C'est en 1990 que le Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec (RGPAQ) décidait, après consultation de ses membres, de produire un document qui favoriserait la formation et l'intégration des nouvelles animatrices et des nouveaux animateurs en alphabétisation.
La tâche n'était pas facile: se joindre à un groupe populaire d'alphabétisation, cela veut dire assimiler beaucoup de choses en très peu de temps. Comme il n'existe pas de cheminement modèle menant à l'alphabétisation populaire, les nouvelles personnes qui joignent les groupes d'alphabétisation doivent donc composer avec beaucoup d'éléments nouveaux. Certes, elles peuvent toujours miser sur leurs expériences antérieures et, en comptant sur l'aide des autres personnes du groupe, réussir à se débrouiller. Mais pourquoi ne pas élaborer pour elles un outil qui leur offrirait, en un seul document, un panorama assez complet, qui ferait le tour de ce qu'est le travail en alphabétisation, qui présenterait son environnement, ses partenaires? Voilà qui faciliterait grandement la tâche qui incombe aux nouvelles personnes des groupes et au groupe lui-même, qui a la responsabilité d'assurer leur intégration. C'est ainsi que le RGPAQ s'est lancé dans ce projet qui a demandé une longue gestation... En effet, par où commencer? À quelles questions répondre en priorité? C'est à partir de là que les membres du comité de pédagogie se sont mis à réfléchir et que le projet a pris forme...
«Il faut parler de l'«angoisse du premier atelier»; il faut donner des outils «pour en savoir plus»; «il faut expliquer tous ces sigles incompréhensibles qui nous entourent»; «il faut parler des approches!»... «Et le RGPAQ il faut le présenter, montrer quel est son rôle... Et le CDEACF... et les ressources sur lesquelles on peut compter...»; «il faudrait que ce soit un outil dynamique, qu'on puisse le lire par petits bouts parce que quand on commence en alpha, on a tant de choses à lire...»; «il faudrait aussi qu'on puisse mettre le document à jour au fur et à mesure que les changements surviennent...»
Et puis, au fil des discussions, le concept s'est élargi: pourquoi ne pas viser également les membres des conseils d'administration, les bénévoles, bref, toutes les personnes qui commencent à s'impliquer dans un groupe d'alphabétisation populaire et même celles qui s'y intéressent? Ne restait plus qu'à produire les textes!
Plusieurs personnes ont travaillé à ces textes: Jean-François Aubin, Marie-Hélène Deshaies, Martine Dupont, Anne-Marie Gervais, Berthe Lacharité, Richard Latendresse, Françoise Lefebvre, Colette Paquet, Liliane Rajaonina, Ginette Richard, Micheline Seguin. Plusieurs personnes ont lu et relu le document à différentes étapes de la production, pour s'assurer de la pertinence de son contenu, de sa clarté, etc. Il s'agit des membres du comité de lecture, des membres du comité de pédagogie, des membres du comité de coordination du RGPAQ et des membres de l'équipe de travail. Nous tenons à remercier chaleureusement toutes ces personnes et particulièrement Marie-Hélène Deshaies et Liliane Rajaonina qui ont su prendre le projet en cours de route et le mener à terme.
Il s'agit en quelque sorte d'une introduction au pays de l'alphabétisation populaire, d'une sorte d'initiation au RGPAQ et au réseau alternatif d'alphabétisation du Québec.
Il s'adresse aux personnes qui ont joint les rangs de l'alphabétisation populaire ou qui prévoient de le faire, et aussi à toutes celles qui s'y intéressent; c'est un document destiné à tous ceux et celles pour qui l'analphabétisme représente un défi de taille et qui cherchent une alternative à l'approche scolarisante. Nous l'avons élaboré en gardant à l'esprit vos besoins en tant que nouvelles et nouveaux venus, en nous rappelant les difficultés de nos propres débuts. Cet outil vous évitera d'avoir à chercher dans de nombreux livres, et pour celles et ceux qui commencent à travailler dans un groupe, de questionner à tout moment vos nouvelles collègues de travail ou d'apprendre sur le tas à vos dépens. Sans être exhaustif, ce document contient néanmoins la base de ce qu'il faut savoir. Il traite, entre autres, de prévention, de sensibilisation, de conscientisation, de l'organisation et de la gestion d'un groupe. Il présente une courte analyse de l'analphabétisme et raconte l'origine de l'alphabétisation. Il présente brièvement les groupes d'alphabétisation membres du RGPAQ. Il relate l'histoire du RGPAQ et brosse un tableau des différents volets de l'alphabétisation populaire. Enfin, il présente quelques témoignages de participantes et de participants.
Il y aurait tellement plus à dire... Nous ne pouvions le faire en si peu de pages, et nous avons dû faire des choix. Cependant, parmi les guides pratiques qui figurent en fin de volume, nous vous suggérons quelques pistes pour approfondir les aspects qui vous intéressent: les publications du RGPAQ et les ressources existantes en alphabétisation. De plus, ce document a été conçu de façon à ce que vous puissiez ajouter d'autres informations plus spécifiques que vous jugerez nécessaires.
Ce document est une production du RGPAQ, dont un des principaux mandats consiste à soutenir le développement des groupes populaires en alphabétisation. Vous pouvez à tout moment vous adresser au bureau du RGPAQ; l'équipe en place chargée de réaliser les mandats qui lui sont confiés par l'assemblée générale et le comité de coordination, pourra répondre également à vos demandes.
Nous espérons que ce guide facilitera votre arrivée en alphabétisation ou qu'il vous rafraîchira la mémoire à l'occasion. Il ne remplacera pas l'expérience acquise au fil des ans par chacun des groupes, mais nous pensons qu'il pourra, lui aussi, contribuer au développement de l'alphabétisation populaire.
Nicole Lachapelle
Coordonnatrice RGPAQ
«
Nous, les petits de la planète
Je viens aux ateliers d'alphabétisation pour échanger avec les autres de toutes sortes de sujets intéressants. J'ai appris à compter sur les calculatrices, à moins faire de fautes en écrivant. On fait connaissance avec des personnes formidables qu'on connaissait mais que de vue. Là, on les connaît avec leur vécu qui n'est pas toujours facile. Des expériences de vie qui nous font apprécier les gens à leur juste valeur. On se fait des amies, on s'amuse, on apprend plein de choses.(...)
Notre professeur est formidable, très patiente, très bonne pour expliquer. C'est très bon! Ça nous aide beaucoup à se débrouiller dans les formules à remplir, à faire des chèques, à tenir une comptabilité. Je me demande bien pourquoi ça n'a pas été fait avant. Ces ateliers-là, c'est Indispensable dans une paroisse. J'espère que ça va continuer très, très longtemps. Dégourdissez-vous, les «grands du Gouvernement», on a besoin de ça. Ça nous aide à vivre. Ne nous lâchez pas... C'est primordial pour nous, les «petits de la planète».»
Rose Ouellet
Centre Alpha des Basques
«Mon Journal». Le journal des participants et participantes des groupes d'alphabétisation du RGPAQ, no 3, hiver 1995, p.3.
Combien y a-t-il de personnes analphabètes au Québec? Pourquoi est-on analphabète? Quelles sont les causes de l'analphabétisme? Qui sont les personnes analphabètes, et que signifie être analphabète? Les mesures prises actuellement pour remédier à l'analphabétisme sont-elles suffisantes?
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Une situation à laquelle il est difficile de croire, mais pourtant bien réelle
Les données les plus récentes proviennent d'une enquête de Statistique Canada réalisée en 19891, qui a déterminé des niveaux d'analphabétisme en fonction de l'aptitude à la lecture, à l'écriture et au calcul dans des activités courantes de la vie quotidienne.
Cette enquête révèle que 6% des adultes québécois âgés de 16 à 69 ans sont à peu près incapables de lire, et que 13% peuvent tout juste repérer un mot familier. Seulement un peu plus de la moitié d'entre eux ont fait leurs études primaires et la majorité n'ont pas terminé leurs études secondaires2.
Sur les sept millions d'habitants que compte le Québec, près de 900,000 personnes ont donc de très grandes difficultés à lire, à écrire et à calculer, alors que l'école est obligatoire depuis 1942.
Être une personne analphabète: responsabilité individuelle ou responsabilité sociale?
Les causes de l'analphabétisme sont multiples. Difficultés d'apprentissage générées par des problèmes familiaux, eux-mêmes causés par diverses formes d'inadaptation: causes et conséquences se confortent et s'enchaînent dans un véritable cercle vicieux. Mais une constante se dégage de l'histoire de vie des personnes analphabètes: la pauvreté. Elles proviennent généralement des milieux défavorisés où les revenus sont en dessous du seuil de pauvreté (ou légèrement au-dessus) et où l'on vit en marge des structures de socialisation. Et notre société n'a toujours pas résolu le problème de leur accès à l'instruction.
Mais qui sont ces personnes analphabètes? Et que signifie être analphabète?
On compte autant d'hommes que de femmes analphabètes au Québec. Et si ce sont les personnes âgées qui ont le plus de difficulté avec la lecture, un grand nombre de jeunes sortent de l'école avec des déficiences importantes en lecture, en écriture et en arithmétique. Être une personne analphabète, c'est, par exemple, avoir besoin d'aide pour lire sa correspondance personnelle ou remplir une demande d'emploi; c'est ne pas pouvoir lire la posologie d'un médicament ni aider ses enfants dans leur apprentissage scolaire; c'est aussi ne pas chercher à changer d'emploi par peur d'affronter l'inconnu; c'est ne pas être en mesure de s'informer ni de s'exprimer; c'est être limité dans l'exercice des droits fondamentaux comme le droit à l'instruction et au travail; c'est, pour la très grande majorité, être marginalisé et exclu socialement.
«Donnez-moi un point d'appui et je soulèverai le monde.»
Archimède
Les personnes analphabètes possèdent des connaissances et des habiletés certaines, développées dans le cadre de leurs responsabilités familiales ou de leurs expériences de travail. Elles sont habiles dans les projets concrets. Certaines, en particulier les personnes plus âgées, ont des compétences professionnelles puisqu'elles ont eu un accès réel au marché du travail. On en trouve même qui possèdent leur propre entreprise. Mais ces compétences sont rare ment reconnues et valorisées dans une société en évolution technologique constante, où les connaissances doivent être régulièrement mises à jour.
Les personnes analphabètes veulent s'engager dans une démarche d'alphabétisation pour diverses raisons: devenir plus autonomes, améliorer leurs connaissances, développer leurs capacités, aider leurs enfants à réussir leurs études, retourner sur le marché du travail, réaliser des projets qui leur tiennent à cœur, etc.
Quelles sont les conséquences de l'analphabétisme pour l'ensemble de la société?
Si l'analphabétisme n'est pas un problème individuel, les personnes analphabètes ne sont cependant pas les seules à en subir les conséquences. Certes, elles sont les premières à en souffrir, mais aucun société ne peut impunément tolérer qu'une partie de ses membres soient incapables d'exercer leurs droits fondamentaux de citoyens. Parler de croissance et de production tout en laissant en jachère une force de travail potentielle est une contradiction en soi. Les conséquences à moyen et à long terme de l'analphabétisme sont prévisibles: rupture du tissu social, multiplication des problèmes sociaux et augmentation des dépenses d'assistance, qui risquent de mener à l'abandon de toute forme de solidarité sociale. Ignorer les coûts sociaux de l'analphabétisme, c'est, en fin de compte, accepter tacitement de perpétuer une société à deux vitesses et pervertir le sens même de la démocratie.
Une réponse très partielle
Malgré l'énergie déployée par les intervenantes et intervenants en alphabétisation, la réponse des pouvoirs publics à l'analphabétisme demeure très fragmentée et incomplète. Il n'existe pas de politique globale en alphabétisation. Malgré de nombreuses pressions, le gouvernement du Québec s'est toujours refusé à assumer cette responsabilité. La conséquence concrète de cette lacune est le manque de coordination: il est arrivé par exemple, qu'alors même que le gouvernement appuyait financièrement des projets de sensibilisation et de recrutement, on devait, dans plusieurs groupes refuser des personnes faute de ressources!
Le seul programme gouvernemental qui appuie le travail d'alphabétisation est le «Programme de soutien à l'alphabétisation populaire autonome» (PSAPA), qui permet la réalisation d'activités de formation adaptées aux personnes analphabètes; mais le financement est trop maigre pour couvrir les dépenses nécessaires au fonctionnement d'un organisme d'alphabétisation.
Depuis 1987, les groupes d'alphabétisation ont aussi pu compter sur les «Initiatives fédérales-provinciales conjointes en matière d'alphabétisation» (IFPCA), qui financent des activités connexes à la formation (création de matériel didactique, recherche, etc.). Ce programme a permis à plusieurs groupes de recevoir de petites sommes pour réaliser un travail complémentaire et essentiel à la formation. Mais l'état actuel des relations fédérales-provinciales compromet l'avenir de ces projets. En ce qui concerne les activités d'alphabétisation liées à un objectif de formation de la main-d'œuvre, la Société québécoise de développement de la main-d'œuvre (SQDM) commence à réfléchir à une politique cohérente pour appuyer financièrement ce travail. Pour le moment, seules quelques initiatives locales ont permis de financer ce type d'activités.
Dans un contexte de réduction des dépenses publiques, les moyens mis en œuvre pour contrer l'analphabétisme et une pauvreté en constante augmentation, avec son cortège de problèmes sociaux, s'avèrent dérisoires. Cela signifie que, pendant de nombreuses années encore, l'analphabétisme et la pauvreté poseront de graves problèmes, à moins de prendre à temps des mesures radicales.
Le problème de l'analphabétisme exige une action vigoureuse: À causes multiples... réponses diversifiées
Une politique en matière d'alphabétisation
L'analphabétisme doit être reconnu comme un problème grave et son éradication considérée comme une priorité. Cela doit se concrétiser par la mise en place d'un plan d'action global en matière d'alphabétisation.
La lutte contre la pauvreté
Il n'est pas possible de résoudre le problème de l'analphabétisme sans prendre de mesures contre la pauvreté, en particulier par des politiques et une fiscalité favorisant une répartition plus juste de la richesse, une politique de plein emploi, le maintien et l'amélioration des programmes sociaux.
Des campagnes d'information et de sensibilisation du public
C'est un volet important de la lutte contre l'analphabétisme. Le public doit connaître l'ampleur, les causes et les conséquences de l'analphabétisme. Il faut favoriser la formation, le maintien ou le retour aux études.
Des campagnes de prévention
Il faut également sensibiliser les jeunes enfants à l'importance de la lecture et de l'écriture et les inciter à lire, entre autres grâce à des mesures de prévention au niveau des familles.
Des corrections au système d'enseignement primaire et secondaire
L'école doit concrétiser le principe de l'égalité des chances et faire une place réelle aux ayant des démarches d'apprentissage différentes.
La reconnaissance des besoins multiples en formation
Même s'il n'existe pas de possibilité d'emploi pour tous à court terme, tous doivent avoir droit à la formation pour fonctionner dans la société.
La reconnaissance des groupes populaires et de leur contribution dans la lutte contre l'analphabétisme
La gravité du problème nécessite une lutte multiforme et soutenue. À cet égard, il nous faut apprendre, comme société, à conjuguer nos efforts pour enfin gagner cette lutte contre l'analphabétisme, la pauvreté et l'exclusion sociale. Les groupes populaires sont à l'origine d'une intervention adaptée aux besoins des personnes analphabètes et peuvent participer à la recherche de solutions. Leur rôle d'éducation et leur expertise doivent être reconnus, ce qui doit en particulier se traduire par un financement conséquent. Le Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec, ayant constaté les liens qui existent entre l'analphabétisme, ses conséquences pour les gens qui le vivent ainsi que pour notre société, et la pauvreté et le chômage, préconise cet ensemble de mesures et les met en œuvre dans ses orientations, sa pédagogie, son mode de fonctionnement et en fait, depuis de nombreuses années, l'objet de ses revendications.
...«Il nous faut apprendre, comme société, à conjuguer nos efforts pour enfin gagner cette lutte contre l'analphabétisme, la pauvreté et l'exclusion sociale.»
En bref
L'analphabétisme n'est pas le problème d'une minorité. Il touche environ une personne sur sept au Québec. Ce problème affecte l'ensemble de notre société. L'analphabétisme est en grande partie généré et entretenu par notre société et par l'État. Les différentes mesures prises pour enrayer l'analphabétisme et développer la formation professionnelle se court-circuitent car elles ne s'inscrivent pas dans une vision globale. De plus, pour éliminer l'endettement, les gouvernements choisissent de se désengager des programmes sociaux.
L'analphabétisme touche également les personnes en emploi. Les entreprises font peu de formation professionnelle et encore moins quand il s'agit des travailleurs et travailleuses occupant des postes subalternes. En même temps, les exigences en matière de formation de base augmentent. À moins d'un changement d'approche radical, le nombre de personnes laissées pour compte continuera de s'accroître. La démarche d'alphabétisation doit permettre aux gens de réaliser leurs projets. L'alphabétisation que nous tentons de faire veut redonner aux personnes leur dignité, pour qu'elles ne soient plus considérées comme des parasites ou une force de travail dont on ne sait que faire.
Dans cette grande coproduction internationale, des milliers d'acteurs de l'alphabétisation populaire traverseront le temps et l'espace pour vous faire revivre certains des moments les plus bouleversants de cette magnifique saga: la naissance et l'évolution de l'alphabétisation populaire au Québec.
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Les origines lointaines de l'alphabétisation populaire
Bien que l'alphabétisation populaire soit née au Québec dans les années 1960, elle s'inscrit à l'intérieur d'une trame beaucoup plus ancienne. Déjà, au XVIe siècle, un vaste mouvement de démocratisation de l'éducation avait commencé en Europe. Mouvement qui s'est incarné ici dans l'action de Marguerite Bourgeoys et ses «petites écoles3».
La partie la plus lointaine et la plus sombre de nos archives nous apprend également que le mouvement populaire des années 60 héritait, directement et indirectement, d'une pratique déjà ancienne. Pratique qui portait, avant la lettre, certains éléments de l'éducation populaire. Par exemple, les cercles agricoles, fondés en 1883, regroupaient des agriculteurs qui s'échangeaient leurs connaissances et expériences respectives. En 1900, on comptait 530 de ces cercles, qui rejoignaient 43,000 personnes4, et s'étaient donné pour objectif d'améliorer les conditions matérielles et intellectuelles des agriculteurs et de défendre leurs intérêts5. Entre 1850 et 1900, de nombreuses expériences en éducation des adultes ont vu le jour. Celles des milieux populaires (mouvements syndicaux, coopératifs, etc.) servaient à outiller leurs membres. Leurs actions étaient un moyen de promouvoir leurs idéaux et d'élargir l'accès à l'éducation.
Les années 60...
Le scénario: «OCTOBRE»
Un contexte politique qui a favorisé, au Québec, la création des groupes populaires.
Le scénario de cette période s'inscrit dans le contexte de la Révolution tranquille. L'ampleur des réformes entreprises, notamment dans les secteurs de l'éducation, de la santé et des affaires sociales, modifie profondément la société québécoise, dans le sens d'une démocratisation qui encourage la participation de la population. C'est à ce moment-là que l'éducation populaire autonome prend forme.
«Au milieu des années 60, on assiste (...) à l'émergence de nouvelles formes d'organisations populaires locales: les comités de citoyens. Ils sont la réponse populaire au saccage des milieux urbains et ruraux provoqué par l'intervention ou au contraire l'inaction des pouvoirs publics. Nés à Montréal dans les paroisses dites «marginales» de l'Est du Québec, ces comités de citoyens se multiplient dans les centres urbains et les régions rurales. Souvent initiés par le courant de l'animation sociale, qui vise à faire participer la population des quartiers défavorisés aux transformations sociales, leur champ d'action allait de la santé à la rénovation urbaine, en passant par le loisir, le travail, les problèmes scolaires(...).»6
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«LES BELLES HISTOIRES DES PAYS D'EN HAUT».
