle les verbes dans les phrases suivantes - complète la phrase avec le bon verbe - donne des verbes oralement - remplace le verbe par un autre verbe. Les exercices doivent permettre à l'apprenant de repérer les verbes dans les contextes les plus variés, de trouver des exemples. Chaque apprenant construit une phrase, puis les autres identifient le verbe qu'il a utilisé pour faire sa phrase. Par la suite, la formatrice s'assure de fournir régulièrement des exercices qui focalisent sur le verbe pour faire en sorte que se fixe cet apprentissage. Il sera toujours présent dans la pratique de l'écriture. Il en va de même pour les autres notions et conventions. Il s'agit de conserver et d'actualiser les apprentissages dans la suite des pratiques de lecture et d'écriture (travail au tableau).
c) Adjectif qualificatif :
Démarche :
Il s'agit de présenter des phrases qui font ressortir, dans chaque exemple «oui», le qualificatif du nom. L'exemple «non» en contraste avec le «oui» fait ressortir l'absence de qualificatif. Ce contraste leur permet, en comparant, de faire ressortir la manière d'être, la qualité de l'être ou de l'objet. Malgré la présence des adjectifs numéraux, démonstratifs et possessifs dans les textes - donc en lecture et au besoin dans l'écriture - nous ne les abordons pas à ce niveau.
oui : Cet homme semble inquiet,
non : L'homme marche dans la rue.
oui : Le chat est petit.
non : Le chat est dans le salon.
oui : L'enfant est triste,
non : L'enfant est allé au parc.
oui : Cette femme est contente.
non : Cette femme est allée chez le notaire.
oui : La fleur rose est belle,
non : La fleur est dans le pot.
oui : Le café noir est fort,
non : Le café pousse au Brésil.
oui : Les abeilles sont petites, nombreuses et travaillantes,
non : Les abeilles vivent dans des ruches.
oui : Les bons fruits juteux et sucrés sont bons pour la santé,
non : Les fruits poussent dans les arbres.
Lorsque les apprenants ont réussi à définir que certains mots viennent nous donner des informations supplémentaires sur les noms en présence, à savoir la qualité de l'être ou de l'objet et la manière d'être, les phrases sont reprises une à une dans le but d'isoler, soit en soulignant, soit en encerclant, chacun de ces mots. Les apprenants se concentrent sur les mots et la formatrice les aide à préciser la façon dont chacun qualifie le nom. La formatrice se sert de la formule : comment est l'objet ou la personne? ou inversement : qu'est-ce qui est comme ceci ou comme cela? pour faire ressortir le lien entre l'adjectif et le nom.
Chaque apprenant est appelé à trouver oralement des adjectifs qualificatifs. Après cet exercice oral, à l'aide d'un texte que les apprenants ont en main, ils doivent encercler ou souligner les adjectifs qualificatifs. À une autre étape, les apprenants sont appelés à faire des phrases à partir d'un nom donné par la formatrice. La tâche consiste à qualifier ce nom dans un contexte de phrase.
Objectif :
Les apprenants seront capables d'identifier, par exemple en l'encerclant, le mot qui est le signe du nombre et sauront pourquoi il y a un «s» aux noms.
Discussion :
Nous avons présenté dans la progression la notion de genre avant la notion de nombre parce que les noms ont avant tout un genre et que le nombre, pour sa part, peut varier selon le contexte.
Cette notion est abordée par le biais de la place des déterminants et du «s» comme marque du pluriel sans étendre l'apprentissage de l'application du nombre à ses multiples facettes. La notion de nombre est très vaste de contenu (elle va du nom jusqu'au verbe en passant par les adjectifs); on se limitera donc au nombre des noms comme porte d'entrée. Le niveau avancé se chargera de pousser cette notion plus loin.
Démarche :
La notion de nombre peut être très concrète. Il s'agit de quantité, notion vraisemblablement connue de tous et toutes et largement utilisée. La démarche peut donc partir d'une expérience témoin afin de porter la notion de nombre à l'observation9.
Ce qui importe dans la démarche, c'est de mettre les apprenants en situation de saisir le sens du pluriel dans les mots : quels sont les mots qui nous apprennent s'il est question d'un ou de plusieurs événements, d'une ou de plusieurs choses ou personnes. Cette démarche leur permet de vérifier, tant à l'oral qu'à l'écrit, la différence entre le pluriel et le singulier. Le «s» à la fin des mots sera nécessairement observé, vu le contexte d'analyse comparative d'une même phrase au singulier dans un premier temps et, ensuite, au pluriel.
