Le canal de Lachine et ses quartiers
En mai 2002, le vieux canal de Lachine s'ouvre à nouveau à la navigation.
S'il ne retrouvera pas l'intense activité de navigation commerciale
d'antan, c'est à un exercice de mémoire qu'il nous conviera. Premier
élément d'un vaste couloir maritime de pénétration du
continent, berceau de l'industrialisation montréalaise et canadienne
et refuge de l'immigration irlandaise au 19e siècle, il transforma
un chapelet de villages ruraux paisibles en un puissant centre de production
manufacturière et en une grouillante agglomération ouvrière
que l'ouverture de la voie maritime du Saint-Laurent vint démanteler
au milieu du 20e siècle. Aujourd'hui, son réaménagement
s'inscrit dans une aventure exemplaire de revitalisation sociale et économique
initiée par les forces vives des communautés locales qui refusent
la fatalité du sous-développement et de l'exclusion.
Absolu Saint-Laurent et le Collectif d'animation urbaine L'autre
Montréal, se proposent d'offrir aux Montréalais et aux visiteurs
une croisière sur le canal de Lachine et des circuits en autobus qui
leur permettront d'en découvrir l'histoire passionnante et mouvementée,
ainsi que celle des quartiers riverains. Traçant son parcours tranquille
dans un paysage urbain saisissant,on évoquera trois siècles de labeur
et de solidarité, de souffrances et de rêves, témoins d'une
aventure humaine et technologique qui fait partie de notre patrimoine.
En voici quelques éléments puisés dans la riche matière
historique, culturelle et sociale que l'on découvrira... au fil de l'eau.
Le canal à Lachine vers 1826, après son ouverture
Le canal de Lachine
Le canal de Lachine a été creusé il y a près de 180 ans,
réalisant ainsi un vieux rêve datant du 17e siècle
: permettre aux embarcations de traverser le sud-ouest de l'île
de Montréal afin d'éviter les dangereux rapides du fleuve Saint-Laurent
en amont de la ville. Autour de cet axe de navigation, doublé plus tard
par le chemin de fer, allait se développer le plus grand centre industriel
du Canada jusqu'à la première guerre mondiale. Les premiers
travaux commencent en 1821, à l'instigation des grands marchands anglophones
de Montréal désireux d'édifier un empire commercial basé
sur le Saint-Laurent. L'immigration irlandaise fournit la majeure partie
des 500 ouvriers qui creusent les 13 km du canal et construisent les 7 écluses
(5 aujourd'hui) qui mènent, en franchissant une dénivellation de
15 m, au village de Lachine au bord du Lac Saint-Louis, important poste de
traite de la fourrure. Pour faire face à l'apparition des nouveaux navires
à vapeur, ainsi qu'à l'accroissement du trafic, on agrandit le canal
et on augmente son tirant d'eau plusieurs fois jusqu'à la fin du 19e
siècle.
Grèves sanglantes.
Entreprise colossale, la construction du canal donne lieu à des conflits
d'une rare violence, à une époque où les organisations syndicales
sont encore hors-la-loi. Le travail de forçat, l'indigence des
salaires, et leur distribution sous la forme de bons encaissables seulement
aux magasins des entrepreneurs où les produits sont plus chers qu'ailleurs,
font s'accumuler les frustrations et provoquent les affrontements. «L'émeute
agita durant des mois les ouvriers du canal de Beauharnois et ceux de Lachine.
Puis explosa. L'homme gisait, moribond, parmi les broussailles, à quelques
mètres d'une clôture. Malgré le tumulte, la fusillade,
l'assaut des militaires, malgré la cohue des hommes qui fuyaient,
on l'entendit murmurer: «Je n'ai rien fait». (...). Terrorisé,
un ouvrier se jette dans le canal, tout proche. Le sol est jonché de
blessés, de morts. Il est midi. Lundi, 12 juin 1843. Le conflit le plus
dur du 19e siècle vient de se terminer, dans le sang.»
(Robert Boily, 1980).
Chantier naval Augustin Cantin en 1857
Vers 1850, l'achèvement de la chaîne de canaux reliant l'océan
Atlantique et les Grands Lacs, ainsi que l'installation de prises d'eau
aux écluses, permettant de générer l'énergie nécessaire
au fonctionnement des usines, entraîne le développement industriel
du canal. Les petits villages d'artisans et d'agriculteurs qui le bordent
se transforment en villes industrielles populeuses qui s'annexent les
uns après les autres à Montréal au début du siècle.
L'augmentation constante du nombre et de la taille des navires entraîne
l'ouverture en 1959 de la Voie maritime creusée à même le lit
du Saint-Laurent. Le canal Lachine est définitivement fermé en 1970
et ses abords sont transformés en un parc linéaire qui relie le
port de Montréal à la ville de Lachine. Une piste cyclable permet
de visiter ce site exceptionnel au niveau du patrimoine industriel.