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Le Québec procède alors, durant ces années, à la mise en place d'un système d'éducation public, intégré et gratuit, ce qui aura d'importantes répercussions sur le développement des ressources en éducation des adultes. Durant cette période, de nouvelles expériences d'alphabétisation sont tentées. Nouvelles car, par le passé, des activités d'alphabétisation avaient déjà été organisées. Le «Montréal Mechanics Institute», par exemple, premier organisme à donner de la formation aux travailleurs, offrait déjà en 1829 des cours d'alphabétisation pour répondre aux besoins des industries7.
«C'est principalement à partir de 1965 que se développent des activités d'alphabétisation. Suite aux recommandations du rapport Parent, le ministère de l'Éducation nouvellement créé instaure un secteur de l'éducation des adultes (appelé alors éducation permanente). Ce sont les commissions scolaires qui se voient officiellement confier la responsabilité des cours du niveau élémentaire et secondaire pour adultes. Les premiers cours de français et de mathématiques (au nombre de trois) sont regroupés dans un secteur appelé «cours de base» ou «éducation de base»: ce sont ces activités qui constituent le lieu principal de l'alphabétisation au Québec.»8
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«DANS LE VENTRE DU DRAGON».
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Les premières expériences en alphabétisation populaire
À l'automne 1967, un groupe d'étudiants adultes du quartier de! la Pointe-St-Charles, à Montréal, insatisfait de la formation donnée par la commission scolaire, rencontre le Regroupement des citoyens de Pointe St-Charles. Un comité est alors mis sur pied. Il développe un projet qui aboutira à la création du «Carrefour d'éducation populaire de Pointe St-Charles». L'objectif: se donner des moyens d'apprendre en partant des besoins et aspirations des gens. Le Carrefour mettra sur pied plusieurs projets, dont des ateliers d'alphabétisation.
À la même époque, des ateliers d'alphabétisation se mettent sur pied dans le quartier voisin, la Petite-Bourgogne. Un groupe de prêtres séculiers entreprend alors une consultation publique et plusieurs problèmes sont identifiés. On découvre, entre autres, un taux très élevé d'analphabétisme au sein de la population. Des citoyens et citoyennes créent alors un comité pour défendre leurs droits et développer des services communautaires. En 1967, le «Centre d'éducation des adultes de St-Henri et de la Petite-Bourgogne» (CEDA) offrira ses premiers ateliers d'alphabétisation.
En 1968 se met sur pied dans l'est de Montréal le «CEB AM» (Comité d'éducation de base pour les adultes de Montréal). Celui-ci est particulièrement sensible au problème de l'analphabétisme et amorce un projet pilote qu'on aménage dans le Pavillon d'éducation communautaire d'Hochelaga-Maisonneuve(PEC).
Les années 70...
Le scénario: «LE CRI DE LA LIBERTÉ»
Un contexte qui a permis la création et le développement d'un mouvement en éducation populaire autonome.
Un comité réunissant les groupes populaires à l'Institut canadien d'éducation des adultes (ICEA) crée le Comité d'action des organismes volontaires d'éducation populaire (OVEP). En 1978, en assemblée, il définit ainsi l'éducation populaire autonome (autonome pour la distinguer des activités des commissions scolaires):
«L'ensemble des démarches d'apprentissage et de réflexion critique par lesquelles des citoyens mènent collectivement des actions qui amènent une prise de conscience individuelle et collective au sujet de leurs conditions de vie ou de travail et qui visent, à court, moyen ou à long terme, une transformation sociale, économique, culturelle et politique de leur milieu.»9
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«AUTANT EN EMPORTE LE VENT».
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L'éducation populaire autonome s'investit dans le domaine de la formation en dehors du système d'éducation. Cela se concrétise par diverses formes d'action collective: médias d'information, production de vidéos ou de pièces de théâtre, enquêtes et sondages, voyages de sensibilisation, colloques, conférences...
Un OVEP est défini ainsi:
«(...) un organisme volontaire et autonome, sans but lucratif, contrôlé exclusivement par ses membres; ces organismes démocratiques réalisent des activités d'éducation populaire avec les citoyens touchés par une même situation vécue et/ou identifiée.»10
Les groupes populaires se multiplient, investissent de nouveaux champs d'action. Isolés au départ, ils se regroupent géographiquement ou à partir de champs d'action communs. De nouvelles alliances se créent. Le mouvement d'éducation populaire se développe. On se regroupe pour agir et parce qu'on a une identité commune. Identité qui se renforce dans l'action.
Comme dans les années précédentes, le mouvement populaire continue d'être traversé par plusieurs courants de pensée. Les expériences des années 60 sont analysées, entre autres, à la lumière d'un courant de pensée latino-américain influencé par Paolo Freire. On constate l'impasse des transformations sociales. C'est par la prise en charge des gens des milieux défavorisés, ceux qui contrôlent peu ou pas leurs conditions de vie, que se fera le changement. C'est par l'action et la prise de conscience des réalités sociales que les problèmes pourront être résolus. Les milieux défavorisés doivent s'organiser sur leurs propres bases, se donner des services qui demeuraient jusque-là inaccessibles.
Quelques clips de cette période
L'arrivée de nombreuses personnes immigrantes favorise la création de plusieurs centres d'éducation populaire à caractère ethnique. Le «Bureau de la communauté chrétienne haïtienne de Montréal» est fondé en 1973. Il offre certaines formations de base en français pendant trois ans. Ce programme se transformera pour donner le jour à un groupe d'alphabétisation, le «Centre N'A Rive» (nous y arriverons). En 1972, la «Maison d'Haïti» voit le jour. Bien qu'elle offre de façon informelle des ateliers d'alphabétisation, c'est en 1978 que les activités d'alphabétisation deviennent officielles. Le «Centre portugais de référence et de promotion sociale» est fondé en 1972. Six ans plus tard, il développe des activités d'alphabétisation.
C'est en 1978 qu'un premier groupe d'alphabétisation se met sur pied à l'extérieur de Montréal: il s'agit du «Comptoir St-Pierre de Fort Coulonge», en Outaouais. L'année suivante, la «Coopérative de services multiples de Lanaudière» débute ses ateliers d'alphabétisation. C'est aussi cette année-là qu'un groupe de Longueuil, «Équipe Secours CM. de Longueuil inc.» entame ses activités, de même que le «Centre éducatif des Haïtiens de Montréal».
Les années 80...
Quelques clips de cette période
Pendant les armées 1980-1985, on assiste à une multiplication sans précédent des groupes populaires d'alphabétisation. La fondation du RGPAQ en 1981 (comme on le verra dans le chapitre suivant), la conscience de plus en plus grande du problème de l'analphabétisme et la levée du moratoire sur le programme OVEP en 1984, expliquent cette croissance de l'alphabétisation populaire autonome.
En 1980, à Montréal, voient le jour le «Tour de lire», le groupe «Un Mondalire», le groupe de formation «Tirelire» et le «Collectif d'alphabétisation des détenus et ex-détenus» (CADE). Dans la même période, les groupes «Atout-Lire» de Québec (connu à cette époque sous le nom de Collectif d'alphabétisation du Comité des citoyens et citoyennes du quartier St-Sauveur), le «Centre Lac d'Alma» et le «Centre d'alphabétisation de Jonquière» ouvrent leurs portes.
En 1981, d'autres groupes sont créés dans la région de l'Estrie: «L'Étoile Alpha» et «La route des Estriennes vers la lecture». En janvier de cette même année, une scission dans le groupe «Shécrilire» à Sherbrooke aboutit à la constitution du «Collectif d'alphabétisation des travailleurs» et d'«Arbralettre». Deux groupes font également leur apparition dans la région de Lanaudière: le «Regroupement des services communautaires de Berthier» et le «Regroupement des assisté-e-s sociaux du Joliette Métropolitain» (RASJM), qui entame ses activités en alpha même s'il existait comme groupe depuis 1973. À Québec, le groupe «Alpha St-Jean Baptiste» voit le jour tandis que le «Regroupement des analphabètes de Chapais-Chibougameau» (RACC), qui deviendra plus tard le «Regroupement Bouches à oreilles», fait son entrée en alphabétisation.
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«NORMA RAE».
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Dans la région du Saguenay/Lac St-Jean, on assiste, en 1982, à la naissance du «Centre d'alphabétisation du comté de Roberval», du groupe «Alpha Laterrière» et de «Alpha St-Félix d'Otis». À Matane, «La Gigogne», une maison pour femmes victimes de violence qui existait depuis 1981, commence à faire de l'alphabétisation. À Québec, c'est «Le groupe d'alphabétisation populaire de Limoilou» qui commence ses activités. À Ville-Lemoyne, le «Groupe d'entraide IOTA» naît, issu d'un centre de bénévolat. Cette même année, Montréal voit la naissance du groupe «Lettres en Main» et du «Centre de lecture et d'écriture»(CLÉ).
On assiste, dans les années qui vont suivre, à la naissance de plusieurs groupes dont le «Centre alpha des Basques» à Trois-Pistoles, «La Clé des Mots» à Candiac, «Laportalire»à Brossard, «La Porte Ouverte» à St-Jean-sur-Richelieu,et «COMSEP» à Trois-Rivières. L'année 1984 est particulièrement animée pour l'alphabétisation populaire, puisqu'elle voit la naissance de 42 nouveaux groupes. Plusieurs groupes qui apparaissent alors sont mis sur pied à l'initiative des commissions scolaires, qui voient ainsi un moyen de faire de la sensibilisation et du recrutement pour les cours d'alphabétisation dans le réseau scolaire. Avec les années, certains de ces groupes développeront leur autonomie et réaliseront eux-mêmes des activités de formation. C'est également à cette époque que certains groupes se donnent de nouvelles orientations. Ainsi, Le «Centre N'A Rive» décide dès 1980 d'alphabétiser en créole. Cette décision fait suite à une réflexion sur les difficultés rencontrées avec l'alphabétisation dans une seconde langue. Ce changement de cap ne va pas sans rencontrer certaines résistances. Mais l'expérience est tout de même tentée. Ce sera un succès. En 1981, la «Maison d'Haïti» adopte également cette pratique.
Le scénario: «LE DISTRAIT»
Selon une étude réalisée par l'ICEA11, le ministère de l'Éducation prend des initiatives en matière d'alphabétisation dès 1980. On met sur pied une équipe d'aide au développement et un programme de recherche. On entreprend la publication d'un bulletin, «Alpha Liaison». On organise un séminaire, «Alpha 80». On propose également un plan d'intervention dans les commissions scolaires. L'alphabétisation devient une pratique spécifique et non plus une pratique assimilée au concept de formation de base.
En février 1984, l'Énoncé de politique en éducation des adultes du MEQ débouche, d'une part, sur l'octroi d'une enveloppe ouverte aux commissions scolaires pour l'alphabétisation et, d'autre part, sur la levée du moratoire qui avait été imposé en 1982-1983 pour le programme OVEP.
Plusieurs groupes alpha, qui survivaient tant bien que mal depuis quelques années, parviennent alors à obtenir un financement. Celui-ci demeure toutefois bien insuffisant.
Cette ouverture sera malheureusement de courte durée et en 1985-1986, le ministère impose à nouveau un moratoire sur l'accréditation de nouveaux groupes au programme OVEP et gèle le budget. Les groupes populaires en alphabétisation sont toujours aux prises avec un programme de soutien qui ne finance que les activités de formation et nulle part, on ne veut reconnaître les frais relatifs à l'infrastructure et à l'ensemble des activités d'un groupe, comme le travail de sensibilisation, de représentation, etc.
«On a fait le choix au Québec de soutenir le développement de l'alphabétisation dans l'appareil scolaire plutôt que dans la société(...) une telle orientation a marginalisé le mouvement autonome d'éducation populaire.»12
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«OPÉRATION BEURRE DE PEANUT».
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En 1987, le gouvernement fédéral investit le champ de l'alphabétisation. Au Québec, cette intervention sera encadrée par une entente fédérale-provinciale. Elle aura pour effet de soutenir la recherche, la sensibilisation et la production de matériel didactique en alphabétisation et ce, dans divers milieux: groupes populaires, réseau scolaire, syndicats, bibliothèques publiques, etc.
Les années 90...
Quoi de neuf concernant la reconnaissance de l'alphabétisation populaire et de son financement?
Depuis 1993, plusieurs actions régionales et provinciales ont été organisées dans le but de faire reconnaître l'alphabétisation populaire et augmenter son financement. Sous le gouvernement libéral, quelques rencontres ont eu lieu au niveau ministériel. On a reconnu que ce financement était insuffisant, et annulé une coupure de budget de 10%. Des promesses d'augmentation du budget ont été lancées pendant la campagne électorale.
Après plusieurs campagnes de pression menées par les groupes d'alphabétisation populaire et coordonnées par le RGPAQ au cours de l'année 1994-1995, le nouveau ministre de l'Éducation, Jean Garon, est venu à l'assemblée générale du Regroupement annoncer que le budget du programme de soutien à l'alphabétisation populaire autonome allait doubler en 1995-1996. Ces sommes seront consacrées au développement et au financement de nouveaux groupes dans des régions du Québec où ceux-ci sont rares (Chaudière-Appalaches, Gaspésie, Laval, etc.). Elles permettront, minimalement, un rattrapage au niveau de l'indexation pour tous les groupes et assureront une subvention minimum de 25,000$ à chacun.
D'autre part, dans la tourmente des conflits de juridiction entre le provincial et le fédéral, les groupes doivent lutter ferme, depuis 1993, pour assurer le renouvellement de l'entente qui permet au fédéral d'investir en alphabétisation au Québec. De plus en plus de groupes se mettent également, peu à peu, à compléter leur financement par des projets liés à l'employabilité, la formation de la main-d'œuvre ou la création d'emploi. Certains s'investissent également dans des projets associant l'alphabétisation et la santé. En bref, les groupes sont appelés à diversifier leur travail d'éducation populaire.
Au fil des ans: «RETOUR VERS LE FUTUR»
Tout au long de ces années se tisse donc une trame sonore et visuelle. En dirigeant les projecteurs sur des éléments particuliers qui ont inspiré les acteurs de l'alphabétisation populaire, on reconnaît que les mêmes aspirations traversent les différentes époques.
En arrière-plan, une constante: la survie a toujours été un enjeu pour les groupes populaires en alphabétisation. La lutte pour une véritable reconnaissance politique et financière se poursuit. D'autres éléments se retrouvent au fil des années, notamment la diversité des pratiques, la volonté de formation et de perfectionnement des animatrices et l'enracinement des groupes dans le milieu.
Par ailleurs, que ce soit chez Freire, Freinet ou d'autres, dans les réflexions formulées à l'intérieur des publications des groupes et du Regroupement, on reconnaît les mêmes principes:
On se reconnaît toujours dans l'approche conscientisante:
«L'alphabétisation populaire a pour mandat de partir véritablement des préoccupations des gens, de découvrir les motivations pour ensuite travailler là-dessus afin de regrouper ces gens-là sur une base collective pour éventuellement mener une réflexion.»13
À SUIVRE...
Prochainement sur nos écrans... «LA GUERRE DES ÉTOILES»
Qui est Célestin Freinet?
Cet éducateur français, né en 1896 et décédé en 1966, a créé une pédagogie fondée sur la motivation, le travail collectif, le sens de l'effort et des responsabilités et ce, à travers des méthodes actives (journaux scolaires, correspondance interscolaire, etc.).
En 1984, quand le groupe Lettres en main a publié le bilan de ses premières années de pratique, il y a fait état des réflexions menées sur l'approche conscientisante et présenté des éléments théoriques puisés chez Freinet: «Il s'agissait non pas de repousser du revers de la main l'aspect politique, mais de l'ouvrir sur d'autres aspects de l'activité humaine et sur tous les niveaux d'un processus de changement, soit les attitudes, les capacités intellectuelles et la relation au milieu»14
Dans ce même document, le groupe expose également les principes de la méthode naturelle définie par Célestin Freinet et qui oriente les pratiques à Lettres en main:
Freire est sans aucun doute celui qui a le plus inspiré les premiers acteurs en alphabétisation populaire au Québec. Plusieurs ont puisé dans son approche de conscientisation pour l'adapter au contexte particulier de chaque quartier, de chaque région et des populations concernées.
Qui est Paolo Freire?
Né en 1921, Paolo Freire suit une formation en philosophie et en droit. Il a été avocat d'un syndicat des quartiers pauvres d'une ville du Brésil. Dès 1947, il s'intéresse à la question de l'alphabétisation. Il se dissocie rapidement des méthodes scolarisantes et décide de créer sa propre méthode. Ses premières expériences vont connaître du succès dès 1961. En 1962, un plan d'alphabétisation sera mis sur pied dans toutes les villes importantes du pays. En 1964, un coup d'État met fin à la campagne d'alphabétisation. Paolo Freire est exilé.
Quelques grands principes de rapproche de Paolo Freire 15 :
«Paolo Freire refuse les méthodes d'alphabétisation mécaniques. Il a cherché une méthode liée à la démocratisation de la culture; une méthode qui serait un instrument de l'élève et non de l'éducateur; une méthode qui serait un acte de création, capable d'entraîner d'autres actes créateurs; une méthode qui donnerait confiance au peuple, qui échangerait avec lui, qui réaliserait l'humanisation à partir des masses populaires et avec elles.»16
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«Y en a des pires que moi!
Je suis content d'avoir connu Un Monda lire. J'avais bien des difficultés à lire et à écrire. Pour bien dire, je ne savais pas lire et écrire du tout. Grâce à la patience des animatrices et à leur savoir-faire, je peux maintenant me débrouiller. Je peux aider ma fille dans ses devoirs et ça me fait plaisir. À la compagnie, ils m'ont demandé pour être contremaître, j'ai dit oui. Parce que je suis venu à Un Mondalire, je peux faire mes rapports après mon quart de travail et la direction est heureuse de mon travail. Je peux faire tout ce que je veux et je ne suis pas gêné. Il y en a des «bien pires» que moi!
Nous sommes de petits groupes de cinq à six personnes, l'animatrice a tout le temps de s'occuper de nous. Je suis allé dans une école où il y avait des groupes de quinze à vingt personnes et j'ai été obligé de quitter car je n'étais pas capable de suivre les autres. Bravo et longue vie à l'organisme».
Claude
Un Mondalire, Montréal.
«Mon Journal». Le journal des participants et participantes des groupes d'alphabétisation du RGPAQ, no 4, printemps-été 1995, p.6.
«Quand j'étais enfant je n'ai pas appris...
Je ne suis pas allé à l'école parce que mes parents avaient besoin que je m'occupe du bétail sur la montagne, que je m'occupe de mon frère qui était malade avec la varicelle et après j'allais avec mon père scier du bois pour les usines».
Deslinda da Concelcao Nunes (traduit du portugais)
RGPAQ/Fondation Alpha Pop.
Livre de l'Année Internationale de l'alphabétisation. Montréal, 1993, p. 115.
Un regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec
Il était une fois la grande et la petite histoire d'un regroupement de groupes populaires en alphabétisation qui est né, a grandi et s'est développé jusqu'à aujourd'hui. Les principaux personnages de cette histoire sont ses groupes membres qui en ont fait ce qu'il est aujourd'hui et qui façonneront ce qu'il deviendra demain. Revivez avec nous cette grande épopée qui marqua à tout jamais le visage de l'alphabétisation au Québec. C'était, il y a très, très longtemps...
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1981
Où l'on voit que les bonnes fées qui se sont penchées sur le berceau du nouveau-né l'ont doté de grandes ambitions. La suite nous prouvera à quel point il s'est montré pugnace...
Fondation du Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec (RGPAQ)
Dès 1979-80, les différents groupes populaires d'alphabétisation au Québec avaient commencé à développer des liens et des contacts entre eux. À cette époque, une vingtaine d'organismes d'éducation populaire autonomes, subventionnés par le ministère de L'Éducation du Québec (MEQ), intervenaient en alphabétisation. Même si certains d'entre eux faisaient de l'alphabétisation depuis 1967, leurs pratiques demeuraient alors mal connues. Un événement allait cependant cristalliser le désir de regroupement de ces groupes: le «Séminaire Alpha 80», organisé par la Direction générale de l'éducation des adultes (DGEA), qui s'adressait aux animatrices tant des commissions scolaires que du réseau populaire. À cette occasion, les groupes populaires d'alphabétisation se sont rapidement rendu compte que leurs pratiques étaient semblables et qu'ils avaient intérêt à travailler ensemble.
