«On se fait une grande affaire de chercher les meilleures méthodes
d'apprendre à lire, on invente les bureaux, des cartes, (…)
Quelle pitié!
Un moyen plus sûr que tous ceux-là, et celui qu'on oublie toujours,
est le désir d'apprendre. (...) laissez-là vos bureaux (...);
toute méthode lui sera bonne.
L'intérêt présent, voilà le grand mobile,
le seul qui mène sûrement et loin.»
Jean-Jacques Rousseau
Écrivain et philosophe
1712-1778
Il était une fois...
Il y a quelques années, alors que j'étais en alpha depuis bientôt sept ou huit ans, Jean-Paul est venu frapper à la porte de l'organisme. Je l'ai rencontré pour un test de classement, ce qui fut très vite fait. Jean-Paul ne connaissait qu'une seule lettre de l'alphabet : le X, sa signature! Motivé comme personne, il m 'a fièrement affirmé : «Je veux apprendre à lire et écrire!»
Je me suis dit intérieurement : «Là, si je veux être honnête avec lui, je dois lui dire qu'on va prendre ça par le début, p'tit bout par p'tit bout et que si tout va bien... dans sept ou huit ans, on va s'attaquer à l'écriture.» Un hic majeur : Jean-Paul devait bien avoir au moins 74 ans. Le temps nous faisait cruellement défaut.
C'est donc le jour ou ai eu la chance de rencontrer Jean-Paul, cet homme si éloquent, qu'il m'est apparu clairement que la lecture ET l'écriture devaient être abordées de front. Insatisfaite depuis déjà un certain temps, j'avais commencé à remettre en question ma façon de faire. Dans mes ateliers, je trouvais que ça tournait en rond sur le plan de l'écriture, que très peu de progrès se faisaient sentir et, surtout, que le transfert dans le quotidien était quasi inexistant.
Quelques semaines plus tard, je suivais la formation sur le langage intégrée du RGPAQ...
Et quelques années plus tard, l'écriture est plus que jamais au cœur de ma pratique...
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En alphabétisation populaire, il est entendu que nous aspirons à ce que les participantes et les participants apprennent à lire et à écrire, et ce, dans une structure bien précise. Nous leur proposons d'apprendre dans l'action. Les nouvelles compétences fraîchement acquises se greffent à ce bagage qui est le leur et auquel nous accordons vraiment une grande importance. Nous leur proposons d'apprendre dans un contexte qui se veut émancipateur. Notre conception de l'alphabétisation ne se limite pas aux compétences relatives aux codes orthographique et grammatical, loin de là! Nous visons une pratique qui sera réellement transférée dans leur quotidien. Une pratique participative et démocratique qui leur redonne le pouvoir. Cette notion de pouvoir peut s'étendre jusqu'à l'apprentissage. En effet, lorsque les participantes et les participants s'approprient leur propre démarche d'alphabétisation, celle-ci prend subitement un sens réel.
Il est impossible de nier les parallèles entre notre façon de faire en alphabétisation populaire et le langage intégré. Dans nos organismes, il nous importe que les personnes qui y participent prennent en charge leur propre démarche en devenant autonomes, notamment sur le plan de la lecture et de l'écriture. Nous faisons en sorte que ces personnes jouent un rôle dynamique jusque dans la construction de leur «savoir-lire» et de leur «savoir-écrire». Nous donnons une grande importance à la conscientisation. Pour ce faire, nous multiplions les situations d'échanges de points de vue, qui favorisent l'écoute de l'autre, la prise de parole et l'exercice de responsabilités qui tendent tous vers la transformation. La communication se retrouve au premier rang de notre action, elle est l'esprit de l'approche intégrée. Voilà pourquoi nos lieux sont donc propices à l'acquisition de compétences en lecture et en écriture en tant qu'actes de communication. Nous saisissons régulièrement les éléments de notre riche quotidien d'alphabétisation populaire pour en faire autant d'occasions de lecture, d'écriture et de débats. Des occasions qui deviennent automatiquement significatives pour les participantes et les participants.
Ces aspects sont donc autant de raisons d'explorer l'approche intégrée. Une approche qui :
En fait, l'approche intégrée est surtout une façon de faire de l'écrit un outil que nous nous approprions, un peu comme un tournevis que nous apprenons à manier... en vissant! Nous «osons» l'utiliser sans peur, même si nous sommes un peu gauches au début. En langage intégré, l'écrit, tout comme le tournevis, est à notre portée et devient accessible, que nous soyons de niveau fonctionnel, intermédiaire ou même débutant.
Comme avec toute méthode ou approche privilégiée, une étape importante est celle où nous questionnons les participantes et les participants sur leur représentation de la lecture et de l'écriture. Il s'agit d'un préalable incontournable pour la réalisation d'objectifs personnels puisque nous savons combien, en alphabétisation, il est important de travailler à partir d'objectifs clairs et... réalistes. Il n'est pas rare que certaines personnes n'arrivent pas à déterminer concrètement ce qu'elles aimeraient apprendre, si ce n'est pour réussir là où elles ont échoué ou pour ne plus être exclues. Nous nous rendrons souvent compte, en les questionnant davantage, que ces personnes désirent apprendre à écrire sans faire de fautes, persuadées à tort qu'il s'agit de la norme. Pour d'autres, le fait d'apprendre les lettres de l'alphabet sera synonyme d'apprendre à lire. Il importe de faire ressortir que la lecture n'est pas un but en soi, mais un moyen pour atteindre un but. Que lire, c'est donner du sens. Le travail sur la vision de l'écriture est également essentiel. Il nous servira de point de départ, nous guidera pour les amener à identifier des besoins clairs, qui vont au-delà «d'écrire pour écrire».
Une telle réflexion sur la lecture et l'écriture sera d'une grande utilité pour que les personnes s'engagent à nous suivre sur le chemin du langage intégré. Car toutes pratiques d'écriture autonome et de lecture sont souvent synonymes d'inconnu et d'insécurité pour les participantes et les participants. Leur expérience de l'apprentissage du code se résume trop souvent aux séries d'exercices hors contexte, méthode qui s'est déjà soldée, au demeurant, par un échec puisque les personnes se retrouvent en démarche d'alphabétisation. En alphabétisation populaire, c'est à nous de leur présenter une autre façon de faire, de les amener à surmonter leurs résistances en relevant le défi de «risquer l'écrit». Cela dit, cette approche exige que nous ayons confiance en eux et que nous soyons ouverts à partager avec eux la responsabilité de l'apprentissage.
Avant d'aller plus loin sur notre approche et notre perception quant à l'application du langage intégré, permettez un bref retour dans notre histoire. En 1991, Guy Boudreau, professeur de l'Université de Sherbrooke, animait une aux animatrices et aux animateurs du RGPAQ sur l'approche du langage intégré, une approche pédagogique qui préconise l'apprentissage simultané de la lecture et de l'écriture, et ce, en continuité avec l'expression orale. Un document écrit dans la collection Un visa pour l'alpha pop a servi à arrimer l'approche (initialement destinée aux enfants) à notre pratique d'alphabétisation populaire.
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La formation de Boudreau a par la suite été donnée à plusieurs reprises et a été animée par des personnes directement issues du terrain. Ces dernières ont cherché à développer encore davantage son application. Au fil des ans, la théorie s'est ainsi vue bonifiée d'exemples concrets, ce qui témoigne de toutes les possibilités que permet l'approche.
Il apparaît clair que notre façon de faire en alphabétisation populaire nous a amenés à utiliser et à développer des éléments qui sont propres au langage intégré. Comme cette approche n'est pas une recette à suivre pas à pas, une grande part de celle-ci laisse place à l'interprétation et au contexte. Par exemple, plusieurs d'entre nous n'offrent que des ateliers à temps partiel. Dans de telles conditions, il est de l'ordre du défi de garder l'intérêt réel des participantes et des participants si le code écrit est abordé de façon linéaire, à partir des simples lettres de l'alphabet, en passant par les règles qui régissent le code jusqu'au texte pour ensuite passer à l'écriture en tant que telle. Aborder d'abord la mécanique de la lecture pour ultimement travailler l'écrit peut s'avérer, dans plusieurs cas, une démarche longue et fastidieuse. C'est pourquoi procéder de façon intégrée, en s'attaquant directement aux textes et à leurs sens, permet d'aborder la langue de façon beaucoup plus dynamique et concrète pour les participantes et les participants.
Certains ont expérimenté l'approche intégrée de manière spécifique et documentée, alors que d'autres l'ont fait de façon assez intuitive. Ce qui explique que, dans le contexte de la formation sur le langage intégré du RGPAQ, des animatrices et des animateurs prennent subitement conscience que leurs propres pratiques se reflètent dans l'approche du langage intégré.
