ADDENDUM au MÉMOIRE CONCERNANT L'ÉNONCÉ DE POLITIQUE SUR LES SERVICES DE GARDE

FEDERATION  DES  ASSOCIATIONS DE  FAMILLES MONOPARENTALES   DU  QUEBEC

Mars  1989

Fédération des Associations des Familles Monoparentales du Québec — 890 Dorchester est, pièce 2320. Montréal, Québec. H2L 2L4, tél.: (514) 288-5224

La Fédération des associations de familles monoparentales du Québec (FAFMQ) organisme provincial, regroupe des associations de familles monoparentales à travers le Québec. La FAFMQ représente une bonne partie de la clientèle actuelle des services de garde et également la clientèle potentielle par excellence, advenant l'établissement d'un réseau de services de garde adéquats.

La FAFMQ souscrit aux objectifs de la Loi sur les services de garde qui

visent

  • l'accessibilité des services de garde
  • le respect de la liberté de choix des parents
  • la participation des parents

Quant à la logistique de la consultation, la FAFMQ déplore les délais trop courts qui sont alloués entre la diffusion de l'énoncé et le dépôt des mémoires et la période de temps choisie: cette fois-ci, les vacances de Noël et pour la consultation précédente, ce fut pendant les vacances estivales.

La FAFMQ souscrit à fond au droit fondamental qu'a l'enfant à des services de garde de qualité.

Ce droit fondamental vient renchérir l'option de la FAFMQ selon laquelle seuls des services de garde collectifs peuvent répondre aux besoins de garde, au Québec.

La FAFMQ reconnaît l'effort du Gouvernement dans son implication dans le dossier de la garde d'enfants et reconnaît l'importance d'une consultation publique.

A la lecture attentive du document d'orientation Pour un meilleur équilibre, la trame de fond qui se dégage, c'est un désengagement de l'Etat.

1° en subventionnant les garderies commerciales, l'Etat se désengage du réseau des services de garde comme premier responsable

  • de la qualité
  • de l'accessibilité
  • de la gratuité

2° l'Etat abonde dans un rôle de collaborateur, de partenaire - il appuie, il suggère, il veut partager avec d'autres partenaires économiques sa vocation de premier responsable des services de garde.

3° L'Etat ne croit pas à la nécessaire implantation d'un réseau de services adéquats. La volonté politique est absente.

4° L'Etat ira chercher du fédéral, nous n'en doutons pas, toutes les subventions possibles en politique de garde mais sans y mettre un engagement ferme de sa part.

5° L'Etat n'a pas de plan d'ensemble qui viserait à long terme la gratuité des services de garde.

Au contraire, telle la cigale, l'Etat valse des plus pauvres aux plus riches, voulant sauver la chèvre et le chou, sans prendre aucun engagement.

L'Etat ne répond pas aux besoins de garde des parents à revenus moyens. Le seul effort d'aide aux revenus moyens, c'est d'inclure un certain nombre de familles admissibles à une partie de l'exonération financière avec le remaniement des seuils de revenu admissible.

Mais pour les revenus élevés ! Quelle aubaine ! L'Etat double la déduction pour frais de garde et en enlève le plafond.  Une déduction royale qui va à rencontre de la philosophie fiscale de convertir en crédit d'impôt, les exemptions et déductions.

C'est un cadeau princier fait aux revenus aisés : pourquoi le Gouvernement privilégie-t-il les familles à revenus aisés dans sa politique des services de garde, par le biais de la fiscalité ?

Ces dépenses fiscales comptabilisées autrement pourraient servir à élargir l'assiette financière de la politique des services de garde. Présentement, c'est un talon d'Achille dans une politique cohérente des services de garde.

S'il y avait volonté ferme de la part du Gouvernement, celui-ci négocierait tous les avantages fiscaux et sociaux reliés à la charge d'enfants pour bâtir une véritable politique de services de garde.