Exemple de procédé
La formatrice appelle les apprenants à l'observer faire un geste, à partir duquel ils devront construire quelques phrases. Elle met un crayon sur une table libre. Elle demande aux apprenants de faire des phrases sur ce qu'ils ont vu ou voient. Si besoin est, elle questionne afin, d'une part, de rester dans le contexte et, d'autre part, de s'assurer que toutes les possibilités émergent : combien y a-t-il de crayons sur la table? où est le crayon?
Les phrases sont écrites au tableau. On recommence l'expérience avec plusieurs crayons. Les mêmes phrases, mais cette fois au pluriel, sont construites. Elles sont aussi écrites au tableau.
Le matériel obtenu permet de faire une analyse comparative. Les phrases sont observées pour en dégager ce qui marque le nombre : l'article et le «s» du nom au pluriel, en l'occurrence «crayons».
Le singulier et le pluriel sont vus de front. Pour éviter la confusion dans la terminologie, le groupe se penche sur ce qui lui permettrait de se souvenir du terme juste pour l'un ou l'autre nombre. Il suffit d'en associer un pour que l'autre le soit. Ce peut être, par exemple : pluriel = plusieurs. Quoiqu'il en soit, ce sera à chacun, ou au groupe, de définir ce truc, mais il faut lui en donner le temps.
Les apprenants, chacun leur tour, doivent donner le nombre d'un nom compris dans une phrase énoncée par la formatrice. Dans ces phrases, on trouvera des déterminants qui n'ont pas été utilisés dans les phrases de départ. Puis chacun donne une courte phrase où apparaît un nom soit au singulier, soit au pluriel selon la demande de la formatrice. Des déterminants variés tels «des», «mes», «tes» et «ses» ou «ces» peuvent être utilisés. La formatrice écrit au tableau les phrases de chaque apprenant pour faire ressortir l'éventail des déterminants utilisés et fournit des exemples pour ceux qui n'apparaissent pas.
Si cette étape démontre une bonne compréhension, le groupe formule la règle dans ses mots, formulation qui s'insérera dans la grammaire des apprenants.
Quelques exercices pratiques doivent être exécutés pour appliquer, dès cette étape, la nouvelle notion et fixer son apprentissage. Par exemple, la formatrice donne quelques phrases où les mots soulignés doivent être mis au pluriel : J'ai fait la robe.
La notion de nombre se retrouve désormais dans la suite des exercices suivant le texte.
Objectif :
Que les apprenants utilisent la majuscule avec les noms propres de personnes, de pays, de villes, de rues et finalement de provinces, bref de lieux.
Explications :
Avec cette notion commence la focalisation sur le particulier et la distinction dans la nature des noms. Pour les noms propres, nous recourons à l'analyse comparative afin de différencier le nom propre des autres noms et d'observer, le cas échéant, la majuscule.
L'objectif poursuivi est d'amener les apprenants à reconnaître que la majuscule est nécessaire, voire indispensable, dans les différents cas cités dans l'énoncé de l'objectif.
Démarche :
Les apprenants découvrent que les noms de rues, de villes, de provinces, de pays, de personnes et d'animaux portent une majuscule. La formatrice dit de ces mots, qui portent obligatoirement des majuscules, qu'ils sont des noms propres.
La formatrice donne un nom commun ou un nom propre à chaque apprenant pour identification. Puis elle demande aux apprenants de donner des exemples de noms propres. Dans un texte, la formatrice aura omis de mettre les majuscules et les apprenants ont donc à repérer et corriger les mots qui en ont besoin. La suite d'exercices sur le texte comprend désormais un exercice sur les noms propres. Cela assure une certaine permanence dans l'apprentissage.
De même que pour les autres notions, le groupe formule la règle afin que celle-ci s'ajoute aux autres notions de leur grammaire.
C'est intéressant d'introduire des connaissances générales quand l'occasion s'y prête. Nous n'avons pas intégré d'objectif visant à les apprendre, mais cela donne plus de signification au contenu. Si l'utilisation d'information relative au découpage géographique semble susciter de l'intérêt, la formatrice pourra aborder ce thème par la suite.
Objectif :
Les apprenants seront capables de résumer en deux ou trois phrases simples le contenu d'un texte.
Explication :
Ce travail se fait progressivement, en parallèle à la capacité d'écriture des apprenants.
Nous portons une attention particulière au titre puisque nous croyons qu'il est le point de départ de l'apprentissage du résumé. Le rôle ou la fonction du titre est en quelque sorte de refléter ce dont parle le texte. La démarche commence par apprendre ce à quoi sert un titre et à titrer un texte.