La fermeture du canal et la migration des entreprises vers les grands axes
autoroutiers de la banlieue ou d'autres régions du monde appauvrissent
ces quartiers ouvriers où naissent cependant, dès la fin des années
soixante, des réseaux associatifs dynamiques dont les initiatives dans
le domaine de la santé publique, du logement coopératif et
du développement économique local commencent à porter fruit
et forcent même les responsables gouvernementaux à faire preuve
de plus d'imagination dans leurs stratégies de développement.
Les quartiers et les villes du canal
«La machine commande. Monstre déchaîné qui ne peut plus
arrêter sa marche, elle existe par-delà les pouvoirs de l'homme.
Elle ouvre à l'esprit l'horizon des temps futurs: possibilités inouïes,
super confort; nouvel esclavage peut-être. Après avoir frôlé
le champ de sa domination, c'est un véritable soulagement de percevoir,
sous la lueur grelottante d'une lampe à arc, le balcon d'une petite maison,
les branches d'un arbre, le son lointain d'une voix humaine. (...) Les usines
ont tout pris l'arrière-port depuis Mill Street jusqu'à Ville
Saint-Pierre. Les quartiers qu'ils occupent leur ressemblent. Hâtivement,
jour et nuit, jours de semaine et jours fériés, les faubourgs de
Sainte-Anne, de Saint-Joseph, de Sainte-Cunégonde, de Saint-Henri besognent.
Savonneries, papeteries, cartonneries, fonderies, aciéries, filatures
de coton, soieries, fabriques de cigarettes, lampistehes, biscuiteries, charbonneries,
flaconneries, tanneries, huileries, tôleries, raffineries battent
l'enclume, rougissent le fer, tournent les manivelles, empaquettent, étiquettent,
dévident, pédalent, martèlent, comptent, soupèsent,
mesurent, emballent, enregistrent. Et pendant les heures de repos, enveloppent
tout de suie et d'un roulement sourd. Un peuple de termites vit au coeur de
la grande fournaise industrielle. Dès que son regard cherche à s'évader,
il rencontre les cheminées d'usines.» Gabrielle Roy, 1941.
Le Griffintown en 1874
Griffintown: «The City below the Hill»
Grange des pauvres et pré communal pour les premiers colons,
le fief Nazareth, qui prend le nom de Griffintown, devient vers 1850
le premier centre industriel du Canada et le foyer des immigrants et ouvriers
irlandais. Abandonné par ses usines et vidé de sa population, ce
quartier est redécouvert par les artistes; il livre aujourd'hui
ses secrets et légendes et reprend vie avec l'établissement
de la Cité du multimédia.
Le fantôme de la femme sans tête.
Mary Gallagher est une prostituée, a Lady of the evening, qui
vit de ses charmes dans le Griffintown. Elle est assassinée le 26 juin
1876, et sa tête tranchée est jetée. C'est là que commence
la légende: tous les 7 ans, Mary Gallagher revient dans le quartier pour
chercher sa tête !
La Petite-Bourgogne : rails de fer et «blue note»
Faubourg prospère qui vit les prouesses constabulaires de Louis Cyr,
l'homme fort, et la première bibliothèque publique francophone,
la Petite-Bourgogne a été profondément bouleversée
à la fin des années soixante par une opération dite de rénovation
urbaine qui a provoqué l'expulsion de nombre de ses résidents et
fait disparaître la majeure partie de son habitat du 19e siècle.
Demeurent pourtant des coins de charme préservés de la destruction,
comme la rue Coursol et le vieux théâtre Corona qui se réveille.
C'est dans ce secteur de la ville que s'établit, dès la fin du
19e siècle, une communauté de noirs américains attirés
par l'activité des grandes gares toutes proches où ils étaient
employés comme porteurs de bagages. Oscar Peterson, un des grands noms
du jazz, y est né et a fait son apprentissage musical dans quelques-unes
des nombreuses boîtes de nuit aujourd'hui disparues.
Le jeune Oscar Peterson et sa famille
Le jazz.
«Là-haut, derrière les stores, se démène un jazzband
forcené. Le saxophone mugit; les couples tournent, sautent, voltigent.
Et lorsque, épuisés, les fabricants de bruits syncopés demandent
quelques minutes de répit, le sommelier nègre a déjà poussé
une pièce de monnaie dans le phono-automatique. Il ne faut pas que le
bruit cesse. Il ne faut pas que l'agitation tombe. Il ne faut pas s'arrêter.
Il ne faut pas penser.» Gabrielle Roy, 1941.
La Redpath Sugar en 1854
John Redpath à titre d'entrepreneur-maître maçon participe
à la première construction du canal de Lachine en 1825. Il fonde
la première raffinerie de sucre au Canada en 1854, près de l'écluse
Saint-Gabriel à Pointe-Saint-Charles. Sa compagnie intégrait l'ensemble
des opérations de production, depuis la culture de la canne à sucre
aux Antilles jusqu'à la fabrication et à la commercialisation
du sucre, en passant par le transport de la matière première
Saint-Henri: «la vie d'fac'trie»
Petit village d'artisans du cuir dès le 18e siècle,
Saint-Henri-des-Tanneries devient une des plus importantes agglomérations
industrielles du Canada avec l'ouverture du canal et l'arrivée du chemin
de fer.