C'est en février 1981 que le RGPAQ est officiellement fondé lors d'une assemblée générale à laquelle participaient 11 groupes populaires d'alphabétisation. On donne alors au nouvel organisme les rôles suivants: «un lieu d'échange et de réflexion sur nos pratiques en alphabétisation et un front sur le financement de l'alphabétisation populaire en lien avec le front des Organismes volontaires d'éducation populaire» (OVEP).
Le Mémoire pour la Commission d'étude sur la formation des adultes (CEFA)
Dès sa fondation en 1981, une des actions majeures du RGPAQ a consisté à produire un mémoire sur l'alphabétisation, et à le soumettre à la Commission d'étude sur la formation des adultes (Commission Jean), chargée de faire le point sur l'éducation des adultes et d'adresser des recommandations au gouvernement. Le mémoire du RGPAQ faisait état de la situation de l'analphabétisme en tant que problème social et présentait le travail des groupes d'alphabétisation, ainsi que leurs besoins. Il énumérait également un certain nombre de recommandations orientées vers une politique d'ensemble en alphabétisation.
«La Commission a été fortement influencée par le nouveau mouvement d'alphabétisation populaire. Réciproquement, elle a donné à ce mouvement une plus large visibilité. Elle a reconnu à l'éducation populaire autonome un rôle majeur là ou on ne lui avait reconnu jusqu'alors qu'un rôle expérimental, d'avant-garde peut-être, mais seulement complémentaire par rapport aux programmes réguliers d'éducation des adultes.»17
Parallèlement à la préparation du mémoire, le Regroupement mène une importante campagne de presse pour faire connaître le problème de l'analphabétisme. Dans le cadre de cette action, il amorce ses premières luttes sur le financement de l'alphabétisation populaire et dénonce l'état de sous-financement des groupes.
1982
Où l'on assiste, attendris, à ses premiers pas... Et l'enfant grandit en grâce et en sagesse...
Parution des premiers numéros d'«Écrire pour la première fois» et d'«Alphabétisation populaire»
De 1982 à 1986, le RGPAQ publie un bulle tin interne à l'intention des animatrices «Alphabétisation Populaire», tiré à 300 exemplaires; «Écrire pour la première fois», un bulletin qui s'adresse cette fois aux personnes participantes, est tiré pour sa part à 1000 exemplaires. Des assemblées dites «de concertation» permettent aux animatrices des groupes d'échanger sur leur matériel et sur leurs approches respectives.
1984
Où l'on découvre comment le jeune RGPAQ se développe et se met à l'œuvre... Les débuts semblent prometteurs... Comme un dramaturge l'a dit en son temps: «La valeur n'attend pas le nombre des années!»
Énoncé de politique en éducation des adultes; priorité aux personnes analphabètes; levée du moratoire...
En février 1984, le MEQ rend public son énoncé de politique en éducation des adultes, l'alphabétisation devient une des priorités en éducation des adultes. Cette prise de position se concrétiser; par une enveloppe ouverte pour les commissions scolaires, qui peuvent désormais être subventionnées pour toutes les inscriptions qu'elles enregistreront en alpha.
D'autre part, cet énoncé de politique du MEQ entraîne la levée du moratoire que le ministère avait imposé en 1982-83 sur le programme OVEP, et qui avait été à l'époque dénoncé par le RGPAQ. C'est alors 42 nouveaux groupes qui font leur entrée dans le programme, et plus d'un million de dollars, c'est-à-dire une augmentation de 239%, que l'on injecte dans le programme.
Le 30 mars, lors d'une assemblée générale spéciale, le RGPAQ analyse en détail l'énoncé de politique et prend position. En mai, il dépose un mémoire sur ce sujet.
Le nombre de groupes membres, qui s'élevait à 17 en décembre 1982, est passé à 23 en mars 1984.
1985
Où l'on voit le RGPAQ explorer le vaste monde... «Et pour un coup d'essai, c'est un coup de maître».
La Grande Rencontre
C'est aussi à cette époque que germe l'idée de la «Grande Rencontre». Au début, le projet semble assez modeste: une rencontre avec les participantes et participants des groupes. On se rend vite compte que si l'on veut que ces personnes participent aussi à l'organisation et à l'orientation de l'activité, il va falloir étirer l'échéancier. C'est ainsi qu'a lieu une "Petite Rencontre" en avril 1984, qui donnera un avant-goût de la «Grande Rencontre», premier grand rassemblement de personnes analphabètes au Québec, qui se tiendra pour sa part l'année suivante, en mai 1985.
Près de 400 personnes analphabètes des groupes populaires d'alphabétisation, venues de partout au Québec, se retrouvent à l'Université Laval pour fêter d'abord, puis pour discuter ferme le lendemain sur différents thèmes. Un comité organisateur formé d'animatrices et de participantes et participants des groupes a déterminé la forme, le contenu et le déroulement des deux journées. Tout le monde est mis à contribution pour animer les ateliers: animatrices, participantes et participants et amis des groupes. La plénière de l'après-midi est formelle: on en veut encore! Un succès éclatant qu'on n'a pas osé montrer parce que plusieurs participantes et participants ne se sentaient pas capables d'affronter les médias.
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1986
Où l'on remarque que ses qualités d'analyste et de stratège se forgent dans les turbulences de l'adolescence et les défis multiples de l'époque...
Le premier congrès d'orientation:
«La multiplication des activités en 1984-1985, les difficultés financières croissantes, le développement «non planifié» soulèvent bon nombre de questions. Les attentes des groupes sont multiples, tant au niveau du rôle politique de représentation du Regroupement qu'au niveau d'un «leadership» pédagogique qui pourrait être développé. Par ailleurs, les participantes et participants, suite à la Grande Rencontre, deviennent partie prenante du Regroupement et leurs attentes se manifestent aussi.
(...) Il faut donc revoir le fonctionnement, établir des priorités, repenser le Regroupement et identifier les dossiers prioritaires sur lesquels on veut le voir intervenir. Mais il faut, d'abord et avant tout, préciser qui en sont les membres et s'assurer qu'ils ont les mêmes objectifs et orientations.
Pour son cinquième anniversaire, le Regroupement organise donc un congrès d'orientation, pour faire le point et «organiser» l'avenir.»18
En 1986, le RGPAQ compte 31 groupes membres et quatre autres groupes sont en attente de statut. Parmi les résultats du Congrès, mentionnons une définition de l'alphabétisation populaire et de ce qu'est un groupe d'alphabétisation, ainsi que des orientations pour le RGPAQ. L'ensemble sera revu, corrigé et adopté lors de l'assemblée générale de juin 1986.
1987
Où l'on s'aperçoit que la ténacité et la combativité du RGPAQ s'affirment face à l'adversité...
Reprise des luttes sur le financement; travail sur le «programme distinct» en alpha, le Programme de soutien à l'alphabétisation populaire autonome (PSAPA); reconnaissance et financement du RGPAQ comme structure de représentation...
En 1987, les luttes sur la question du financement reprennent. Elles vont se mener principalement par l'entremise de rencontres, par l'envoi de lettres et par la présence du RGPAQ au comité de refonte du programme OVEP mis sur pied par le ministre de l'Éducation de l'époque, Claude Ryan. Le travail de ce comité aboutira au «Rapport Charbonneau». Le RGPAQ tente de faire avancer le dossier des nouveaux groupes bloqués par un second moratoire imposé dès 1985-86.
Le RGPAQ a de nouveau presque doublé son «membership» et compte maintenant une quarantaine de groupes membres. En assemblée générale, les membres, après avoir fait l'expérience du travail avec le MÉQ au sein d'une foule de comités, tentent de recentrer leur efforts sur l'avancement du dossier de l'alphabétisation populaire.
1988-89
Où l'on se rend compte qu'une demi-victoire peut constituer un tremplin pour de nouvelles attaques...
Les années 1988 et 1989 seront en grande partie consacrées à l'élaboration de ce qu'on appelle le «programme distinct». On estimait à ce moment au RGPAQ que pour réussir à faire augmenter les budgets des groupes d'alphabétisation sans pénaliser les autres OVEP, il fallait bénéficier d'un programme distinct de financement, ce qui est devenu par la suite le PSAPA. Le RGPAQ a bel et bien obtenu un programme distinct, mais sans un sou de plus sinon sa reconnaissance en tant qu'organisme de représentation lui donnant droit à un financement pour cet aspect précis de son travail.
1988
Contribution du RGPAQ à la mise sur pied du Centre de documentation sur l'éducation des adultes et la condition féminine (CDEACF), en y déposant sa collection; étude des besoins; réinvestissement de la pédagogie; augmentation du nombre de groupes membres...
C'est la période où commence l'intervention du fédéral en alphabétisation. C'est au printemps 1988 que le RGPAQ présente au gouvernement fédéral un projet d'étude des besoins en formation et en perfectionnement auprès de ses membres. Cette enquête aboutira à la rédaction d'un document précieux, «État des besoins», qui permettra par la suite d'orchestrer un programme de perfectionnement et la mise en place d'une revue pédagogique. Un deuxième document sera produit la même année, le «DIRA: Documentation. Information. Ressources. Alphabétisation: une réponse aux besoins des formatrices en alphabétisation».
... «Depuis quatre ans que je suis des cours à Alpha-Nicolet, ça me donne plus de courage pour lire le journal et pour parler aux autres. Je suis moins gène. Je suis dans le conseil d'administration. Cela me donne confiance en mol et ça m'encourage à continuer mes coure pour me débrouiller encore plus...»
Serge Auger, Extrait d'une entrevue réalisée par Claire Lachapelle en janvier 1992, RGPAQ. Le Monde alphabétique. No.3, printemps-été 1992, p. 53.
1989-90
Où l'on constate avec amertume que les plus grands efforts ne sont pas toujours couronnés des succès escomptés...
Année internationale de l'alphabétisation: tournée du Livre, événements régionaux et événements de clôture; forum «Une société sans barrière»; premier programme de perfectionnement; sortie des premiers numéros de la série «Un Visa pour l'alpha pop»...
Les années 1989 et 1990 sont axées sur la visibilité du RGPAQ et la problématique de l'analphabétisme à l'occasion de l'Année internationale de l'alphabétisation. Le RGPAQ se joint au projet international du «Voyage du livre» et fait circuler son «Grand Livre bleu» d'un groupe à l'autre à travers le Québec dès septembre 1989.
Résultat: des centaines de textes écrits par des participantes et participants en alphabétisation, sept événements régionaux pour souligner la venue du Grand Livre dans chaque région et donner l'occasion aux médias de diffuser le message: «Ça vous concerne». Un journal format tabloïd, dont sept numéros paraîtront, est publié à grand tirage et est diffusé gratuitement. Le RGPAQ organisera aussi un événement de clôture de l'Année internationale, le 15 décembre 1990, et en profitera pour souligner le début de la décennie de l'alphabétisation.
En novembre 1990 a lieu le forum «Une société sans barrières» organisé conjointement par la Centrale de l'enseignement du Québec (CEQ), l'Institut canadien d'éducation des adultes (ICEA) et le RGPAQ. Événement axé sur la sensibilisation à l'analphabétisme et surtout sur les droits des personnes analphabètes, ce forum a ceci de particulier que les personnes analphabètes en démarche d'alphabétisation en sont les personnes-ressources.
Beaucoup de travail a été fait au cours de l'Année internationale et on peut dire qu'on a beaucoup parlé d'analphabétisme et d'alphabétisation cette année-là. Malheureusement, cela n'a pas permis aux groupes de sortir de leurs difficultés économiques. Les groupes sont déçus: il n'y a toujours pas de politique d'alphabétisation au Québec, et les ressources octroyées aux groupes restent extrêmement maigres, alors que les commissions scolaires voient - pour peu de temps cependant - le financement de leurs activités d'alphabétisation croître considérablement. La réalisation du premier programme de perfectionnement financé par le gouvernement fédéral permettra le tenue de 16 sessions données dans quatre régions différentes sur quatre thèmes différents. Des documents seront publiés à la suite de ces sessions et c'est ainsi que la série «Un visa pour l'alpha pop» voit le jour.
«Bonjour, je suie un travailleur à la Consumer Glass députe près de vingt ans. Un programme de formation de base a été annoncé à l'automne 92 et je me suie Inscrit.
Je suis retourné à l'école par curiosité élabora. Je me suis aperçu que j'avais oublié mon français au niveau de la communication orale et de l'écriture, j'avais même oublié mon alphabet. Quand je suis arrivé chez moi, ma femme m'a demandé ce que j'avais. J'avais l'air morose. Je lui ai dit que j'avais oublié les lettres de mon alphabet. Alors elle a ri et ma belle-mère aussi. Ma belle-mère s'est mise à chanter l'alphabet et ma femme aussi. J'ai ri et après j'ai retrouvais les papiers avec les lettres de l'alphabet un peu partout dans la maison. Je suis parvenu à m'en souvenir. Mon expérience m'a appris qu'il n'y a pas d'âge pour se recycler.»
Raymond Quesnel, témoignage publié dans le Monde alphabétique, No.6, automne-hiver 1993, p. 51.
1990-1991
Où l'on constate que des années studieuses succèdent aux périodes d'action...
Deuxième programme de perfectionnement; parution du premier numéro de la revue «Le Monde alphabétique»; sortie de «La pédagogie au RGPAQ d'hier à demain»...
C'est aussi à l'automne 1990 que quatre autres sessions de perfectionnement pour les animatrices sont offertes par des professeurs de l'Université du Québec à Montréal (UQAM) et quatre autres documents de la série «Un visa pour l'alpha pop», dont un vidéo, sont produits. Au printemps 1991 paraît le premier numéro de la revue «Le Monde alphabétique«. Le document retraçant l'évolution du travail sur la pédagogie au RGPAQ «La pédagogie au RGPAQ d'hier à demain», est également publié.
1992-1993
Où l'on note que le RGPAQ prend un second souffle et se prépare pour mieux sauter...
Le deuxième congrès et la Journée particulière
La nécessité de tenir un deuxième congrès d'orientation, sous le thème «Renforcer l'unité», se fait alors sentir. Les activités de l'Année internationale, de même que le programme de perfectionnement des animatrices, ont permis à plusieurs groupes de développer une dynamique régionale. Par contre, l'ensemble des groupes ressentent le besoin de renforcer la cohésion nécessaire au fonctionnement du RGPAQ.
Le Congrès a lieu en juin 1992. On élargit les discussions en organisant une «Journée particulière» qui ouvre le congrès: des intervenantes et intervenants du milieu populaire viennent rencontrer les membres du RGPAQ et on discute ensemble de différentes problématiques: pauvreté, formation professionnelle, intégration au marché du travail, etc.
Puis, au congrès, on discute des principaux thèmes qui nous rallient: spécificité de l'alphabétisation populaire, autonomie et relations avec les bailleurs de fonds et plus spécifiquement avec les commissions scolaires, place des participantes et participants dans les groupes et au RGPAQ, liens avec les groupes d'éducation populaire autonome, structure du RGPAQ pratique de la démocratie et pédagogie. De ces discussions ressortent des principes clairs qui guideront à l'avenir le choix des nouveaux membres. Chaque groupe membre devra aussi participer au processus de révision du membership du RGPAQ en fonction des principes qui guident les définitions et les orientations adoptées en 1986.
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1993
Le RGPAQ visite les groupes en organisant des ateliers-échange avec les participantes et participants; sortie du Livre de l'Année internationale de l'alphabétisation; adoption de la plate-forme...
En mars 1993, une version miniature du Grand Livre qui avait circulé à travers le Québec pendant l'Année internationale sera publiée grâce à la collaboration de La Fondation Alpha Pop: le livre de l'Année internationale de l'alphabétisation, qui regroupe une centaine de textes de participantes et participants aux ateliers d'alphabétisation populaire, est enfin disponible!
En juin 1993, on adopte la plate-forme politique du RGPAQ; ce document qui présente le travail d'alphabétisation populaire, démontre la nécessité du réseau d'alphabétisation populaire et présente les revendications des groupes pour la survie et l'amélioration du travail d'alphabétisation.
1994-95
Où l'on voit le RGPAQ, sa combativité raffermie, disposer ses pions et se lancer dans la bataille décisive... Et c'est la victoire!
Dépôt d'un mémoire sur la réforme Axworthy; interventions pendant la campagne électorale provinciale; dépôt de la plate-forme politique auprès du ministre de l'Éducation; sortie du premier numéro de «Mon Journal» (journal des participantes et des participants des groupes d'alphabétisation du RGPAQ)...
Le RGPAQ organise une assemblée publique à Montréal réunissant 500 personnes et quelques artistes, comme Louise Portai, Reine France et Paul Chamberland, pour lancer une campagne en faveur d'un financement accru pour les groupes d'alphabétisation et un plan gouvernemental de lutte contre l'analphabétisme. On a recours à des moyens de pression variés, comme l'envoi de céréales «Alphabits» (en forme de lettres) au ministre de l'Éducation pour lui rappeler nos demandes. On utilise également, pendant la campagne électorale provinciale, une montgolfière arborant le message «Que faites-vous pour les analphabètes?» de manière à rappeler aux politiciens leurs responsabilités. Le travail auprès des médias se développe: plus d'une centaine d'articles seront publiés dans les journaux à travers le Québec au cours de l'année 1994. Il faut mentionner aussi plusieurs rencontres avec le ministre de l'Éducation.
Le RGPAQ fait la première page de «La Presse», pour dénoncer les restrictions dans la mesure «Rattrapage scolaire» de la Sécurité du Revenu. Sylvie Tardif, coordonnatrice d'un groupe d'alphabétisation membre du RGPAQ, est nommée «Personnalité de la semaine».
1995
Le RGPAQ organise un déjeuner aux «Alphabits» dans le hall du ministère de l'Éducation, avec plus de 300 personnes. Le ministre Garon est présent. À l'assemblée générale du RGPAQ, il annonce que les budgets de l'alphabétisation populaire seront doublés: un plancher sera fixé à 25 000$ pour les subventions des groupes, et on dégagera des crédits pour le développement et la création de nouveaux groupes.
À l'occasion de la journée internationale de l'alphabétisation, le 8 septembre, le RGPAQ diffuse les résultats d'un sondage Léger et Léger/RGPAQ portant sur la perception qu'ont les Québécois et Québécoises de la problématique de l'analphabétisme et sur les solutions à mettre de l'avant par le gouvernement du Québec. Le RGPAQ sentait déjà l'appui de la population à ses revendications. Grâce à ce sondage, il a connu l'ampleur de cet appui.
... Cette histoire n'est pas encore terminée! Les années ont passé, ponctuées de déceptions et de victoires, et il reste encore beaucoup à faire. Mais la machine est bien rodée. Et Ton est prêt à relever de nouveaux défis grâce à l'organisation, l'union et la solidarité qui se sont développées tout au long de la lutte.
Voyager! Tout le monde en rêve... Mais devant les multiples possibilités qui s'offrent à nous, comment choisir la façon de voyager qui nous convient, qui respecte nos moyens et notre réalité et qui correspond à notre identité?
Partez en voyage avec nous pour suivre les aventures de nos deux reporters qui vous montreront, chacun à leur façon, l'art de voyager dans l'univers de l'alphabétisation populaire. Pour bien préparer votre départ, jetez un coup d'œil à la planification des activités. Faites une escale à mi-chemin et apprenez ce qu'est une gestion financière démocratique. Laissez-vous ensuite emporter par le récit d'un voyage au pays des structures et du fonctionnement des groupes d'alphabétisation populaire.
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Gérer un groupe populaire en alpha est un défi qui peut (si on ose un peu...) se comparer à l'escalade du mont Everest ou, plus modestement, à l'organisation d'une croisière d'aventures dans des contrées lointaines...
On choisira le type d'aventure en tenant compte des intérêts et des objectifs de chacun, mais aussi en fonction des valeurs partagées par les membres du groupe. Tout choix comporte des avantages et des inconvénients: ou bien une planification stricte, ce qui veut dire que l'on n'aura plus à s'inquiéter en cours de route, mais aussi que l'on n'aura plus son mot à dire sur le trajet ni les sites à visiter; ou alors un voyage à notre rythme, dont nous contrôlons l'itinéraire et l'animation, mais qui doit par conséquent demeurer plus modeste.
