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«Être un illettré, ce n'est pas facile à vivre tous les jours. Moi je pense que le gouvernement trouve que c'est un luxe de faire des écoles pour les illettrés. Moi je dis que le gouvernement se dit que moins nous avons d'institutions, plus nous sommes faciles à exploiter. Mais moi je ne leur donnerai pas cette chance et j'espère que vous aussi.»

Un participant aux ateliers alpha d'Atout-Lire

La parole, ça s'apprend

Atout-Lire se définit comme un groupe populaire en alphabétisation. Pour nous, un groupe populaire, ce sont des citoyens et des citoyennes qui se regroupent et s'organisent ensemble pour tenter de trouver des solutions collectives à des problèmes communs et qui, parallèlement à ses actions concrètes, amorce une démarche de réflexion critique sur le milieu et plus globalement sur la société en général. C'est donc un groupe qui prend naissance dans le milieu populaire et qui lutte de différentes façons à l'amélioration de nos conditions de vie. Cette lutte suppose de croire en nos possibilités d'agir, c'est-à-dire de devenir les sujets d'un changement possible et conséquemment, de prendre les moyens d'y parvenir.

Partant du milieu et étant toujours intégré à celui-ci, le groupe populaire est des plus apte à comprendre les besoins réels du milieu et à tenter d'y répondre adéquatement.

Par son statut de groupe populaire, Atout-Lire se distingue de d'autres organismes ou institutions qui ont pour fonction d'apprendre à lire et à écrire aux adultes analphabètes. Nos objectifs d'alphabétisation se précisent à la lumière de notre analyse idéologique du phénomène de l'analphabétisme et à partir de nos contacts avec les analphabètes rejoints. Ce que nous visons, c'est d'abord de regrouper des gens vivant les mêmes problèmes (dans ce cas, les analphabètes), de s'organiser et de lutter ensemble pour de meilleures conditions de vie. Et c'est l'outil écriture que nous voulons partager et développer comme moyen de réfléchir et d'agir sur la réalité; la maîtrise du code écrit s'avérant être un minimum essentiel à l'autonomie et à la défense des droits dans une société où l'écriture est le lot de tous les jours.

Ce présent article exposera d'abord un bref historique d'Atout-Lire afin de démontrer comment un groupe populaire prend naissance dans le milieu populaire même, à partir d'initiatives collectives pour tenter de résoudre les problèmes spécifiques à son milieu. Nous présenterons ensuite un aperçu de notre analyse de l'analphabétisme en rapport avec son milieu et pour terminer, nous montrerons comment notre idéologie et nos objectifs découlent nécessairement de cette analyse de l'analphabétisme comme phénomène social.

Historique du groupe

Atout-Lire était à l'origine un sous-comité du Comité des citoyens(ennes) du quartier St-Sauveur de Québec. Ce sous-comité avait été mis sur pied en 1979 afin de répondre aux besoins d'alphabétisation de certains membres du Comité des citoyens(ennes). Mais il se distinguait des autres sous-comités par son caractère de «service» alors que le Comité des citoyens(ennes) se veut un groupe de luttes urbaines. Son rôle a pris de plus en plus d'importance lorsque les membres du sous-comité se sont rendus compte du grand besoin d'alphabétisation à travers la basse-ville de Québec. Depuis trois ans, le sous-comité s'est élargi pour devenir le «Collectif d'alphabétisation du Comité des citoyens(ennes) du quartier St-Sauveur», précisant plus clairement ses objectifs et fonctionnant toujours de façon très autonome par rapport au Comité des citoyens(ennes). Finalement, en avril 82, le «Collectif d'alphabétisation» s'est incorporé sous le nom d'ATOUT-LIRE pour faire de l'alphabétisation sa priorité tout en partageant les mêmes objectifs généraux et à long terme du Comité des citoyens(ennes), c'est-à-dire développer des moyens collectifs et concrets de défense de nos droits.