«J'arrivai sur les bords du canal Lachine. Des gamins du
quartier, aux dents gâtées, y étaient assis, jambes pendantes
(...). Qu'ils étaient gais ces gamins de Saint-Henri! Et en un sens,
pour cause, car jamais après eux enfants ne posséderont autant.
Les produits exotiques de la terre, mélasse des Barbades, bananes de
la Jamaïque, rhum des Antilles passaient sous leurs yeux en route
vers les entrepôts qui dégor-gaient des senteurs des Tropiques.»
Gabrielle Roy.
Ce quartier ouvrier francophone recèle un riche patrimoine populaire,
témoin de l'évolution de l'habitat ouvrier montréalais.
Prises en étau entre la voie ferrée et la rue Saint-Augustin, la
maison de John Clermont, menuisier, et ses voisines datant de 1870, sont des
restes superbement restaurés de l'ancien village Saint-Augustin qui fusionna
avec Saint-Henri-des-Tanneries pour former la ville de Saint-Henri. Sur la
rue Saint-Ambroise qui longe le canal et ses industries, les maisons de Louis
Richard, qui datent de 1890, illustrent cette période de développement
important où la main-d'oeuvre affluait des campagnes et s'entassait dans
ces pauvres maisons de bois qui poussaient même dans les fonds de cours
auparavant occupés par les écuries des charretiers. Autour du parc
Sir-Georges-Etienne-Cartier, aménagé après l'annexion de Saint-Henri
à Montréal en 1905, s'alignent les triplex typiques de l'habitat
ouvrier montréalais des années 1910-1930.
Construit en 1933 dans le cadre des travaux publics destinés à
atténuer les effets dévastateurs de la Grande dépression, le
marché Atwater de style Art-Déco a retrouvé depuis sa restauration
une animation intense qui attire nombre de Montréalais ... et les promoteurs.
Usine de la Dominion Textile en 1909
En 1880, la Merchant's Cotton Co. (devenue plus tard la Dominion Textile)
s'installe à Saint-Henri. La Ville de Saint-Henri lui accorde une subvention
de 10 000 $ et une exemption de taxes pendant 20 ans à condition que
la compagnie engage au moins 300 personnes de la ville pendant au moins 5
ans. La ville voisine de Sainte-Cunégonde lui accorde aussi une subvention
de 5 000 $ pour qu'elle s'installe à proximité de la limite des
deux villes.
En 1889, alors que le revenu de «survie» d'une famille est de 9,00$
par semaine, le salaire hebdomadaire d'un homme se situe entre 6,50 et 8,00
$, celui d'une femme entre 1,50 et 3,50 $ et celui d'un jeune garçon
entre 1,50 et 5,00 $. La semaine de travail des hommes est de 70 heures.
Depuis la première grève de 1891, cette usine a été le
théâtre de nombreux conflits de travail qui furent des jalons importants
pour les droits des travailleurs et des travailleuses. On doit particulièrement
souligner la grève de 60 jours en 1946, qui permit d'obtenir l'accréditation
syndicale et la journée de 8 heures.
Les usines, aujourd'hui fermées et en attente d'une nouvelle vie,
dominent encore le quartier et rappellent le labeur et les luttes pour la
dignité des travailleuses «du coton». Des lieux encore hantés
par les personnages de Gabrielle Roy dans son roman Bonheur d'occasion.
Pointe Saint-Charles
À l'origine fief de Charles Lemoyne et site des fermes des Sulpiciens
et de la congrégation Notre-Dame, la Pointe Saint-Charles se développe
avec la construction du canal et du pont Victoria, le plus long pont du monde
en 1860. Son patrimoine rural, religieux, résidentiel et industriel témoigne
de trois siècles d'histoire. Au 17e siècle, la maison
de ferme Saint-Gabriel, un des plus anciens édifices de Montréal,
accueillera les Filles du Roy. Dominant l'écluse Saint-Gabriel, les hautes
silhouettes de la raffinerie Redpath Sugar, de la filature de soie Belding
et de la Northern Electric rappellent l'intense activité industrielle
d'antan.
Sur la rue Centre, deux églises catholiques voisines, presque jumelles,
Saint-Gabriel et Saint-Charles, évoquent les deux peuplements,
irlandais et canadien français, de ce quartier d'ouvriers.
Les Irlandais de la grande famine.
L'immigration irlandaise a été encouragée par les autorités
coloniales britanniques à partir de 1820. Elles y voyaient un double
avantage: noyer les francophones dans une mer d'immigrants anglophones
et fournir une main-d'œuvre nécessaire à l'expansion industrielle.
Les Irlandais immigrent dans le but précis de survivre. Pour la seule
année 1847, on estime à 110 000 le nombre de ceux qui ont immigré
au Canada pour échapper à la famine qui sévissait en Irlande.