L'étude du Conseil national du Bien-Etre social dans son document: De meilleurs services de garde d'enfants, décembre 1988, propose une option de réaménagement de toutes les politiques reliées à la garde d'enfants pour en bonifier une véritable politique d'ensemble :

. hausse considérable du nombre de places en garderies agréées (750 000 de plus en 7 ans). . hausse du % d'enfants qui en bénéficieraient (de 13% en 87 à 51 % en 95). . le montant des frais acquittés par les parents basé d'après la capacité contributive de ceux-ci. . hausse des salaires du personnel enseignant dans les garderies. . diminution du ratio enfant/moniteurs à 0-2 ans 3/1, 2-6 ans 6/1, 6et+ 10/1, milieu familial 4/1. . congé de maternité 17 semaines + congé parental 9 semaines à 75 % du salaire. (Evidemment, cette étude n'inclut pas les allégements fiscaux du Québec).

Les femmes chefs de famille et assistées sociales représentent une clientèle "à risque" lorsque l'autre parent est presque complètement absent.

La FAFMQ recommande que les enfants de ces familles soient toujours admissibles aux garderies sans qu'il y ait une obligation d'étude ou de travail rattachée à l'admissibilité, par mesure de prévention en santé mentale.

A

L'impact de cette mesure, c'est de permettre aux femmes de se reprendre en main, émotivement, psychologiquement et physiquement de façon à assumer la rupture et de pouvoir viser à leur prise en charge économique.

Le parent au foyer, qui se sépare, risque fort de devenir une clientèle potentielle par excellence des services de garde.

S'il est marié en séparation de biens, ce parent devient nécessairement pauvre par les lois actuelles, à moins que les actifs de la famille ne soient au nom des deux conjoints ou à son nom propre (ce qui est rarement le cas).

Des statistiques américaines avancent même que le niveau de vie de l'homme augmente de 42 % et celui de la femme qui a la garde voit le sien baisser de 73 %, un an après le divorce.

La Loi sur le divorce, le Droit familial et la jurisprudence ne tiennent pas suffisamment compte de la richesse réelle du couple et des dépenses reliées à l'enfant. Et le partage des biens familiaux se fait toujours attendre, malheureusement !

Parent au foyer

La FAFMQ recommande que les halte-garderies et les jardins d'enfants

soient incorporés au plus tôt dans la gestion des services de garde par l'Office, avec les aménagements suivants:

  • augmenter à un maximum de cinq heures, les périodes de garde.
  • déterminer les mêmes critères d'admissibilité à l'exonération financière que pour les garderies, la garde en milieu familial et la garde en milieu scolaire sans obligation d'étude ou de travail.

L'impact de cette mesure, c'est de reconnaître que tout enfant a un droit fondamental à des services de qualité et de permettre au parent au foyer, des périodes de bonne hygiène mentale.

La FAFMQ a étudié attentivement le projet de garde au domicile de l'enfant en tenant compte des paramètres suivants:

  • il faut établir des services collectifs pour répondre aux besoins de garde.
  • l'agence ne peut diminuer ses effectifs au profit du particulier.
  • il faut satisfaire les besoins de garde de soir, de nuit, de fin de semaine et de garde en milieu rural.

La FAFMQ recommande que la responsable de garde au domicile de l'enfant relève d'une agence de services de garde.

  • qu'elle soit engagée et payée par l'Agence,
  • que l'Agence négocie un contrat avec l'employeur,
  • que la responsable soit admissible à l'information et à la formation tout comme les responsables de famille de garde,

- qu'un roulement soit établi pour assurer le service en cas de maladie      ou de vacances des responsables de garde au domicile de l'enfant,

- que de bonnes conditions salariales soient apportées de façon à éliminer la sur-exploitation des femmes.

L'impact de cette mesure, c'est d'assurer à l'enfant une sécurité en tout temps; il ne serait plus question de laisser l'enfant seul le soir ou la nuit. Le parent pourrait aller travailler en toute tranquillité d'esprit.

Réticences des mères au foyer

On se rend bien compte que la mère au foyer qui doit retourner sur le marché du travail éprouve beaucoup de réticences à faire garder son enfant.

  • elle a peur de l'inconnu pour l'enfant
  • elle se croit indispensable
  • en quelque part, elle éprouve un sentiment de culpabilité, un sentiment de renier sa responsabilité
  • elle n'est pas sure de vouloir partager le pouvoir qu'elle a sur son enfant

La garde au domicile de l'enfant est recherchée en premier lieu par ces parents parce que:

  • rien n'est changé dans les habitudes de vie de l'enfant; il est dans son milieu, dans ses jouets
  • le service n'est pas interrompu si l'enfant est malade.