Il faut, bien sûr, prévoir: économiser pour se procurer les billets d'avion, valider les passeports, se faire vacciner, trouver quelqu'un pour garder les chats et arroser les plantes, etc., mais l'essentiel est de déterminer ce que nous voulons découvrir et la manière dont nous allons le découvrir. Comment fixer les priorités, choisir l'itinéraire et bien gérer les moyens pour parvenir à destination? Voilà des questions incontournables19.
La planification des activités
Pour planifier ce voyage, on peut se servir de nos expériences antérieures, qu'on ajustera en fonction de l'évaluation qui en a été faite. À cela s'ajoutent les éléments de la conjoncture qui pointent à l'horizon: changements dans la composition du groupe qui fait le voyage organisé, nouveaux sites à visiter, arrêts supplémentaires, nouveaux guides à former, etc. On vérifie ainsi tous les éléments dont on doit tenir compte pour déterminer notre itinéraire. De cette façon, on pourra élaborer une proposition qui sera discutée par les guides et les «participantes et participants-voyageurs».
De façon moins allégorique et plus technique, Yvan Comeau définit la planification de la façon suivante: «La planification est une démarche rationnelle qui consiste à déterminer des objectifs précis et à mettre en œuvre les moyens susceptibles de les atteindre dans les délais prévus.»20
Idéalement, on doit planifier l'ensemble des activités de notre organisme: les activités de sensibilisation et de recrutement des participantes et participants, les activités sociales, les ateliers, la gestion financière, la formation des animatrices et animateurs, la formation des bénévoles, les activités concernant la dynamique interne, les dossiers politiques présents et à venir, notre participation aux divers regroupements, etc. Dans un document sur l'organisation d'un projet d'alphabétisation populaire, Yvan Comeau apporte un éclairage sur les divers aspects de la planification et fournit les informations nécessaires pour bien préparer les activités d'un groupe populaire en alphabétisation.
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Le modèle de planification qu'il propose repose sur sept grands principes21:
1. Étudier le problème
La planification part pratiquement toujours d'un problème, d'une situation indésirable ou d'un besoin qui n'est pas comblé. Étudier le problème signifie en comprendre toutes les facettes, à la fois sociales (les personnes concernées et leurs caractéristiques), économiques (aspects monétaires et matériels), politiques (rapports sociaux entre individus et groupes) et idéologiques (idées, valeurs, croyances et projets de société).
D'où vient ce besoin d'escalader les hauts sommets?
2. Identifier les priorités d'intervention
C'est souvent en recherchant les causes du problème ou en déterminant ses manifestations les plus indésirables pour une population qu'on peut fixer les priorités d'intervention.
Où irons-nous? Dans la Cordillère des Andes ou dans l'Himalaya?
3. Formuler les objectifs
Les objectifs sont des résultats qu'on se propose d'atteindre dans un laps de temps déterminé. Ils peuvent être fixés à court terme (environ six mois), à moyen terme (de un à deux ans) ou à long terme (de trois à cinq ans).
Quel sommet allons-nous escalader? En combien d'étapes? En combien de temps?
4. Préciser les moyens et le suivi
On doit associer, à chacun des objectifs, des moyens précis et identifier les étapes de réalisation. Il faut également prévoir les mécanismes pour assurer le suivi.
À pied, à ski, en raquettes, ou à genoux...?
5. Élaborer le modèle d'évaluation
L'évaluation doit être prévue lors des différentes étapes de la planification afin de vérifier si les objectifs sont atteints et si les moyens choisis sont efficaces.
Une ou deux haltes durant le parcours?
6. Indiquer les ressources matérielles et financières
On indique dans la planification les ressources humaines et financières dont on dispose pour la réalisation des objectifs et moyens choisis. Cette étape peut nous obliger à revoir certains moyens, éliminer tel ou tel objectif et délaisser une priorité.
Cartes, boussoles, câbles, pics, guide de montagneux avion pour se rendre sur les lieux, un stage d'entraînement... des commandites peut-être? Peut-être devrait-on commencer par le Mont-Royal?
7. Fixer un échéancier
Il s'agit d'étaler dans le temps et d'ordonner les moyens, les étapes de réalisation, les moments forts, le suivi, l'évaluation et la disponibilité des ressources.
Quand partons-nous, par quels moyens de transport? Disposons-nous de toutes les ressources nécessaires? Combien d'étapes comportera le voyage? Quel est le jour d'arrivée prévu?
C'est donc à partir de ces grands principes qu'on planifie les activités d'un groupe. Chaque année, les différentes instances (conseil d'administration, assemblée générale, comités, équipe de travail, etc.) doivent se pencher sur un rapport d'activités ou un bilan, à partir duquel elles élaborent un projet d'activités pour l'année suivante.
Une fois le bilan et le projet d'activités discutés, on élabore un calendrier d'activités pour le groupe, pour chaque comité, et pour chacune des activités. Avec le temps, la planification annuelle devient plus facile parce qu'on dispose des bilans et des planifications antérieures et qu'on acquiert de l'expérience dans cet art.
Nous voilà prêtes pour l'escalade de l'Everest!
La gestion des finances: un terrain plutôt accidente!
Un des aspects «inévitables» de la vie d'un groupe est celui des finances. Qu'il s'agisse d'escalader l'Everest ou de faire de l'alpha... il faut un minimum de ressources financières. Quoique bien souvent, on soit contraint de fonctionner avec moins que le minimum vital. Aussi nous faut-il lutter constamment pour obtenir des ressources suffisantes pour poursuivre l'action dans notre milieu. Se doter de calendriers détaillés et bien pensés est indispensable, mais il y a toujours des imprévus. À tout moment, on peut croiser un précipice ou rencontrer une crevasse, une avalanche peut se produire et venir chambarder la planification de notre escalade... Certains de ces incidents sont prévisibles, d'autres non. On est sûr de rencontrer des obstacles au cours d'une année: retard d'une subvention, refus de financer des projets présentés, crevasse apparemment incontournable, etc. Mais on ne sait pas où, quand et combien d'embûches nous rencontrerons avant d'arriver à bon port. Ainsi peut-on, d'une année à l'autre, se retrouver avec une équipe réduite et devoir restreindre nos activités.
La capacité de relever un tel défi - tout comme la gestion financière d'un organisme -comporte des dimensions politiques.
Où va-t-on chercher notre financement? À quelles conditions? Comment gère-t-on nos ressources financières et humaines? Quelles sont les conditions financières faites aux membres de l'équipe? Doit-on compter sur le bénévolat? Et s'il y a des bénévoles, quelle place ces personnes occupent-elles?
Baliser le chemin permet, malgré le vent et la tempête, de maintenir le cap.
Le nerf de la guerre demeure encore et toujours le financement.
Cette partie s'inspire d'un document préparé par Michèle Asselin pour l'R des centres de femmes du Québec à l'occasion d'une session de formation sur la gestion et le fonctionnement des centres de femmes en 1990:
Une gestion financière démocratique
La solidarité devant l'adversité de la nature...
1. Quelques principes de base
2. Quelques moyens
2.1. S'organiser ou se faire organiser:
2.2. Faciliter la compréhension de la gestion financière et de la comptabilité:
2.3. Favoriser une meilleure «implication»:
2.4. Autres pistes:
Une gestion financière saine: quelques moyens
En bref:
Il faut planifier annuellement l'ensemble et chacun des aspects de nos activités. La planification se fait de façon systématique et en plusieurs étapes, afin de n'oublier aucun élément L'expérience et la planification des années précédentes facilite le travail. L'organisation de la gestion financière et sa planification sont des éléments importants de la planification annuelle. Quelques pistes sont données pour gérer de façon plus efficace et démocratiser ce dossier.
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Structures et fonctionnement des groupes populaires en alphabétisation
«J'appelle ploutocratie un état de société où la richesse est le nerf principal des choses.» (Renan)
Il existe, au nord de l'Amérique, dans une contrée dont on n'est pas certain qu'elle soit un pays, un ensemble de petits groupes formant un type de société bien à eux, appelée «ONGALPHA». Munie d'un guide touristique intitulé «Agir ensemble démocratiquement», j'ai pris, par un beau matin ensoleillé, la montgolfière qu'on avait apprêtée pour la visite de ces groupes. J'ai entrepris ce voyage en apportant le petit cahier rouge qui ne me quitte jamais. Voici donc pour vous, lecteurs et lectrices, ces notes livrées en toute sincérité qui sauront, je l'espère, vous faire partager mon enthousiasme.
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Avant le départ
Je m'approche d'un petit groupe et je reconnais la personne avec laquelle j'ai pris entente pour ce voyage un peu inusité. Il semble régner une certaine agitation. Quelqu'un m'explique: «Plusieurs autorisations sont nécessaires pour décoller de cet aéroport. La personne avec laquelle notre guide avait fait affaire, est semble-t-il absente... Personne n'a l'air au courant de notre venue, et encore moins des ententes prises préalablement!» Je suis consternée. Peut-être devrai-je remettre mon voyage...
Une personne s'approche de notre groupe. Cet homme travaille à l'aéroport et vient nous porter les dernières nouvelles. Il faudra attendre encore quelque temps. Notre petit groupe décide de prendre la situation avec un «grain de sel». Chacun y va d'une réflexion un peu ironique, sans avoir l'air de vouloir vraiment s'emporter. Le fonctionnaire qui fait la navette entre nous et la tour de contrôle ne paraît pas s'émouvoir outre mesure de nos remarques.
Je constate l'immense pouvoir de la bureaucratie. À quelques reprises, devant certaines réflexions du fonctionnaire à qui notre guide s'adresse, j'avoue sentir la moutarde me monter au nez. Finalement, notre organisateur utilise sa très grande connaissance du milieu et, faisant jouer ses relations personnelles, réussit à influencer le fonctionnaire peu avenant. Nous obtenons toutes les autorisations dont nous avons besoin et partons d'un cœur léger vers notre aéronef qui oscille légèrement au gré du vent.
Le départ
J'ai mémoire d'autres voyages, vécus dans des pays où l'on dirigeait intentionnellement les étrangers vers des zones dites «touristiques». Je ne sais pas encore si on nous réserve le même genre d'itinéraire. Je me demande si les groupes que je vais rencontrer seront sur la défensive ou bien si, au contraire, ils partageront en toute liberté leur façon de voir, leur façon de vivre la «démocratie». J'ai hâte de les rencontrer mais demeure un peu sceptique quant à leur accueil... Je me demande également s'ils sont aussi démocratiques que mon guide touristique veut me le laisser croire. J'ai une certaine idée de ce que veut dire «démocratie»; j'ai entrevu parfois des sociétés où les décisions se prenaient ensemble, dans un processus qui tenait compte de tout un chacun. Mais je n'ai rencontré qu'en de très rares occasions ce type d'organisation. Généralement, on me présentait des structures dites «démocratiques» alors que trop souvent, ce que j'en percevais et ce que je constatais n'était qu'une bureaucratie déguisée ou même parfois une aristocratie nouveau genre. Je ne demande qu'à me laisser séduire par ce que je verrai...
Le pilote de notre aéronef nous donne les recommandations d'usage, s'informe si nous sommes bien vêtus (il peut faire très froid, là-haut), si nous sommes bien équipés contre la pluie (ça ne pardonne pas en haute altitude), si nous avons pensé à nous munir de lunettes d'approche (c'est tellement beau vu d'en haut...). Je reconnais à ses questions et aux informations qu'il nous donne l'expertise de notre navigateur. Rapidement, il nous explique certaines manœuvres afin que nous partagions l'information et que nous puissions bien réagir en cas de problème. Il nous rassure également, nous explique les manœuvres de décollage, d'atterrissage. En quelques minutes, nous en apprenons plus sur le mécanisme des montgolfières (du moins l'essentiel) que si nous avions lu plusieurs ouvrages techniques à ce sujet. Ce navigateur connaît bien son travail et il sait transmettre l'information de manière à ce que nous nous sentions très vite impliqués dans la réussite du voyage. Je repense au guide «Agir ensemble...» que j'ai lu avant de partir. L'auteur y abordait la question du «pouvoir» et du partage de ce dernier. Il mentionnait quatre sources de pouvoir: l'expertise, la maîtrise des relations, la maîtrise de l'information et la fonction occupée dans un système donné. Je constate que notre navigateur a très vite partagé avec nous certaines informations qu'il possède et que cela a contribué à établir au sein du groupe un climat amical, chaleureux... Décidément, ce voyage s'annonce bien!
Première escale
«Mesdames et messieurs, préparez-vous à l'atterrissage!». Cette voix me tire de la contemplation dans laquelle j'étais plongée. Je retire vivement mes «longues vues» pour constater que le sol se rapproche sensiblement. La fébrilité me gagne: je vais visiter, enfin, mon premier groupe ONGALPHA. De la zone d'atterrissage, des gens nous font de grands gestes de bienvenue. Notre guide-ressource nous mentionne les autorisations qu'il a obtenues et les balises de la rencontre. Nous n'irons pas dans les locaux de l'organisme parce qu'il est situé trop loin du terrain d'atterrissage, mais nous disposons d'une permission de rester au moins deux heures au sol.
Notre guide nous présente à ce premier groupe. Il y a des membres du C.A., délégués par leur A.G., accompagnés de travailleuses et de participantes et participants. J'ai un peu de difficulté à me retrouver dans toutes ces abréviations. La simplicité étant au rendez-vous, je me risque à poser certaines questions. Les échanges sont faciles, parfois notre guide-ressource «traduit» pour nous certains mots inusités, nouveaux à nos oreilles.
C'est ainsi que je retiens de cette première escale que les personnes du groupe qui étaient présentes à la rencontre, ont été déléguées par l'ensemble des membres de l'assemblée générale. Les membres se réunissent plusieurs fois par année afin de se tenir au courant des principaux dossiers de l'organisme: les finances, les activités, les événements spéciaux, les liens avec d'autres groupes comme le leur... La réunion de tous les membres s'appelle A.G.: Assemblée générale. Les membres de ce groupe proviennent de différents «secteurs»: il y a des personnes de l'extérieur (qui représentent le milieu dans lequel le groupe est implanté), des personnes qui fréquentent l'organisme (à titre d'usagers des services), des travailleuses (qui représentent l'ensemble des employées) et, finalement, la personne qui coordonne, au quotidien, les différentes activités.
Cette assemblée élit des personnes qui vont voir à gérer le groupe, selon les décisions qui auront été prises au cours des assemblées générales. Ces personnes élues forment le C.A.: Conseil d'administration. Dans le groupe que nous avons visité au cours de cette première escale, les membres du C.A. sont élus proportionnellement selon leur provenance. Ainsi, certains représentent des personnes du milieu, d'autres des travailleuses et d'autres enfin, les participantes et participants (ou usagers des services). Je me souviens de la description lue dans mon guide «Agir ensemble démocratiquement» (p.35) à propos du modèle de concertation sociale et elle me semble correspondre tout à fait à ce que j'observe au cours de cette rencontre.
Certaines personnes présentes démontrent un très grand pouvoir d'information et un pouvoir relié à la fonction même qu'elles occupent au sein de l'organisme. D'autres possèdent une expertise propre... Au fur et à mesure que nous échangeons avec elles, je prends conscience qu'il y a un partage des pouvoirs. Chacun intervient librement dans la conversation, de façon spontanée, sans qu'il semble exister de contraintes entre les membres.
Ainsi, il existe divers modèles d'organisation dans les groupes faisant partie de l'ONGALPHA. Mon guide touristique ne m'avait donc pas induite en erreur! Nous repartons vers une autre destination, après deux heures d'échanges solides et animés. Au moment des remerciements, alors que je dis (bien naïvement, je dois l'avouer) «Merci pour votre participation active à notre première visite des groupes de ONGALPHA...», un éclat de rire m'interrompt. Je reste un peu perplexe, légèrement vexée, quand un membre du groupe me demande: «Qu'est-ce que c'est ça, ONGALPHA?» Je me mets en devoir de lui raconter ce que j'ai lu... Je suis de nouveau interrompue par une autre personne qui m'explique la signification de O.N.G., en alpha. J'avoue que je ris, mais un peu jaune... Je m'étais fait une «image» de ce qu'étaient les O.N.G. ALPHA mais je ne savais pas qu'il en existait plusieurs sortes... en alpha comme dans d'autres domaines. On m'informe d'ailleurs que ce terme est peu utilisé dans le milieu. On va plutôt dire «groupe d'alphabétisation», «groupe d'alpha pop»... Je repars donc avec de nouveaux vocables à inscrire dans mon petit cahier rouge, tout en me disant que j'aimais bien croire que l'ONGALPHA existait réellement, comme un espace à découvrir, à conquérir, à séduire...
«Il y a aussi les changements technologiques. (...) Ça prend moins de monde pour faire le travail. Plus il y a de monde en chômage, plus les employeurs ont le choix. Ils prennent la crème. Comme il y a moins de crème que de lait, à un moment donné, il ne va rester que du petit-lait. C'est nous le petit-lait. Ils vont bien finir par nous prendre.»
Réal. Extrait d'une entrevue réalisée par Richard Latendresse, RGPAQ, Le Monde alphabétique, n° 5. été 1993. p. 35.
...«Je fais partie du conseil d'administration de la Forte Ouverte. J'étais porte-parole à la Porte Ouverte pour l'Année Internationale de l'alphabétisation. J'ai passé dans le Lundi, à la télévision, dans les églises(...). J'ai même fait passer des entrevues à du monde qui venait s'inscrire. Les gens sont gênés. Moi je les embarque, je les mets à l'aise(...).»
Jean-Claude Daneau. Extrait d'une entrevue réalisée par Pierre Simard, RGPAQ. Le Monde alphabétique, n°2, automne-hiver 1991, p. 54.
Deuxième escale
Nous venons de terminer notre dîner frugal, à quelques centaines de pieds dans les airs, lorsque notre guide nous signale que le deuxième terrain d'atterrissage est en vue. Nous nous préparons joyeusement à la descente, convaincus, forts de notre première expérience, d'être bien reçus. L'arrivée est tout aussi intéressante que la première fois.
Ce qui nous frappe de prime abord, dans ce deuxième groupe, c'est la composition de la délégation qui nous reçoit dans ses locaux. Seules des travailleuses de l'organisme sont présentes. On nous apprend que la structure de représentation du groupe est calquée sur celle des collectives de femmes. «Dans l'organisme, ce qui prime, ce sont les rapports de travail», me dis-je en pensant à ce que j'ai lu dans «Agir ensemble...»
Il s'agit d'un collectif auto-gestionnaire; la gestion du groupe est assumée entièrement par les personnes qui y travaillent. Le collectif des travailleuses tient lieu d'assemblée générale et de conseil d'administration. Je ne peux m'empêcher de penser que cela fait beaucoup de responsabilité pour les mômes personnes... Par contre, on nous mentionne à quel point c'est plus facile et plus simple d'en arriver à un consensus lorsqu'il y a des décisions à prendre. Comme les gens souhaitent établir des rapports de travail égalitaires, la prise de décision se fait de façon «ultra-démocratique». Dans l'équipe des travailleuses, l'expertise et les forces de chacune sont mises à contribution, au service de l'ensemble du groupe. Les informations sont partagées davantage au quotidien, car la structure formelle et la structure informelle sont très proches l'une et l'autre.
Quelqu'un s'interroge sur la place des usagers, des participantes et participants, comme on dit dans le milieu. Le collectif nous présente alors la structure et les lieux où se manifestent concrètement les personnes qui suivent la formation dans l'organisme. Il existe un comité de participantes et participants, qui s'occupe entre autres d'organiser des fêtes lors d'événements spéciaux comme la Journée internationale de l'alphabétisation (le 8 septembre), la Journée internationale des femmes (le 8 mars). Un autre petit comité s'occupe, quant à lui, du journal interne de l'organisme. Ces comités sont appuyés par les travailleuses qui y apportent un support technique.