Pourtant beaucoup moururent pendant le voyage ou dans les baraquements
de quarantaine installés près du port. Une stèle située
à l'entrée du pont Victoria, le Black Rock, honore la mémoire
de 6 000 de ces immigrants fauchés par la terrible épidémie
de typhus de 1847-1848.
Véritable laboratoire social, grâce à son réseau communautaire
dynamique et innovateur, ce quartier sinistré par la désindustrialisation
d'après-guerre reprend espoir et reconstitue avec ténacité
son tissu social.
La Redpath Sugar et l'écluse Saint-Gabriel en 1912
Côte-Saint-Paul et Ville-Emard
Coin de campagne tranquille en bordure de l'ancien lac à la Loutre,
la Côte Saint-Paul va devenir un quartier ouvrier où la vie urbaine
et industrielle du canal de Lachine va côtoyer longtemps la vie rurale
et de banlieue de Ville-Émard au bord de l'aqueduc, plus au sud.
C'est la construction de deux écluses qui va perturber la vie paisible
de la petite communauté de Côte-Saint-Paul. Le lac à la Loutre,
asséché, disparaît. La rivière Saint-Pierre qui serpentait
en contre-bas, est canalisée et enfouie sous terre : encore aujourd'hui,
elle passe sous le canal en aval des écluses. Elle est maintenant un
égout et se déverse dans le fleuve à Verdun. En 1825, les écluses
sont en opération, laissant passer les embarcations de petit calibre,
canots et bateaux à fond plat, chargés de farines, de pois et de
sel. Ils transportent vers l'ouest les immigrants fraîchement arrivés
au pays et au retour, ils remplissent leur bateaux de pelleteries.
L'énergie hydraulique.
Vers 1847, le gouvernement fédéral loue le droit d'utilisation
de l'eau du canal de Lachine à des fins industrielles : grâce à
la forte dénivellation, le surplus d'eau retenu par les écluses
servira ainsi à produire de l'énergie hydraulique, bien supérieure
à celle jusqu'alors fournie par le moulin à vent, le cheval et la
force humaine. L'eau en se déversant dans les pris es d'eau, fait
tourner des turbines dont le mouvement action nent meules, scies et
machines diverses; certaines usines, comme la Redpath Sugar, utiliseront la
machine à vapeur. La location des sites permettait l'usage d'une certaine
quantité d'eau et la dimension des prises d'eau dans le canal était
con trôlée. Pourtant la consommation excessive d'eau par cer
taines industries entraînait parfois une baisse du niveau du canal qui
forçait les capitaines de bateaux à arrêter leur navires jusqu'à
ce que le niveau du canal remonte
En passant par LaSalle Saint-Pierre
Entre le canal et la falaise, s'étend une vaste dépression occupée
aujourd'hui par les voies ferrées de la cour de triage Turcot du Canadien
National. Elle fut jusqu'au 19e siècle le site du lac à
la Loutre, un élargissement de la rivière Saint-Pierre, premier
choix des sulpiciens au 17e siècle pour le tracé de leurs
premiers projets de canal.
Le Montréal & Lachine Railway en 1880 à Saint-Henri
La première voie ferrée sur l'île de Montréal a été
ouverte en 1847 et, longeant au nord le canal de Lachine, reliait l'ancienne
gare Bonaventure à la ville de Lachine. De là, un traversier permettait
de rejoindre une autre voie ferrée sur la rive sud.
La grue de LaSalle Coke.
Dans les années 50, 600 ouvriers travaillaient à l'usine LaSalle
Coke. La compagnie possédait sa propre flotte de charbonniers et
l'immense grue en convoyait les cargaisons jusqu'à l'usine, jadis installée
en face. La compagnie produisait, à partir du charbon, du gaz synthétique
et du coke, un combustible tiré du charbon. L'usine fut démolie
en 1984. Le terrain est actuellement occupé par un site d'enfouissement
de sols contaminés qui rappelle l'enjeu majeur de la décontamination
des bords et du lit du canal dans le cadre des projets de revitalisation
économique, résidentiel et récréotouristique du plus ancien
bassin industriel du pays.
Lachine
Le commerce de la fourrure est à l'origine de Lachine. Cet endroit situé
en amont des rapides qui font obstacle à la navigation sur le Saint-Laurent,
devient dès le 17e siècle un relais pour les voyageurs
obligés de faire du portage sur plus de 13 km, transportant marchandises
(quincailleries pour le troc ou pelleteries) et canots. Ainsi, ces rives deviennent
le quai duquel partiront ou reviendront ceux qui voyageront entre Ville-Marie
et les régions de trappe des Pays d'en haut.
La Chine ?