Les apprenants sont habitués à recevoir des textes titrés, mais aucune attention particulière n'y avait été portée. Le titre était vu globalement. À partir du moment où la formatrice se penche sur l'apprentissage progressif du résumé, la première étape consiste à consacrer un temps à la notion de «titre».
Objectif :
Que les apprenants aient, à la fin du niveau, élargi leur banque de vocabulaire. Cela peut se traduire par la capacité de trouver le synonyme ou l'antonyme d'un mot. Ils seront capables de définir un mot simple.
Explication :
Les mots continuent d'être une préoccupation importante pour le niveau intermédiaire. Quoique ce travail se retrouve aux trois niveaux, il s'étend ici aux rapports que l'on peut établir entre les mots du point de vue du sens. On aborde les synonymes et les antonymes. Cet aspect de la langue permet aux apprenants de prendre conscience de la présence des concepts d'opposition et de parenté dans la langue et de les utiliser consciemment. Les apprenants font l'exercice de jouer avec la langue, avec les mots. En faisant ce travail, on ne peut passer à côté de la signification des mots qui constitue, en soi, un exercice de définition. La lecture se raffinant au point de pouvoir lire avec aisance (l'apprentissage du code atteignant presque ses limites), on doit nécessairement faire un travail sur le vocabulaire (volume et compréhension). On peut passer par une progression relativement simple pour arriver à définir des mots.
Pour permettre de faire saisir ce que veulent dire synonyme et antonyme, il faut faire une démarche de réflexion sur le sens des mots. On peut procéder par découverte en se servant, dans le cas des synonymes, de paires de mots qui sont synonymes, par exemple :
commère | bavard |
gens | personne |
lourd | pesant |
ôter | enlever |
rapide | vite |
Les apprenants ont à réfléchir sur chacune des paires afin d'arriver à la conclusion que ces mots veulent dire la même chose. La formatrice dira que deux mots qui veulent dire la même chose s'appellent des synonymes.
On procède de la même façon pour les antonymes, par exemple :
riche | pauvre |
beau | laid |
lent | vite |
grand | petit |
Il est important de fournir des mots que les apprenants connaissent et peuvent lire. Nous suggérons également de prendre des mots concrets.
Puis, on demande de trouver dans le texte un synonyme de _______ ou un antonyme de _______ . On peut également suggérer une paraphrase qui correspond à un mot du texte. On demande de trouver l'expression dans le texte qui correspond à telle définition. On leur demande d'associer chaque mot de la colonne de gauche à leur antonyme de la colonne de droite. Ou encore, on peut suggérer trois définitions différentes pour un mot et les apprenants ont à trouver la bonne définition. On peut leur proposer un jeu de devinette où un mot est défini et ils doivent le trouver, soit dans un texte, soit dans une banque de mots. Lorsqu'ils sont relativement habitués, on peut leur suggérer des définitions afin qu'ils découvrent le mot. Cet exercice se fait individuellement ou deux par deux. On peut demander à des groupes de deux apprenants de formuler la définition d'un mot qu'ils soumettent au groupe, sous forme de devinette. Finalement, individuellement, ils ont à définir des mots tirés d'un texte ou d'une banque de mots.
Il existe une série de mots qui se retrouve fréquemment dans les écrits. Certains d'entre eux sont relatifs au temps et servent à lier deux éléments dans une phrase. Les apprenants ne saisissent pas toujours bien le sens de ces mots et en ignorent la graphie. Ils ont pourtant à les écrire. On peut donc poursuivre deux objectifs dans l'apprentissage de ces mots : un objectif concernant le sens et un deuxième concernant la graphie. En ce qui a trait à la graphie, il ne s'agit pas de faire apprendre une liste de mots mais bien de fournir une ressource/référence pour leur cahier dont ils pourront se servir ultérieurement, c'est-à-dire quand ils écriront seuls.
Sans avoir trop focalisé sur ces mots, les apprenants se penchent quand même sur leur signification et retrouvent dans leur cahier un outil pratique à utiliser quand ils écrivent seuls.
Liste des mots que nous retenons : quand - avant - après -souvent - depuis - pendant - maintenant - durant - lorsque -jamais - toujours - déjà - rarement - ensuite.
Le même type de travail peut être fait, si besoin est, avec des ensembles de mots qui traduisent, par exemple, la notion d'espace.
Les mots fréquemment utilisés dans la phrase interrogative (qui, que, quoi, pourquoi, qu'est-ce), puisqu'ils contiennent le son «qu», sont vus grâce à la simple découverte de ce son. Les questions sur le texte forment le contexte où ces mots sont appris globalement. Il est cependant nécessaire de s'assurer de la compréhension de ces mots. Quand au début d'une question on retrouve le mot «qui», à quoi s'attend-on comme réponse? C'est là le genre de question qui peut servir pour interroger le sens de ces mots.
