Les instruments de lutte des travailleurs : guide d'évaluation
(militants syndicaux) : guide d'évaluation
Introduction
Voici un guide d'évaluation de nos actions qui a pour but
de nous aider à voir plus clair dans la
réalité de notre milieu de
travail et de nous aider à poursuivre
des luttes concrètes
dans le sens des intérêts des travailleurs. Remarquons
que le mot "lutte" est pris dans un sens très
large qui n'inclut pas seulement des grandes actions telles
grèves, ralentissement de la production ou manifestations mais
aussi la lutte quotidienne de militants pour une meilleure
convention collective, pour les griefs déposés par les
travailleurs, pour des mesures de sécurité dans son usine
etc.. Au fond, il y a toujours des luttes-petites ou grandes, peu
visibles ou évidentes entre travailleurs et patrons. Dans le
cas où les luttes sont faibles ou peu avancées, ce guide
pourra servir davantage à analyser son syndicat local et
àvoir comment il peut devenir un outil de lutte des
travailleurs1 Dans le cas où les luttes sont plus
fortes, ce guide aidera àmieux découvrir les
erreurs et les bons coups de ses luttes passées et à
préparer des luttes plus correctes pour l'avenir.
Les questions de ce guide devront aider à préciser
les obstacles et les conditions d'une vie syndicale plus
dynamique. En gros, ces "obstacles et conditions concernent les
3 aspects suivants :
- les objectifs de nos revendications et luttes sont-ils
clairs pour les travailleurs ?
- avons-nous uns stratégie qui nous aide à voir concrètement
le rapport de force entre travailleurs et patrons dans notre milieu
de travail ?
- nos moyens de luttes sont-ils adéquats ?
A la fin de l'évaluation, on pourra voir que nos faiblesses
concernent plus tel ou tel aspect; par exemple, dans le cas où
notre faiblesse principale porterait sur les objectifs, il faudrait
peut-être stimuler des discussions et un groupe d'étude
et de travail (get); dans le cas où la faiblesse serait la
stratégie, il faudrait peut-être entreprendre une
opération "connaissance de son milieu" (ou une enquête)
qui permettrait de mieux connaître la force de son patron et
les groupes de travailleurs les plus combatifs dans son
syndicat.
N.B. Etant donné qu'aux sessions de formation syndicale du CFP.,
plusieurs travailleurs viennent de la fonction publique, nous avons précisé
entre parenthèses des questions spécifiques à ce groupe de
travailleurs et à leur lutte récente de mai 1972.
A) Objectifs de lutte
- Qui a le plus contribué à définir les objectifs
de notre lutte? (Dans le cas du Front Commun: les objectifs de la
négociation étaient-ils conformes aux problèmes
rencontrés par les syndiqués de notre milieu de
travail?)
- Quels étaient les objectifs de notre lutte?
- les travailleurs et les plus militants de notre syndicat
avaient-ils des idées claires à ce sujet et
partageaient-ils ces objectifs? (Les objectifs du Front Commun
étaient-ils compris et acceptés par les travailleurs de
notre syndicat? Préciser)
- Avons-nous entrepris au début ou au cours de notre lutte
des enquêtes, analyses nous permettant de mieux identifier les
causes de nos problèmes et les responsables? (Exemples: de qui
attendions-nous des appuis? de qui attendions-nous des attaques ou
même des menaces?)
- Les objectifs de notre lutte, tels que compris par les
travailleurs de notre syndicat, ont-ils changé du début
à la fin de la lutte? (Dans les moments difficiles, les
travailleurs tendaient-ils àlaisser tomber certains objectifs?
De nouveaux objectifs sont-ils apparus au cœurs de la lutte?
)
B) Stratégie de lutte
- Tenant compte de nos luttes passées et actuelles, comment
évaluons nous, en nombre et en qualité (a) les
travailleurs militants les plus actifs et conscients dans notre
syndicat (ils viennent de quels départements, ils ont quelles
occupations etc..) (b) les travailleurs sympathiques à nos
objectifs de lutte mais peu ou moyennement actifs en pratique.(c)
les travailleurs apathiques, indifférents ou même
opposés à nos objectifs de lutte (ils viennent de quels
départements, occupations etc..)