Je remarque le même enthousiasme, face au travail à accomplir, dans ce groupe que dans celui que nous avons rencontré lors de notre première escale. Par ailleurs, une réflexion de l'auteur d'«Agir ensemble» me revient en mémoire: «... les règles et les structures jouent un rôle positif lorsqu'elles clarifient et équilibrent les rapports entre les différentes composantes d'une réalité» (p. 9). Lorsque je prends le temps de m'arrêter et de réfléchir à ce que ces travailleuses nous ont fait découvrir comparativement au premier groupe rencontré, je me rappelle que les modèles et les structures d'organisation démocratique sont diversifiés et «même doivent varier selon les besoins et les conditions de chaque milieu» (p. 23 de mon guide).
Nous repartons avec le «vent dans les voiles» tout en nous demandant où nous passerons l'heure du prochain repas et où nous irons dormir... Notre guide-ressource s'empresse de nous rassurer et c'est d'un cœur léger que nous quittons cette équipe charmante pour nous diriger allègrement vers notre lieu d'hébergement
Durant la nuit, le ciel déverse des torrents de pluie et au petit matin, au moment du départ, c'est un ciel serein qui nous convie à l'envolée.
Troisième escale
Notre astronef nous balade au gré du vent et nous en profitons pour prendre quelques photos de paysages enchanteurs. La troisième escale est prévue pour la fin de l'avant-midi, ce qui nous laisse du temps pour bavarder entre nous. Pris dans la conversation générale, nous ne remarquons pas que le ciel s'obscurcit jusqu'au moment où notre «navigateur» nous conseille vivement de nous préparer à essuyer une bonne averse. La température baisse considérablement et, par mesure de précaution, à cause du vent qui s'est élevé, nous atterrissons en catastrophe dans une prairie verdoyante.
À peine sommes-nous descendus qu'une jeep s'approche de notre lieu d'atterrissage. La personne qui la conduit ne semble guère de charmante humeur. Elle nous demande un peu rudement ce que nous faisons là. Nous apprenons que nous sommes sur un terrain privé, possession d'un riche propriétaire terrien, et que nous devons quitter les lieux dans les plus brefs délais. Notre navigateur fait valoir le mauvais temps, explique le but de notre expédition et, finalement, réussit à convaincre notre interlocuteur de l'emmener rencontrer le «patron». En attendant son retour, nous nous mettons à l'abri. Nous sommes plusieurs à prendre cette aventure un peu à la légère, tout en la teintant d'un brin de romantisme.
Après quelques minutes d'attente, le propriétaire en personne vient à notre rencontre et nous propose l'hébergement. Finalement, le beau temps réapparaît et nous quittons notre hôte, véritable aristocrate, avec un certain soulagement, en nous disant que décidément, nous sommes d'un autre monde. Je ne peux m'empêcher de penser à toute cette élite, de naissance ou d'argent, qui mène les destinées de plusieurs pays... Je me dis qu'heureusement, il existe d'autres formes de pouvoir qui, même si elles sont limitées, permettent à un plus grand nombre de personnes de prendre leur place et d'avoir quelque influence sur leur propre vie!
Quatrième escale
À cause du mauvais temps, c'est un groupe de personnes inquiètes de notre sort qui nous accueille à notre descente de la montgolfière. Nous les rassurons et les suivons, répartis dans divers véhicules qui nous amènent aux locaux de l'organisme. Quel contraste avec notre escale précédente! Ici, le groupe est constitué d'une majorité de personnes très peu scolarisées, tout le contraire d'une élite... Nous nous informons sur leur manière de fonctionner, sur leurs structures de représentation. Tout comme le premier groupe, ils fonctionnent avec une assemblée générale composée majoritairement de participantes et participants aux activités. Les travailleuses en font également partie. Plusieurs comités gravitent autour de cette assemblée: comité des fêtes, comité des activités d'auto-financement, comité journal, comité de sensibilisation, etc. Nous constatons que dans toutes les structures, ce sont majoritairement des participantes et participants qui sont présents et engagés activement.
Les travailleuses nous expliquent de quelle façon elles s'y prennent pour améliorer la circulation de l'information et la saine prise de décision. Les efforts sont vraiment orientés vers une plus grande accessibilité et une vulgarisation de l'information. Les textes remis en assemblée générale ou au conseil d'administration, sont simples, courts et toujours présentés d'abord oralement pour demeurer accessibles à tous. Nous constatons que toutes les structures et le fonctionnement du groupe sont axés sur les participantes et participants. Je repense à mon guide «Agir ensemble...» et je note la différence entre le groupe auto-gestionnaire et celui-ci, axé sur la prise en charge par les participantes et participants. Dans le premier cas, ce sont vraiment les structures et les conditions dans lesquelles se vit le travail qui priment, alors que dans celui-ci, ce sont les conditions et les échanges associés aux services et aux personnes participantes qui ont pris les devants. Je me demande quelle place les travailleuses occupent dans cette structure, même si je constate que celles-ci semblent tout à fait à l'aise dans ce type d'organisation; les participantes et participants semblent respecter leur expertise et la fonction importante qu'elles remplissent au sein de l'organisme.
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Le retour
Nous repartons la tête pleine des conversations et échanges qui viennent d'avoir lieu. Certains s'endorment au cours du trajet qui nous ramène à notre point de départ. Je reste impressionnée par ce que j'ai vu, par les personnes que j'ai rencontrées, par ce que j'ai entendu. Je constate que les trois groupes que j'ai eu le plaisir de rencontrer sont vraiment axés vers une démocratisation et partagent, malgré leurs structures différentes, un même souci «d'aménager la plus large part possible au développement collectif et à l'épanouissement individuel» («Agir ensemble», p. 23) Mais ce qui me frappe, après ce long périple qui n'aura pourtant duré que deux jours, c'est la diversité des formes de pouvoir qui cohabitent dans la société.
Je me remémore certaines étapes de notre voyage. Je repense au pouvoir de la bureaucratie (influence abusive de l'administration), à celui de l'aristocratie (pouvoir et influence de l'élite), parfois doublé de pouvoir autocratique (qui gouverne par lui-même). Je me considère privilégiée d'avoir pu rencontrer d'autres types de structures. Derrière les divers modèles rencontrés, existent d'abord des personnes avides de partager, entre elles et dans le respect de leurs différences, le pouvoir.
Je sais également que cette démocratie nécessite des mécanismes pour s'actualiser, se concrétiser, au jour le jour. Ces mécanismes, je l'ai constaté, touchent d'abord la circulation de l'information. On ne peut faire des choix, librement, que si on est informé... Ensuite, en lien avec ce qui précède, la prise de décision constitue un autre mécanisme incontournable et nécessite une réelle implication de toutes les personnes qui sont concernées. En ce sens, la participation devient elle aussi un mécanisme primordial à la démocratisation des organisations.
Il est vrai que certains mécanismes aident à concrétiser les principes démocratiques, mais encore faut-il que la volonté de toutes et tous de faire en sorte que tout cela s'actualise soit présente. Et c'est dans les petits événements de la quotidienneté que ces moyens prennent tout leur sens. Les personnes impliquées doivent constamment investir des efforts dans ce type d'organisation, parce qu'elles ne sont pas toutes rendues au même point et au même moment, et parce que la responsabilité collective, en tant que but à atteindre, n'est jamais tout à fait acquise....
Je me dis encore, au moment de notre dernier atterrissage, au moment où nous sommes sur le point de nous quitter, qu'il est tout de même étonnant que dans un monde de plus en plus «ploutocratique», il existe des espaces où «à des degrés divers selon les possibilités du milieu concret, on prendra les moyens d'élargir la démocratie, d'accorder à chaque personne, ni plus, ni moins, que la valeur unique qui est la sienne dans la société», Agir ensemble, p. 10). Je me dis finalement que le guide touristique que j'ai consulté ne m'a pas menti. Je suis revenue de cette croisière pour en témoigner!!!
«Il y a deux ans ja ete malade. Grâce a DECLIC jai repree confiance en moi, parce que je sais mieux lire et et écrire la vie est plus belle pour moi».
Florent Mayer. RGFAQ/Fondation Alpha Pop. Le livre de l'Année Internationale de l'alphabétisation. Montréal, 1993, p. 62.
Ce voyage remonte déjà à quelque temps. On m'avait demandé un article sur le sujet, mais je n'osais trop m'y mettre, pensant que j'aurais oublié...
J'ai relu mes notes de voyage et les ayant (à peine) remaniées, je me suis risquée à commettre ce texte. J'ai pensé que d'autres néophytes, comme moi, trouveraient plaisir à lire ces quelques réflexions et que devant ma naïveté, ma foi, ils pourraient rigoler.
Je demeure un peu songeuse lorsque je repense à certains courants traversés au cours de ce voyage.
Je ne peux m'empêcher de penser que le fait de vouloir s'organiser de façon démocratique, dans une société ploutocratique et bureaucratisée comme la nôtre, peut sembler un peu archaïque... Par contre, je me dis que sans utopie, que deviendraient tous les rêveurs et les rêveuses qui, retroussant leurs manches, cherchent à concrétiser avec d'autres, plus pragmatiques, ce monde un peu meilleur qui laisse place à l'imaginaire, à la créativité et à la prise de parole de ceux et celles qui n'ont souvent plus de rêves...
Chers lecteurs et lectrices, Il nous fait plaisir de vous présenter notre personnalité vedette. Comme chaque mois, nous avons sillonné le vaste monde des gens célèbres sinon riches, et notre journaliste a rencontré, pour vous, cette vedette peu connue du grand public mais dont le talent transparaît chez divers interprètes: «La conscientisation».
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Q.
Parlez-nous de vos origines...
R.
Je suis venue au monde dans l'hémisphère sud de la planète. Dans ces contrées, le savoir était l'apanage de l'élite. On croyait que richesse était synonyme de savoir et que pauvreté était synonyme d'ignorance. Un jour, quelqu'un, nommé Freire, s'est élevé contre cette perception et a déclaré que richesse était synonyme de pouvoir et qu'il y avait abus de ce pouvoir. En effet, tous étaient convaincus que le monde devait fonctionner de cette façon: Richesse conservait son pouvoir et son savoir et Pauvreté nourrissait sa soumission et son ignorance. J'ai donc pris racine dans la pensée de cet homme et, petit à petit, j'ai pris forme. On me nomma «Conscientisation».
Q.
Depuis ce temps, vous avez beaucoup voyagé...
R.
En effet, je suis restée confinée pendant quelques années dans l'hémisphère sud mais des explorateurs venus du nord m'ont ramenée avec eux, dans leurs bagages. Je m'en souviens comme si c'était hier. Eux aussi questionnaient les concepts du savoir et du pouvoir... Ils n'étaient pas les seuls. Dans ce temps-là, partout sur la planète, on réévaluait plusieurs règles... Dans certains pays où j'ai élu domicile, on parlait de révolution...
Je suis arrivée chez vous vers la fin de la révolution dite «tranquille». Comme plusieurs institutions sociales, l'éducation était remise en question. On parlait de plus en plus d'une «autre éducation» mais on avait de la difficulté à la définir. Disons que mon arrivée ici a coïncidé avec le désir de plusieurs animateurs sociaux de cette époque de bâtir quelque chose de nouveau AVEC les personnes démunies.
Q.
En quoi étiez-vous différente?
R.
J'étais et je suis ENCORE différente! Quand je constate l'évolution sociale, je puis affirmer que je suis tout à fait actuelle et intéressante, encore plus dans le contexte socio-économique qui règne en ce moment. Ma principale caractéristique est de considérer que le manque d'instruction n'est pas un problème d'ordre personnel, mais un phénomène social lié à la pauvreté qui elle, est entretenue par les plus riches. Les gens ne sont pas ignorants par paresse, manque d'intérêt ou sottise comme on voudrait nous le faire croire. Les gens sont ignorants parce qu'il en va de l'intérêt des riches de les maintenir dans cet état et parce que le seul savoir reconnu et valorisé est uniquement celui de l'élite, celle qui a étudié dans les grandes écoles. Les pauvres, eux, ont rarement accès aux études avancées; quoiqu'on en dise, vous savez, elles ne sont pas gratuites, même ici. De plus, depuis qu'ils sont tout jeunes, on bafoue les pauvres, on écarte la culture populaire des écoles. Comment voulez-vous qu'ils soient tentés par des études alors que le milieu scolaire nie constamment leur identité propre? Mais je m'emporte et je m'éloigne quelque peu de mon propos... Si jamais le sujet vous intéresse, lisez donc «Les enfants n'aiment pas la pédagogie», de Madame Janine Holht. Vous comprendrez aisément que c'est du mutisme exigé des enfants par l'école que naît l'analphabétisme des adultes. Mais revenons à nos moutons.
Ah oui! ma différence...
Je dirais qu'elle se remarque d'abord et avant tout par la façon dont les animateurs et animatrices font leur travail. Tout d'abord, contrairement aux profs traditionnels, ces gens-là s'efforcent de connaître le milieu de vie des personnes à qui ils enseignent et consultent régulièrement ces dernières pour s'enquérir de leurs besoins, de leurs intérêts, de ce qu'ils pensent. Leurs cours sont bâtis en fonction des personnes et non pas d'un programme normatif.
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Ensuite (ou en même temps), les animateurs et animatrices ne pensent pas être les seuls à détenir l'ensemble du savoir. Ils vont susciter la participation de tout un chacun, parce qu'ils sont convaincus que les savoirs individuels des personnes ont beaucoup de valeur et qu'ils enrichissent les groupes. Ne s'estimant pas au-dessus du groupe, ils en font partie bien qu'ils aient un rôle précis à jouer. Us reconnaissent également que les participantes et participants ne sont pas des objets. Ce sont des personnes qui, tout en faisant une démarche d'apprentissage, reprennent un pouvoir sur leur vie. Ce pouvoir, que les gens retrouvent, les amènera à vouloir agir sur leur milieu afin de s'y impliquer et d'y changer des choses.
Ah, le savoir! Dans les sociétés modernes, on l'a compartimenté, découpé en unités d'apprentissage et on l'a assorti de diplômes qui sont sensés prouver que ceux qui les détiennent possèdent ce savoir. «L'autre éducation», celle qui se nourrit de la vraie vie, qui se passe avec le vrai monde, considère que le savoir est une richesse collective à partager.
Q.
Oui, mais vous ne pouvez nier, Madame, qu'il existe des gens qui, objectivement, ne savent pas...
R.
... lire ni écrire, oui, je suis au courant. C'est d'ailleurs une des raisons qui font que je demeure d'actualité. Vous savez sans doute que je suis née de cette réalité: l'analphabétisme des gens du Sud. Ce sont des personnes qui travaillaient en alphabétisation qui m'ont ramenée chez vous.
Je vais vous raconter une anecdote qui, je crois, vous permettra de mieux me connaître. Il y a quelques années, dans un quartier de Montréal, un groupe de personnes dont plusieurs étaient sans emploi suivait un cours d'alphabétisation dans un organisme populaire. Plusieurs d'entre elles se plaignaient de l'accueil qu'on leur réservait au bureau de chômage et souhaitaient que ça change. Leurs griefs contre les fonctionnaires étaient diversifiés. L'animateur du groupe les a alors invités à manifester leur mécontentement et à chercher à solutionner leur problème.
Les personnes auraient bien aimé faire quelque chose, mais elles ne savaient trop comment s'y prendre. Le groupe s'est mis à discuter et a finalement arrêté un plan d'action relativement simple. Un des participants a été mandaté par les autres pour prendre contact avec le bureau de chômage. Il s'agissait de rencontrer les fonctionnaires de l'endroit. Les gens se disaient que s'ils se mettaient à plusieurs, on serait bien obligé de les écouter. Comme les appels téléphoniques ne semblaient pas porter fruit, le groupe a décidé d'écrire une lettre adressée à la personne responsable du bureau. Leur demande était toujours la même: ils souhaitaient rencontrer les membres du personnel pour les rendre plus sensibles et attentifs aux besoins des personnes analphabètes qui s'adressaient à eux.
Le responsable a communiqué avec l'organisme et s'est rendu à ses locaux. Il a donné une mini-conférence, présenté les services offerts par le bureau de chômage, parlé des programmes. Les gens présents lui ont posé des questions, lui ont parlé aussi de l'attitude des fonctionnaires. Ils ont fait part également de leur déception: ce qu'ils avaient demandé n'avait pas été entendu. Le responsable pensait qu'il avait pris une bonne décision d'aller rencontrer les gens, mais il ne semblait pas très «chaud» à l'idée que ces personnes se rendent dans son bureau, rencontrer ses confrères.
La démarche entreprise par le groupe semblait avoir échoué. On se retrouvait avec de beaux feuillets publicitaires, mais on n'avait pas le sentiment d'avoir été compris. C'est alors qu'un participant eut l'idée d'écrire aux journaux, dont celui du quartier. Il fallait beaucoup de courage à ces personnes pour rendre leur situation publique, car quiconque lirait le journal saurait qu'elles avaient de la difficulté à lire et à écrire. Elles décidèrent de courir le risque et le résultat dépassa leurs attentes!
Le lendemain de la parution du journal, le responsable du bureau de chômage les contacta. Il les invitait à venir le rencontrer dans son bureau. La suite de cette histoire est des plus concluantes. À partir de ce moment-là, les fonctionnaires, sensibilisés aux problèmes des personnes analphabètes, changèrent d'attitude. De plus, certains fonctionnaires se mirent à référer de nouveaux participants à l'organisme d'alphabétisation!
Vous voyez ce que les gens qui adoptent mon approche deviennent capables d'accomplir? Cette démarche a amené les participantes et les participants à agir sur leur milieu tout en apprenant. L'animateur, lui, a partagé ses connaissances notionnelles et a ainsi aidé le groupe à actualiser un changement d'attitude et à défendre ses droits face à la bureaucratie. Évidemment, cette démarche ne peut se faire que dans un esprit d'entraide, de partage, de confiance... C'est ainsi que les gens apprennent les uns des autres...
Q.
À propos d'apprentissage, vous êtes au courant des méthodes existantes en alphabétisation. Avec laquelle ou lesquelles vous sentez-vous le plus à l'aise?
R.
Laissez-moi le temps de réfléchir un peu. Attendez que je me rappelle... Au début, quand je suis arrivée au Québec, il n'y avait pas eu beaucoup d'expériences d'alphabétisation qui avaient été tentées... Tout cet univers était en exploration. Vous savez, c'était plus simple dans les régions où je suis née. Mon approche était aussi une méthode. On travaillait avec des images «déclencheurs», et l'animateur ou l'animatrice prenait en note les mots qui revenaient le plus souvent dans la description verbale de cette image et dans la discussion qui suivait. Ensuite, on utilisait ces mots comme repères notionnels, et l'animateur bâtissait la leçon autour d'eux.
Ici, c'était différent. On n'a pas eu la même facilité avec l'aspect méthodologique de mon approche. Je pense que c'est à cause de la différence de langue et de l'orthographe particulière du français. On a essayé de conserver la méthode syllabique, qui était la plus connue, mais on s'est vite rendu compte qu'elle allait à l'encontre de l'esprit qui m'animait. De plus, cette méthode présentait le contenu notionnel comme à la petite école. Les textes qui pouvaient être lus étaient un peu insignifiants. Elle était beaucoup axée sur le côté «mécanique» de la lecture. C'est comme si on avait voulu montrer comment construire une maison tout en présentant les outils un à un et en demandant aux personnes de tout connaître de chaque outil avant même de commencer à s'en servir. Faire de la conscientisation tout en utilisant une méthode qui infantilisait l'apprentissage des adultes était contradictoire. On a donc laissé tomber la méthode syllabique.
Ensuite, pour se rapprocher le plus possible de mes origines, on a utilisé les discussions de groupe comme matériel notionnel. Un sujet était apporté en atelier et les gens étaient invités à échanger à son propos. L'animateur ou l'animatrice prenait en note les propos des participantes et participants, sur le sujet donné, et s'en servait pour bâtir l'aspect notionnel de ses ateliers. Cette méthode avait un avantage certain: elle permettait de réinvestir les discussions d'atelier par un autre biais, celui de l'apprentissage de la lecture et de l'écriture. La méthode globale, c'est ainsi qu'elle se nomme, avait comme principal avantage de valoriser le discours des participantes et participants. Ce qui est écrit noir sur blanc a en effet beaucoup de valeur pour tous. Elle offrait la possibilité de travailler de façon plus dynamique, puisque le contenu était connu de tous et que les participantes et les participants en étaient les auteurs. Elle est encore utilisée dans plusieurs groupes populaires. Le seul inconvénient, c'est que cette méthode est difficilement applicable avec des personnes qui débutent vraiment leur apprentissage. Celles-ci procèdent souvent par essai et erreur et tentent d'emmagasiner tous les mots qu'elles voient «par cœur». Cela crée chez elles un grand stress. Par contre, pour des personnes qui décodent un peu, disons que cette méthode est nettement plus intéressante et plus proche aussi de ma façon de voir l'apprentissage: tout le monde participe à l'élaboration des contenus, les sujets sont apportés par les gens et donc près de leur réalité. Je me sens à l'aise avec la méthode globale si elle est utilisée dans un contexte qui respecte les capacités et le rythme d'apprentissage des personnes à qui elle s'adresse.