En 1667, les sulpiciens, seigneurs de l'île de Montréal, concèdent
ce territoire à Robert Cavelier de La Salle, aventurier et explorateur
dont l'obsession était de découvrir un passage entreprise, on baptisa
sa seigneurie du nom de «La Chine». «L'espérance du castor,
mais surtout celle de trouver par ici passage dans la mer Vermeille, où
Mr de la Salle croyoit que la rivière d'Ohio tomboit, lui fit entreprendre
ce voyage pour ne pas laissera un autre l'honneur de trouver le chemin de
la mer du Sud, et par elle celui de la Chine.» Voyage de MM. Dollier
de Casson et de Galinée, 1669-1670.
La guerre.
Carrefour du commerce entre Français et Amérindiens, Lachine a
aussi été le théâtre d'un épisode sanglant des guerres
franco-iroquoises. Pour se venger du gouverneur Denonville qui a détruit
leurs villages et leurs réserves de nourriture, et envoyé
40 d'entre eux aux galères, des Iroquois prennent Lachine par surprise
en 1689, brûlent le village et massacrent une trentaine d'habitants.
Traumatisée, la jeune colonie montréalaise se met en état de
siège. La Grande paix de 1701, signée non loin de la future embouchure
du canal dans le Vieux Montréal, amènera plus de sérénité
dans les relations entre les Premières Nations et les Français.
Grâce à la construction du canal, Lachine devient un carrefour
important où la grande compagnie de traite des fourrures, la Compagnie
de la Baie d'Hudson, installe ses quartiers généraux et un entrepôt
qui abrite aujourd'hui le Centre d'interprétation sur le commerce de
la fourrure.
Pont et magasin de la Baie d'Hudson à Lachine en 1907
Affecté par la fermeture du canal, qui fut son centre vital pendant
plus de cent cinquante ans, Lachine s'est donné un nouvel essor basé
sur la mise en valeur de son riche patrimoine et de son site exceptionnel
en bordure du Lac Saint-Louis, où s'évase le fleuve Saint-Laurent.
Le Musée Plein Air de Lachine, situé sur l'immense jetée du
parc René-Lévesque et sur les rives du lac, expose à ciel ouvert
36 sculptures monumentales d'artistes contemporains.
De l'autre côté du fleuve, se profile le village de Kahnawake,
ancienne mission jésuite fortifiée et réserve de la nation
Mohawk. À mi-distance de Montréal, le parc des Rapides de Ville
LaSalle permet de découvrir les flots tumultueux qui agitent les hauts
fonds du Saint-Laurent, à l'origine du creusement du canal de Lachine.
Vue du fleuve Saint-Laurent de Montréal au Lac Saint-Louis,
et du canal de Lachine, 1856
Le canal de Lachine : du rêve de 1670 à la renaissance de 2002
Le Saint-Laurent apparaît très tôt comme l'axe central des
communications à l'intérieur du continent. Les échanges se
faisant à partir de la côte atlantique, la voie laurentienne est
plus commode, parce que rapide et directe. Il est possible de naviguer de
façon ininterrompue depuis la mer jusqu'à Montréal (1
500 km) mais, vers l'amont, une barrière de rapides interdit tout passage.
On appellera d'abord «sault Saint-Louis», puis «rapides de
Lachine», cette dénivellation d'une longueur de 10 km où s'engouffrent
les eaux du Saint-Laurent, à la sortie du lac Saint-Louis, en chutant
de 13 m. À cet endroit, il est donc nécessaire de procéder
à un portage et à un changement d'embarcation pour avancer davantage.
Le contournement des rapides avant le canal de Lachine
Dans les rapides: jusqu'à la construction du canal,
la seule façon de franchir la dénivellation des rapides, c'était
à l'aide d'embarcations spéciales : des bateaux à voile plats,
en pin, étroits à l'avant et à l'arrière à la manière
d'un canot. Ces bateaux de 40 pieds sur 10 pieds remontaient le courant,
halés à bout de bras le long du fleuve.
Portage : les premiers colons cherchèrent très
tôt un moyen de contourner le sault Saint-Louis. Entre Montréal
et Lachine, la voie la plus naturelle suivait la rivière Saint-Pierre
et le lac à la Loutre, au pied de la falaise sur laquelle serpentait
la route Upper Lachine Road, entre la tannerie des Rolland et le village
de Lachine. L'autre chemin était le bord du fleuve (le boulevard LaSalle
et la rue Wellington) qui pris le nom de Lower Lachine Road.
Par voie d'eau : plusieurs projets ont été conçus
sous le régime français sans avoir été réalisés.
Le manque de moyens techniques et financiers font avorter ces projets.
Les projets de canal des sulpiciens
Ces projets utilisent le lit de la rivière Saint-Pierre et le bassin
du lac à la Loutre :
- 1670 : le premier projet de canalisation, resté sans suite, devait
servir à alimenter les moulins à eau de la rivière Saint-Pierre
près de la ville. François Salignac Fénelon, supérieur
des sulpiciens, imagine ce projet de canalisation des eaux du lac, ce qui
aurait également augmenté le volume de marchandises en transit.
