MÉMOIRE PRÉSENTÉ PAR
LA FÉDÉRATION DES ASSOCIATIONS DE FAMILLES MONOPARENTALES
DU QUÉBEC
SUR LE DOCUMENT D'ORIENTATION POUR UNE POLITIQUE DE SÉCURITÉ
DU REVENU
Février 1988
Fédération des Associations des Familles Monoparentales
du Québec
890 Dorchester est. pièce 2320. Montréal. Québec.
H2L 2L4. tél.: (514) 283-5224
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1. LA PRÉSENTATION DE LA FAFMQ
La Fédération des associations de familles
monoparentales du Québec est un organisme provincial, sans
but lucratif, qui compte 50 associations de familles monoparentales
au Québec, rassemblées en 8 regroupements régionaux.
C'est une structure à trois paliers qui permet de rejoindre la
base de façon régulière afin de mieux répondre à
ses besoins. Le rôle de l'organisme provincial est double :
-
son rôle interne en est un de support aux
associations membres par la formation, l'information et l'appui technique
apportés par le biais du regroupement régional ou encore
directement à la locale.
-
son rôle externe consiste à faire connaître
la situation de la monoparentalité au grand public, à faire
des recommandations aux institutions sociales et gouvernementales
concernées en tout ce qui touche les familles monoparentales
dans les textes de lois et les réformes proposées.
Son objectif fondamental est l'amélioration de la situation socio-
économique des familles monoparentales; la Fédération
travaille à être un agent de changement social.
2. L'INTÉRÊT JUSTIFIÉ DE LA FAFMQ
DANS LA QUESTION
Comme porte-parole des familles monoparentales à revenus moyens
et faibles ou prestataires d'aide sociale, la FAFHQ a un intérêt
primordial dans la réforme qui se dessine. Depuis quelques années
déjà, la famille monoparentale accuse des reculs par rapport
au soutien accordé aux familles. Le gouvernement, par ses différentes
législations, a créé deux sortes de familles alors que
la société reconnaissait de plus en plus la famille monoparentale
au même titre que la famille biparentale.
3. LES LIMITES DE LA RÉFORME PROPOSÉE
Le mémoire, présenté ici, tient compte que la consultation
publique se fait sur un document d'orientation pour une politique de
sécurité du revenu. C' est donc une première démarche
et ce ne doit surtout pas être la seule consultation sur le sujet.
En effet, celle-ci est forcément parcellaire puisque la réforme
sur la fiscalité et la réforme sur les services
de garde sont absentes de la politique actuelle de sécurité
du revenu alors qu'elles y sont étroitement liées dans
les faits. L'une ne va pas sans les 2 autres.
Le gouvernement aura donc pris connaissance du pouls de la société
sur un sujet très fragmentaire de la sécurité du revenu.
De ce fait, le projet de loi qui sera déposé en tenant compte
de la réforme sur la fiscalité et sur les services de garde
doit être soumis à la consultation publiée. La société
doit se faire entendre sur l'ensemble des éléments de la sécurité
du revenu.
ATTENDU QUE le document d'orientation pour une politise de sécurité
du revenu ne tient pas compte de la réforme sur la fiscalité
et sur les services de garde,
ATTENDU QUE les mémoires et avis de groupes et particuliers ne
peuvent, de ce fait, offrir une proposition qui tienne réellement
compte de l'ensemble de la sécurité du revenu,
ATTENDU QUE le gouvernement pour sa part inclura dans sa législation
sur la sécurité du revenu les réformes sur la fiscalité
et sur les services de garde,
La Fédération des associations de familles monoparentales
du Québec demande qu'une commission parlementaire publique
soit convoquée à la suite du dépôt de loi sur la
sécurité du revenu.
4. LES CARACTERISTIQUES DES FAMILLESMONOPARENTALES,
PRESTATAIRES D'AIDE SOCIALE
D'après les données du ministère de la Main-d'oeuvre
et de la Sécurité du revenu au 31 décembre 1986, les
familles monoparentales dirigées par une femme et prestataires
d'aide sociale, se chiffrent à 76 289, et à 3 650 les familles
dont le chef est un homme. Les femmes, chefs de famille, représentent
31% de l'ensemble des femmes prestataires d'aide sociale. Elles se retrouvent
29 282 dans les moins de 30 ans, 36 108 dans le groupe d'âge de
30 à 44 ans. 8 372 de 45 à 54 ans et les 55 ans et plus sont
au nombre de 2 463.