Nous voilà donc, quinze ans plus tard, à faire le point sur le langage intégré. Animatrices et animateurs, nous nous sommes retrouvés lors d'une «rencontre-échanges» pour nous questionner et réactualiser notre regard sur cette approche. Notre évaluation et nos constats ont mis en lumière différents aspects que nous nous sommes appropriés parce qu'ils étaient en lien direct avec notre pratique d'alphabétisation populaire. Les échanges nous ont en outre permis de constater combien nous avions, dans nos groupes respectifs, développé des pratiques de lecture largement basées sur des écrits authentiques et des pratiques d'écriture autonome.
Sans aucune prétention théorique, Pouvoir se dire... se veut un rapide survol des principes et concepts de l'approche intégrée, un espace de réflexion ainsi que le reflet de certaines pratiques que nous avons adoptées. Essentiellement constitué d'exemples d'activités pratiques, qui sont des pratiques d'écriture autonome, le présent document est d'abord et avant tout un outil concret qui, nous l'espérons, sera source d'inspiration et qui saura vous alimenter.
Le langage intégré est avant tout un
mode de pensée qui nous laisse libre
d'élaborer différentes stratégies
Dans ce document-ci, vous remarquerez que l'espace réservé à la lecture est moins important que celui dédié à l'écriture. Cela s'explique tout simplement par le fait qu'il nous est assez naturel de travailler le texte. Facilement, nous exploitons une diversité de matériel écrit, significatif pour les participantes et les participants. De leur côté, ceux-ci abordent la lecture avec plus de facilité, et c'est plutôt au moment d'aborder l'acte d'écriture que les complications surviennent. Nos résistances, nos propres schèmes et les leurs nous enlisent parfois dans des activités d'écriture somme toute assez dirigées. C'est du moins ce qui ressort lors des formations du RGPAQ sur le langage intégré. C'est pourquoi nous avons constitué une boîte à outils qu'il vous est proposé d'explorer. Ces activités, qui sont soit des idées de projets, soit simplement des amorces, s'inscrivent toutes dans une perspective de développement de pratiques d'écriture autonome.
Pouvoir se dire... ne remplace ni le document de Boudreau ni la formation. Il est plutôt un outil complémentaire à ceux-ci. Nous vous invitons d'ailleurs, si ce n'est déjà fait, à feuilleter le langage intégré de Boudreau, qui reste une source de référence. Quant à la formation, toujours aussi pertinente, elle se veut le trait d'union entre la théorie et notre action sur le terrain. Continuellement enrichie d'expériences significatives, elle est le reflet d'une approche vivante et en constante évolution. Elle devient donc un outil pratique... pour notre pratique!
En observant de près les principes qui sous-tendent le langage intégré, il est facile de faire le parallèle avec deux autres méthodes, soit la méthode naturelle de lecture et d'écriture1 et la méthode active2. Dans la méthode naturelle de lecture et d'écriture, l'apprentissage de la langue est directement relié aux besoins de communication, alors que dans la méthode active, l'adulte est le premier acteur des ses apprentissages et la construction de savoirs se fait à partir de recherche. En langage intégré, nous partons directement des participantes et des participants, qui sont pleinement engagés tout au long du processus. Leurs productions deviennent notre matière première.
Quelques principes incontournables :
La lecture et l'écriture comme actes de communication
En langage intégré, les personnes qui participent aux ateliers sont encouragées à aborder la culture écrite (lecture et écriture) en premier lieu par le sens puis par le code. Le texte ET le message sont privilégiés. Plutôt que de décomposer la langue et de l'aborder segment par segment, ce qui crée forcément un écart entre la fonction et l'utilisation, elle est abordée par sa fonction naturelle : celle de communiquer un message. L'écrit devient du coup authentique, significatif, pertinent et stimulant.
Les participantes et participants vus comme des utilisateurs de la langue écrite
Comme les participantes et les participants utilisent la langue d'une manière fonctionnelle et réfléchie, ils sont de réels utilisateurs de la langue. En leur suggérant d'écrire sur ce qui se passe dans leur vie, ils analysent leur vécu et le partagent.
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En les encourageant à lire, notamment pour s'informer et pour se débrouiller à partir des écrits qui les entourent, ils posent un regard différent sur l'apprentissage. Soudainement, l'apprentissage n'est plus dénué de sens, contrairement à ce qu'il a pu être dans leur passé scolaire. Un des éléments essentiels au langage intégré, quand nous invitons les personnes à écrire, c'est le droit à l'erreur. Dans cette approche, l'erreur est considérée comme une prise de risque, une émission d'hypothèse et n'est surtout pas, dans un premier temps, objet de correction.
Comme dons tout apprentissage, il est normal de ne pas tout réussir quand l'écrit est abordé, surtout pour une personne en processus d'alphabétisation. Ainsi, quand Jean-Paul, du groupe débutant, écrit laborieusement : «je sui alé o IGA», nous pourrions considérer sa phrase à partir des ratés, soit l'omission de la majuscule en début de phrase, l'absence de ponctuation et les erreurs orthographiques dans la majorité des mots. Même si nous l'encourageons, Jean-Paul comprendra, avec raison, qu'il n'a pas réussi si nous procédons sur-le-champ à la correction. Nul doute que son sentiment d'incompétence, déjà fort, face à l'écriture sera accentué. Observons plutôt cela d'un autre œil : il a fait l'effort d'écrire (toujours important à souligner), il a bien formé ses lettres, il a réussi le découpage syntaxique et a utilisé de bonnes stratégies quant aux sons. Nous pouvons même ici introduire la notion de «fautes intelligentes» par exemple, l'utilisation du «o» au lieu du «ou». De plus, et surtout, il est primordial de faire ressortir que tous les membres du groupe sont parvenus à lire et à comprendre sa phrase. En insistant sur les bons coups et la réussite communicative plutôt que sur les «fautes», la prise de risque de Jean-Paul est couronnée d'un succès, et il est probable qu'il aura envie de rééditer son heureuse expérience. En langage intégré, avec cet exemple, Jean-Paul se situe au stade d'écriture temporaire3. En alphabétisation, certaines personnes avec qui nous travaillons n'arriveront pas à dépasser ce stade, d'où l'importance de mettre l'accent sur le message plutôt que sur l'ensemble des règles qui régissent le code écrit. Le projet d'écriture s'inscrit dans la continuité de la parole, et le code développé au fur et à mesure est donc un moyen de servir l'expression. C'est pourquoi notre tolérance à l'erreur leur permettra, pour ainsi dire, de s'approprier l'écrit, à leur façon, ce qui constitue l'objectif principal de la démarche.
«C'est pas parce qu'on ne sait pas bien lire et écrire
qu'on n'a pas de belles histoires à raconter»4
François
Le texte : outil de développement de la pensée critique
L'approche intégrée est basée sur le respect des participantes et des participants et de leur culture. À travers elle, nous tenons compte de qui ils sont, de leur vécu et de leur façon de s'exprimer. «On les aide à assumer le contrôle d'une langue qui leur appartient, de leur propre apprentissage, de leur propre expression orale et écrite et de leurs propres pensées.» Goodman (1989). La langue leur permet de réfléchir sur leurs expériences et de transmettre leurs pensées, selon leurs besoins.
La langue est, entre autres, un outil pour penser. Dans le langage intégré, le texte est un outil pour penser ET pour apprendre. Avec l'approche intégrée, lire (au-delà du simple décodage) signifie comprendre. L'apprentissage est enraciné dans une forme d'action et de pensée. La lecture et l'écriture sont des moyens pour que les membres du groupe effectuent un «travail» d'ouverture sur l'environnement. En développant un sentiment de compétence à l'égard de l'écrit, c'est le pouvoir de penser que nous offrons aux participantes et aux participants de se réapproprier. Je lis et j'émets des idées, et ces idées sont reçues. Une valeur est accordée à mes propos : «Je suis reconnue!» Pour un adulte en processus d'alphabétisation, c'est énorme. C'est une façon de se faire exister un peu plus aux yeux des autres et de «se voir» enfin dans le regard de ceux-ci, dans cette société où l'écrit est omniprésent et valorisé et dont les participantes et les participants ont toujours été en marge.
En langage intégré, l'écrit est beaucoup plus qu'une technique à acquérir, et l'apprentissage n'est pas vu du simple aspect de transmission de connaissances. Les productions littéraires sont à la base même du langage intégré. Les apprentissages sont largement basés sur le texte sous toutes ses formes. Graduellement, les personnes qui participent aux ateliers s'approprient la langue écrite et la mettent au service de leurs besoins. Cela se fait dans un climat d'échanges naturels et significatifs. Le travail sur le plan de la lecture, au-delà de développer le goût de lire, viendra ultimement soutenir le processus d'écriture. S'inspirant de l'approche intégrée, Boudreau (1992) nous propose la structure suivante :
À travers cette démarche, autant d'importance est accordée au message qu'aux particularités concernant les codes orthographique, grammatical et lexical. C'est une façon de procéder qui fait en sorte que les apprentissages reliés au code seront greffés au travail en cours. Contrairement à une approche plus scolaire et plus linéaire, ici, le code ne mène pas à l'écrit. Il est travaillé directement à travers lui.