Vu le grand nombre d'analphabètes qui répondaient à notre campagne de recrutement, nous nous sommes vite vus confronter à des limites purement physiques: manque d'espace et de disponibilité de locaux. Depuis un an, des locaux ont été mis à notre disposition par la Commission des Écoles Catholiques du Québec (C.E.C.Q.) au Centre St-Malo dans le quartier St-Sauveur afin de répondre le plus adéquatement possible aux demandes du milieu, dans le milieu même. Il va sans dire que ce milieu physique scolaire n'est pas en accord avec nos objectifs de déscolarisation; il s'avère même contraignant en raison des heures et journées d'ouverture disponibles. Les contraintes financières nous empêchent pour l'instant de poursuivre nos activités hors de ce cadre physique mais le projet d'aménager un local moins scolarisant, plus souple au niveau des heures et journées d'ouverture, plus accueillant, nous tient toujours à cœur.

Atout-Lire a déjà plusieurs réalisations à son actif. L'an dernier, en plus d'effectuer une campagne de recrutement et de sensibilisation continue tout au long de l'année, le groupe a mis sur pied trois ateliers d'alphabétisation à raison de plus ou moins dix participants par atelier et a travaillé sur une approche et des méthodes pédagogiques dynamiques et spécifiques aux adultes analphabètes provenant de milieux populaires. De plus, le groupe a organisé des sessions d'auto-formation avec les alphabétiseuses de la région de Québec et a participé à des rencontres-discussions avec d'autres groupes intervenant en alpha afin d'échanger sur nos pratiques et alimenter nos réflexions. Finalement, les membres du collectif ont produit un vidéo sur notre approche en alphabétisation. Cette année, notre grande priorité se situe au niveau de l'approfondissement de notre méthode et sur l'élaboration d'outils pédagogiques, c'est-à-dire recherche et expérimentation systématique d'une méthode basée sur notre pratique et nos réflexions antérieures.

L'analphabétisme en rapport avec son milieu

Ce volet visant à définir l'analphabétisme, à en cerner les causes, nous a semblé nécessaire dans la mesure où l'analyse que l'on fait d'un phénomène conditionne le type d'action privilégiée, appliquée à ce phénomène. Une telle réflexion résulte d'une lecture critique de documents concernant le sujet, mais elle est aussi et surtout le fruit d'une part, de nombreux témoignages d'analphabètes recueillis lors de discussions en ateliers sur le thème de l'analphabétisme et d'autre part, d'échanges entretenus avec des intervenants(es) en alphabétisation.

Phénomène individuel, handicap, incapacité déterminée génétiquement: toutes ces déterminations entretiennent le brouillard de honte entourant les analphabètes. D'un phénomène socio-économique, on en est arrivé à l'aide de quelques manipulations alchimiques, à un phénomène individuel résultant d'une incapacité bizarrement omniprésente dans les couches populaires et quasi-absente des banlieues-dortoirs où paisent dans le confort, les classes bourgeoises. Ce «détournement» engendre et nourrit le préjugé voulant que les analphabètes ne soient pas intelligents. Il a pour conséquence de confiner ceux-ci dans l'isolement et à développer chez eux un sentiment de culpabilité et d'infériorité.

Nous tenterons de dissiper cette brume en traitant de l'analphabétisme non pas comme un phénomène individuel et pathologique mais comme un phénomène socio-économique. Les conditions socio-économiques seront brièvement survolées ainsi que les modalités de reproduction de ce phénomène par le système scolaire et par le milieu familial.

[Voir l'image pleine grandeur] Homme lisant un journal à l'envers.

Conditions socio-économiques des analphabètes

En tentant de repérer les conditions de vie communes aux analphabètes, on aboutit en fin de piste à la pauvreté, au chômage, à l'assistance-sociale, au travail aliénant et déqualifié (les 3/4 des participants à nos ateliers d'alphabétisation sont chômeurs-euses, assistés-ées-sociaux-ales). Les analphabètes forment la couche la plus démunie de la société, ne disposant que de ses bras pour survivre et privée de la parole pour se défendre. Le phénomène perdure en raison de son caractère essentiel pour le système capitaliste disposant ainsi d'une main-d'œuvre peu qualifiée, sous-payée, silencieuse et parfaitement adaptable aux besoins de l'industrie, à la conjoncture économique. Les analphabètes, privés du pouvoir de la parole et de la capacité de revendiquer, éprouvent certaines difficultés à s'organiser, se sentent isolés et acceptent les emplois les plus insalubres. Le système capitaliste en tire profit.

Ceci étant succinctement dénoncé, voyons maintenant de plus près quels sont les facteurs qui engendrent et/ou perpétuent le phénomène de l'analphabétisme.