- On se retrouvent dans le syndicat les travailleurs les plus
militants: dans l'exécutif, au journal, dans un comité,
ailleurs etc... ?
- Existent-ils des liens solides ou faibles -par journal,
assemblée etc..- entre les plus militants de notre syndicat et
l'ensemble des travailleurs? (Dans le cas du Front Commun, la
structure d'information reposait-elle sur les plus militants et
rejoignait-elle la majorité des travailleurs?)
- Dans notre lutte, d'autres groupes de travailleurs ont-ils soutenus ou
se sont-ils alliés à nous? Si oui, ces alliés venaient
de quelles classes sociales et ils représentaient les intérêts
de quelles classes sociales (Voir tableau en annexe 1)
- Y a-t-il dans notre milieu de travail des individus, groupes,
organismes qui se sont opposés à nos objectifs au cours
de la bataille? Si oui, qui sont-ils et les intérêts de
quelle classe sociale défendent-ils? ( En s'opposant au Front
Commun, l'État Québécois servait surtout quels
intérêts?)
- Avions-nous un plan de lutte, c'est-à-dire différentes é
tapes prévues qui permettaient d'agir ou do réagir de façon
soutenu (et non pas spontanément) et d'entrevoir une victoire sur notre
adversaire?
- Pour l'avenir, entrevoyons-nous la préparation et le plan
d'une lutte? Une lutte sur quoi surtout?
C) Méthodes de lutte
1.
- Quels sont les principaux moyens (nombre de personnes, journal,
local, etc) dont nous avons disposé au cours de notre lutte?
Quels sont-ils aujourd'hui?
- Quels étaient les moyens des groupes qui étaient
opposés à nos objectifs? (Dans le cas du Front Commun,
quels étaient les moyens, ressources dont pouvaient disposer
le gouvernement? Quels sont ceux qu'il a utilisés en fait?)
Quels sont-ils aujourd'hui?
2.
- Dans notre syndicat, y avait-il au cours de la lutte des
"poteaux", des comités de grèves, des structures
concrètes qui permettaient des communications et des
discussions entre la base et la direction? Quel a été le
rôle du permanent syndical? Qu'en est-il aujourd'hui?
- Quel appui ou aide avons-nous reçu de notre
Fédération, du Conseil Central, de la CSN? Comment
avons-nous vu le rôle de ces organes syndicaux? Comment,
à notre avis devrait-il se faire dans l'avenir?
3.
- Quelles sont les principales leçons que nous avons
tiré de cette lutte? Des succès? Des erreurs (Dans le cas
du Front Commun, considérons-nous cette bataille comme une
victoire ou un échec pour les travailleurs?)
- pour l'avenir, quelle sorte de luttes (avec quels objectifs,
quelle stratégie, quels moyens) croyons-nous nécessaire
et possible de mener dans notre milieu?
Annexe : Schéma des classes sociales (en société capitaliste)
La société capitaliste est composée de deux
classes fondamentales, les capitalistes et les travailleurs,
dont les intérêts sont tout à fait opposés. Les
intérêts des classes intermédiaires balancent ou
oscillent, selon les circonstances, entre ces deux classes
fondamentales.
I) Travailleurs ( ou prolétariat)
- classe ouvrière; travailleurs de la production et des
transport (exemple: un machiniste, un menuisier, un
débardeur)
- Autres travailleurs (autres classes laborieuses) travailleurs
dans les secteurs commerciaux, financiers et des services (ou des
appareils d'Etat) (ex: une vendeuse, un commis de banque, une femme
de ménage dans un hôpital)
II) classes intermédiaires (ou petites bourgeoisies)
- cadres et professionnels salariés (ou nouvelle petite
bourgeoisie) (ex: contremaître et ingénieurs à
l'usine, gérant des ventes, professeur d'université,
journaliste, policier)
- petite bourgeoisie: ils possèdent leurs propres moyens de
travail et ne sont pas salariés. (ex: avocats à leur
compte, épiciers, cordonniers)
III) Capitaliste (ou bourgeoisie)
Les propriétaires d'usines, de commerces, de banques; et
leurs représentants politiques dans l'Etat capitaliste et les
appareils de cet Etat ( ce sont les hommes politiques au pouvoir et
les hauts fonctionnaires) .