La modélisation
Le langage intégré favorise une pratique de modélisation où nous donnons l'exemple. En tant qu'animatrices et animateurs, nous sommes encouragés à faire la lecture aux personnes participant aux ateliers en mettant en relief tout le processus de lecture, comme ce qui a motivé le choix, le style et le but du texte. Nous sommes également invités à émettre nos hypothèses en survolant le texte, à confirmer nos anticipations au fur et à mesure de la lecture, à faire ressortir ce que nous avons retenu, etc. C'est en tant que lecteur expérimenté que nous abordons les stratégies de lecture. Par cette lecture, nous stimulons le goût de lire, la découverte de différents genres littéraires et, ultimement, nous favorisons une meilleure intégration notionnelle. Lorsque nous abordons les notions en lien avec un texte ou un extrait d'un livre que nous leur avons lu, nous leur permettons une meilleure disponibilité, une anticipation et une plus grande rétention parce que l'outil utilisé leur est familier.
La modélisation permet la découverte
de l'ensemble des aspects
du travail d'écriture.
Il en va de même pour le processus d'écriture. Nous devons être conscientes et conscients que tous les écrits qui passent entre les mains des participantes et des participants sont sous leur forme finale et qu'il leur est donc difficile de saisir tout le travail que représente la production d'un texte. Ils sont convaincus que les premiers jets sont automatiquement parfaits, ce qui contribue à entretenir la perception négative qu'ils ont d'eux-mêmes puisque le processus d'écriture leur demande à eux un effort colossal. C'est pourquoi il est bénéfique d'écrire devant eux. Ils peuvent ainsi prendre conscience que tout écrit est le fruit d'un processus d'essais et d'erreurs et qu'il comporte plusieurs étapes de réalisation, peu importe qui tient le crayon. Par exemple, il est possible de leur présenter les jets, brouillons et copies qui auront mené à la version finale d'une rédaction que vous avez faite : demande de subvention, lettre, rapport de projet, etc. Ils auront donc la possibilité de voir tout le processus, tout le travail effectué. Ils sont généralement assez surpris de constater que, même en possédant largement les rudiments de l'écrit, poser ce geste n'est pas aussi simple et instantané qu'ils ne le croient.
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Le système de conférences
La collaboration entre toutes les personnes qui participent aux ateliers est aussi à la base du langage intégré. Puisque l'écrit est systématiquement vu comme objet de communication, les participantes et les participants réagissent ensemble aux écrits qui leur sont proposés. Il en va de même en ce qui concerne leurs propres productions écrites. Nous leur demandons de réagir entre eux face à ce qu'ils ont produit. Ce qui est appelé «conférence» est donc tout simplement la relation, l'échange autour d'un texte entre deux ou plusieurs personnes, entre une participante et une animatrice ou encore entre différents groupes d'un même organisme.
Un participant ou une participante utilisera le moyen des différentes conférences5 pour vérifier la clarté ou l'efficacité de son texte ou pour se faire alimenter lors d'un manque d'idées. Cette façon de s'appuyer sur le groupe modifie la relation de type «prof-élève». D'autres personnes peuvent en effet jouer le rôle habituellement réservé à l'animatrice ou à l'animateur. Le système de conférence, par les interactions qu'il favorise, permettra non seulement d'échanger et d'émettre des idées ou des suggestions, mais il rendra aussi plus concret l'acte de communication et le rapport entre le rédacteur et le lecteur.
Une fois le texte terminé, des conférences entre l'animatrice ou l'animateur et la participante ou le participant se tiendront afin d'effectuer le travail de correction en tant que tel. C'est à la toute fin qu'auront lieu des conférences durant lesquelles se fera l'évaluation de l'évolution du processus d'écriture.
Les mini-leçons
Les mini-leçons concernent les règles de fonctionnement général du langage intégré ou encore certaines procédures liées à l'écriture. Dans certains cas, elles peuvent également servir, tout comme la conférence d'édition, à aborder des informations spécifiques aux règles grammaticales et lexicales. Les mini-leçons, sans s'adresser au groupe en entier, viseront plusieurs membres qui ont rencontré les mêmes difficultés. À travers celles-ci, ils cumuleront et organiseront les apprentissages, et ce, à partir de leur expérience personnelle. McCormick (1986) réserve l'apprentissage du code à la conférence d'édition. Elle précise toutefois différents contenus comme l'entrée dans l'écrit (manipulation de la langue, conscience phonologique et segmentale), le démarrage d'un atelier d'écriture, la tenue de conférences et les stratégies et qualités d'une bonne écriture.
L'édition, sous toutes ses formes
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À travers le processus d'édition, qui concerne directement la révision du texte, une solide pratique d'autocorrection est mise en place afin que les participantes et les participants puissent appliquer l'apport notionnel d'une production aux autres qui suivront.
Avec eux, nous développons des outils bien précis et travaillons à ce que ceux-ci se les approprient réellement et les utilisent activement. C'est toute la question d'autonomie qui est présente derrière ce concept. Pour ce faire, nous pensons à des outils concrets et simples, reliés aux codes grammatical, orthographique et lexical, qui leur permettront d'identifier et de corriger certaines de leurs erreurs. Ces outils se bonifient avec le temps puisque les règles sont montrées au fur et à mesure de leurs besoins. Nous avons notamment pris l'habitude de constituer une banque de notions grammaticales fréquentes, appuyées d'éléments directement issus de leurs propres productions. La théorie devient ainsi beaucoup plus accessible. L'idée est de toujours se rappeler de s'en tenir à l'essentiel. Il est totalement inutile de mentionner, par exemple, que tel mot est un adverbe ou encore d'aborder les racines étymologiques avec quelqu'un qui se situe à peine plus loin que «l'écriture au son». Bien sûr, les subtilités de la langue française peuvent toujours s'expliquer, mais... aucune rétention ne s'opère lorsqu'il y a surcharge d'information.
Au-delà du travail final d'édition, comme le langage intégré s'appuie sur le principe que nous écrivons pour être lus (!), les participantes et les participants sont donc mis en situation authentique d'écriture. Ici, l'objectif n'est pas d'écrire, mais bien de trouver une destination et un écho à l'écriture. Le fait de diffuser les écrits donnera lieu à une rétroaction, un «feedback» qui permettra justement à chaque personne d'évaluer si elle a atteint son but d'écriture. La diffusion en langage intégré peut prendre différentes formes, comme celle d'un recueil de textes, d'une affiche publique ou d'un article de journal. Plus largement, les écrits peuvent également prendre la forme de slogans, d'annonces, de messages ou de textes affichés sur un babillard, de roman-photos ou même d'une production théâtrale. Il est essentiel d'intégrer un aspect de diffusion à l'ensemble des démarches d'écriture.
Le texte est une prise de parole,
une prise de pouvoir !
La diffusion, c'est l'étape de reconnaissance de la valeur de ce qui a été exprimé. C'est donner une tribune à celles et à ceux qui n'en ont pas. C'est leur donner une légitimité. C'est une forme d'inclusion. Diffuser l'écrit, c'est «la tape dans le dos» qui leur permettra de se sentir digne d'intérêt et qui favorisera le désir d'aller de l'avant avec d'autres projets d'écriture.
Lors de la «rencontre-échanges», différents éléments ont été relevés comme étant des freins à l'utilisation de l'approche intégrée. D'abord, la structure très définie présentée dans le guide de Boudreau a déjà pu décourager certaines personnes. Son aspect théorique et sa terminologie parfois très technique et plus ou moins près de notre réalité ont certainement contribué à en démotiver d'autres. Malgré cela, certaines personnes ont pris conscience qu'à travers les pratiques d'écriture autonome qu'elles ont développées, plusieurs parallèles pouvaient se faire avec le langage intégré.
Ceci dit, pour certaines personnes, les plus grandes difficultés résident dans les premiers pas puisque le langage intégré comporte plusieurs éléments. Mais qui a dit que tout devait se faire d'un seul coup, du jour au lendemain? Peu importe par quel aspect est abordé le langage intégré, il est important de se questionner sur les préalables qu'il nécessite. Citons un exemple. Une consigne en apparence simple telle que «choisissez un sujet d'écriture» peut s'avérer complexe si une personne ne sait pas exactement ce que «sujet» signifie. Le système de conférence peut aussi être laborieux si la tension est à son comble entre certaines personnes le jour où nous tentons de le mettre en place. Cela risque de ne pas donner les résultats escomptés... Une réflexion sur les conditions nécessaires à l'application est importante pour tous les aspects du langage intégré. Elle nous confortera dans notre animation et nous assurera un bon fonctionnement, en autant que les participantes et les participants comprennent concrètement et systématiquement les objectifs de l'ensemble de la démarche.