- 1689 : le projet est repris par François Dollier de Casson, successeur
de Fénelon. La construction commence le 13 juin 1689 : il s'agit
de relier le lac à la Loutre au fleuve Saint-Laurent par un canal de
2 km de longueur. Dans la nuit du 4 au 5 août 1689, un raid amérindien
sur le village de Lachine met fin aux travaux.
- 1700 : Dollier de Casson confie à l'ingénieur Gédéon
de Calalogne le creusement d'un canal (12 pieds de large et 1 pied de profondeur)
qui est abandonné à cause de la mort de Dollier de Casson en 1701
et par les difficultés financières de Gédéon de
Catalogne qui n'avait pas prévu que le roc solide nécessiterait
des moyens plus importants que prévu.
- 1717 et 1732 : par deux fois les sulpiciens demandent à l'ingénieur
du roi, Gaspard Chaussegros de Léry, concepteur des fortifications
de Montréal, de poursuivre le creusement du canal. À cause
des coûts trop importants, le projet est abandonné.
Projet du canal entrepris par les sulpiciens pour contourner les
rapides de Lachine.
Gaspard-Joseph Chaussegros de Léry, Carte d'une partie
de l'isle de Montréal, 1733.
Le premier système de canalisation du Saint-Laurent (1783)
L'invasion américaine de 1775-1776 révèle aux autorités
militaires la fragilité de la ligne de communication entre le haut et
le bas Saint-Laurent : on construit des canaux fortifiés entre
le lac Saint-Louis et le lac Saint-François où l'on retrouve la
plus grande dénivellation entre Montréal et le lac Ontario : 1781,
Côteau-du-Lac, le plus ancien en Amérique du Nord; 1783, Rapide-de-la-Faucille,
Rocher-Fendu, Trou-du-Moulin; 1805, Cascades, qui remplace Rapide-de-la-Faucille
et Trou-du-Moulin.
Le deuxième système de canalisation du Saint-Laurent (1848)
Le peuplement de la région des Grands Lacs par les Loyalistes
venus des Etats-Unis, la commercialisation de produits pondéreux (blé
et bois surtout), l'augmentation du volume des échanges qui en résulte,
l'apparition de nouveaux types de navires (Durham Boat et le navire à
vapeur) suscitent la création de nouveaux canaux : 1825, canal de Lachine,
entre le port de Montréal et le lac Saint-Louis; 1832, canal Rideau,
entre la rivière Outaouais (Ottawa) et le lac Ontario (Kingston); 1832,
canal Welland, entre le lac Ontario et le lac Érié.
La construction du canal de Lachine et du canal Rideau permet
l'ouverture d'une route triangulaire entre Montréal-Ottawa-Kingston,
qui pallie quelque peu l'absence d'un lien direct entre le bas Saint-Laurent
(Montréal) et les Grands Lacs.
L'Union de 1841, qui repose sur l'intégration du Bas et du
Haut Canada, favorise une politique d'investissement massif dans les canaux
du Saint-Laurent qui font face à l'âpre concurrence des canaux américains
(comme le canal Érié en 1825 et le canal Oswego en 1828, qui relient
New York aux Grands Lacs) : 1843-1849, le canal Lachine est considérablement
élargi; 1843-1845, le canal de Beauharnois (rive sud) remplace les anciens
canaux militaires (rive nord) entre le lac Saint-Louis et le lac Saint-François.
Cet ensemble de canaux aux dimensions standardisées permet
enfin un lien direct sans rupture de charge entre le bas Saint-Laurent et
les Grands Lacs.
Canal de Lachine : les projets de construction de 1791-1821
- 1791 : Adam Lymburner, marchand à Québec, reprend l'idée
d'un canal comme voie de contournement des rapides. Le gouvernement du Bas-Canada
revoit les études antérieures, mais la guerre de 1812 freine le
mouvement.
- 1815 : on vote des crédits pour étudier la réalisation
du canal, mais on n'y donne pas suite.
- 1819-1821 : sous l'initiative de John Richardson, 7 des plus importants
hommes d'affaires de Montréal, avec comme ingénieur Thomas Burnett,
créent la Compagnie des propriétaires du canal de Lachine qui
tente de vendre des actions pour la construction du canal entre le Pied-du-Courant
et Lachine avec embranchement vers le port de Montréal. Des 3 000 actions
émises pour financer le projet, seules 1 780 trouvent preneur. C'est
l'échec.
Canal de Lachine : la construction en 1821-1825
Le gouvernement reprend le projet et crée une commission présidée
par Richardson et dans laquelle on retrouve plusieurs membres de la
Compagnie des propriétaires du canal de Lachine.
Thomas Burnett demeure l'ingénieur en chef du projet, et les travaux
sont exécutés par les sociétés Bagg & White,
McKay & Redpath, et Philip J. White.