Pourquoi propose-t-on au niveau intermédiaire l'apprentissage des nombres écrits? C'est pour répondre à des besoins fonctionnels. Ceci permet de faire un chèque, de repérer une date sur le calendrier, de prendre en note un rendez-vous ou un message.
Il est nécessaire de s'assurer que tous les apprenants ont une connaissance élémentaire de la valeur des nombres. Sans cela, ces apprentissages fonctionnels sont inutiles.
Nous associons l'écriture des nombres à la capacité de faire un chèque. Une personne du niveau intermédiaire peut, en explorant un modèle de chèque, arriver à le remplir seul à l'aide d'une fiche-guide sur laquelle on retrouve les nombres accompagnés des sons équivalents en lettres. Généralement, ils ont davantage besoin de support parce qu'ils se croient incapables. Le plus difficile est de mémoriser la façon d'écrire les nombres. Dans certains cas, les graphies ne sont pas simples : vingt, huit, cinq, treize en sont des exemples. On ne peut pas faire de travail sur le son, puisqu'ils sont tous différents. Il n'y a pas de système global pour appuyer l'apprentissage graphique. Il faut malheureusement les apprendre par cœur. Les dizaines nous fournissent un cadre référentiel pour reproduire les nombres par écrit : on peut retenir que soixante s'écrit toujours de la même façon que ce soit avec un - deux - trois - etc..
Ainsi, nous proposons d'orienter le travail, dans un premier temps, sur les vingt premiers nombres, c'est-à-dire de 1 à 20, puis sur les dizaines. L'objectif vise à ce que les apprenants puissent écrire ces nombres de façon autonome.
Nous nous penchons ensuite sur le calendrier. Sa structure est à découvrir. Pour cela, nous fournissons une feuille du mois en cours et les apprenants en font l'analyse. La formatrice doit fournir des questions pertinentes afin de les aider à découvrir cette structure. À quoi correspond chaque colonne verticale? chaque colonne horizontale? quel mois est-ce? combien y a-t-il de jours dans ce mois? quel jour sera le 7 de ce mois? le 19? le 30? combien de jours dans une semaine? quel jour commence la semaine? quel jour la finit? Puis on fait découvrir l'identification des jours fériés sur un calendrier : quelle est la date de Noël? Quel jour sera Noël cette année? quel signe apparaît sur le calendrier à ce jour? quel jour changeons-nous d'année? combien y a-t-il de mois dans l'année? On peut continuer de cette façon jusqu'à ce qu'ils nomment les saisons et les mois correspondants.
À chaque nouveau début de mois, la formatrice fournit la grille correspondante.
Ces feuilles sont insérées dans leur cahier et deviennent leur agenda. Ils pourront y inscrire les activités qui se tiendront au cours de la session de même que leurs rendez-vous.
Quand les apprenants ont suffisamment intégré les nombres et l'organisation du calendrier, on peut aborder le «chèque». Chaque apprenant doit avoir en main un prototype de chèque. Encore une fois, chacun l'observe. Puis un apprenant volontaire lit point par point ce qui est écrit pendant que la formatrice reproduit ce qu'il lit au tableau. Elle énonce une mise en situation et le groupe tente de faire le chèque. La formatrice aide en fournissant les éléments logiques nécessaires. Une nouvelle mise en situation est remise aux apprenants et, deux par deux, ils tentent de le remplir. Les résultats sont mis en commun et analysés afin de définir la formulation exacte.
Par la suite, individuellement, les apprenants ont à rédiger des chèques à partir de différentes mises en situation.
Nous allons voir quelques découvertes de sons, d'une part pour rappeler la démarche et, d'autre part, pour fournir une démarche propre à des sons qui, en plus de permettre la découverte de la graphie, permettent de découvrir la règle orthographique. Il s'agit en effet de graphies qui s'utilisent dans des contextes particuliers.
Objectif :
Que les apprenants utilisent «m» devant «p» et «b».
Explication :
Les règles orthographiques sont autant d'outils à maîtriser pour faciliter l'écriture autonome. Les premières conventions que les apprenants du niveau débutant ont découvertes relevaient directement des associations des lettres avec leur son, soit simple ou complexe. Ici, nous allons un peu plus loin en ajoutant une condition à l'utilisation d'une lettre, en l'occurrence le «n» ou le «m». Comme nous le disions, les choses se complexifient, mais les apprenants, s'ils sont bien du niveau intermédiaire, ont les acquis nécessaires pour faire cet apprentissage. L'approche de la découverte est utilisée avec succès pour cette règle orthographique.