Reproduction du phénomène de l'analphabétisme à l'intérieur du système scolaire

Le système scolaire, représentant l'idéologie et la culture dominante, ne reflète évidemment pas la réalité populaire; aussi, ne pouvant s'actualiser à l'intérieur d'un système projetant des valeurs qui leur sont étrangères, les enfants issus de classes populaires abandonneront l'école ou seront promptement dirigés vers les voies allégées et professionnelles, où l'acquisition du code écrit ne s'avère certes pas la principale priorité.

«J'ai été à l'école des métiers jusqu'à 20 ans. J'ai jamais appris à lire et à écrire. L'école de métiers Wilbrod Bhérer, on appelle ça une école de «mongoles».»

Un participant à nos ateliers d'alphabétisation.

De plus, la fonction normalisatrice de l'école joue elle aussi un rôle dans l'évacuation des enfants des classes populaires du système scolaire. En effet, en ne tenant pas compte des intérêts et aptitudes spécifiques à chacun, le système scolaire provoque la marginalisation des individus pour qui la réalité présentée en classe n'est pas significative. Le système scolaire produit son quota d'analphabètes; les classes populaires laissées pour compte, éprouvant certaines difficultés à puiser à l'école les éléments nécessaires pour alimenter leurs motivations. L'ostracisme vécu par les gens ne rencontrant pas la norme, soit par leurs vêtements, leur niveau de langage, leurs comportements «différents» etc., constitue une des formes d'élimination rapide des couches populaires du milieu scolaire.

S'agit-il d'un phénomène visant à dégager du milieu scolaire une partie de la clientèle destinée à tisser une pièce supplémentaire du réservoir de main-d'œuvre déqualifiée? S'agit-il d'une résistance des membres de la classe populaire à un milieu étranger, bourgeois, éloigné de leur réalité quotidienne? Acte conscient? Acte inconscient? Nombreuses sont les voies de réflexions possibles et nous ne prétendons pas être en mesure, du moins en quelques lignes, de pouvoir y répondre. Mais ce qu'assurément nous croyons, c'est qu'une combinaison des différents éléments mentionnés ci-haut peuvent expliquer ce phénomène d'exclusion et d'élimination des classes populaires du système scolaire.

Nous croyons de plus, qu'à ces mécanismes d'exclusion et d'élimination, viennent se greffer des facteurs d'ordre familial. Selon notre interprétation, le milieu familial se pose comme reproducteur de l'analphabétisme mais nous ne le tenons pas responsable de la génération du phénomène. Nous le considérons plutôt comme un simple agent du contexte dans lequel il est inséré, le contexte socio-économique. Bref, les membres de la classe populaire se voient souvent engagés dans un cercle vicieux; de parents à enfants, le phénomène de l'analphabétisme se perpétue.

Le milieu familial comme reproducteur de l'analphabétisme

En général, le milieu familial populaire ne favorise ni ne valorise l'éducation, et il abrite sous sa coupole une série de facteurs susceptibles de reproduire l'analphabétisme. On peut retenir:

L'héritage culturel
Généralement, on ne transmet que ce qui nous a été transmis; les analphabètes sont souvent issus de parents eux-mêmes analphabètes, et sont susceptibles à leur tour de le retransmettre à leurs enfants. Ceux-ci ne peuvent les consulter au besoin, s'y référer comme personne-ressource;

«Quand j'étais jeune, j'ai été frappée par une auto. J'ai été longtemps en chaise roulante, je ne pouvais pas aller à l'école. Ma mère savait pas lire et écrire, alors elle n'a pas pu me le montrer.»

Une participante à nos ateliers d'alphabétisation.

Les raisons d'ordre économique
L'apport monétaire est valorisé et ce, d'autant plus qu'il s'avère vital;

«Moi, je n'ai jamais été à l'école, J'ai été élevé sur une terre et j'ai commencé à travailler à l'âge de 8 ans.»

Un participant à nos ateliers d'alphabétisation.

L'espace physique restreint, le manque d'instruments de travail
De plus, l'écrit étant habituellement absent de la culture quotidienne des milieux populaires, l'intérêt à la lecture, à l'écriture n'est pas suscité.