D'après le document à l'étude, il y aurait actuellement
65 442 familles monoparentales à l'aide sociale dont 8 645 seraient
admissibles au programme "Soutien financier". Il reste donc 56 797 familles
monoparentales dont le chef est présumé employable et disponible
à moins de preuve contraire.
Quant aux enfants les plus jeunes des foyers monoparentaux dirigés
par une femme et âgés de moins de 6 ans, ils se chiffrent
à 28 185 enfants et parmi ceux-ci, 11 857 ont moins de 2 ans.
5. LES RAISONS QUI AMÈNENT LES FAMILLES MONOPARENTALES
À L'AIDE SOCIALE
Les raisons qui amènent les familles monoparentales à l'aide
sociale sont multiples. Analysons certaines d'entre elles.
1. Il est évident que la famille biparentale prestataire
d'aide sociale dont les conjoints se séparent devient ipso facto
deux ménages sur l'aide sociale.
2. Le Droit de la famille, la Loi sur le divorce et le partage des biens,
tel qu'il est pratiqué au Québec, ont eu pour effet de pénaliser
gravement la mère au foyer lors de la rupture du couple.
Bon nombre de femmes, chefs de famille monoparentale, ont été
acculées à l'aide sociale à cause du partage inéquitable
des biens lors de la séparation ou du divorce.
- De plus, les pensions alimentaires octroyées par jugement sont
souvent si minimes que les créancières alimentaires doivent
faire appel à l'aide sociale. Et ce, même si le revenu
familial de ce couple avant séparation pouvait se situer parmi
les bien nantis.
- Un jugement de pension alimentaire au montant dérisoire amène
la déresponsabilisation du débiteur qui a l'impression de
payer l'aide sociale puisque son ex-conjoint reçoit le même
montant, que la pension soit payée ou pas.
- Parmi les jeunes de moins de 30 ans, la présence d'un enfant
qui leur permettait de recevoir le plein montant d'aide sociale, a
fait que certains s'en sont prévalu et sont devenus familles
monoparentales.
N.B. Il est à noter que certains hommes vivent les mêmes
problèmes que les femmes chefs de famille dont nous faisons ici
état.
6. LES PRINCIPES SOUS-JACENTS À UNE VÉRITABLE
RÉFORME DE L'AIDE SOCIALE
1. Le droit à un revenu minimum adéquat pour toutes et
tous quelle que soit la cause de l'insuffisance de revenu.
2. Le droit à l'autonomie financière de chaque personne adulte.
- Le droit à des mesures de soutien vers l'autonomie financière
basées sur une participation volontaire et non par coercition
et pénalités.
- Le droit au travail par la mise en oeuvre d'une véritable politique
de plein emploi appuyée par un réseau de services de garde
complet, de qualité et financièrement accessible à
tous.
7. LES PRINCIPES DE LA RÉFORME GOUVERNEMENTALE
ET SES EFFETS NÉGATIFS
1. L'État ne se reconnaît le devoir et
l'obligation de pourvoir aux besoins essentiels que des personnes inaptes
au travail, ce qui signifie retrait du gouvernement face
à la reconnaissance des besoins essentiels de toute personne complètement
démunie.
Le soutien de l'État se définit comme étant conditionnel
à sa capacité de payer, aux conditions économiques
et aux consensus sociaux. Le calcul des besoins essentiels ne se base
plus sur les données du Dispensaire Diététique de Montréal
(DDK) mais le calcul se resserre pour ne prendre en considération
que les besoins du 10* des personnes les plus pauvres parmi les pauvres,
à court, moyen ou long terme selon les différents programmes.
2. L'État reconnaît que les prestations actuelles de l'aide
sociale sont insuffisantes. Malheureusement, seules seraient augmentées
les prestations du programme "Soutien financier".