Bon, voyons... À quelle autre méthode ai-je été présentée? Ah oui, la méthode mixte! Cette méthode a été largement inspirée à la fois de la phonétique et de la méthode globale. Le problème, c'est qu'elle a aussi un vocabulaire qui s'apparente à la méthode syllabique. J'en perds un peu la tête, je vous avoue. Disons que parfois, les animateurs ou animatrices, dans le but de diversifier leurs explications, y ont recours, avec quelquefois de bons résultats, d'autres fois, non... Mais si l'esprit qui les anime consiste à tenir compte des différences dans les modes d'apprentissage, à simplifier certaines données pas toujours évidentes, et à rendre la tâche plus claire pour les participantes et participants, je m'y sens relativement à l'aise. Il faut dire que tout dépend de l'attitude des animateurs et animatrices par rapport au savoir. Dans la mesure où ils ont conscience que les participantes et les participants ne sont pas des êtres passifs, en attente, mais des personnes agissantes qui ont des questions face aux notions, dans la mesure aussi où les animateurs et animatrices se sentent à l'aise d'inclure dans leurs «cours» ces questions et ces commentaires, je dirais que tant la méthode mixte que la méthode phonétique sont conciliables avec moi, tout comme la méthode globale dont je vous ai parlé précédemment.
«Nous souhaitons que le Ministre de l'Immigration reconsidère le cas des haïtiens qu'il veut déporter en Haïti. Il faut arrêter toutes démarches de déportation contre eux parce que nous savons tous que la situation politique en Haïti est instable et est actuellement très controversée, donc, c'est mettre en péril la vie de tous ces braves gens. Alors que ces personnes ont eu le temps de s'intégrer au Québec, nous jugeons que c'est tout à fait juste qu'ils y demeurent».
Un groupe d'apprenants de la classe d'Elvire à la Maison d'Haïti. (Traduit du créole)
RGPAQ/Fondation Alpha Pop. Le livre de l'Année internationale de l'alphabétisation, Montréal, 1993, p. 131.
Ceci m'amène à vous parler de la méthode phonétique. Disons qu'elle complète bien la méthode globale lorsqu'il s'agit d'aborder l'apprentissage avec des personnes très peu alphabétisées. Cette méthode a été systématisée au cours des dernières années. Elle a vraiment pris naissance en alphabétisation populaire, contrairement aux trois autres qui avaient été expérimentées en milieu scolaire, auprès d'enfants en apprentissage. Le principal avantage de cette pratique d'alphabétisation est qu'elle part de ce que tout adulte connaît, c'est-à-dire l'articulation verbale de sa pensée. Tout le monde sait parler, de façon intelligible.
Donc, tout le monde connaît la grammaire, celle qui est orale, et tout le monde connaît les phonèmes puisque la langue parlée est d'abord et avant tout un système de communication orale. Pour chaque son, les participantes et participants sont mis à contribution dans une perspective dynamique, afin d'alimenter la «banque de mots» qui servira à apprendre à lire. Ces mots sont pris en note par l'animateur ou l'animatrice qui les utilisera tout au long de l'apprentissage du nouveau son. Les gens savent reconnaître les sons, oralement, et après avoir bien identifié les lettres qui forment ces sons, dans des mots signifiants qu'ils ont apportés, ils sauront les lire dans des phrases. Tout au long de la démarche, l'animateur ou l'animatrice, se reporte au groupe, à sa connaissance de la parole. Qu'il s'agisse d'une règle de grammaire ou d'un nouveau son, l'animateur ou l'animatrice part toujours de ce que les gens savent, au niveau du langage. Cette façon de faire revalorise énormément les personnes et les sécurise tout à la fois. Elles deviennent partie prenante de leur apprentissage. Le «savoir-dire» (la tradition orale, diraient les anthropologues) reprend ses lettres de noblesse et sert d'assise au reste, c'est à dire le savoir-lire et écrire. Il n'est pas question de mutisme avec une telle méthode!
Finalement, tout dernièrement, j'ai été mise en contact avec une méthode tout à fait novatrice qui sans doute fera son chemin et pour laquelle je me reconnais certaines attirances. Par contre, elle dérange un peu car elle bouscule tous nos préjugés sur la meilleure façon d'apprendre à lire et à écrire. Essentiellement, le langage intégré prétend que c'est en ÉCRIVANT que les gens apprennent le mieux à lire. C'est un peu renversant, avouons-le! Pourtant, en y regardant de plus près, la démarche me semble très intéressante et très compatible avec les visées que je mets de l'avant depuis toutes ces années. En effet, l'animateur ou l'animatrice devient un modèle servant de démonstrateur à ses participantes et participants. On parle de «modèle scripteur». Il demande au groupe de lui suggérer un sujet et devant lui, se met en action d'écriture. Son rôle consiste à dire à voix haute, au fur et à mesure qu'elles se présentent, toutes les interrogations qui lui viennent à l'esprit relativement à l'acte d'écrire. Cela peut aller de la recherche d'une idée, en passant par l'orthographe d'un mot ou encore par une question d'ordre syntaxique. Les participantes et participants sont les témoins de ces questionnements et par le fait même, l'écrit est démystifié. On ne peut que constater que TOUT le monde éprouve face à l'écrit des hésitations, des questionnements... Et l'écrit reprend sa raison d'être, c'est-à-dire «communiquer par des signes intelligibles une idée qu'on a dans la tête». N'est-ce pas là le but de la lecture et de l'écriture: communiquer, échanger, partager des connaissances, des informations?
Comme vous pouvez le constater, mise à part la méthode syllabique avec laquelle je n'ai vraiment aucun point commun, les autres méthodes me plaisent. Par contre, j'aurais envie de vous dire que le langage intégré est ce qui me rejoint le plus parce qu'il dérange, tout comme moi je l'ai fait lorsque j'ai commencé à me faire entendre...
Q.
Vous nous avez parlé du passé, du présent mais quel avenir entrevoyez-vous pour les prochaines années?
R.
Lorsque j'observe comment va le monde, partout sur la planète, je crois que je vais être très occupée. Vous savez, il y aura de plus en plus de raisons de développer le sens critique collectif et de se faire entendre. Et puis, il deviendra de plus en plus urgent... d'agir!
Dans ce nouvel épisode de notre palpitant roman-feuilleton, notre héroïne se retrouvera plongée dans la grande aventure de l'alphabétisation populaire. Quelles seront ses motivations? Aura-t-elle l'expérience et les qualités nécessaires? Comment vivra-t-elle les premiers moments en alpha?
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Nous avons vu dans les chapitres précédents que notre héroïne, «L», après une enfance et une adolescence heureuses à Trois-Pistoles, déménage en Estrie. Elle y travaille dans différents groupes populaires: maison déjeunes, groupe de défense des personnes assistées sociales, journal communautaire.
«L» est une personne très engagée dans son milieu. Elle milite entre autres dans le mouvement écologique où, lors d'une action d'éclat, elle rencontre un riche fils d'armateur grec qui deviendra le père de son enfant. Elle participe aussi à toutes les démarches organisées pour la mise sur pied d'une garderie dont elle devient, par la suite, membre du conseil d'administration. Au cours d'une période difficile où elle se sépare et devient cheffe de famille monoparentale, elle découvre le centre de femmes où elle trouve un soutien important. À travers ces expériences, elle est surprise de rencontrer des personnes qui ont de la difficulté à lire et à écrire et son souci alors est de rendre l'information plus accessible. Nous avons quitté notre héroïne au moment où elle décidait de déménager à Québec avec son enfant I Grec. Retrouvons-la attablée dans un bar un peu fou de la rue St-Jean pour la suite de ses aventures.
Chapitre 13
«L» vient d'ouvrir un journal et elle semble déjà très absorbée par sa lecture. A la table voisine, un beau jeune homme l'observe avec intérêt. Il l'a remarquée dès son entrée et l'a suivie des yeux jusqu'à sa table. Il ne peut plus détourner son regard d'elle. Il est très attiré et sent l'urgence d'agir.
Il se lève, se dirige vers elle et l'aborde. N'ayant pas préparé son entrée, il est satisfait d'entendre que ce qui sort de sa bouche ne fait pas trop «cliché».
Ça ne fait pas vraiment «cliché», plutôt prétexte cousu de fil blanc, puisqu'une pile de ces journaux gratuits trône juste à l'entrée du bar. Heureusement pour lui, elle ne le voit pas venir avec ses gros sabots et répond candidement:
Elle remarque une étrange réaction sur le visage de son nouvel interlocuteur. De peur qu'il interprète ses paroles comme le signe qu'elle est seule et cherche l'âme sœur, ce qui est vrai du reste, elle s'empresse d'ajouter qu'elle trouve ces messages romantiques ou humoristiques et souvent surprenants.
Elle ajoute qu'elle vient de lire le message d'un blond aux yeux bleus, à la conscience sociale plus développée que les muscles, fervent d'espaces verts et de bicyclette.
Lui, de son côté, sent ses jambes ramollir et n'ose avouer qu'il est le blond aux yeux bleus du journal. Pour ne pas perdre pied, il s'empresse de lui dire qu'il s'appelle «X-Y», son nom de famille est «Z» mais que généralement, quand il signe, il se contente de faire un «X».
Elle lui dit qu'elle s'appelle «L». Il lui répond que c'est un très beau nom (à chacun ses goûts!). Elle ajoute qu'elle cherche du travail. Il lui dit que, la journée même, il a affiché une offre d'emploi sur le babillard du Comité. L'offre provient du groupe Lire-Écrire qui cherche une animatrice en alpha. «L» est intéressée. Un frisson lui parcourt l'épine dorsale quand il l'invite, mine de rien, à venir lire l'offre d'emploi sur le babillard du Comité de citoyens et de citoyennes. Elle aime sa façon d'ajouter le mot «citoyennes» ce qui, selon sa propre interprétation, démontre son souci du genre féminin. Il est définitivement son genre.
Chapitre 13 ½
La lecture de la description de tâches lui confirme son intérêt pour ce poste. «L» se rend donc sur place pour voir de quoi il retourne. Elle y est accueillie par «M», l'animatrice responsable de l'accueil ce matin-là. «M» lui fait d'abord visiter les locaux. Le décor «n'a pas grand-chose qui puisse évoquer les mauvais souvenirs de l'école: de la musique, beaucoup de lumière, des plantes un peu partout, des tables "maisons" faites de planches ou de portes montées sur des chevalets, des chaises dépareillées. Au mur, des cartes géographiques, des photos de la bande et, signe particulier, une grande feuille de stratifié blanc lustré tenant dans chaque pièce la place du sévère tableau noir. Malgré cet ameublement hétéroclite et quelque peu chambranlant, le premier coup d'œil est assez agréable: la place est accueillante et il s'en dégage un petit air de famille.»22
Un coin a été aménagé pour la lecture. On y trouve des revues et des livres traitant de sujets variés et convenant le plus possible à des lecteurs et lectrices débutants23. «M» lui explique que, comme dans d'autres groupes24, «Lire-écrire» co-parraine un projet avec la bibliothèque municipale qui lui permet de renouveler régulièrement les livres. À côté, «L» entrevoit une salle d'ordinateurs où quelques personnes travaillent ensemble à mettre la touche finale au journal du groupe.
Dans la cuisine, des participantes et participants achèvent leur pause et s'en retournent à leur atelier. «L» et «M» s'assoient un moment et parlent ensemble du poste qui est offert. «L» veut tout savoir. «M» lui décrit la structure et le fonctionnement du groupe, son approche pédagogique, le type de personnes qui fréquentent les ateliers, leur provenance et leurs motivations à venir en alphabétisation populaire... Toutes ces informations correspondent à ce que «L» recherche comme milieu de travail.
Une seule ombre au tableau: les conditions de travail qui, comme dans plusieurs autres groupes, semblent particulièrement précaires, tout comme le financement des groupes populaires eux-mêmes. La situation financière de «Lire-Écrire» est inquiétante. Malgré une augmentation accordée en 1995-1996 par le ministère de l'Éducation, son principal subventionneur, le budget demeure largement insuffisant pour répondre à la demande. De plus, cette année, le groupe a décidé de ne pas présenter de demande à la commission scolaire parce que cette dernière veut s'ingérer dans les groupes qu'elle finance, en imposant des critères de qualification pour le choix des animatrices. Le groupe devra donc fonctionner sans ces revenus. Cette situation financière difficile n'est pas sans conséquence. «L» apprend que, l'an dernier, quatre animatrices travaillaient à «Lire-Écrire». Deux d'entre elles ont quitté en juin, une pour retourner aux études et l'autre pour un emploi offrant de meilleures conditions de travail. Il a été décidé de n'embaucher qu'une seule personne et de réduire les activités du groupe. C'est un choix douloureux parce que les besoins sont grands et que le groupe étant de plus en plus connu, il existe déjà une liste d'attente qui s'allonge. Toutefois, le conseil d'administration compte réévaluer la situation à la fin de l'année. Le poste est donc d'une durée d'un an renouvelable si la situation financière le permet.
«L» repart chez elle en réfléchissant à ce qu'elle va faire. Elle est enthousiasmée par ce qu'elle a découvert: l'atmosphère du groupe, les relations à la fois respectueuses et familières qu'il semble y régner, la façon de lier les activités d'alphabétisation au quotidien des gens qui fréquentent le groupe et de les adapter aux différentes cultures qui s'y rencontrent. Cependant, elle s'interroge sur les conditions salariales qui sont offertes. Elle a un enfant à charge et comme elle n'a jamais vu à quoi ressemblait une pension alimentaire, elle a besoin d'un salaire décent et d'une certaine sécurité d'emploi. Elle repense à la coupure de postes. Elle évalue le pour et le contre. L'attitude du conseil d'administration dans cette situation la rassure. Les décisions qui ont été prises correspondent, selon les informations dont elle dispose, à ce qu'elle-même aurait décidé dans les mêmes circonstances. Il lui apparaît inacceptable qu'un groupe populaire se voie amputé de son autonomie dans le choix des travailleurs et travailleuses. Elle estime que c'est au conseil d'administration, à l'équipe de travail et aux participantes et participants de choisir les personnes qui y travailleront.
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Elle décide de soumettre sa candidature. Elle sait que ça n'est pas gagné d'avance; elle n'a jamais travaillé en alphabétisation et ne possède pas de diplôme universitaire. Elle mise surtout sur ses qualités personnelles, sa connaissance des milieux populaires et son expérience en animation. Pour se rassurer, elle fouille un peu dans la documentation en alphabétisation populaire. Elle veut vérifier si elle possède les qualités et les aptitudes nécessaires à ce poste.
Dans ses recherches, elle tombe sur un passage portant sur l'attitude à développer en alphabétisation populaire:
«Savoir écouter avec attention, être franche, suivre vraiment le rythme et le style de chacun, être impliquée dans les échanges, reconnaître sincèrement et mettre à profit les expériences de tous, etc., voilà en effet des attitudes qui honorent la formatrice d'envergure. Et cette envergure permettra par surcroît de sentir la part de vérité et de profondeur dans certaines manifestations de la «culture populaire» loin du jugement stéréotypé sur la «culture du pauvre».
La formatrice qui possède un «sens pédagogique» sait faire la part des choses. Que signifie la rigueur pédagogique sans la souplesse de l'animation? À quoi bon un tel effort d'apprendre sans la spontanéité, le jeu et le rire? Les plus sages techniques ont-elles un sens sans la motivation et la sécurité intérieure?
Il serait tout aussi futile de vouloir appliquer un programme préemballé. Considérer les besoins réels des apprenants, susciter leur capacité d'écoute et d'attention, stimuler leur goût de lire et d'écrire sont des initiatives hautement plus efficaces.
Par ailleurs, toute pédagogie en alphabétisation populaire doit prendre en compte certains obstacles à l'apprentissage reliés au contexte psycho-social et environnemental: la fatigue, les tensions corporelles, l'insécurité financière et émotive, une image négative de soi suite aux expériences scolaires antérieures, etc. Ici encore, la formatrice fera preuve de souplesse et s'adaptera aux situations multiples.
La simplicité et le discernement sont toujours de mise en alphabétisation populaire.»25
Chapitre 13 ¾
«L» est toute énervée; elle vient d'être convoquée à une entrevue. Le comité de sélection est composé de trois personnes: une animatrice, un représentant du conseil d'administration et une participante du groupe. Le comité lui rappelle les grandes lignes du poste offert. On s'informe de ses expériences antérieures en animation dans des groupes populaires.
On vérifie ses connaissances du milieu, des personnes analphabètes et de leurs principaux problèmes. On veut savoir si elle saura bien comprendre les personnes avec lesquelles elle sera appelée à travailler, si elle saura les écouter et partager avec elles et si elle sera prête à apprendre d'elles autant que celles-ci viennent apprendre dans le groupe. Le comité vérifie ses connaissances de l'analphabétisme et lui demande son opinion sur les actions à mener dans ce domaine.
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On vérifie ses capacités à travailler en équipe dans divers contextes: conseil d'administration, équipe de travail, comités, travaux de recherche. On s'informe si elle a des aptitudes particulières dans la rédaction de demandes de financement parce que toute l'équipe de travail se partage les taches, dont la recherche de financement.
Le comité lui fait part des diverses coalitions auxquelles le groupe participe: le RGPAQ, le Regroupement des groupes d'éducation populaire de la région, une coalition de groupes du quartier. On s'informe sur sa connaissance de ces diverses structures de regroupement et des enjeux qui s'y jouent actuellement.
Pour finir, on lui demande de rédiger un court texte afin de vérifier sa maîtrise du français. On lui demande aussi de faire le plan d'un atelier afin de tester ses capacités d'organisation, sa façon de structurer les apprentissages et de voir l'originalité de ses moyens utilisés.
À la suite de quoi, on l'informe qu'afin de faciliter la gestion et de clarifier les règles, les travailleuses ont un contrat de travail. De plus, une période de probation de trois mois est prévue, après laquelle on procède à une évaluation afin d'identifier les problèmes, s'il y a lieu, et de trouver des solutions ensemble. Cette évaluation est faite par les participantes et participants de son atelier et un comité composé de nouveau de trois personnes: un ou une participant(e), un membre du CA et un membre de l'équipe de travail.
L'entrevue a duré quelque 45 minutes. Deux minutes plus tard, elle se retrouve au Comité de citoyens et citoyennes où «X-Y» l'attend, les doigts croisés.
Chapitre 13 7/8
«L» apprend qu'elle a été choisie et qu'elle commence la semaine suivante. Elle se rend immédiatement aux locaux de «Lire-Écrire» pour discuter avec sa nouvelle équipe de travail. Justement, un animateur vient de terminer un atelier. Elle a très envie que «W» lui raconte comment cela s'est passé; elle l'avoue, le premier atelier qu'elle aura à animer lui fait peur. «W» la rassure en lui disant que, pour commencer, elle coanimera un atelier avec une autre animatrice, question de lui laisser le temps de s'intégrer et de faciliter l'apprentissage.
Puis, il lui parle de son atelier dont le thème était la pauvreté. «W» avait préparé un exercice d'écriture au cours duquel chaque personne devait composer trois phrases sur la pauvreté. Dans un second temps, les phrases étaient écrites au tableau et corrigées en groupe. Comme souvent, l'atelier a pris une tournure qu'il n'avait pas prévue. A partir de cet exercice, les participantes et participants se sont mis à discuter. «W» constatait qu'ils et elles se sentaient peu concernés par la pauvreté, l'associant à un problème vécu par d'autres gens ailleurs dans les pays pauvres.