L'analphabétisme: facette positive

L'analphabétisme implique chez les personnes concernées le développement de mécanismes visant à minimiser les effets de celui-ci sur la vie quotidienne. Des moyens pour maîtriser l'analphabétisme s'élaborent au fil des jours et requièrent une dose appréciable d'ingéniosité et de créativité. Voilà un contre exemple conduisant à réfuter l'équation: analphabétisme = manque d'intelligence. À ce contre exemple s'ajoute l'analyse socio-économique du phénomène, qui démontre clairement la nécessité d'envisager l'analphabétisme comme composante du contexte socio-économique.

L'analyse de l'analphabétisme exposée, ses causes cernées, le défi consistant à élaborer une méthode d'alphabétisation adaptée à la réalité de vie des adultes analphabètes rejoints peut être relevé; enfin, nous l'espérons.

Idéologie et fonctionnement du groupe

Atout-Lire est composé pour l'instant de 6 membres actifs, soit 3 permanentes et 3 militants(tes). Chaque permanente a la responsabilité d'un atelier et l'anime avec un(e) militant(e). Chaque équipe se rencontre deux fois par semaine afin d'assurer la préparation et l'animation des ateliers d'alphabétisation. La permanente prend la responsabilité de la préparation concrète de l'atelier (matériel, photocopies,...), rédige un compte-rendu de chacun des ateliers et assure le lien avec les autres animatrices permanentes. Ce fonctionnement permet de dégager les militants(es) des tâches trop fastidieuses et de profiter de leur dynamisme et apports, enrichissants aux discussions sur la méthode, la pratique. Des réunions du collectif (les 6 membres) sont cédulées toutes les deux semaines pour se situer les uns par rapport aux autres, vérifier la cohérence et la progression de la méthode, s'entendre sur une approche commune, s'auto-critiquer, échanger des informations pertinentes.

L'équipe est dynamique. Sans n'avoir jamais eu le temps de rédiger une plate-forme de base sur des objectifs communs, il semble aller de soi que nous ayons une idéologie commune. Mais nous comprenons l'importance d'articuler clairement notre idéologie (et nos objectifs) pour pouvoir continuellement s'y référer dans la définition de notre pratique. Pratique en évolution constante selon la dynamique de ses membres.

L'idéologie du groupe transparaît sur deux niveaux: celui de l'analyse globale du phénomène de l'analphabétisme et celui de notre intervention proprement dite, cohérente avec l'analyse.

L'analyse de l'analphabétisme, nous l'envisageons en rapport avec un milieu socio-économique et conséquence d'une réalité de classe, Nous reconnaissons l'analphabétisme comme phénomène social, ce qui suggère qu'il faille en conséquence le considérer comme une responsabilité sociale, ce qui implique: de reconnaître l'analphabétisme comme problème collectif, de comprendre toutes les ramifications de l'analphabétisme outre ses contextes les plus personnels, en fait, son fondement socio-économique. Nous percevons aussi notre implication sociale en rapport avec celles des autres groupes populaires intervenant dans le milieu et non découpée de ceux-ci; ce qui exige d'être informés minimalement sur leurs activités et champs de lutte, d'être solidaires avec eux et de pouvoir ramener l'information sur la défense des droits et solutions collectives aux participants des ateliers.

Au niveau de notre intervention, nous définissons notre action sur un plan socio-politique plutôt que strictement sur une relation d'aide. C'est-à-dire que notre objectif général à long terme vise un changement global socio-économique. Pour ce faire, nous avons choisi une approche d'alphabétisation-conscientisation et nous adoptons notre méthode et nos outils pour répondre à notre volonté de conscientiser. Il importe ici de démystifier le terme «conscientisation» qui pour nous ne signifie pas: propagande, imposer nos points de vue. Au contraire, il s'agit d'amorcer des discussions sur différents thèmes reliés à la réalité de vie des participants analphabètes tout en respectant l'opinion et la démarche de chacun. Le rôle de l'animatrice(teur) est de pousser la réflexion toujours plus loin, d'amener de cette façon les participants à une vision plus globale des phénomènes qui semblent au premier coup d'œil être des problèmes individuels. Nous favorisons une réflexion critique (non fataliste) et une démarche collective de résolution des problèmes. Au même titre que les participants, les animatrices(teurs) participent à cette démarche de réflexion critique. Les obstacles concrets, matériels qu'ont à surmonter les analphabètes les amènent souvent à réajuster leur conception idéaliste de la lutte des classes. C'est ce qui nous fait dire qu'ensemble on se conscientise, ensemble on s'ouvre des portes vers une connaissance, une compréhension critique des réalités sociales.