3. L'État veut maintenir un écart raisonnable entre le revenu
disponible des travailleurs au salaire minimum et celui des ménages
employables sur l'aide sociale.
En vue de maintenir cet écart, le gouvernement
propose de réduire tous les barèmesdu
programme APTE par rapport au système actuel indexé de 1989
et de compenser en augmentant l'exemption des gains de travail.
Le jeu de retirer d'une main et de donner de l'autreest
loin de répondre aux besoins, souvent exprimés par les bénéficiaires,
de pouvoir conserver une plus large part des gains de travail afin
d'augmenter le montant de prestation actuelle qui est insuffisant
et de devenir une réelle incitation au travail.
4. L'État veut corriger les lacunes du système actuel pour
en faire un élément stratégique d'incitation au travail.
Les régimes de taxation et de transferts amènent le programme
actuel d'aide sociale à un taux marginal implicite de taxation
de l'ordre de 75 à 100% sur les revenus de travail comparativement
à 60% pour les plus nantis.
Le fait de réduire les prestations et d'augmenter l'exemption
ne règle pas le problème comme le démontre fort justement
le tableau de la page 27 où figure le détail des barèmes
proposes pour le groupe "personne seule apte et disponible". Pour
ce groupe, le surplus reçu, grâce à des gains maxima
de travail de l'ordre de 155$ pour les 9 premiers mois, de 140$ pour
personne admissible et de 80$ pour participant, équivaut à
un maigre surplus de 32$, 32$ et 72$ respectivement par rapport au
système actuel indexé de 1989. Les prestataires qui n'auront
pas gagné le maximum des gains de travail admissibles en seront
quittes pour une baisse de revenu malgré tous les efforts fournis.
5. L'État veut éliminer toute distinction
fondée sur l'âge des personnes. Il semble que cette mesure
serait mise en force en 1990. encore deux ans d'attente pour les Jeunes
de moins de 30 ans, c'est beaucoup trop!
6. L'État veut promouvoir l'incitation au retour sur le marché
du travail pour les deux parents de famille biparentale dans le programme
APTE.
Autant le gouvernement, par la fiscalité,
prônait le retour des femmes au foyer avec les avantages fiscaux
qu'il accordait au chef de famille biparentale sauf évidemment
pour la femme chef de famille monoparentale, autant il fait
volte-face dans son document d'orientation pour inciter les deux parents
à participer aux mesures d'employabilité.
on voit bien là le souci du gouvernement de récupérer
le maximum possible dans les programmes sociaux. La famille, pour
sa part, est sujette à deux poids, deux mesures, selon qu'elle
est monoparentale ou biparentale et selon qu'elle est biparentale
travailleur ou biparentale prestataire. Une nouvelle catégorisation
de familles est née! Le nouveau ministre délégué
a la famille aura fort à faire pour harmoniser le soutien aux
familles des différents ministères.
7. L'État veut reconnaître les parents d'enfants de 2 ans
et plus comme aptes et disponibles aux mesures d'employabilité.
La Fédération s'oppose fortement à cette mesure et pour
les raisons suivantes.
D'une part, il faut connaître la problématique
de la monoparentalité pour faire la part des choses et comprendre
la difficulté psychosociale d'une femme ébranlée par
la rupture de son couple. Règle générale, il faut compter
environ trois ans pour reprendre vraiment pied après un divorce.
La femme accuse des pertes aux niveaux émotif, socio-économique
et psychologique.
D'autre part, l'aide sociale, qui tolérait que la mère
demeure au foyer tant que le plus jeune enfant n'était pas d'âge
scolaire, veut maintenant décréter que la mère est
apte et disponible à participer à des mesures d'employabilité
dès que l'enfant a deux ans. La rupture du couple amenant le
départ d'un des conjoints, l'enfant perd déjà un parent;
devra-t-il perdre le deuxième? La situation est différente
si les deux parents sont sur le marché du travail avant la rupture.
L'enfant est alors habitué au départ de ses deux parents
pour le travail; il a fait sa place a la garderie où un 3e adulte
le prend en charge. Sinon, c'est lui demander une surcharge d'adaptation
qui, nous l'avons maintes fois noté, peut être nocive pour
lui.