La garde au domicile de l'enfant et la garde en milieu familial sont privilégiées par les parents pour les très jeunes enfants parce que ces services ressemblent le plus à ce qui se passe à la maison. De plus, pour plusieurs parents, ce sont les seuls services qui existent ou qu'ils connaissent.

Campagne de sensibilisation

Les activités de socialisation et d'éducation en garderie sont souvent méconnues des parents comme apport important au développement de l'enfant.

La FAFMQ recommande qu'une campagne de sensibilisation soit faite auprès des parents sur le bien-fondé des services de garde concernant les activités de socialisation et d'éducation, comme démarche préalable à une mesure d'incitation volontaire au retour aux études ou sur le marché du travail.

Appui aux regroupements des trois services de garde

La FAFMQ appuie les recommandations des regroupements des garderies sans but lucratif, le Regroupement des agences de services de garde et l'Association des services de garde en milieu scolaire dans leurs reven- dications concernant de meilleures conditions de travail, de formation, de ratio et de conditions salariales.

Le financement des garderies

La FAFMQ s'oppose à la méthode de financement proposée dans le document d'orientation.

Une subvention de fonctionnement basée sur la participation financière des parents oblige les garderies à majorer leurs tarifs pour améliorer leur sort avec les effets négatifs suivants : . une diminution de la clientèle à revenu faible ou moyen pour qui la garde

est trop coûteuse.

. une obligation de combler au maximum le taux d'utilisation des places en garderie au détriment des objectifs pédagogiques donc perte de qualité du service.

. une augmentation du ratio enfants/moniteurs-trices, déjà trop élevé. . une dégradation des conditions salariales et de travail.

L'impact qu'aurait cette mesure, c'est d'augmenter les tarifs, ce qui obligera nos familles à retirer les enfants des garderies, à surexploiter la parenté pour faire garder les enfants ou encore à se passer du minimum vital ou à s'endetter.

Le programme APPORT

Le programme APPORT a le malheur d'exercer, auprès des familles à bas revenu de travail, un contrôle aussi serré que celui de l'aide sociale. Il est difficile et complexe à administrer. De plus, les formulaires s'avèrent difficiles à remplir - même les agents ne s'y retrouvent pas.

Plusieurs familles monoparentales sont pénalisées parce que les pensions alimentaires qu'elles reçoivent sont calculées comme autres revenus et sont déduites à 100% dans le calcul du revenu admissible contrairement aux revenus de travail.

L'impact pour la famille monoparentale implique que pour un montant identique de revenu, s'il s'agit de pension alimentaire, la famille n'aura pas droit à APPORT.

La FAFMQ réclame que les pensions alimentaires soient calculées au même titre que les revenus de travail dans le programme APPORT, dans les prêts et bourses et à l'aide sociale.

La garde en milieu scolaire

A plusieurs reprises, la FAFMQ a réclamé que la garde en milieu scolaire prenne le nom de centres de jour en milieu scolaire pour répondre mieux aux objectifs d'encadrement et d'éducation.

La FAFMQ a, de plus, fortement insisté pour que la structure des centres de jour en milieu scolaire soit opérée par la municipalité, les jours et les heures non régis par le scolaire, les jours de congé et durant les vacances estivales.

Il est inadmissible que ce service ne soit pas en force dans toutes les écoles de la province quand on pense que l'infrastructure est en place partout.

Le transport scolaire devient une priorité pour assurer l'efficacité du service en région là où le transport en commun n'existe pas.

L'impact de cette mesure pour nos femmes qui sont demeurées au foyer avec leurs enfants d'âge préscolaire, c'est de leur permettre grâce aux centres de jour en milieu scolaire une intégration rapide au marché du travail en vue d'atteindre à leur autonomie financière.

Tous ces espoirs seront permis à la condition qu'effectivement il soit mis en place un véritable réseau de services de garde adéquats.

Présenté à la Commission des Affaires sociales le 28 février 1989.