Les travaux commencent en juillet 1821 et le canal est ouvert en août
1824, même si les travaux ne s'achèvent qu'au printemps 1825. Plus
de 500 ouvriers, surtout irlandais, y travaillèrent. Le canal est une
voie d'eau entièrement artificielle :
- 13,4 km de long; 14,6 m de largeur; 1,4 m de profondeur;
- 7 écluses permettant de franchir la dénivellation de 14,3 m
entre Lachine et le port (on abandonne l'idée de prolonger jusqu'au
Pied-du-Courant) : 3 écluses au port, 1 écluse à Saint-Gabriel,
2 écluses à Côte-Saint-Paul, 1 écluse régulatrice
à Lachine;
- murs du canal en terre ; maçonneries dans les écluses;
- portes en bois à doubles vantaux renforcées de métal et
actionnées à la main par un système de treuils utilisés
jusqu'à l'électrification en 1951.
Canal de Lachine : les travaux d'agrandissement de 1843-1849
Pour combattre l'influence néfaste du canal Érié qui drainait
vers New York 50 % du trafic des Grands Lacs destiné au port de Montréal,
l'amélioration du réseau de canaux canadiens s'imposait.
On envisage de prolonger le canal de Lachine jusqu'au Pied-du-Courant le
long de l'axe de la rivière Saint-Martin et de le border de docks : vu
les coûts, on abandonne cette idée et on garde le parcours
initial ;
- largeur de 120 pieds en surface et 80 pieds au fond; profondeur de 9
pieds;
- réduction du nombre d'écluses : 2 au port, 1 à Saint-Gabriel,
1 à Côte-Saint-Paul, 1 à Lachine;
- sas (bassins des écluses) portés à 200 pieds x 45 pieds
x 9 pieds;
- écluses construites en pierre de taille; portes en poutres de chêne
et pin; vannes en fonte actionnées par des crics; portes actionnées
par des chaînes reliées à des cabestans;
- deuxième jetée à Lachine en coffrage de pierres, poutres
et maçonnerie.
Le troisième système de canalisation du Saint-Laurent (1873-1904)
La Confédération (1867) donne une autre impulsion au réseau
de canalisation. Les canaux du Saint-Laurent se voient attribuer le rôle
de stimulant dans le développement commercial de l'ensemble du
Canada en donnant aux produits de l'Ouest un débouche vers la mer. Pour
atteindrecet objectif, le gouvernement Canadien impose en 1875 un gabarit
uniforme pour toutes les écluses (82 3 m de longueur, 13,7 m de largeur
et 4,3 m de profondeur):
- agrandissement du canal de Lachine;
- dragage du fleuve
- agrandissementdu canal Welland, des canaux de l'Outaouais et
du Richelieu;
- constructiondu canal de Soulange (rive nord) qui remplace le
vieux canal de Beauharnois (rive sud) entre le lac Saint-Francois et le
lac Saint-Louis (première utilisation du béton dans la construction
des écluses et électrification du canal).
Les travaux commencent en 1873 et se terminent en 1904 . Cette
lenteur peut être attribuée à l'ampleur des travaux et au fait
que pendant la construction, les navires peuvent continuer à emprunter
les canaux.
Avec ce réseau de canalisation, les bateaux pourront se rendre
de Montréal au lac Supérieur (2 100 km) en franchissant une
dénivellation de 163,6 m.
Canal de Lachine : les travaux d'agrandissement de 1874-1885
Les derniers travaux majeurs commencent en 1874 :
- largeur 45 m; profondeur de 4,3 m;
- agrandissement des écluses ;
- construction d'une troisième jetée à Lachine, longue de
6200 pieds
- 1875 : on construit des voies ferrées longeant le canal.
Canal de Lachine : âge d'or et déclin
La période de 1880 à 1959 forme l'âge d'or du canal L'activité
industrielle est à son comble. Axe majeur de développement industriel
au Canada, le secteur du canal de Lachine atteint son apogée au cours
de la première moitié du 20' siècle alors qu'il constitue
la concentration industrielle la plus importante du pays. Mais ses faiblesses
se font sentir : vétusté des installa tions industrielles, qui sont
parmi les plus anciennes du pays et écluses trop petites, qui sont régulièrement
endommagées par des navires toujours plus gros.
Le quatrième système de canalisation du Saint-Laurent (1959)
La Voie maritime du Saint-Laurent est le dernierjalon important
dans l'histoire de la canalisation du Saint-Laurent; sa construction va provoquer
le déclin et la fermeture du canal de Lachine.
- Le Canada et tes USA créent une commission internationale chargée
d'étudier le projet d'un canal en eauxprofondes, entre les Grands
Lacs et la mer. Le projet n'aboutit pas
- 1909 :Une commission mixte internationale poursuit les études
- 1921,1932 et 1938 : De nouveaux traités internationaux
ne donnent aucun résultat.
- 1959 : Inauguration de la Voie maritime du Saint-Laurent
L'ouverture de la Voie maritime suscite l'augmentation du tonnage
annuel transporté sur le tronçon du Saint Laurent Les dimensions
des écluses sont de 223,5 m x 94 4 m x 9,1 m Elles permettent le passage
des étui et les cargos des Grands Lac, Le tonnage nasse de 8,8 millions
de tonnes en 1958 a 20,6 millions de tonnes pour la première année
de la Voie maritime.