La FAFMQ demande que le choix soit laissé
au parent de demeurer au foyer tant que l'enfant n'est pas d'âge
scolaire de la même façon que les personnes de 55 ans
et plus peuvent à leur choix être déclarées
non disponibles.
8. LES ÉLÉMENTS POSITIFS DE LA RÉFORME
Bien que parcellaire, la réforme proposée amène quelques
éléments positifs:
- elle accorde (en 1990) la parité aux jeunes de moins de 30
ans.
- elle accorde le choix pour les 55 ans et plus de se faire
reconnaître non disponibles.
- elle accorde des prestations majorées pour les personnes
inaptes; elle diminue les vérifications mensuelles à deux
fois l'an ; elle dispense de demander des autorisations préalables
pour les besoins spéciaux.
- elle accorde le choix aux prestataires du programme Soutien financier
d'accéder à des mesures d'employabilité sans perte
d'avantages ni de prestations.
9. LE NIVELLEMENT VERS LE BAS
Le document d'orientation pour une politique de sécurité
du revenu propose un nivellement vers le bas. Plutôt que de contrer
la pénurie d'emploi par une politique de l'emploi, plutôt
que de hausser le salaire minimum, établir de meilleurs contrôles
dans les normes du travail, améliorer les normes de travail, établir
un système de garde d'enfant universel et gratuit, on nivelle par
le bas et on coupe chez les plus pauvres pour assurer l'écart entre
les travailleurs en emploi et les personnes en employabilité. Le
document semble emprunter le vocabulaire des groupes mais il en donne
une interprétation tout autre.
- Le droit à l'emploi devient le droit à l'employabilité.
La présomption d'aptitude n'est pas synonyme d'emploi. Et c'est
l'emploi qui génère des revenus et non l'employabilité.
L'autonomie financière dépend du travail et non de l'employabilité.
Voilà comment on glisse du droit au travail et à l'autonomie
vers l'obligation, la responsabilité, la contrainte, les pénalités
pour un droit à l'employabilité. On sabre allègrement
dans les programmes sociaux.
- On ne veut plus reconnaître les besoins essentiels des enfants
puisqu'au travailleur, on ne reconnaît pas ses responsabilités
parentales dans son salaire.
- On élimine les besoins spéciaux pour obliger les bénéficiaires
à assumer les mêmes responsabilités qu'ont les travailleurs
à faibles revenus. Pour les bénéficiaires, cela veut
dire ne plus pouvoir assumer ces responsabilités.
- On restreint à 4 mois avant l'accouchement le statut de personne
non disponible jusqu'à 5 semaines après la naissance sauf
si la mère à la garde légale de son enfant.
- On oblige le parent avec un enfant de 2 ans à participer aux
mesures d'employabilité puisque plusieurs femmes avec de jeunes
enfants travaillent à l'extérieur du foyer.
- On reconnaît aux personnes non disponibles le droit de conserver
un montant de revenus de travail. De là à décréter,
par la suite, que puisqu'elles gagnent, elles deviennent de ce fait
disponibles, il n'y a qu'un pas.
- On présume de l'aptitude et de la disponibilité des bénéficiaires
sauf preuve du contraire. Le fardeau de la preuve revient au bénéficiaire.
- Dans le programme APTE, on ramène l'exemption pour gains de
travail admissibles de la famille monoparentale avec un enfant au
même montant que pour la personne seule; une autre perte pour la
famille monoparentale.
- apte est essentiellement un programme coercitif et punitif.
- On retire le Supret en faveur du programme APPORT qui ne s'adresse
qu'aux familles avec enfant(s). L'aide aux célibataires et aux
couples sans enfant ayant des revenus faibles sera éliminée
à court terme.
10. LA NOTION DE CONJOINT ET DE FAMILLE
La FAFMQ considère la relation parent(s) enfant(s) comme base
pour la définition de la famille.
La famille est un groupe de parent(s) et d'enfant(s)
mineur(s) vivant ensemble dans une certaine continuité pour favoriser
le développement personnel et social des personnes qui le composent.
La famille monoparentale est tout ménage dans lequel
un enfant réside avec un seul de ses parents légaux à
la fols.