Une des difficultés pour certaines et certains d'entre nous est directement liée à la perception ou à la conception que nous avons de l'écrit. Notre rapport personnel à l'écrit teintera en effet souvent notre façon de l'aborder avec les personnes qui participent aux ateliers. Selon notre relation avec la lecture, il se peut que nous explorions l'écrit d'une manière qui ne rejoindra pas autant les participantes et les participants. Comme le dit Desmarais (2003) : «Les gens de milieux populaires lisent pour passer à l'action et leurs pratiques servent, par exemple, à dresser des listes, à écrire des recettes ou encore à lire des revues techniques». Pour les passionnés de grande littérature, l'utilisation d'écrits dits «populaires» pourraient ne pas s'imposer d'emblée. Il en va de même avec l'écriture. Semble-t-il que pour se sentir à l'aise avec une démarche d'écriture ou pour transmettre le goût d'écrire, il faille soi-même être confortable avec ce geste, ce qui peut poser problème pour certaines personnes. Une question importante s'impose alors : «Apprend-on réellement à communiquer par l'écrit si on ne s'en tient qu'à des exercices dirigés?»
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Dans le même ordre d'idée, notre propre culture de lettrés nous amène parfois à fixer des objectifs issus de nos propres paramètres pour les écrits des participantes et des participants. En langage intégré, la place réservée au contenu prend le pas, dans un premier temps, sur le code.
Par contre, il n'est pas automatique pour nous de reconnaître la valeur d'un écrit truffé de fautes d'orthographe. Combien de fois, lors d'une première lecture, ferons-nous remarquer une petite faute ici ou là, un mauvais accord ou l'oubli d'une majuscule? Vous savez, ces évidences... C'est plus fort que nous, comme un réflexe. Ce sont nos critères personnels qui persistent. Sauf que, ce faisant, nous envoyons le message, bien involontairement, que le code compte d'abord et avant tout et qu'un objectif incontournable d'un texte est d'être exempt de faute. C'est un exemple de double message. D'une part, nous disons que c'est le contenu qui prime, et, d'autre part, nous ne pouvons nous empêcher de faire des commentaires qui se rapportent à la forme. Ceci dit, à l'usage, nous constatons que certaines personnes se satisfont pleinement de l'acte d'écrire en se souciant fort peu de corriger leurs erreurs. Pour elles, si le message est clair, le texte est réussi. À travers le langage intégré, elles détiennent le pouvoir sur ce qui est acceptable ou non. Pour d'autres, le travail sur l'orthographe tiendra systématiquement une large place dans la démarche. À nous de nous adapter à la vision de chacun et de travailler dans cette perspective, toujours dans les limites du réalisme.
La peur que suscitent les projets d'écriture chez les participantes et les participants conjuguée à notre propre réserve de leur faire vivre une situation d'échec est un autre obstacle qui a fréquemment été mentionné. Il est évident qu'à prime abord l'écrit est pour eux synonyme d'inconfort. Ils ont en mémoire les séries d'exercices sur le code grammatical et les dictées. L'aventure de l'écrit issue de projets plus personnels ne ressemble en rien à ce qu'ils connaissent. Ils doivent donc se faire confiance là où ils ont jusqu'à présent échoué, ce qui n'est pas une mince affaire. Bon nombre de personnes qui se retrouvent dans les ateliers sont des «championnes de la feuille». Elles exécutent avec aisance toutes les séries d'exercices qui portent sur des notions particulières. Par contre, écrire une simple phrase s'avère quasi impossible. Lors d'exercices dirigés, elles sont en terrain connu et se sentent valorisées. Il est donc important de faire valoir que de tels exercices ne leur apprendront pas «à écrire», car pour apprendre «à écrire», il faut écrire! D'où l'importance de susciter l'intérêt, d'installer graduellement cette autre façon de faire et de les amener à nous faire confiance dans l'inconnu.
L'exploration de l'écriture autonome nous demande évidemment une grande souplesse puisque, avec l'approche intégrée, nous puisons l'apport notionnel à même les productions des participantes et des participants, au contraire de ce qui se passe dans les séries d'exercices planifiés. Ce sont donc les membres du groupe qui nous guident à partir de leur matériel plutôt que l'inverse. Ils deviennent en quelque sorte les maîtres d'œuvre dans la démarche. Ce sont également eux qui établissent les limites lorsqu'ils sont satisfaits du travail accompli. Il arrive en effet régulièrement qu'un texte soit jugé « ben correct de même » par celle ou celui qui l'a rédigé alors qu'il reste encore un travail considérable de correction à effectuer. C'est un moment qui peut être difficile pour nous qui voyons tout ce qui manque. Il n'en tient qu'à nous, cependant, de lâcher prise. Car, au fur et à mesure que l'univers de l'écrit est vécu par les participantes et les participants comme un acte de communication, ils établissent leurs propres critères d'acceptabilité. Une façon de faire qui nous demande de nous adapter à eux, en leur faisant confiance.
Il est évident que l'approche intégrée peut d'une part, nous conduire à nous remettre en question sur notre vision de l'appropriation de la lecture et de l'écriture et qu'elle peut, d'autre part, être également source de stimulation.
Comme le langage intégré peut s'inscrire directement dans le courant de la conscientisation, sa pratique pourrait ultimement se retrouver dans l'ensemble des projets que nous menons. L'idée est de saisir chacune des occasions qui passent pour en faire autant d'occasions d'écriture et de communication. En plus d'être présent dans les ateliers réguliers, l'écrit sera omniprésent dans l'atelier d'informatique, dans le comité X et dans le projet Y et il aura le sens de prise de parole et d'expression de soi. Il y a ici concordance avec ce que nous véhiculons lorsque nous leur rappelons que l'écrit sert à livrer un message, soit leur message.
Le langage intégré s'appuie largement sur la collaboration entre les participantes et les participants. Il s'agit d'une pratique qui peut même donner lieu à un décloisonnement entre les différents groupes d'un organisme. Une personne qui se sent en confiance avec quelqu'un d'un autre niveau peut ainsi faire appel à celui-ci pour du soutien. De même, les gens de tous les groupes peuvent être invités à participer à un projet d'écriture précis si cela les intéresse. Nous pouvons facilement remarquer qu'ils sont solidaires, qu'ils se font confiance entre eux et qu'ils se sentent compétents. Cette approche, centrée sur l'ensemble des participantes et des participants, suscite l'initiative et la créativité et, ultimement, une motivation intrinsèque.
En langage intégré, il est toujours possible de s'en sortir la tête haute. Autrefois objet de sanction, le texte devient une sorte de terrain de jeux. Tout écrit comporte matière à recevoir un encouragement. Contrairement à la feuille d'exercices où il y a une bonne et une mauvaise réponse, le texte nous permet toujours de souligner tout potentiel Une fois l'expérience bien installée, les changements sont graduels. Alors qu'à notre plus grande satisfaction certains membres avouent fièrement retourner à la maison et relire ce qu'ils ont produit, d'autres nous coupent littéralement le souffle en nous disant : «Je sais déjà sur quoi je vais écrire pour mon prochain texte.» Cette projection dans le monde de l'écrit, exprimée avec une lumière dans le regard, est sans contredit un signe que le chemin sur lequel nous sommes ne mène pas à l'impasse.
Une autre image révélatrice concerne les participantes et les participants qui subitement se mettent à écrire en dehors du cadre de l'atelier : correspondance, cartes de remerciement, listes, histoires, poèmes, etc. N'est-ce pas ce que nous visons, une pratique d'écriture autonome en dehors de l'atelier d'alphabétisation, un réel transfert des acquis dans le quotidien? En abordant l'écrit à travers de véritables situations, il est plus simple de l'associer à des projets de société et il devient plus facile de faire de l'alphabétisation populaire.
Lorsque l'accent est mis sur le message,
lorsque l'écrit est présenté comme une
pratique qu'il est possible de s'approprier
à sa façon et lorsque les participantes et
les participants sont invités à prendre la parole,
nous les encourageons à devenir de réels
utilisateurs de la langue.
Comme il a précédemment été mentionné, le langage intégré a laissé plusieurs traces qui se traduisent dans les pratiques actuelles d'écriture autonome et de lecture. La présente boite à outils est donc constituée d'activités qui sont issues de nos groupes ou encore qui ont été inspirées par Meril et Mégrier (2000). Ces activités que nous vous proposons ne sont pas nécessairement associées à un niveau précis puisqu'il existe d'importantes différences entre les organismes.
Pour certaines personnes, l'univers de l'écrit est menaçant et explorer l'espace du témoignage peut être une expérience douloureuse. Susciter l'envie d'écrire ne se fait donc pas toujours aisément. C'est pourquoi nous devons, dans un premier temps, multiplier et varier les occasions où l'écriture sera vue comme un jeu. Elle sera démystifiée et elle apportera reconnaissance.
À travers ces activités, il est essentiel de toujours garder en tête l'esprit du langage intégré, de percer le monde de l'écrit, de lier tout processus d'écriture à la transmission d'un message et d'introduire la notion de plaisir et de satisfaction. Votre animation soulignera sans relâche les efforts non-négligeables qui ont été investis pour parvenir à un résultat. De plus, vous devrez favoriser les interactions du groupe devant les écrits de chaque personne, multiplier les échanges et surtout mettre en valeur leurs productions.