La fermeture du canal de Lachine
La Voie maritime élimine la nécessité de transiter par Montreal
et sonne ainsi le glas du canal de Lachine Son utilisation chute dramatiquement
: on bloque l'extremité montréalaise en 1965 et on le ferme définitivement
a la navigation en 1970.
En 1974, le gouvernement fédéral prend en charge Aménagement
des berges du canal par l'entremise de Parcs Canada. Le site est déclaré
parc historique natio-nal en 1978 et il est aménagé en parc linéaire
cyclable.
La réouverture du canal de Lachine
En 1997 le gouvernement fédéral, propriétaire du canal, et
la Ville de Montréal ont annoncé la réouverture et le réaménagement
du canal. Cet ambitieux projet de revitalisation permettra d'accueillir les
plaisanciers qui pourront remonter le temps au fil de l'eau, dans un superbe
site en plein coeur de la ville.
La navigation sur le canal de Lachine
Les premiers canaux, comme celui de Coteau-du-Lac en 1779, sont très
étroits et peu profonds et ne laissent passer que des canots ou des barques
(en 1817, ce canal est agrandi : sa largeur passe à 3,7 m et sa profondeur
à 1,5 m).
À l'origine la profondeur du canal de Lachine n'était que de 1,40
m et sa largeur de 14, 6 m. Au cours de ses 2 agrandissements successifs,
sa profondeur et sa largeur vont tripler, et ses dimensions standardisées
vont s'harmoniser avec l'ensemble des autres canaux.
Au cours de la période 1825-1843, le batteau est graduellement
supplanté par le Durham boat. Cette embarcation à fond
plat, de conception américaine, multiplie par 10 la capacité de
chargement du batteau en la portant à 40 tonnes. Elle était
propulsée par 4 avironneurs qui poussaient des rames de 5 m. Une voile
carrée était déployée par vent favorable.
Avec l'agrandissement du canal entre 1873 et 1885, apparaissent les canallers,
des bateaux faits sur mesure pour les nouvelles dimensions des écluses.
En 1895, 1 million de tonnes de fret franchissait le canal; 20 ans plus tard,
4 millions de tonnes ; enfin de 1930 à 1950, la quantité totale
de marchandises passe de 8 à 10 millions de tonnes.
Avec la Voie maritime du Saint-Laurent en 1959, apparaissent les lakers
adaptés aux magistrales écluses de la Voie. Le tonnage passe de
8,8 millions de tonnes en 1958 à 20,6 millions de tonnes pour la première
année de la Voie maritime.
Le canal de Lachine en 1896 (photographie prise du haut de la
cheminée de la Montreal Street Raiiway). Au centre, la Redpath Sugar
et au fond, Pointe-Saint-Charles et l'île des Soeurs.
Réparations printanières dans le canal de Lachine avant
l'ouverture de la navigation en 1876
Élargissement du canal de Lachine en 1875
Travailler au bord du canal au 19e siècle
Jeunes travailleurs d'abattoirs à Saint-Henri vers 1890
Le travail des enfants
Avec l'industrialisation, de nombreux enfants vont travailler dans les usines.
En 1841, au tout début de l'industrialisation, la Chambre a voté
une loi limitant à 12 heures la journée de travail des enfants
de 8 à 12 ans. La proposition initiale de 8 heures a été rejetée
avec violence par les députés: « Nous ne voulons pas que les
enfants vivent jusqu'à 10 ans sans avoir contracté l'habitude salutaire
du travail » ! Souvent les enfants travaillent dès l'âge de
8 ou 10 ans; l'Acte des manufactures (1885) fixera l'âge minimum pour
le travail des enfants à 14 ans pour les filles et 12 ans pour les garçons,
et la durée de leur travail à 60 heures par semaine; mais peu de
contrôles sont effectués et on assiste au viol systématique
de la législation; les enfants sont même souvent battus ou mis au
cachot !
Engagés comme apprentis, souvent sans salaire, ils sont chargés
de tâches qui ne leur apprennent aucun métier.
Une des fonderies des quartiers du canal en 1872
Le travail des femmes
Venant des campagnes, beaucoup de femmes se sont installées dans
les quartiers industriels du canal de Lachine pour travailler dans les manufactures
des secteurs du textile et de l'alimentation. Même avec des salaires
qui sont la moitié de ceux des hommes, l'insuffisance des revenus familiaux
force les femmes des milieux populaires à prendre un emploi en plus de
leur lourde tâche de ménagère du 19e siècle. Elles préfèrent
souvent le métier d'ouvrière à celui, encore plus contraignant,
de domestique dans les maisons bourgeoises. Nombre d'entre elles travaillent
à la pièce à domicile pour le compte d'un manufacturier qui
ainsi économise ses frais de locaux. Pour assurer la garde des enfants
des ouvrières, les religieuses vont ouvrir des salles d'asile.
Ouvrières de la Dominion Textile en 1905
L'Autre montreal