La famille biparentale est tout ménage dans lequel
l'enfant réside avec ses deux parents légaux à la fois.
Quant à une définition de conjoints qui pourrait être
appliquée de façon uniforme dans tous les programmes sociaux,
la FAFMQ propose la suivante tirée de "Les femmes et la fiscalité"
p. 59.
-
tout couple légalement marié.
-
toute union de fait avec enfant(s) des deux partenaires,
quelle que soit la longueur de l'union sauf si les deux personnes
renoncent au statut de conjoint.
-
toute union de fait de durée d'au moins
2 ans sans enfant appartenant aux deux et qui en font la
demande.
Cette définition permettrait d'établir clairement les obligations
du partenaire à l'endroit des enfants de l'autre si les deux font
la demande de conjoints.
La définition de conjoints de fait telle que proposée dans
le document selon laquelle 12 mois de vie commune établit la relation
de conjoints de fait est arbitraire et donne ouverture à des déménagements
qui n'en seront pas vraiment ou encore chambardera des situations qui
étaient appelées à plus de stabilité. Comment serait
établie la différence entre le "chum", le chambreur et le
"steady" ? Ou encore avec 11 1/2 mois de résidence par année
?
11. LA CONTRIBUTION PARENTALE
La réforme veut appliquer à l'aide sociale, la notion de
contribution parentale qui est utilisée dans l'attribution des
prêts et bourses pour les enfants de 18 ans et plus considérés
dépendants.
Pour les personnes dépendantes, les prestations seront réduites
en fonction du revenu des parents et elles seront nulles quand le revenu
dépassera un certain seuil. Exemple : 21 600$ pour une famille
biparentale avec un enfant à charge de 10 ans et plus, par cette
notion de contribution parentale, l'État pourra réduire le
nombre de prestataires de moins de 30 ans et assurer la parité
aux autres dans deux ans.
Des normes précises sont apportées pour déterminer la
personne indépendante :
- de 18 ans et plus et
- qui a résidé 2 ans hors du foyer familial pour une raison
autre que pour les études ou
- qui a eu un emploi régulier pendant 2 ans ou
- étant ou ayant été marié ou
- étant conjoints de fait ou
- ayant un enfant à charge ou
- détenant un diplôme universitaire de 1er cycle.
La prestation du parent bénéficiaire gui héberge son
enfant dépendant, ne sera pas réduite à cause du partage
du logement.
12. LE RETOUR AUX ETUDES ET SUR LE MARCHE DU TRAVAIL
La femme, chef de famille monoparentale est propulsée par le tribunal
et l'aide sociale à tout faire pour atteindre son autonomie financière
le plus rapidement possible.
Comme aide au recyclage, la formation professionnelle ainsi que les
programmes de retour aux études postsecondaires pour les chefs
de famille monoparentale sont fort précieux. Malheureusement, les
responsables gouvernementaux de ces programmes s'attendent à un
taux de rendement exceptionnel de la part des participantes. Ils oublient
que la femme a vécu une rupture de couple souvent difficile et
que l'habitude de l'étude est à réapprendre.
Par ailleurs, les agents d'aide sociale ne sont pas toujours au courant
de ces programmes. Devant un programme qui est pourtant reconduit pour
la deuxième fois, se faire dire, par son agent, que ce programme
n'existe pas, c'est un peu fort! Il y en a d'autres qui découragent
les femmes de 45 ans et plus qui veulent s'y inscrire. Ce n'est pas
pour elles, assurent-ils! Pourtant ce sont des programmes qui permettent
aux femmes d'aborder plus doucement le virage vers l'autonomie financière
sans tout chambarder, comme le faisait déjà l'obligation de
sortir de l'aide sociale et de s'inscrire aux prêts et bourses
pour retourner aux études.
13. LE RÔLE DES AGENTS D'AIDE SOCIALE
La réforme proposée annonce que des ressources humaines d'accueil
et d'accompagnement seraient mises à la disposition des bénéficiaires
d'aide sociale. Nous craignons que les éléments positifs d'une
telle aide soient compromis par l'utilisation des mêmes agents
d'aide sociale qui, d'enquêteurs qu'ils étaient, doivent devenir
des conseillers en orientation efficaces auprès de la clientèle
la plus vulnérable de notre société.