Voyons cependant les différences qui ressortent lorsqu'on aborde un son soumis à une règle orthographique et un son soumis à une convention graphique. Prenons par exemple le son «ch» : la condition pour le reproduire tient dans la nécessité de la présence des deux lettres dans le respect de l'ordre d'apparition (ce n'est pas «hc» mais bien «ch»). Nous sommes en présence d'une convention graphique qui, si elle n'est pas respectée, change le son. Il en est autrement pour le «m» devant le «p» et le «b». Le «n» devant «p» et «b» est remplacé par «m»; si cette règle n'était pas appliquée, le son ne changerait pas. Or, dans une progression notionnelle, la règle orthographique du «ch» précède celle du «m» devant «p» et «b» puisque nous jugeons plus complexe l'apprentissage d'une règle orthographique que d'une convention graphique.
Il s'agit de voir dans quels cas il faut utiliser le «m». Le classement, tâche première de cette démarche, permet aux apprenants de dégager la règle. Mentionnons le fait que nous retrouvons le «m», dans la grammaire, non seulement devant le «p» et le «b», mais également devant le «m». Toutefois, vu le faible nombre de mots en «emme», tel «emmener», nous ne l'incluons pas dans cette démarche. Ils sont vus globalement en contexte de lecture.
Nom : _____________
Date : _____________
a) Lis les mots suivants :
troublant | température |
encre | embarquer |
emprise | ambition |
mandat | champêtre |
dans | novembre |
étampe | détente |
fente | décembre |
tampon | lambin |
galant | enjamber |
ventre | tempe |
grand | endetter |
roulant | rampe |
b) Quel son se retrouve dans tous les mots? _____________
c) Souligne les lettres qui font le son. _____________
d) Combien de façons différentes y a-t-il d'écrire le son «an»? _____________
e) Quelles sont-elles? _____________
Nom : _____________
Date : _____________
a) Lis les mots suivants :
lampe | jambe | jambon |
tente | septembre | novembre |
décembre | convention | enveloppe |
campagne | Champagne | champignon |
ensemble | tremper | emballer |
emploi | gendre | entente |
cramper | vampire | ambition |
empiler | menton | tendre |
tante | gant | restaurant |
maintenant | élan | pourtant |
b) Classe les mots dans la bonne colonne :
«am» | «em» | «an» «en» |
Le procédé mène à identifier les cas où lorsque le son [an] est suivi du «p» ou du «b», on écrit un «m» à la place du «n». Donc, après que tous les apprenants ont complété l'exercice ci-dessus, ils doivent démontrer qu'ils ont déduit la règle en l'exprimant oralement.
La formatrice écrit au tableau autant de mots qu'il y a d'apprenants pour que chacun puisse en lire un et expliquer la graphie, donc, énoncer la règle orthographique qui sera introduite dans leur grammaire.
La formatrice peut donner autant d'exercices qu'elle peut juger nécessaire pour que les apprenants utilisent la règle. Elle s'assure, de plus, d'inclure un exercice dans la série accompagnant le texte afin que son recours fréquent génère un certain automatisme.
Objectif :
Que les apprenants soient capables d'utiliser l'accent approprié en présence du bon son.
Explication :
Pour une personne en démarche d'apprentissage, lorsque le «e» est assorti d'un accent, il peut être vu comme une lettre différente du «e» non accentué. Le fait de l'avoir lu par la méthode globale nous explique cette conception. Est-ce un tort ou un avantage? D'une part, nous croyons que c'est un avantage puisque l'accent va de soi quand le son le prescrit; l'image qu'on se fait du mot comprend l'accent. Ce qu'on est en droit de se poser comme question, c'est : la subtile différence entre l'accent grave et l'accent aigu peut-elle, quand vient le temps d'écrire, ne pas être discriminée? De plus, ce n'est pas simplement sur le «e» que nous retrouvons les accents : pensons à «î», «à». Au niveau intermédiaire, nous avons établi la limite de l'apprentissage à la différenciation et l'association de l'accent au bon son. Les accents aigu, grave et circonflexe sur le «e» sont ceux que nous abordons. Quoique le son [é] s'écrive également «er», «ez», «ai», nous nous contentons de voir «é» et «er». Quant au «è», qui présente la même complexité, nous nous contentons de voir «è», «ê» et «ai». La démarche que nous suggérons pour cet apprentissage tient compte de l'importance de la différenciation des accents. En conséquence, nous croyons qu'il est nécessaire d'aborder le son [é], après quoi nous passons à d'autres notions avant d'aborder le son [è].