[Voir l'image pleine grandeur]La parole, ça s'apprend.
Droit de Parole, Décembre 1981, page 16.

Pour atteindre la population visée, nous nous donnons des moyens qui soient plus adaptés à son vécu qu'en milieu scolaire institutionnel. Notre approche a pour point de départ le vécu quotidien des participants analphabètes et leur réalité de classe. Partant du postulat que les analphabètes du quartier sont les rejetons d'un système scolaire traditionnel mal adapté, nous leur offrons un cadre plus personnalisé, plus souple dans lequel ils ont toute liberté de prendre en charge leur propre processus d'apprentissage. Nous leur redonnons du pouvoir sur leur formation.

À cet effet, Atout-Lire est un complément nécessaire au travail de certaines commissions scolaires parce qu'il répond à des besoins que le système d'éducation traditionnel ne réussit pas entièrement a satisfaire. Il se distingue de celui-ci:

  • Par son caractère non-institutionnel, non-scolarisant. Il offre un cadre moins impressionnant et beaucoup plus humain que l'école traditionnelle. Ceci est important pour le grand nombre d'analphabètes récalcitrants à se ré-introduire dans un cadre qui les a jadis traumatisé et qui est souvent un facteur essentiel, sinon la cause de leur abandon initial;
  • Par ses modes de recrutement qui essaient autant que possible de rejoindre les analphabètes par un contact personnel étant donné la honte qui entoure le phénomène et leur moyen de défense qui les pousse à cacher leur analphabétisme;
  • Par un enseignement plus personnalisé qui nécessite la réduction du nombre de participants à un groupe maximum de 10;
  • Par notre approche pédagogique spécifique aux adultes, qui refuse tout matériel didactique qui infantilise l'adulte, qui part de leur réalité spécifique, de leur vécu, de leur quartier. On croit fermement que la formation du milieu se fait beaucoup mieux par les gens du milieu. On préfère donc le terme «animateur(trice)» à celui d'enseignant(te) car son rôle est aussi de réduire la distance et le rapport de force professeur-élève, d'encourager les analphabètes à se prendre en charge eux-mêmes, de s'entraider, d'animer l'atelier par la lecture de textes, dictées,... Ce sont les participants eux-mêmes qui vont s'impliquer dans le déroulement des ateliers, qui vont définir leurs besoins et les moyens d'y répondre;
  • Par le rôle qu'il s'est donné d'aider à rebâtir une confiance en soi en donnant aux participants le plus grand contrôle possible sur le processus éducatif, par des discussions, des échanges, la formation d'idées, la communication verbale, éléments indispensables avant de se livrer avec assurance à l'acte d'écrire.

En guise de conclusion

D'après notre expérience antérieure et nos réflexions sur le phénomène de l'analphabétisme, nous en sommes arrivés à voir l'alphabétisation et la conscientisation comme deux objectifs étroitement liés. On se doit maintenant de développer une méthode d'alphabétisation qui reflète nos objectifs, qui permette de lier alphabétisation et conscientisation le plus adéquatement possible, dans la pratique.

Nos échanges avec d'autres groupes et l'expérimentation de plusieurs formes pédagogiques nous ont amenés a croire que la méthode «thématique» et la méthode «globale» (non-syllabique) constituent ensemble le moyen de lier alphabétisation et conscientisation sans jamais négliger l'un ou l'autre de ces deux objectifs, et de répondre aux besoins exprimés par les gens du milieu.

La méthode se précise à partir de nos contacts avec les analphabètes. À la limite, nous ne devenons que de simples intermédiaires entre eux et leurs vrais besoins. Nous nous y adaptons et nous y adaptons notre méthode et nos outils. Aussi, nous nous opposons à toute tentative d'élaborer de grands principes et méthodes pédagogiques sans partir de la base (la population concernée) et sans la consulter.

[Voir l'image pleine grandeur]Certificat en alphabétisation de l'Université de Montréal.
Certificat en alphabétisation de l'Université de Montréal.