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«W» a alors distribué un court article de journal qui traitait de la situation ici et qui contenait un tableau de statistiques sur la pauvreté. Les participantes et participants ont voulu calculer où chacun et chacune se situait par rapport au seuil de pauvreté. L'atelier s'est transformé en atelier de calcul... On a constaté que la majorité du groupe vivait sous le seuil de la pauvreté. Cela changeait totalement leur perception du problème. Les participantes et participants se sont sentis très concernés par l'information contenue dans l'article mais aussi par tout ce qu'ils et elles entendent sur le sujet quotidiennement.
L'atelier s'est terminé par une présentation des groupes d'entraide du quartier. On s'est dit qu'au cours des prochains ateliers, on inviterait des représentants de ces organismes à venir parler de leurs actions et du type de services qu'ils offrent. Finalement, les échanges ont été très intéressants. Les participantes et participants ont affirmé au moment de l'évaluation qu'ils et elles avaient beaucoup apprécié les moyens choisis pour traiter du sujet. «L» est emballée par ce que vient de lui raconter «W» et espère, à son tour, pouvoir animer des ateliers aussi dynamiques.
Sera-t-elle une bonne animatrice? Son contrat sera-t-il renouvelé? Si le conseil d'administration doit couper son poste, sera-t-elle encore en accord avec leur décision? Vivra-t-elle une longue et chaude histoire d'amour passionnée avec son beau «X-Y Z»? Les groupes d'alphabétisation populaire et tous les groupes d'éducation populaire bénéficieront-ils d'une plus grande reconnaissance et d'un meilleur financement? «L» restera-t-elle longtemps en alpha et s'y préparera-t-elle une belle retraite? Aura-t-elle une fois de plus la bougeotte et partira-t-elle pour la Mauricie, le Lac St-Jean ou la région de Montréal? Son fils I Grec aura-t-il une adolescence difficile? C'est ce que vous saurez en lisant la suite des aventures palpitantes de l'animatrice «L».
La tâche d'un groupe d'alphabétisation ne se limite pas à «dispenser» des ateliers. Elle revêt différents aspects sur lesquels il faut rester vigilant si l'on veut éviter le mauvais œil. Afin de mettre toutes les chances de notre côté, notre astrologue nous propose d'utiliser les pouvoirs de son troisième œil pour tenter de percer les secrets des dieux. Suivez le guide! Il saura vous diriger, selon votre signe astrologique, à travers les méandres de l'alphabétisation.
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Vous êtes des personnes réalistes et concrètes. Vous aimez garder les deux pieds sur terre. Vous analysez la situation avant d'agir. Soyez fidèle à votre habitude: vous avez bien raison, il s'agit d'une étape préalable à toute action. Personne n'est plus à l'aise que vous dans l'étude du milieu et l'analyse des besoins.
L'étude du milieu et l'analyse des besoins
Elle permet de prendre connaissance des différentes caractéristiques de la population rejointe et d'identifier les besoins (en termes de formation ou autres).
Les organismes du milieu, qui travaillent quotidiennement avec la population, peuvent vous fournir les informations nécessaires: groupes communautaires, écoles, CLSC, etc. Ces derniers disposent souvent de monographies de quartiers qui en décrivent la situation socio-économique. Vous pouvez aussi recueillir des renseignements complémentaires auprès de comités locaux engagés dans des secteurs plus précis ou auprès d'une catégorie particulière de la population.
Vous êtes aussi des personnes sensibles et la situation que vous venez d'analyser vous préoccupe, surtout en ce qui a trait aux personnes analphabètes. Pensez «sensibilisation»!
La sensibilisation
Comment conscientiser le public sur la problématique de l'analphabétisme, faire connaître les services d'alphabétisation ou recruter les personnes désireuses d'apprendre à lire et à écrire? Pensez à utiliser les associations et institutions du milieu; les médias; le porte-à-porte; les kiosques d'information dans des événements publics; les affiches et dépliants ou tout autre moyen ou outil original (jeux, pièces de théâtre, animations variées...).
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Vous êtes d'excellentes médiatrices, votre perspicacité est légendaire, et avec votre grande sensibilité, particulièrement pour la Balance, aucun doute, votre accueil sera chaleureux.
L'accueil
Nos services étant mieux connus grâce à la sensibilisation, on peut s'attendre à ce que des personnes analphabètes viennent pour s'inscrire. C'est aux signes d'air de prendre la relève et d'être prêts à les accueillir.
«Les premières visites des personnes analphabètes au groupe d'alpha sont vécues comme un accueil par l'animatrice et par le groupe, au sein d'un groupe de formation, plutôt que comme un écueil, un obstacle à franchir avant d'entrer dans le cercle des élus de l'école.»26
Faites-leur visiter les locaux. Présentez-les aux autres participantes et participants, aux animatrices et aux autres membres de l'équipe. Offrez-leur un café... En un mot, essayez de les mettre à l'aise, de leur expliquer le fonctionnement des ateliers et de leur faire connaître le groupe.
À l'accueil succède l'enquête-évaluation. Avec votre doigté habituel, vous ferez merveille!
L'enquête-évaluation
Elle vous permettra de classer les nouveaux et nouvelles dans le niveau de formation adéquat ou par centre d'intérêt dans le cas d'ateliers à option ou de projets à plus long terme.
Vous aurez à recueillir des informations sur les besoins et la demande de formation, les habiletés et aptitudes, à évaluer le niveau des acquis en lecture, écriture et calcul et le degré de maîtrise de la langue parlée.
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Votre franchise (surtout pour les béliers), votre sens du leadership, votre capacité d'organisation et votre dynamisme sont des atouts majeurs pour prendre en charge la formation. C'est aussi l'occasion de manifester vos capacités d'écoute et de négociation et votre sens de la synthèse.
La formation
La formation peut adopter une foule de formats selon les besoins, les demandes, les intérêts, les objectifs, les ressources, etc. Il vous faudra être attentive, valoriser les expériences de tous, tenir compte du rythme de chacun.
Avec les participants et participantes:
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Votre esprit créatif est bien connu et votre persévérance est à toute épreuve. La postalphabétisation est votre domaine. Vous y serez à l'aise comme des poissons dans l'eau!
La postalphabétisation
Selon Bernard Dumont la postalphabétisation comporte: «(...) trois aspects, dont aucun ne doit être négligé et qui doivent être pris en considération dès les premières réflexions sur la préparation d'une action d'alphabétisation, à savoir:
Pour ne pas perdre le bénéfice des compétences nouvellement acquises, les personnes récemment alphabétisées doivent avoir l'occasion de les entretenir dans le cadre de leur vie quotidienne.
Pour les aider, pensez:
En bref
En plus d'offrir des ateliers, un groupe populaire doit faire connaître l'existence de ses services aux personnes qui en ont besoin, sensibiliser la population au problème de l'analphabétisme et à ce que vivent les personnes analphabètes, collaborer à la défense des droits et à l'amélioration de leurs conditions de vie et participer à leur intégration dans la société. Quel que soit votre signe, soyez assurées que vous pourrez contribuer au développement de l'alphabétisation populaire.
L'analphabétisme n'est pas une maladie. Pourtant, il se transmet de génération en génération, l'analphabétisme engendrant la pauvreté et la pauvreté engendrant l'analphabétisme. De plus, les personnes analphabètes, à la fois pauvres et isolées, se retrouvent dans les couches de la population les moins en santé et ayant une espérance de vie inférieure. Que faire contre cet état de fait? Un mot à la mode dans le milieu de la santé: la PRÉVENTION!
Êtes-vous informé sur la prévention de l'analphabétisme? Faites le test!
Choisissez entre les deux réponses suggérées:
1- Un des facteurs causant l'analphabétisme est:
a) Le gène alphabéta
b) La pauvreté
2- Le moyen de prévention de l'analphabétisme que vous privilégiez est:
a) Un cours d'alphabétisation auprès des parents
b) Une intervention précoce auprès des enfants
3- Les enfants ont tous les mêmes chances:
a) Vrai
b) Faux
4- Il faut combattre l'analphabétisme:
a) Chacun dans son coin
b) Collectivement
5- D'après vous, quel est l'énoncé le plus important?
a) Mieux vaut tard que jamais
b) Rien ne sert de courir, il faut partir à temps
Si vous avez répondu cinq fois «a»,vous avez tout intérêt à faire de l'article «La prévention: une nécessité» votre lecture de chevet pour les prochaines semaines!
Si vous avez répondu trois fois «b», il vous manque un petit quelque chose pour devenir expert en prévention; l'article «La prévention: une nécessité» peut vous y aider!
Si vous avez répondu quatre à cinq fois «b», bravo! La prévention vous tient à cœur, mais on vous invite à lire quand même l'article, question de vous mettre à four. En fait, si vous voulez comprendre l'importance de la prévention de l'analphabétisme, il est impératif de lire ce qui suit; on vous aura prévenu!
L'analphabétisme
Avec l'avènement de l'école obligatoire en 1942, on aurait pu penser que l'analphabétisme allait enfin être enrayé. Mais non, l'analphabétisme existe toujours, et de nouvelles générations de personnes analphabètes issues, celles-là, du système scolaire, ont succédé aux anciennes. Même dans les pays industrialisés, un nombre important de jeunes de moins de trente ans sont analphabètes. Au Québec, 33% des personnes inscrites en alphabétisation ont moins de 30 ans28. «Le ministère de l'Éducation admet que 36 jeunes sur 100 abandonnent leur cours secondaire avant d'avoir obtenu leur diplôme...»29 Devant un tel constat d'échec, que reste-t-il à faire? Baisser les bras, chercher des coupables, ou identifier les causes, tenter de les enrayer et ainsi prévenir l'analphabétisme?
«À travers les récits de vie, le vécu et les témoignages des personnes analphabètes elles-mêmes, on peut identifier, dans la somme des parcours individuels, des causes plus pointues, plus immédiates: troubles d'apprentissage, problèmes familiaux, santé déficiente, problèmes de santé mentale, parcours scolaire marqué par l'échec, etc.»30
Cependant, toutes ces causes ont pour trame de fond la pauvreté. Au Québec, près de 20% des enfants vivent dans la pauvreté.31
La pauvreté et l'école, on le sait, ne font pas vraiment bon ménage. Souvent, les personnes pauvres ne s'y sentent pas à leur place. On n'y parle pas leur niveau de langage; ce ne sont pas leurs valeurs qui y sont transmises. L'école valorise ceux qui «performent»; elle marginalise ceux qui échouent et les étiquette de TCC, MSA, TLA, TGA!32 On constate que «(...) au lieu d'être le premier agent d'Insertion sociale, l'école devient, pour plusieurs jeunes, le premier facteur de leur exclusion sociale.»33
Des recherches ont démontré que l'analphabétisme se retrouve davantage dans les familles de milieux socio-économiquement défavorisés. Les parents de ces familles, trop préoccupés par leur survie, sont souvent démunis pour stimuler, préparer leurs enfants à différents apprentissages. Ces parents, souvent peu scolarisés eux-mêmes, conservent de l'école un mauvais souvenir. Ils ne valoriseront donc pas l'école auprès de leurs enfants et ne pourront pas les aider si ceux-ci rencontrent des difficultés scolaires.
Nous ne naissons pas égaux, pas plus que nous ne commençons la maternelle égaux! Comme si le tableau n'était pas déjà assez noir pour ces enfants, des études ont démontré que plusieurs d'entre eux ne mangent pas à leur faim tous les jours; ce qui occasionne des difficultés de fonctionnement telles que le manque de concentration, la nervosité et l'agressivité.
«Les classes de T.G.A. ont pour but d'apprendre à lire et à écrire aux jeunes en difficultés d'apprentissage. (T.G A = trouble grave d'apprentissage) Cependant la réalité est tout autre. Le jeune en T.G.A. est mis à part du régulier et laissé à lui-même. Oui, bien sûr ont lui donne quelques travaux mais dans le seul but de sauver les apparences. Après 3 ou 4 ans perdu à l'intérieur de cette prison, on vous met à la porte sans savoir ni lire ni écrire correctement et sans aucune formation en quoique ce soit. Arrivé sur le marché du travail on éprouve de la difficulté à s'exprimer clairement, on n'est incapable de remplir un simple formulaire d'application. Il en résulte un grand manque de confiance en soi. Il est évident qu'un travail satisfaisant et rémunérateur est presque impossible à trouver. L'avenir, quel avenir nous attend? Partout, les portes restent closes. Une minime lumière d'espoir brille un peu, et c'est la Boîte à Lettres.»
Mario Bungess/RGPAQ/Fondatlon Alpha Pop. Le livre de l'Année Internationale de l'alphabétisation. Montréal, 1993, p. 90.
En attendant les vraies remises en question des inégalités sociales et du système scolaire, où peut-on agir pour briser ce cercle vicieux? Auprès de qui devons-nous intervenir? Des projets n'intervenant pas à la source peuvent contribuer à minimiser les risques de reproduction de l'analphabétisme. Cependant, ceux qui interviennent dès le plus jeune âge de l'enfant, avant même que le problème n'apparaisse, sont plus susceptibles d'empêcher la reproduction de l'analphabétisme. Les parents, les intervenantes et intervenants, les éducatrices et éducateurs sont, bien entendu, des acteurs importants dans la démarche de prévention, mais c'est l'enfant qui, en bout de ligne, doit bénéficier de l'intervention.
Quelques projets de prévention
Depuis quelques années, plusieurs projets de prévention se sont concrétisés. Les exemples qui suivent ne prétendent nullement inclure toutes les activités de prévention, ils visent plutôt à faire un survol des types de projets réalisés au Québec et ailleurs. Qui sait si vous ne trouverez pas vous-même de nouvelles idées?
La sensibilisation
La sensibilisation est un ensemble de moyens visant à informer le public sur un sujet ou un problème quelconque. Jusqu'à présent, au Québec, le moyen le plus utilisé dans le domaine de la sensibilisation à l'analphabétisme est la rencontre d'information. Dans une perspective de prévention du décrochage scolaire et de l'analphabétisme, certains projets centrent leurs interventions sur le personnel enseignant, d'autres sur des jeunes. Par exemple, à St-Eustache, un projet de ce type a été mis sur pied par la Table de concertation Laurentides-Lanaudière: deux personnes en démarche d'alphabétisation et une formatrice rencontrent des élèves et leur présentent le problème de l'analphabétisme.
La formation
Il y a des projets qui vont au-delà de la sensibilisation en faisant de la formation leur principale activité. L'objectif est de faire comprendre les mécanismes de reproduction de l'analphabétisme aux intervenantes et intervenants et de les inciter à agir dans leur milieu auprès de leur clientèle défavorisée. Par exemple, la Boîte à lettres de Longueuil a produit une trousse de prévention intitulée: «De pas en mots: grandir ensemble!». La Boîte à lettres offre une formation sur la trousse aux intervenantes et intervenants travaillant auprès de parents d'enfants de 0 à 5 ans. Par la suite, les intervenantes et intervenants peuvent dispenser des ateliers auprès des parents afin de les soutenir dans leur rôle d'éducateur.
D'autres projets s'adressent aux parents. À la CECM, le programme «J'apprends avec mon enfant» est destiné aux parents désireux de connaître le vécu scolaire de leur enfant. Ils participent à des ateliers d'écriture et de lecture durant le jour.
Certains projets interviennent auprès de la famille: enfants et parents. Le but de leurs activités est d'appuyer les parents dans l'éducation de leur enfant et de faire valoir l'importance de la lecture. À l'école Sainte-Famille de Sherbrooke, un projet d'intervention précoce privilégie le développement du langage et des aptitudes à la socialisation chez les enfants et les prépare au milieu scolaire. Dans le même projet, on intervient aussi auprès des parents par des rencontres. Plusieurs agents de la communauté sont impliqués, ce qui fait de ce projet un modèle d'intervention concertée.
Parmi les projets qui interviennent auprès de la famille, certains visent à soutenir concrètement les parents dans leur rôle d'éducateurs. Le Centre d'éducation populaire de Pointe-du-Lac organise des ateliers d'aide aux devoirs et leçons à l'intention de ceux qui éprouvent de la difficulté à suivre l'apprentissage scolaire de leur enfant. Chaque parent s'implique dans la mesure de ses capacités avec le soutien d'une animatrice, compte tenu du niveau et/ou des difficultés scolaires de l'enfant.
Aux États-Unis, près de Washington, les intervenantes et intervenants du mouvement PLAN (Push Literacy Action Now) travaillent également avec la famille. Ils ont produit une trousse d'activités où le parent est encouragé à stimuler l'habitude de la lecture chez l'enfant. Toutes ces activités de prévention ont comme objectif ultime de contrer l'analphabétisme. Cependant, ceux qui s'adressent plus spécifiquement aux jeunes enfants, que ce soit directement ou par l'intermédiaire des parents ou des intervenantes et intervenants, ont davantage de chance de briser le cercle vicieux de l'analphabétisme. Il faut multiplier les actions en ce sens dans nos milieux.
Même si ces initiatives sont encore loin de régler les problèmes d'inégalités sociales, leur diversité semble un bon point de départ pour faire participer plus activement la communauté au dépistage et au soutien aux personnes aux prises avec le problème. Il faut noter à cet égard le rôle crucial du système scolaire en tant que principal intervenant auprès des enfants et en tant qu'interlocuteur privilégié des parents.
En bref:
L'analphabétisme continue à se reproduire. De nouvelles générations de personnes analphabètes issues, celles-là, du système scolaire, succèdent aux anciennes. On le sait, l'analphabétisme se retrouve davantage dans les familles de milieux socio-économiquement défavorisés. L'analphabétisme et la pauvreté font malheureusement bon ménage. En attendant les vraies remises en question des inégalités sociales et du système scolaire, certaines expériences sont tentées pour prévenir la reproduction de l'analphabétisme.
Vous désirez approfondir l'un ou l'autre des sujets abordés dans ce document?
Vous souhaitez entreprendre une recherche sur un thème qui vous intéresse?
Voici quelques pistes qui pourront vous aider dans votre démarche...
Au cours des années, le RGPAQ a publié plusieurs documents à l'intention des groupes d'alphabétisation populaire. Ces publications ont pour objectif de favoriser les échanges entre les groupes d'alphabétisation populaire et de fournir aux animatrices et animateurs des documents de formation adaptés aux pratiques de l'alphabétisation populaire. Ces documents sont disponibles au RGPAQ.
Dans la série «Le monde alphabétique»
Cette revue, publiée depuis 1991, permet de faire connaître les réflexions, les pratiques, les expériences, les réalisations et les productions provenant des groupes populaires en alphabétisation. On y retrouve aussi des témoignages de participants et participantes, des articles qui illustrent ce qui se fait et se vit ici et ailleurs dans le monde... Chaque numéro comporte un dossier portant sur un thème particulier. Vous y retrouverez des sujets abordés dans ce document: les origines de l'alphabétisation populaire au Québec, les structures, le fonctionnement et la gestion des groupes populaires en alphabétisation, l'animation, la conscientisation, la prévention.
N°1
«La métacognition»
(épuisé)
Quelques réflexions autour de la métacognition. Une expérience en métacognition auprès des adultes. La diversité des formes d'apprentissage.
[Voir l'image pleine grandeur]
N°2
«Faciliter l'apprentissage en alphabétisation populaire»
Problèmes rencontrés dans le processus d'apprentissage et propositions d'approches pédagogiques.
N°3
«Où en est l'alphabétisation conscientisante au Québec?»
L'évolution du concept d'alphabétisation conscientisante. Les rapports de partenariat avec les pouvoirs publics. Quelques expériences menées dans les groupes.
[Voir l'image pleine grandeur]
N°4
«Les femmes et l'alphabétisation»
Les causes de l'analphabétisme chez les femmes à l'échelle nationale et internationale. Réflexion sur la mobilisation des femmes pour l'alphabétisation. Témoignages d'animatrices et de participantes d'ici et d'ailleurs.
N°5
«Alphabétisation populaire et emploi...»
Analyse des enjeux du point de vue de l'alphabétisation populaire et des syndicats. Présentation de projets entrepris par les groupes ou en collaboration avec les groupes populaires.