Une étape de la démarche permettra de déterminer un modèle-mémoire de sorte qu'au moment d'aborder l'accent grave, la confusion ne s'installe pas. Le modèle-mémoire sert de soutien à la mémoire. Comme la démarche est celle énoncée dans le premier document Méthode phonétique au niveau débutant, l'exemple pour la découverte du [é] constitue un modèle à utiliser pour la découverte d'un son à deux graphies ou plus.
Démarche :
1. La formatrice énonce oralement une série de mots contenant le son vedette, en l'occurrence le [é]. Les premiers ont une syllabe; les suivants, deux, et les derniers, plus de deux. Le son à l'étude se retrouve une seule fois dans le mot (pour mieux l'isoler), en position initiale, médiane ou finale. On évite, dans la suite des apprentissages, que deux sons trop semblables à l'ouïe se succèdent. On ne doit pas inclure des mots avec le son [ier], tel «fermier». Toutefois, à l'étape où les apprenants fournissent des mots en [é], ils seront acceptés.
Modèle de liste de mots pour la démarche
dé | étoile | respirer |
clé | donner | épingle |
ôter | caméra | boucher |
vélo | liberté | récolte |
dîner | visiter | remplacer |
passé | écrire | épicerie |
aimer | couper | réduire |
carré | céleri | ramasser |
métro | déranger | commencer |
parler | chérie | précision |
danger | plancher | étranger |
2. Les apprenants ont identifié le son. La formatrice soumet à chacun un mot, lui demande s'il entend le son et, dans l'affirmative, où il se trouve dans le mot (au début, au milieu, à la fin).
3. On vérifie la graphie du son. La formatrice écrit un certain nombre de mots au tableau. Chaque apprenant en lit un et repère, dans l'ordre d'écoulement des sons, ce qui fait «é»
ou «er». Ainsi s'établit une correspondance grapho/phonétique du son [é] pour chacun des mots au tableau.
4. La formatrice donne sur une feuille une série de mots comprenant le son [é]. Il s'agit d'un exercice de repérage où les apprenants ont à entourer ce qui fait le son [é]. Cet exercice aide les apprenants à focaliser, de façon répétitive, sur la graphie du son [é] afin que la mémoire la retienne. Une deuxième consigne leur est soumise : de combien de façons le son [é] est-il écrit? et : écris les deux graphies du son [é] : ______________.
5. La formatrice donne oralement des mots qui contiennent parfois le son [é]. L'apprenant doit dire si le mot contient effectivement ce son. La discrimination s'aiguise.
6. La formatrice écrit une dizaine de mots au tableau. Chaque apprenant en lit un et isole le son, si toutefois il s'y trouve.
7. La formatrice distribue une liste de mots dont certains contiennent le son [é]. La consigne est d'entourer les mots où l'on entend le son [é]. Les apprenants doivent lire les mots sinon ils ne font qu'un simple repérage de lettres.
8. On fournit un texte, comprenant des mots avec le son [é] écrit des deux façons, où les apprenants sont appelés à entourer les mots où l'on entend le son [é].
9. Dans un texte, la formatrice a omis de mettre les accents aigus quand ils étaient nécessaires. La consigne demande de compléter là où c'est nécessaire.
10. La formatrice demande à chaque apprenant de donner un mot contenant le son [é]. Le groupe confirme ou infirme si le son s'y trouve. L'apprenant écrit son mot au tableau et isole le son.
11. La formatrice s'assure ponctuellement de la présence de mots en [é] dans les textes et exercices de repérage. Ceci vise à soutenir cette apprentissage.
En s'inspirant de la démarche utilisée pour le son [é], vous pouvez amener les apprenants à découvrir le son [è] écrit «è», «ê» et «ai». Nous réaffirmons la nécessité d'espacer les apprentissages des sons [é] et [è] pour éviter la confusion qui peut s'installer, non pas à la lecture, mais davantage à l'écriture. L'apprentissage successif des accents aigu et grave peut amener une confusion.
Mise en garde : ne pas faire d'exercice où on demanderait de mettre soit «è» soit «ê» là où il y a lieu. Aucune règle ne leur permet de décider. Rappelons qu'au niveau intermédiaire, les apprenants ne se servent pas encore du dictionnaire. On peut d'autre part demander de mettre soit «é», soit «ê» ou encore, soit «é», soit «è».
Objectif :
Que les apprenants sachent utiliser, le cas échéant, le «c» dur ou doux et le «g» dur ou doux.