Leur crédibilité auprès des bénéficiaires
est fortement ébranlée après la période de harcèlement
que ceux-ci ont vécu au cours des deux dernières années.
C'est donc avec beaucoup d'inquiétude que nous verrons ces enquêteurs-travailleurs
sociaux dans leur nouveau rôle. Nous espérons à tout
le moins qu'ils sauront faciliter le cheminement des bénéficiaires
dans la dignité et le respect du rythme personnel de chacun.
14. LE CREDO DE L'AUTONOMIE FINANCIÈRE DES
FAMILLES MONOPARENTALES
La FAFMQ prône l'autonomie financière pour les familles monoparentales
dans le cadre précis de personnes vivant la situation de la monoparentalité.
En voici le credo :
-
Partage des biens familiaux à la séparation, au
divorce ou au décès.
-
Médiation globale entre les conjoints sur
l'obligation alimentaire et la garde des enfants.
-
Pension alimentaire pour les enfants appelée
allocation de soutien à l'enfant
qui tiendrait compte du coût réel d'entretien de l'enfant
réparti entre les deux parents ex-conjoints selon leur capacité
de payer et ne serait pas négociable.
Cette allocation de soutien à l'enfant ne serait ni déductible
d'impôt pour le débiteur, ni imposable à la créancière.
Un service de perception automatique de cette allocation de
soutien garantirait l'apport des deux parents.
-
Pension alimentaire pour l'ex-conjoint qui demeurerait
et qui serait toujours soumise aux critères que l'on connaît.
-
Choix laissé au parent avec enfant(s) de
demeurer au loyer jusqu'à ce que le plus jeune atteigne l'âge
scolaire que ce parent soit ou ne soit pas prestataire d'aide sociale.
-
Temps de répit (2 ans minimum) pour permettre
au parent démoli par la rupture de son couple de se reprendre
en main et pour mieux affronter le recyclage nécessaire pour
le retour aux études et sur le marché du travail.
-
Programmes de formation professionnelle et d'études
post-secondaires facilitant le retour aux études et sur le marché
du travail aux femmes, chef de famille monoparentale.
-
Réseau de services de garde universel et
gratuit, accessible et de qualité.
-
Mesures fiscales reconnaissant la famille monoparentale
et l'union de fait au même titre que la famille biparentale.
-
Le credo de l'autonomie des familles monoparentales
a voulu démontrer le cheminement suivi par la famille monoparentale,
de la rupture à l'autonomie, avec toutes les étapes de vie
où s'accumulent à l'heure présente, perte sur perte,
pour la femme chef de famille.
L'État par l'harmonisation et la concordance souhaitées des
mesures législatives des différents ministères concernant
la famille, saura-t-il transformer ces pertes en gains ?
15. CONCLUSION
La réforme ouvre la voie à un changement de société
de la part de l'État. L'ère de l'État-Providence s'estompe
dans le temps. Mais plus grave encore, c'est la philosophie qui sous-tend
ces coupures.
Le document d'orientation pour une politique de sécurité du
revenu interpelle toutes les couches de la société.
Ce sont à plus ou moins long terme tous les programmes sociaux qui
seront modifiés à la baisse - la norme de référence
étant le plus rigoureux, le moins généreux - et on l'appliquera
à l'ensemble des programmes.
La FAFMQ fait appel à toute la société pour prendre le
temps d'analyser à la loupe le futur Projet de loi sur la sécurité
du revenu dans lequel seront intégrées les réformes sur
la fiscalité et sur les services de garde. C'est donc une loi-piège
qui peut sembler toucher officiellement l'aide sociale et ne pas intéresser
la population en général, alors que dans la réalité,
c'est une loi qui pourrait avoir le pouvoir de modifier en profondeur
l'ensemble des programmes sociaux, si on n'y prend garde.
Il est important et nous le répétons que le gouvernement convoque
une commission parlementaire pour que la population puisse s'exprimer
sur le contenu du véritable Projet de loi sur la sécurité
du revenu.
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