Les activités présentées sont de l'ordre :
[Voir l'image pleine grandeur]
Des catégories vous sont proposées, mais, à l'usage, vous remarquerez que la frontière entre le jeu et la création est souvent ténue. De fait, les activités de diffusion, qu'elles soient à l'intérieur ou à l'extérieur du groupe, comportent généralement un aspect de création incontournable, et la majorité des activités de création peuvent s'inscrire dans un processus de diffusion.
De plus, vous remarquerez que plusieurs de ces activités ne comportent pas de volet «correction». N'oublions pas que nous voulons d'abord faire tomber les résistances face à l'écrit. Nous devons d'abord insister sur le processus de transmission du message et sur son efficacité. Lorsque les participantes et les participants seront plus à l'aise avec l'acte d'écrire, vous pourrez introduire des outils d'autocorrection dans la démarche, ce qui leur permettra de demeurer actifs tout au long du processus.
Objectif
Permettre aux participantes et aux participants de prendre conscience de l'effort fourni lors d'une production.
Déroulement
Conserver systématiquement une copie du travail accompli, et ce, à chaque atelier d'écriture. À la fin de la démarche, consigner les différentes étapes de l'évolution du texte en un seul document.
Commentaires
Ici, les participantes et les participants ont entre les mains non pas un texte final, mais tout le travail qui a été effectué, une preuve de l'effort déployé pour en arriver à leur point de satisfaction. Cela contribue à ancrer le fait qu'écrire n'est pas le fruit d'un jet unique, mais que cela comporte différentes étapes importantes. Une fierté incontestable en découlera et leur donnera le goût de recommencer.
Variation
Il est également utile de consigner chaque produit final pour démontrer, au bout d'un certain temps, l'évolution des écrits de chaque personne.
Objectif
Apprendre à étoffer un texte.
Déroulement
Prendre un texte où se déroule simplement une action. Donner comme consignes aux participantes et aux participants «d'augmenter» chaque phrase en ajoutant notamment des adjectifs. Le texte doit rester cohérent. Comparer les résultats et les différentes avenues qui ont été explorées selon la teinte personnelle de chacun.
Commentaires
Ce travail peut s'effectuer en équipe (une personne plus habile à l'écrit peut être jumelée avec une autre ayant plus de facilité à laisser aller son imagination).
Objectif
Exercer la reconnaissance visuelle des noms et prénoms des membres du groupe. Reconnaître globalement des mots6, créer des automatismes. Reconnaître son nom présenté sous différentes formes en modifiant les polices de caractère, en utilisant des lettres majuscules, des lettres minuscules, l'italique, etc.
Déroulement
Constituer des listes de mots comprenant les prénoms des membres du groupe. Demander à chacun de surligner en fluo son prénom. Procéder au même type d'exercice pour les noms de famille.
Commentaires
Il est bien de faire des listes suivies plutôt qu'en colonne. Ainsi les participantes et les participants s'exercent à balayer du regard de la même façon que lorsqu'ils lisent des phrases ou un texte. Par exemple, un exercice de repérage visuel du prénom Michel pourrait prendre cette forme :
[Voir l'image pleine grandeur]
Variation
Question de se familiariser avec les éléments relatifs à leur identité, il est possible de reprendre le même exercice avec les noms de rues, les noms de ville, etc. De même, il est possible de repérer le nom d'autres membres du groupe ou encore, dans un autre ordre d'idée, de travailler le vocabulaire relatif à différentes situations significatives de vie comme le vocabulaire inhérent aux transactions bancaires, les noms de commerces ou encore des mots usuels comme attention, danger, sortie, fragile, etc.
Objectifs
Effectuer une recherche sur le plan du vocabulaire écrit. Aiguiser le regard sur tous les écrits qui nous entourent.
Déroulement
Imposer une lettre à chaque personne et fournir un petit calepin. Le calepin doit être rapporté avec un certain nombre de mots commençant par cette lettre. La personne doit dire où elle a trouvé ses mots : courrier, endroit public, transport en commun, journal, affiches, etc. Les mots les plus importants sont identifiés. Faire par la suite des exercices de reconnaissance visuelle.
Variation
Explorer une démarche similaire en utilisant des sons vus en atelier.
Objectifs
Arriver à lire et à écrire le nom des personnes significatives. Exercer le repérage visuel.
Déroulement
Demander aux participantes et aux participants de dresser une liste des personnes qui sont importantes pour eux. Les consigner dans une banque spécifique. En faire des exercices de reconnaissance visuelle.
Commentaires
Il y a fort à parier qu'en développant un goût pour les messages écrits, les membres en viendront, à un moment ou à un autre, à s'adresser aux gens qui les entourent. Il serait bien, le cas échéant, qu'ils arrivent à écrire, de mémoire, le nom des personnes concernées ou, à tout le moins, qu'ils sachent où chercher pour trouver eux-mêmes l'information.
Objectifs
Développer des connaissances orthographiques par analogies. Développer un outil d'autocorrection.
Déroulement
Puiser à l'intérieur des textes des participantes et des participants des exemples d'utilisation d'homophones. Les juxtaposer et demander aux gens d'analyser les différences selon le sens. Leur demander également de consigner les résultats afin de pouvoir les consulter à nouveau lors de prochaines productions ainsi que lors du processus d'autocorrection. Les participantes et les participants devront alors s'appuyer sur le sens de la phrase afin de déterminer quel mot ils doivent choisir.
Commentaires
Exemple :
Je me suis cassé une dent. (Stéphane)
Je suis dans le comité journal. (Michel)
On est allé voir un show. (Johanne)
Ma fille et son chum ont organisé un party pour ma fête. (Diane)
Comme ils connaissent les textes de chacun, leurs propres écrits constituent un support familier, simple à lire et surtout significatif.!! est facile de faire référence à «la phrase de Stéphane» ou encore à «celle de Diane». Ce faisant, ils reçoivent le message que leurs écrits sont dignes d'être cités en exemple, un aspect non négligeable.
Variation
Différentes notions grammaticales peuvent être abordées de la même façon.
Objectifs
S'approprier les différentes graphies d'un son. Développer un outil d'autocorrection par analogie.
Déroulement
Sélectionner, avec les participantes et les participants, des mots significatifs et simples à lire pour chacune des graphies d'un son. Sur des cartes de classement, inscrire le son d'un côté et de l'autre, le mot avec le son mis en évidence. Les faire travailler régulièrement en équipe de deux pour s'approprier le vocabulaire associé au son.
Lorsqu'ils sont en situation de révision d'un texte ou de phrases et qu'il y a eu confusion de son, leur faire remarquer que le son de tel mot s'écrit comme dans tel autre mot, tiré de leurs cartons. De cette façon, les membres sont mis sur la piste, trouvent eux-mêmes la réponse et demeurent actifs dans le processus de correction.
Commentaires
Cette étape préalable est importante, notamment pour la recherche dans le dictionnaire. Comment faire pour trouver un mot lorsqu'on ne connaît que la première lettre et qu'on a qu'une très vague idée des différentes façons d'écrire un son?
Variations
Pour les participantes et les participants plus à l'aise avec le code orthographique, les cartons peuvent être remplacés par un tableau qu'ils peuvent en tout temps consulter et sur lequel sont notés les différentes graphies et leurs exemples. Ce même tableau peut être reproduit sur de grands cartons affichés dans le local.
Objectifs
Développer des pratiques d'écriture qui favorisent le transfert dans le quotidien. Présenter une autre façon que les séries d'exercices qui s'enchaînent pour s'approprier la langue écrite.
Déroulement
Demander aux participantes et aux participants d'écrire, à la maison, une à trois phrases sur un sujet de leur choix. Les membres sont encouragés à utiliser des structures simples. Les phrases sont corrigées en groupe à chaque atelier : notions grammaticales, vocabulaire, etc.
Commentaires
Comme le contenu des différents ateliers porte essentiellement sur ce que les membres ont écrit, au bout d'un certain temps, il y a un effet d'entraînement pour ceux qui sont plus réfractaires avec l'idée d'écrire dans un cadre non dirigé. Les thèmes d'écriture, portant régulièrement sur eux-mêmes, mèneront à des discussions très intéressantes et ouvriront clairement la porte à la conscientisation. Parfois, ils utiliseront même cette activité pour se passer des messages entre eux.
Objectifs
Améliorer la vitesse et la reconnaissance des mots. Lire un texte avec fluidité.
Déroulement
Tout au long du processus de production d'un texte, demander aux participantes et aux participants de faire la lecture de leurs textes systématiquement. Comme le processus peut s'étaler sur plusieurs ateliers, les gens prendront confiance, feront une lecture beaucoup plus efficace et, du coup, plus satisfaisante.
Commentaires
Pour tout exercice de compréhension portant sur un texte donné ou sur un travail notionnel, il est préférable que le texte ait été lu à quelques reprises au préalable afin que l'énergie des membres ne soit pas mobilisée uniquement vers le décodage. Ils seront ainsi plus disponibles pour la compréhension.
Variation
La première lecture et une lecture en fin de démarche peuvent être enregistrées. De cette façon, tous et chacun pourront clairement se rendre compte de la différence.