Discussion :
Pour aborder cette notion, le prérequis nécessaire est sans contredit la connaissance et la différenciation des consonnes et des voyelles. La règle du «g» et du «c» s'appuie sur la voyelle qui suit ces deux consonnes. C'est pour cela que nous retrouvons cette règle à cette étape-ci et non avant l'apprentissage des consonnes/voyelles. De plus, c'est une règle orthographique que nous qualifions de base, puisqu'elle reste dans le giron du «son». En effet, c'est la graphie de ces sons, assortie de leur règle, qui doit être apprise; comme dans le cas du «m» devant «p» et «b», la lettre qui suit intervient sur l'orthographe. Par exemple, si j'entends le mot «fatigue», l'apprenant doit être capable de le reproduire, c'est-à-dire de faire le choix graphique selon le contexte sonore. S'il fait le mauvais choix, cela modifiera, à la lecture, le son.
La démarche, différente de celle pour le «m» devant les «p» et «b», passe par la découverte de sons. Elle pourrait être la même, à vous de choisir. Il va sans dire que le son découvert exige davantage tant au plan de la réflexion, de l'observation que de l'analyse, puisqu'une règle à trois volets est à définir.
a) «C» dur et doux :
Le «c» devant «a», «o» et «u» fait [k];
Le «c» devant «i» et «e» fait [s];
Le «c» devant «a», «o» et «u» prend une cédille pour faire le son [s].
Mise en garde : les mots utilisés dans la démarche de découverte ne doivent contenir qu'un seul «c», soit en [s] ou en [k]. Ceci favorise la concentration sur un objet de recherche à la fois.
Démarche :
Dans cette démarche, l'observation doit être dirigée, dans un premier temps, sur la lettre puis sur la différence de son et, finalement, sur la lettre qui suit.
Pour aider l'observation, la formatrice pose des questions qui permettent le raisonnement telles que : est-ce qu'une même lettre se prononce parfois différemment? qu'est-ce qui pourrait expliquer cette différence? observez afin de découvrir ce qui est pareil ou différent.
Quand ils ont découvert la règle, la formatrice précise qu'il est nécessaire de la connaître pour écrire et non pour lire. N'ont-ils pas lu avant de découvrir la règle? Cette intervention leur permet de se rendre compte qu'ils connaissent plein de choses sur lesquelles toutefois ils ne peuvent mettre de mots. C'est là l'essentiel de l'apprentissage des notions.
L'étape suivante consiste à vérifier s'ils ont bien compris. Pour ce faire, la formatrice écrit quelques phrases au tableau où des mots qui contiennent le son [s] écrit «c» et le son [k] écrit «c» se retrouvent (au moins un par apprenant). Chaque apprenant est interrogé sur un de ces mots. Il lit une phrase, identifie le mot contenant un «c» et explique selon les cas la règle orthographique. Les phrases progressent en intégrant plus de mots cibles et des mots contenant les deux sons que peut produire le «c». Voici un exemple :
Mon conjoint a fait une colère.
Mon ami est un casse-cou.
Le ciment est cassé.
J'ai décidé d'aller à l'école.
L'écorce de l'arbre est noircie.
L'événement était cocasse.
Silence, le film commence.
Après cette étape, les apprenants sont en mesure de formuler la règle pour l'insérer dans leur grammaire.
Dans l'exercice suivant, les apprenants doivent écrire les mots dans le cadre d'un texte troué ou de phrases trouées. Chaque phrase est lue par la formatrice avec le mot manquant que chaque apprenant écrit. La correction se fait en groupe; chacun à tour de rôle donne la graphie d'un mot accompagnée de son explication. Si une personne peut expliquer, énoncer une règle, on peut conclure qu'elle a compris.
b) «C» prend une cédille devant «a», «o» et «u» afin qu'il fasse [s]
La notion à découvrir est que pour que le «c» fasse [s] devant «a» «o» et «u», on doit ajouter une cédille sous le «c».
Lorsqu'ils l'auront découverte, la formatrice écrit au tableau autant de mots qu'il y a d'apprenants et chacun d'eux devra expliquer le contexte orthographique d'un de ces mots.
Quelques phrases sont écrites au tableau et les apprenants doivent, le cas échéant, ajouter une cédille et expliquer pourquoi.
Le groupe, assisté de la formatrice, énonce la règle. La formatrice en prend note et la met au propre. Par la suite, les apprenants peuvent l'insérer dans leur cahier/grammaire.
La formatrice présentera autant d'exercices qu'elle juge nécessaire pour permettre aux apprenants de s'approprier cette règle orthographique. Elle s'assure également d'ajouter à la suite d'un texte un exercice qui assure l'assimilation de cette règle.