Objectifs
Amener les participantes et les participants à prendre conscience qu'ils peuvent utiliser l'écrit pour livrer leurs idées.
Les aider à développer un sentiment de confiance face à leur propre capacité d'écrire. Lutter contre le «syndrome de la page blanche».
Déroulement
Demander à chaque personne de choisir un sujet et d'en parler. Si quelqu'un ne sait pas comment aborder la question, des sous-questions peuvent être posées pour faire émerger des idées. Ce que la personne dit est noté textuellement. Lorsque des idées sont émises et clarifiées, les phrases, un peu comme en dictée, sont redonnées à la personne, qui, à son tour, les transcrit.
Commentaires
C'est une façon de faire qui a pour effet de rassurer les participantes et les participants, même de nature volubile, qui ont l'habitude de figer, la main crispée sur le crayon et la panique dans le regard, c'est-à-dire ceux qui ne sont pas capables d'écrire. En fait, toute leur énergie est tellement mobilisée par le code et la structure qu'ils en viennent à perdre complètement le fil de leurs idées. Comme nous volons créer un automatisme du geste d'écriture, il est essentiel de faire valoir que l'orthographe n'est pas importante à ce stade. À l'incontournable question : «Oui mais, comment ça s'écrit?», répondez simplement : «Écris-le comme tu le penses!» ou répétez lentement le mot, syllabe par syllabe, en les invitant à écrire ce qu'ils ont entendu.
Variations
Pour les participantes et les participants les plus aventureux, l'enregistreuse peut être utilisée pour les aider d'abord à structurer leurs idées et ensuite à mettre sur papier ce qu'ils ont dit. Cette façon de procéder les rendra encore plus autonomes.
Comme variation, il est également possible de procéder à l'écriture collective des textes de chaque personne.
Objectifs
Constituer une banque de mots outils qui servira de base à l'autocorrection. Développer l'autonomie.
Déroulement
À partir des textes des participantes et des participants, sélectionner une série de mots qui reviennent couramment dans tous les écrits. Les consigner sur un tableau, appelé le dépanneur, qu'ils consultent par eux-mêmes lorsqu'ils sont en processus de correction de leur texte. La personne qui anime l'atelier surligne les mots qui sont mal orthographiés, et le code de couleur utilisé leur dicte dans quel dépanneur trouver la réponse.
Commentaires
Une série de mots revient systématiquement et fréquemment dans les écrits des participantes et des participants (exemple : plus, dans, beaucoup). Ce n'est cependant pas parce que ces mots sont souvent utilisés qu'ils sont des automatismes. Pour leur faire gagner du temps et pour qu'ils trouvent la réponse plus facilement, nous les dirigeons vers cette liste plutôt que de les faire chercher dans le dictionnaire à chaque fois. Un sentiment de compétence est automatiquement associé à leur recherche, qui se conclut généralement par une réussite.
Variations
Nous pouvons également constituer un dépanneur de verbes, dans lequel sont consignés les verbes qui reviennent régulièrement dans leurs écrits. Dans le même ordre d'idées, il est possible de consigner le vocabulaire de certains sujets personnels d'écriture qui, souvent, se recoupent.
Objectif
Offrir un canevas de travail pour l'élaboration d'un portrait.
Déroulement
Sélectionner différents portraits de participantes et de participants sur le site Alphamonde du Tour de lire : www.alphamonde.ca.
Commentaires
En disposant de matériel de base ou de départ, nous venons en aide aux participantes et aux participants qui ne savent pas par où commencer pour écrire leur texte. Libre à chaque personne ensuite d'imaginer d'autres pistes.
Variation
À la suite de la démarche d'autoportrait, il est possible de proposer aux participantes et aux participants de faire le portrait d'une personne de leur entourage. Cela donne généralement lieu à de beaux témoignages qui, dans une logique de diffusion, peuvent être offerts aux personnes concernées.
Objectif
Permettre aux participantes et aux participants plus inquiets de tenter, sous forme de jeu, l'expérience de l'écriture autonome.
Déroulement
Écrire une question ouverte ou fermée.
La personne qui participe à l'atelier doit inscrire sa réponse en dessous de la question. (S'assurer que la question a bien été comprise.) Selon son aisance, elle peut répondre et ajouter une question. Vous y répondez ou encore la relancez d'une autre question. Dans cette démarche, aucune attention n'est portée au code orthographique. Le but est essentiellement centré sur le message.
Commentaires
Si la personne arrive difficilement à écrire sa réponse, il est possible de lui demander de la verbaliser auparavant. Si elle est à un stade débutant, nous lui demandons de nous lire sa réponse. Nous évitons ainsi de nous buter au décodage. Cet exercice est valorisant pour les participantes et les participants car ils se rendent compte qu'ils se sont fait comprendre, donc qu'ils ont réussi à communiquer.
Variations
Plutôt que de formuler une question, nous pouvons utiliser des consignes, du genre : «Va chercher la brosse à effacer rangée dans l'armoire des dictionnaires.» Cette façon de faire, fort ludique, force les participantes et les participants à s'attarder au sens de la lecture puisqu'elle est constituée de consignes qui commandent une action. Nous pouvons également demander à des personnes plus à l'aise de formuler elles-mêmes les consignes. Ces actes d'écriture, qui provoqueront différentes actions, sont d'excellentes façons de démontrer que nous sommes capables de communiquer par écrit.
Objectif
Produire de courts textes poétiques.
Déroulement
Présenter différents haïkus et en extraire le sens. Selon le niveau du groupe, cela peut se travailler sur support écrit ou à l'oral.
Commentaires
Composer des haïkus de façon collective pour ensuite y aller individuellement lorsque les participantes et les participants sont plus à l'aise.
Consigner dans un recueil officiel les productions des membres du groupe. Ce recueil pourrait par la suite servir pour aborder différentes notions.
Le haïku est une forme classique de poésie japonaise évoquant généralement un fait en lien avec la nature. Les poèmes, en trois lignes et comportant environ une quinzaine de syllabes, sont toujours empreints de légèreté.
Un bruit de sandale
Fait résonner le silence,
Fin de nuit d'été! Bashô
Plusieurs sites Internet sur les haïkus existent et pourront servir de source pour s'alimenter. Les haïkus sont très utiles pour aborder la conscience phonologique7 pour les débutants.
Variations
Pour les personnes plus à l'aise à l'écrit, donner la contrainte des haïkus : cinq syllabes pour la première phrase, sept syllabes pour la seconde et cinq syllabes pour la troisième. Des poèmes avec rimes peuvent également être utilisés pour travailler sur les sons.
Objectifs
Explorer l'univers de l'écriture poétique. Aborder les différents sens d'un écrit. Travailler sur les sons à travers les rimes.
Déroulement
Introduire la première phrase d'un poème.
Demander aux participantes et aux participants de poursuivre le poème avec une, deux, trois phrases ou plus, selon le niveau.
Revenir sur les différentes avenues qui ont été exploitées par les membres.
Commentaires
Voici quelques exemples qui peuvent être utilisés :
Le crépuscule est doux comme un de tes sourires [...] (J. Narrache)
Ah! Comme la neige a neigé [...] (E. Nelligan)
Pour supporter le difficile, et l'inutile [...] (F. Leclerc)
Il y a certainement quelqu'un [...] (A. Hébert)
Mais donne la main à toutes les rencontres [...] (G. Miron)
Variations
Explorer une démarche similaire en utilisant des chansons. Présenter le texte initial afin de voir quels thèmes ont été exploités.
Objectifs
Explorer les différentes avenues que peut prendre un texte. Développer la créativité.
Déroulement
Distribuer un texte qui a été coupé de moitié, mais à la verticale. Seul le début des phrases apparaît sur la feuille.
Donner comme consigne de compléter ce qui manque, de terminer les phrases.
Comparer les différents scénarios qui ont été développés par les participantes et les participants.
Comparer avec le texte initial.
Commentaires
Ce genre d'exercice, lorsqu'il n'a jamais été expérimenté, doit s'appuyer sur un très court texte. Le retour en groupe se fait ensuite à l'oral. Les participantes et les participants lisent ce qu'ils ont inventé. Il n'y a pas de travail de correction orthographique en tant que tel.
Variation
Le groupe est divisé en deux, comme précédemment. Un texte est coupé en deux parties, verticalement : la partie A où n'apparaît que le début des phrases et la partie B, qui ne contient que la fin des phrases. La moitié du groupe doit composer la partie A et l'autre moitié, la partie B. Les résultats sont par la suite comparés.
Objectif
Explorer les différentes avenues que peut prendre un texte à structure répétitive.
Déroulement
Compléter la phrase suivante : Par ma fenêtre, je vois... Comparer les réponses de chaque personne.
Commentaires
Cet exercice est intéressant dans la mesure où les participantes et les participants posent un regard sur le monde qui les entoure. De très riches discussions, notamment sur le contexte social, peuvent en découler.
Objectif
Produire un recueil de proverbes à partir de structures répétitives.
Déroulement
Proposer un début de phrase que les participantes et les participants complèteront, soit individuellement, soit collectivement.
Exemple :
La musique, c'est comme...
L'avenir, c'est comme...
Une porte qui s'ouvre, c'est comme...
Un sourire, c'est comme...
Commentaires
La structure répétitive facilite le repérage pour les personnes les moins à l'aise avec la lecture. Les mots qui reviennent sont des points de repère importants pour elles.
Objectif
Observer ce qui caractérise les différents styles.
Déroulement
Écrire à partir d'une photo. Donner des consignes différentes à chacun : style descriptif, style informatif, style «liste», style imaginaire, style interrogatif, style accusateur, etc.
Commentaires
Un exercice à partir d'une photo prise lors d'une sortie de groupe pourrait donner un résultat semblable au suivant :
Pour vous inspirer, vous pouvez consulter Queneau qui, dans son livre Exercices de style, reprend 99 fois une même anecdote. L'histoire reste la même, un court texte dont seul le style change à chaque page. Très intéressant et surtout pas ennuyant!
Objectifs :
Stimuler la créativité.
Travailler sur la structure de la correspondance.
Déroulement
Individuellement, les participantes et les participants doivent noter le nom de deux personnages ou personnalités qu'ils affectionnent particulièrement. Ils doivent imaginer ce que l'un des deux écrirait à l'autre, et ensuite la réponse que celui-ci lui ferait...
Commentaires
Nous demandons ici aux participantes et aux participants qu'ils imaginent une situation bien précise sur laquelle leurs personnalités vont échanger.
Variation
Les participantes et les participants peuvent travailler deux par deux, chacun jouant le rôle d'une des deux personnalités.
Objectif
Stimuler la créativité.
Déroulement
Demander à chaque personne de choisir un objet inanimé dans son environnement, par exemple un sac à dos, qu'elle devra par la suite faire parler.
Variations
Pour les participantes et les participants plus à l'aise avec l'écrit et l'imaginaire, nous pouvons demander que le texte soit un dialogue entre deux objets ou encore entre l'objet et son propriétaire. Quant aux personnes moins à l'aise avec l'écrit, nous leur demandons de faire la liste du contenu du sac à dos d'une personne du groupe ou d'une personnalité connue.
Objectif
Stimuler la créativité.
Déroulement
Demander aux participantes et aux participants de noter sur un bout de papier le nom d'un objet usuel. Les papiers sont placés au centre de la table et une pige est faite. Ce qui est inscrit sur le papier devient le sujet du prochain texte à rédiger. Exemple : s'il n'y avait plus de «ponts» autour de Montréal, s'il n'y avait plus de trottoirs en ville, s'il n'y avait plus de livres ou d'ordinateurs, etc.
Variation
Ouvrir le jeu à tout sujet improbable plutôt que de ne cibler qu'un objet (exemple : s'il n'y avait plus de politiciens ou s'il n'y avait plus de neige).
Objectifs
Établir différentes sortes d'inventaire. Apprendre à se connaître.
Déroulement
Proposer différents sujets qui donneront lieu à des listes ou à des séries et en choisir un. Individuellement, les participantes et les participants font leur liste sans le soutien de la personne qui anime l'atelier. Chaque personne écrit sa liste comme elle le pense. Demander aux participantes et aux participants de relire ce qu'ils ont noté.
Commentaires
Il peut s'agir d'une situation concrète (pour venir à l'atelier, j'ai besoin de...), d'un contexte plus abstrait (ce que j'aime, ce qui me fâche, ce qui me fait rire, ce dont j'ai peur) ou bien de sujets loufoques. Moins menaçant qu'un texte en tant que tel, ce genre d'exercice peut être une amorce à l'écriture autonome.
Variations
Cet exercice peut servir de base pour l'écriture d'un autoportrait.
Objectifs
Démontrer l'aspect communicatif de l'écrit. Bâtir un esprit d'équipe au sein d'un groupe.
Déroulement
Cibler une personne qui, en formulant des indices écrits, doit faire deviner aux autres membres du groupe où elle habite. Ses indices sont donnés un à un. Les autres membres du groupe doivent émettre des hypothèses ou poser des questions tant qu'ils n'ont pas trouvé. L'échange se fait par Internet, en utilisant un logiciel de messagerie instantané tel MSN ou en utilisant Word via des «mémos» qui ont été imprimés.
Commentaires
Les souvenirs reliés aux différents sites évoqués font parler de soi et de sa vie : «Ah! oui cet hôpital c'est là que je suis allé quand...» Il est intéressant de voir les stratégies employées pour déjouer les autres. La coopération dans le groupe est nécessaire pour débusquer les membres.
Nous avons besoin des forces de chacun. Le mystère prend vite le pas sur le code, qui n'est pas respecté. Nous pouvons aussi aborder l'orientation et utiliser une carte géographique, identifier le nom des rues et des lieux et parler des quartiers. Bien qu'un outil comme MSN soit un outil excitant et valorisant avec son aspect «instantané», l'interface surchargée, en plus de nuire aux personnes moins à l'aise avec la lecture, peut s'avérer déroutante. Voici un extrait d'un exercice fait avec un groupe de niveau débutant en s'appuyant sur une carte du quartier :
Ge rste prch complexe desjardins
Ctu lemétro st loran?
Non
Ctu lemétro Mi gil?
Prch kre sain loui é la cit
C koa le non de lopitale?
Hotel dieu
L'excitation de débusquer le participant était si vive que la communication a rapidement pris le pas sur le code et que les difficultés orthographiques sont devenues bien secondaires.
Variation
Le jeu se joue plus difficilement avec plus de quatre personnes. Il est alors possible de concevoir un jeu où une équipe détermine un lieu signifiant devant être trouvé par une autre équipe.
Objectifs
Noter des idées par écrit.
Synthétiser l'information en phrases simples.
Déroulement
Une personne doit noter une vérité et trois mensonges sur un bout de papier. Elle les lit et le reste du groupe doit deviner, à l'aide de questions, quelle est la vérité. Les personnes les moins sûres d'elles sont à nouveau invitées à écrire comme elles le pensent.
Commentaires
Comme ce qui a été noté sur la feuille ne fait pas l'objet de correction, ce qui est nécessairement renforcé est qu'il est possible d'écrire, et, par conséquent, de communiquer efficacement, même s'il y a des fautes. Ce type d'exercice contribue à éliminer les résistances et encourage les participantes et les participants à explorer l'écrit.
Objectif
Créer un espace de diffusion pour les écrits des participantes et des participants.
Déroulement
Mettre en place un événement où seront lues les créations des participantes et des participants. S'assurer en premier lieu de l'assentiment de chacun. Demander ensuite aux participantes et aux participants qui ont envie de lire des textes de lire les leurs puis de lire ceux de celles ou de ceux qui sont trop réservés pour lire en public. Pratiquer l'exercice pour que chacun puisse arriver à une lecture efficace (bon ton, bon débit, bonne fluidité, etc.) afin que les textes ou écrits soient réellement mis en valeur.
Commentaires
Cette expérience est très valorisante parce qu'elle est entendue par un public. Cela peut se passer à l'extérieur du groupe d'alphabétisation ou encore lors d'un événement porte ouverte. Une activité semblable donnera certainement le goût aux participantes et aux participants de se lancer à nouveau dans l'univers de l'écrit.
Variation
Il peut être intéressant que l'animatrice ou l'animateur ou encore que quelqu'un de l'extérieur du groupe, comme une personnalité ou un comédien, fasse la lecture des textes. Ces derniers peuvent même être lus avec une certaine mise en scène (avec fond musical ou appuyés par des images) ce qui crée, du coup, un espace et un certain climat et qui confère un aspect vaguement théâtralisé, loin d'être inintéressant. Les participantes et les participants doivent cependant demeurer impliqués dans la démarche afin qu'ils soient à l'aise avec le processus et le résultat.
Objectif
Mettre en évidence les textes des participantes et des participants.
Déroulement
Illustrer son propre texte à l'aide de photos, d'images, de dessins ou de collage. Réunir en un seul document l'ensemble des productions écrites et visuelles. Procéder à un lancement officiel où parents et amis seront invités.
Variation
On peut demander à un artiste de procéder à une mosaïque visuelle inspirée par les différentes productions écrites.
Objectifs
Produire une pièce de théâtre.
Utiliser les forces de chaque membre du groupe.
Déroulement
Choisir un thème. Déterminer des personnages. Inventer une histoire. Écrire les textes ou dialogues. Distribuer les rôles. Pratiquer. Présenter le projet au public.
Commentaires
Ce type de projet s'appuie largement sur le groupe. Nous devons tenir compte du facteur d'absentéisme qui pourrait, à la longue, devenir un élément de frustration.
Variation
La démarche peut donner lieu à un roman-photo plutôt qu'à une production théâtrale.
Objectif
Participer à la conception de matériel de diffusion.
Déroulement
Impliquer les participantes et les participants dans la démarche de création de matériel destiné à promouvoir l'organisme. En collaboration avec les membres du groupe, clarifier le principe du dépliant, définir l'angle de traitement, déterminer ce qui est important d'y retrouver, sélectionner le matériel pertinent, écrire le message, organiser l'information, créer un modèle et le valider.