Pour ce qui est des «g» dur et doux, la démarche est la même. Cependant, faut-il le préciser, dans la règle du «c», la cédille vient adoucir le «c» devant le «a», «o» et «u» alors que dans la règle du «g», le «u» vient durcir le «g» devant le «e» et le «i», comme dans figue, guitare.
Le son fondamental de la lettre «s» est [s], mais il change quand le «s» est placé entre deux voyelles. La démarche adopte une suite qui fait découvrir :
a) le son [s] écrit «s»
b) le son [z] écrit «s»
1. À l'oral, la formatrice donne une série de mots où le «s» fait [s]. Exemple de banque de mots :
sage savoir solitude
danse | solide | similitude |
sonner | sauce | sauvage |
souris | surtout | surprendre |
défense | offense | sensible |
sorte | suffire | ensuite |
sirop | salut | sèche |
soldat | ensemble | semblable |
aspirine | espoir | aspirateur |
respire | transport |
2. Elle interpelle les apprenants : «Écoutez les mots et dites-moi quel son revient dans chaque mot.»
3. La formatrice, quand le son est identifié, écrit quelques mots au tableau. Pour chaque mot, la lettre qui rend le son [s] est identifiée.
4. Une nouvelle série de mots est donnée, cette fois avec le son [z]. Les apprenants doivent identifier le son qui se retrouve dans chacun des mots.visite | prison | usure |
valise | cuisine | marchandise |
chemise | musique | musée |
misère | occasion | oiseau |
case | refuser | désirable |
bêtise | trésor | résumer |
jaser | frisette | amusement |
5. Nous retrouvons donc au tableau deux colonnes de mots où, d'une part, le «s» fait [z] et, d'autre part, le «s» fait [s].
6. Les apprenants sont conviés à l'observation et à l'analyse pour dégager les différences et définir la règle du «s» qui fait [z].
7. L'habitude que les apprenants ont acquise dans la pratique de cette démarche les amène facilement à l'observation de ce qui suit le «s». Ils constatent que dans les deux cas, c'est une voyelle. Ils doivent s'ajuster et se concentrer sur un autre élément du mot jusqu'à ce qu'ils arrivent à dégager le fait qu'entre deux voyelles, le «s» se prononce [z]. Ils dégagent également l'observation que lorsque le «s» se trouve entre une voyelle et une consonne ou au début du mot, il conserve sa prononciation propre.
8. Écrire les mots suivants au tableau :assurance - masse - ramasse - mousse - frousse - assemblée -adresse - caresse - jeunesse - presse - vitesse - casserole -vaisselle - assiette - chaussette9. Fournir, à côté de chacun de ces mots, un autre mot dont le «s» est entre deux voyelles et, donc, se prononce [z]. Ils doivent constater le changement. Pour que le «s» se prononce [s] entre deux voyelles, il doit doubler.
10. Fournir sur une feuille une dizaine de mots. Chaque apprenant en lit un et explique pourquoi, selon le cas, le «s» prend tel son.
11. En groupe, comme dans les démarches précédentes, les apprenants, assistés de la formatrice, définissent la règle pour l'insérer dans* leur cahier/grammaire.
12. Dans des phrases, demander aux apprenants d'entourer les mots dont le «s» se prononce [z]. À la correction en groupe, l'explication doit être reprise oralement pour s'assurer que non seulement ils l'ont découverte, mais qu'ils peuvent la verbaliser dans leurs mots. Refaire l'exercice : cette fois, ils doivent entourer les mots dont le «s» seul fait [z]. Finalement, dans un autre contexte, ils doivent trouver des mots où le «s» entre deux voyelles est doublé. Rappelons que dans chaque contexte ils doivent expliquer/justifier leur réponse afin de montrer qu'ils ont compris.
13. La formatrice demande aux apprenants de trouver dans un texte donné trois à cinq mots qui ont le son [z] écrit «s» et le même nombre où le «s» fait [s].
14. Fournir un court texte où les mots sont incomplets. La consigne est de les compléter avec un ou deux «s».
On ne peut pas à ce stade-ci demander aux apprenants de compléter des mots avec «s», «ss», «c» ou «ç». Ce serait viser un objectif de performance orthographique qui ne peut être accessible qu'avec une mémorisation de l'orthographe des mots et ou le dictionnaire.
Comme pour les apprentissages précédents, nous rappelons l'importance d'intégrer régulièrement les nouveaux apprentissages dans la série d'exercices qui accompagne le texte.
Le Tour de lire remercie Les missionnaires Oblats de Marie Immaculée, Maison Notre-Dame des ouvriers et le Secrétariat d'État pour leur contribution financière.
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Dépôt légal - 2e trimestre 1991 Bibliothèque nationale du Québec
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