Commentaires
Ce type de projet, de longue haleine, demande beaucoup d'implication de la part des participantes et des participants. S'il s'étale sur une trop longue période, un essoufflement se fera peut-être sentir. Ceci dit, de par sa nature «officielle», c'est un projet qui est source d'une très grande fierté pour toutes et tous.
Variations
Plutôt que d'être impliqués tout au long du processus, les participantes et les participants peuvent former un comité consultatif qui effectuera un travail de validation à différentes étapes. Le projet peut aussi en être un de conception d'une affiche annonçant les activités du groupe ou d'une invitation à des activités ouvertes à toutes et à tous (un 5 à 7, des portes ouvertes ou autres).
Objectifs
Utiliser l'exposition pour valoriser le travail des participantes et des participants. Promouvoir la culture populaire.
Déroulement
Demander aux participantes et aux participants de photographier tout élément de leur quotidien. Procéder à l'écriture de textes de différentes natures qui relatent ce que les photos représentent pour eux.
Demander à chacun de dactylographier son texte et procéder ensuite à une mise en page uniforme de tous les textes. Procéder à l'encadrement des photos. Déterminer un scénario d'exposition.
Organiser un vernissage où parents, amis et groupes du quartier seront conviés. Préparer collectivement un discours qui sera prononcé par un des membres du groupe.
Commentaires
Ce type d'exercice où les participantes et les participants sont conscients qu'ils seront lus et vus par le public en général est sans contredit source de stimulation et de fierté.
Variations
Le projet d'exposition peut porter sur un thème précis choisi par les membres du groupe eux-mêmes. Cela peut être le fruit d'une démarche de recherches historiques ou encore d'une exploration du monde de la création. La possibilité de s'associer avec un musée ou une galerie d'art peut permettre une présentation qui aura une facture professionnelle.
En abordant la lecture et l'écriture en tant qu'actes de communication, nous plaçons les participantes et les participants en situation de quête ou de production de sens. Cette rencontre avec l'écrit confère subitement aux apprentissage un aspect «digne d'intérêt». Le langage intégré situe les personnes au centre de leurs apprentissages, et elles en deviennent le moteur. Ainsi, l'acte d'écrire suscite l'accroissement de la confiance en soi et en son potentiel. C'est la communication dans sa globalité qui s'améliore.
Les témoignages d'autrui ou les nôtres peuvent évidemment faire remonter à la surface un passé lourd de blessures. C'est Heril et Megrier (2000) qui nous font remarquer que le mot CRI se retrouve dans «écrire». Même si nos ateliers n'ont pas un but thérapeutique, nous devons être conscients et tenir compte de ce que le processus d'écriture peut faire émerger. Les deux auteurs nous font également remarquer que RIRE se retrouve dans «écrire». À nous donc de dédramatiser l'écrit en guidant les participantes et les participants et en leur faisant expérimenter l'aspect ludique de l'écriture.
En bout de ligne, nous voulons les amener à oser. Oser là où ils ont frappé un mur. Comme tous traînent un passé scolaire qui les a stigmatisés, nous devons leur apprendre à « oser l'écrit ». Pour eux, c'est un pari, un sérieux défi à relever. Le but n'est pas de savoir lire pour savoir lire, mais plutôt d'utiliser ce savoir-faire, de se faire confiance. L'objectif n'est pas ultimement «d'apprendre à écrire», mais bien d'écrire. Notre rôle est de leur démontrer que l'écriture n'est pas réservée à une élite. Ils y ont droit, malgré leur inexpérience et leurs maladresses. Ceci dit, nous devons y croire... et nous devons leur faire confiance... Nous voulons que ce qui est vécu en atelier laisse une trace indélébile dans leur quotidien. Si le plaisir ou la satisfaction accompagne le processus, chaque personne pourra pousser plus loin en explorant, en échangeant et en changeant !
Dans le processus du langage intégré, le groupe joue un rôle essentiel : il soutient, il alimente et il stimule. Il s'agit d'une approche participative où toutes et tous doivent entendre et se faire entendre. La démarche sert de lieu de partage et de rencontres. Elle permet de percevoir autrement que par l'oral, qui va si vite et qui est parfois si vague. La lecture et l'écriture sont inter reliées et engagent toute la personne. Elles impliquent tout autant la personne qui lit que celle qui écrit le texte et constituent un processus participatif, même sur le plan de la lecture, puisque le texte est abordé avec une intention.
En s'appuyant largement sur les écrits de participantes et des participants, nous tenons compte de leur culture. Ils ont un bagage auquel nous devons faire place. Nous accueillons et donnons une valeur à leurs préoccupations, à leur réalité et à leur façon d'apprivoiser l'existence. Nous leur laissons un espace pour s'exprimer dans un climat d'écoute et de respect tout en intégrant une dimension «critique». Cette prise de parole, cette affirmation de soi est, de par sa nature, une prise de pouvoir. N'est-ce pas là incontestablement un des objectifs que nous poursuivons? Le parallèle à faire entre l'approche intégrée et l'alphabétisation populaire est incontournable. Donnons-leur le pouvoir, laissons-les nous guider !
BOUDREAU, Guy. Le langage intégré, Un visa pour l'alpha pop, Montréal, RGPAQ, 1992,71 p.
CAOUETTE, Charles E. Éduquer pour la vie, Montréal, les Éditions Écosociété, 1997,180 p.
DE KEIZER, Danielle. Apprendre à lire et à écrire à l'âge adulte, guide méthodologique et pratique, Paris, Retz, 1999,175 p.
DESMARAIS, Danielle, Louise AUDET, Suzanne DANEAU, Martine DUPONT et Françoise LEFEBVRE. L'alphabétisation en question, Outremont, Les Éditions Québécor, 2003,264 p.
GIASSON, Jocelyne. La compréhension en lecture, Montréal, Gaetan Morin éditeur, 1990,255 p.
GILLARDIN, Bernard. Apprentissage de la lecture et de l'écriture pour les adultes en difficulté, livre du formateur, Paris, Retz, 1996,159 p.
GIRARD, Nicole. Le modèle scripteur, Le Monde alphabétique, n° 1, printemps 1991, p.3-5.
GOODMAN, Ken. Le pourquoi et le comment du langage intégré, Choix et défis, Toronto, Scholastic, 1989,80 p.
HERIL, Alain et Dominique MEGRIER. Ateliers d'écriture pour la formation d'adultes, Paris, Retz, 2000, 127 p.
MCCORMICK, Calkins. The Art of Teaching Writing, Heinemann, Portsmouth NH, 1986,358 p.
NORTON, Mary et Joyce WHITE. Whole Language : A Frame Work for Thinking About Literacy Work With Adults, Ottawa, National Literacy Secretariat, 1991,22 p.
Et question de vous inspirer ou de vous évader un peu...
PENNAC, Daniel. Comme un roman, Paris, Gallimard, 1992.177 p. QUENEAU, Raymond. Exercices de style, Paris, Folio plus, 1947,160 p. SAPPHIRE. Push, Éditions de l'Olivier; Points, 1997,200 p.
Quelques sites utiles :
Le Tour de lire : www.alphamonde.ca
Le manuel de tutorat du Collège Frontière : http://www.frontiercollege.ca/french/publicf/pressf/tuhandf.htm
Un merci tout particulier aux personnes qui ont participé à la «rencontre-échanges» :
Jeanne Francke, du RGPAQ, Danielle Arcand, Nathalie Germain et Denis Plante, du CÉDA, Jo-Ann Simpson et Mariloup G. Malboeuf, du Vent dans les lettres, Lise Leduc, du Groupe Alpha Laval et Élise De Coster, du Carrefour d'éducation populaire de Pointe-Saint-Charles.
Merci à Gilles Landry, de Lettres en main, et à George Salamandre, de l'Atelier des lettres, pour leur apport.
Merci également au Comité de développement des pratiques : Thérèse Clarke, du Centre d'activités populaires et éducatives (CAPE) et Élise De Coster, Catherine Migneault, d'Aide pédagogique aux adultes et aux jeunes (APAJ), Stéphanie Valiquette, d'ABC des Manoirs ainsi que Jeanne Francke et Ginette Richard, du RGPAQ.
Un merci tout particulier à toutes les personnes qui ont participé à nos groupes et qui nous laissent les accompagner dans l'univers des mots.
Recherche et rédaction
Martine Fillion
Photos
Martine Fillion
Révision
Marie-Andrée Bédard
Infographie
Éric Villeneuve
Illustration
Cristine Berthiaume
Éditeur
Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec (RGPAQ)
2120, rue Sherbrooke Est, bureau 302
Montréal (Québec) H2K 1C3
Téléphone : 514 523-7762
Télécopieur : 514 523-7741
Courriel : mailto :alpha@rgpaq.qc.ca
Site Internet : www.rgpaq.qc.ca
La présente publication a été produite avec l'appui du Secrétariat national à l'alphabétisation et de Ressources humaines et Développement social Canada.