N°6
«La place des mathématiques en alphabétisation populaire»
Une approche particulière dans l'enseignement des mathématiques: les principes et la démarche adaptée aux adultes à partir de leurs compétences, illustrés par quelques expériences et outils pédagogiques.
N°7
«Le point sur l'alphabétisation populaire en 1995»
Les origines et le développement de l'alphabétisation populaire, les principaux enjeux en cause. L'histoire des luttes menées par les groupes sur la question du financement.
[Voir l'image pleine grandeur]
Dans la série «Un visa pour l'alpha pop»
Les publications de cette série s'adressent avant tout aux animatrices et animateurs en alphabétisation et sont conçues pour être utilisées dans leur travail quotidien d'alphabétisation.
N°1
Soucisse, François. Animation et alphabétisation: guide pratique, Montréal, 1990, 95 pages.
Animation et formation, démarche de groupe et alphabétisation, fonctions et techniques d'animation: clarification, organisation, facilitation, cinq styles d'animation. Premier contact; rétroaction; résolution de problèmes et de conflits; aménagement physique des lieux; évaluation.
N°2
Dupuis, Michèle. Les personnes analphabètes et l'apprentissage, Montréal, 1990, 85 pages.
Apprentissage; processus d'apprentissage; cueillette, synthèse et intégration des données; métacognition et dyslexie.
N°3
Lefebvre, Françoise. Approches et méthodes... Un livre dont vous êtes le héros. «Aventure dans le labyrinthe des approches et des méthodes en alphabétisation», Montréal, 1990, 23 pages.
Rôle de l'animatrice et des participantes et participants; caractéristiques des différentes méthodes et approches en alphabétisation; approche conscientisante, scolarisante et thématique; méthode syllabique, globale, mixte et phonétique.
[Voir l'image pleine grandeur]
N°4
Saunier, Michèle. Comment créer... du matériel pédagogique, Montréal, 1990, 79 pages.
(épuisé)
Créativité; freins à l'imagination et à l'invention; principes fondamentaux; règles du jeu, remue-méninges, concassage, association simple, association forcée, approche analogique; créativité et animation; utilisation des techniques de créativité.
N°5
Boudreau, Guy. Le langage intégré, Montréal, 1992, 71 pages.
Préconise l'apprentissage simultané de la lecture et de l'écriture, l'apprentissage en contexte signifiant, l'écriture dans une intention de communication, le code au service de la communication, la collaboration comme l'appui à l'apprentissage.
N°6
Midy, Franklin. L'évaluation des apprentissages en alpha populaire, Montréal, RGPAQ/Service aux collectivités de l'UQAM, 1992,120 pages.
Quoi, quand et comment évaluer. Guide pratique et outil de réflexion sur l'évaluation. Aborde l'évaluation en l'intégrant au processus d'apprentissage.
N°7
La sauce à... calculer ou les mathématiques en alphabétisation populaire, vidéo, 28 min. 30 sec., Montréal, RGPAQ/Service aux collectivités de l'UQAM, 1993.
Le document montre des animatrices en action dans leurs ateliers et illustre certains principes: la nécessité de partir des compétences des adultes, de recourir à des modèles connus dont celui de l'argent, d'intégrer les mathématiques au français en réalisant un projet collectif.
N°8
Mathieu, Réjean. Agir ensemble démocratiquement, Montréal, 1993, 112 pages.
Traite, entre autres, de la gestion des ressources humaines et matérielles: les rapports de travail: rôles, fonctions et contrats de travail; financement et gestion démocratique; programmation et plan de travail; valeurs, structures et pouvoir.
N°9
Loignon, Franchie, Maziade, Linda, Lefebvre, Françoise. Mathématiques au quotidien: activités et projets, Montréal, 1995,177 pages.
Complément de la vidéo «La sauce à... calculer ou les mathématiques en alphabétisation populaire», ce document constitue un support matériel pour l'encadrement quotidien des activités d'apprentissage des mathématiques.
[Voir l'image pleine grandeur]
Les publications du RGPAQ, c'est aussi...
En plus de la série Un Visa pour l'alpha pop et de la revue Le Monde alphabétique, le RGPAQ a publié différents documents de réflexions, d'analyse ou d'échange. En voici quelques titres...
Lefebvre, Françoise.
Alphabétisation populaire, emploi, et après...
Montréal, 1995, 87 pages.
Recherche et bilan des expériences réalisées dans les groupes d'alphabétisation populaire, de 1990 à 1994.
RGPAQ, Mon Journal:
Le journal des participants et des participantes des groupes d'alphabétisation du RGPAQ.
Ce journal est constitué de textes écrits par des participants et participantes des groupes populaires d'alphabétisation. On y retrouve des témoignages, des récits, des opinions...
RGPAQ, Fondation Alpha Pop.
Le livre de l'Année internationale de l'alphabétisation: recueil de textes
Montréal, 1993, 155 pages.
Recueil d'une centaine de textes conçus et rédigés par des participants et participantes des ateliers d'alphabétisation populaire.
En collaboration avec la CEQ et l'ICEA
Une société sans barrière, Forum pour favoriser l'exercice des droits des personnes analphabètes
Montréal, 1990, 79 pages.
Compte rendu du forum et fiches pratiques destinées aux intervenantes et intervenants désireux d'agir pour diminuer les obstacles rencontrés par les personnes ayant des difficultés à lire, écrire ou calculer.
Gladu, Nicole et Pelletier Francine
Documentation, information, ressources en alphabétisation (DIRA), Une réponse aux besoins des formatrices en alphabétisation
Montréal, 1989, 322 pages.
Répertoire des ressources documentaires et de formation qui recense diverses sources d'information sur plusieurs des thèmes traités, entre autres: apprentissage, didactique, évaluation, langue d'alphabétisation... et des outils de références.
Le CDÉACF
Le Centre de documentation sur l'éducation des adultes et la condition féminine dispose d'une importante documentation spécialisée en éducation des adultes et en alphabétisation. Le CDEACF est né de la fusion du Centre de documentation de l'Institut canadien d'éducation des adultes (ICEA) et de celui de Relais-femmes de Montréal en 1983. Le RGPAQ et le Centre populaire de documentation (CPD) ont enrichi le CDEACF de leurs collections, respectivement en 1988 et en 1990. Le RGPAQ en est membre et participe ainsi activement au maintien et au développement de la collection alphabétisation du CDEACF.
Les groupes membres du RGPAQ bénéficient d'une entente leur permettant d'emprunter directement les documents en remplissant le formulaire «Emprunt direct au CDEACF» que l'on peut ensuite retourner soit par la poste ou par télécopie. On peut se procurer ce formulaire au RGPAQ ou au CDEACF. Pour connaître les publications disponibles, on peut soit téléphoner au CDEACF et leur demander une bibliographie par sujet (frais minimes) ou se procurer le Catalogue francophone canadien des documents en alphabétisation, paru en septembre 1995. On retrouve dans ce catalogue le recensement de plus de 3 200 documents en français touchant la problématique de l'alphabétisation.
Les publications des groupes populaires d'alphabétisation
Plusieurs groupes d'alphabétisation populaire publient d'excellents documents qui s'adressent aux animateurs et animatrices d'alphabétisation, aux personnes analphabètes, aux intervenants sociaux ou à la population en général. La meilleure façon de connaître des documents est de consulter le Catalogue francophone canadien des documents en alphabétisation, puisque il est demandé aux groupes de déposer une copie de leurs productions au CDEACF.
Les publications du programme «Initiatives fédérales-provinciales conjointes en matière d'alphabétisation» (IFPCA)
Le Centre a conclu une entente avec la Direction de la formation générale des adultes du ministère de l'Éducation du Québec (DFGA) pour gérer et rendre accessible l'ensemble des documents produits dans le cadre du programme IFPCA. Les titres figurent dans le Catalogue francophone canadien des documents en alphabétisation.
D'autre part, le CDEACF gère des réseaux d'échanges de documents et d'informations, notamment:
«Les trousses des formatrices et formateurs»
Il s'agit d'un projet réalisé grâce à une entente avec la DFGA. Ces trousses sont destinées aux formatrices et formateurs. Elles leur sont livrées chez eux et mises à leur disposition pendant une période prédéterminée. Chaque trousse comprend une trentaine de documents produits par d'autres groupes dans le cadre du programme IFPCA- Les trousses sont accompagnées de fiches d'évaluation.
«Les valises à lire»
Ce projet est destiné aux participantes et participants des groupes membres du RGPAQ. Chaque valise contient 30 livres de différents niveaux d'alphabétisation abordant 20 thèmes différents. Elles sont mises à leur disposition pour un certain nombre de semaines. Chaque document contient une fiche d'évaluation.
Pour plus d'informations:
Centre de documentation sur l'éducation des adultes et la condition féminine (CDÉACF)
1265, rue Berri #340
Montréal (Québec) H2L4X4
Téléphone: (514) 844-3674
Télécopie: (514) 844-1598
Vous venez de mettre le pied dans l'univers de l'alphabétisation populaire, et vous vous perdez dans cette toute nouvelle terminologie, cette avalanche de noms d'organismes plus mystérieux les uns que les autres... Devant les ordres du jour trop souvent chargés, vous n'osez pas toujours poser les questions qui vous viennent à l'esprit... Ce guide pratique vous aidera à vous retrouver dans ce labyrinthe en vous présentant différents acteurs qui interviennent, de près ou de loin, sur la problématique de l'analphabétisme. Ce guide ne prétend pas être complet, et vous pourrez ainsi y ajouter, à la toute fin, la description de nouveaux acteurs ou de ceux qui interviennent plus particulièrement dans votre milieu.
Un réseau autonome...
Groupes populaires d'alphabétisation
Près d'une centaine de groupes au Québec sont reconnus et accrédités par le Programme de soutien à l'alphabétisation populaire autonome (PSAPA), un programme rattaché au ministère de l'Éducation du Québec. Ces groupes constituent un réseau autonome et distinct du réseau institutionnel des commissions scolaires.
Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec (RGPAQ)
Le Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec est né en 1981, de la volonté de groupes populaires œuvrant dans le domaine de l'alphabétisation de se donner les moyens pour contribuer au développement de l'alphabétisation populaire. Interlocuteur reconnu et sollicité par différents intervenants québécois, ainsi que sur la scène internationale, le RGPAQ joue un rôle important sur les plans politique et pédagogique. Il est le porte-parole des groupes auprès des gouvernements fédéral et provincial, mais aussi, et de façon privilégiée, auprès de l'ensemble des regroupements provinciaux et du mouvement d'éducation populaire et d'action communautaire avec qui il partage un même projet social. Il constitue également un lieu d'échanges et de formation pour ses groupes membres en plus d'assurer la défense des droits des personnes analphabètes et de sensibiliser la population à la problématique de l'analphabétisme.
Fondation Alpha Pop
Créée en 1989 par le RGPAQ, la Fondation Alpha Pop a pour mission de soutenir financièrement les groupes populaires d'alphabétisation du Québec, de contribuer au financement de projets novateurs, ainsi qu'au développement de moyens pouvant permettre aux personnes analphabètes d'exercer leurs droits.
Un réseau institutionnel...
Commissions scolaires
La très grande majorité des commissions scolaires offrent des activités d'alphabétisation qui sont financées par le ministère de l'Éducation (MEQ) dans le cadre de l'éducation des adultes. Certaines exigent des frais d'inscription et/ou de matériel aux personnes qui s'y inscrivent. Certaines travaillent avec les groupes populaires d'alphabétisation de leur région, que ce soit à l'intérieur des tables régionales, par des contrats de services ou par l'entremise de projets IFPCA (Initiatives fédérales-provinciales conjointes en matière d'alphabétisation).
Conseil supérieur de l'éducation
Mis sur pied au même moment que le ministère de l'Éducation, le Conseil supérieur de l'éducation a pour rôle de conseiller l'État sur tout ce qui concerne l'instruction, de la petite enfance à l'âge adulte. Il est composé de vingt-quatre membres issus de différents secteurs d'activités de la société québécoise. Ces membres sont nommés par le gouvernement. Le Conseil a publié plusieurs avis à l'intention du ministre de l'Éducation et du ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, dont «L'alphabétisation et l'éducation de base au Québec: une mission à assumer solidairement» et «Vers un modèle de financement en éducation des adultes», qui touchent plus particulièrement l'alphabétisation.
Tables régionales alpha et tables régionales IFPCA
Ce sont des structures non formelles qui regroupent des commissions scolaires, ou des commissions scolaires et des groupes. Les premières étaient soutenues financièrement par le MEQ, mais ces subventions ont été coupées. Elles délèguent une personne pour les représenter à l'Équipe interrégionale. Quant aux Tables régionales IFPCA, leur fonctionnement est soutenu par la Réserve centrale IFPCA.
Équipe interrégionale
L'Équipe interrégionale en alphabétisation est composée de délégués des différentes Tables régionales d'alphabétisation. On y retrouve principalement des représentants de commissions scolaires. Elle se donne pour mission de contribuer à l'avancement du dossier de l'alphabétisation au Québec.
Des partenaires du mouvement d'alphabétisation populaire autonome...
Qu'il s'agisse de mieux faire reconnaître l'alphabétisation et l'éducation populaire, de défendre les droits des personnes analphabètes, de développer des lieux de formation ou de défendre les droits sociaux de la population, le mouvement d'alphabétisation populaire travaille avec de nombreux partenaires. En voici quelques-uns...
ACEF Centre
Depuis 1992, cet organisme travaille à améliorer l'accessibilité des services bancaires pour les personnes à faibles revenus ou analphabètes. Le RGPAQ a été appelé à collaborer à certains de ces projets.
Centre de documentation sur l'éducation des adultes et la condition féminine (CDEACF)
Le CDEACF a réuni une documentation de base pour l'information, l'intervention et la recherche dans les domaines suivants: l'alphabétisation, les communications, la condition féminine, l'éducation des adultes, l'éducation populaire et la formation professionnelle. Il s'adresse aux intervenants et intervenantes et à toute personne ou groupe intéressé par ces sujets. Le RGPAQ y a déposé sa collection alphabétisation en 1988. Il prend part, depuis ce temps, au fonctionnement du Centre par sa participation au conseil d'administration. Tous les groupes membres bénéficient d'une entente RGPAQ-CDEACF qui leur permet d'emprunter directement de la documentation.
Centre de formation populaire (CFP)
Le CFP offre aux intervenantes et intervenants et aux groupes populaires et communautaires des sessions de formation sur des thèmes tels que le fonctionnement interne des groupes, les communications, les finances, etc. Il propose également des services de consultation et de référence, d'accompagnement de groupe et d'animation. Le RGPAQ fait régulièrement appel au CFP pour l'animation de rencontres ou de sessions de formation. Le CFP a également publié différents documents à l'intention des organisations populaires touchant différents sujets tels que les finances, le contrat de travail, l'évaluation, etc.
Institut canadien d'éducation des adultes (ICEA)
L'ICEA regroupe des organismes publics, communautaires et syndicaux, ainsi que des membres individuels préoccupés par l'éducation des adultes. C'est un lieu d'information, de recherche, d'expertise, de concertation et d'intervention dans les dossiers de l'alphabétisation, de la formation générale, de la formation professionnelle, du développement de la main-d'œuvre, de l'éducation populaire et du rôle éducatif des adultes.
Mouvement d'éducation populaire et d'action communautaire du Québec (MEPACQ)
Le MEPACQ se consacre à la défense, à la promotion et au développement de l'éducation populaire réalisée par les groupes populaires et communautaires autonomes. Il est formé de douze tables régionales qui rejoignent près de 500 groupes à travers le Québec. Plusieurs groupes du RGPAQ sont également membres des tables régionales du MEPACQ. Le RGPAQ travaille en collaboration avec le MEPACQ pour la promotion de l'éducation populaire autonome et la défense des droits sociaux.
Service aux collectivités de l'UQAM (SAC)
Le SAC met à la disposition des groupes communautaires, populaires et syndicaux, les ressources humaines et techniques de l'Université, en donnant un suivi aux demandes de recherche et de formation soumises par les organismes. Le SAC a étroitement collaboré aux deux programmes de formation et de perfectionnement pour les animateurs et animatrices du RGPAQ et à la production des «Visas pour l'alpha pop» consécutive à ces formations.
Solidarité populaire Québec (SPQ)
SPQ est une coalition nationale de plus de 130 organismes issus des milieux populaires, syndicaux et communautaires. Elle se veut un lieu de réflexion et de concertation pour mettre en commun des analyses, développer une riposte unitaire et élaborer des politiques alternatives fondées sur la solidarité sociale. SPQ fonde son action sur «La Charte d'un Québec populaire», adoptée lors d'une Assemblée nationale populaire tenue en juin et octobre 1994. Il existe également des structures régionales du SPQ.
Syndicats
On trouve dans toutes les centrales syndicales une personne responsable de l'alphabétisation ou de l'éducation des adultes.
Centrale de l'enseignement du Québec (CEQ)
L'analphabétisme est une problématique abordée par la CEQ à l'intérieur d'interventions portant sur le décrochage scolaire et les mesures de prévention de ce phénomène. Elle a publié, en 1992 «Exclus ou déserteurs. Les jeunes analphabètes et les difficultés scolaires vécues à l'école primaire».
Centrale des syndicats démocratiques (CSD)
La CSD intervient sur la problématique de l'analphabétisme par un travail de sensibilisation auprès de ses instances régionales. Par le biais d'un comité de travail formé de travailleuses et travailleurs responsables de la formation dans leur milieu respectif, elle cherche également à identifier les façons de supporter les membres des syndicats confrontés aux changements technologiques. La CSD a produit un logiciel en alphabétisation intitulé « Mystère à l'usine» à l'intention des travailleuses et travailleurs ayant des difficultés de compréhension du matériel écrit. Conçu sous forme de jeu d'aventures, ce logiciel interactif leur fournit des connaissances de base et les aide à développer des habiletés de réflexion afin de faciliter le maintien ou l'obtention d'un emploi
Confédération des syndicats nationaux (CSN)
La CSN intervient au niveau de l'alphabétisation en travaillant en collaboration avec ses syndicats locaux à l'implantation de programmes d'alphabétisation en milieu de travail. Ces programmes découlent d'ententes entre l'employeur et le syndicat en place et se déroulent pendant les heures régulières de travail. La CSN a également produit, il y a quelques années, suite à une enquête dans différents milieux de travail, un document intitulé «Démarche CSN en alphabétisation». Ce document cerne l'ampleur du problème de l'analphabétisme en lien avec le monde du travail et la vie syndicale.
Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)
La FTQ intervient sur la problématique de l'alphabétisation et de la formation de base en milieu de travail en aidant les syndicats à développer ou à négocier des programmes de formation pour répondre aux besoins de leurs membres. Ces projets sont réalisés en collaboration avec des commissions scolaires ou des groupes populaires d'alphabétisation. La FTQ a également publié des documents afin d'outiller les syndicats désireux d'entreprendre une telle démarche: «Les étapes de mise en place d'un projet de formation de base», «La formation en emploi: ça se négocie!» et «L'enquête sur les besoins de formation».
Table des fédérations
Cette table est un regroupement de fédérations et d'organismes nationaux de tous les secteurs, allant de l'éducation à la consommation, en passant par les loisirs, la coopération inter-nationale, etc. Le RGPAQ participe à la Table des fédérations sur certains dossiers, comme la promotion de l'éducation populaire et le Secrétariat à l'action communautaire.
D'autres intervenants au Québec et au Canada
ABC Canada
La fondation ABC Canada, dont le bureau se trouve à Toronto, a été créée en 1990 par un groupe de gens d'affaires, avec pour objectif de développer la prise de conscience sur la question de l'alphabétisation et d'y impliquer activement le secteur privé. Ses principales activités: un programme national d'information, un service d'alphabétisation en milieu de travail, un soutien aux organismes communautaires d'alphabétisation.
Centre d'alphabétisation du Québec inc. (The Centre for literacy of Quebec)
Situé au collège Dawson, cet organisme est un centre de documentation qui s'adresse d'abord à la communauté anglophone. Il rejoint les milieux populaires, scolaires et de travail. Il organise des activités de formation et de perfectionnement pour du personnel enseignant, des formateurs ou formatrices et des tuteurs ou tutrices. Il amorce des études et participe à des recherches portant sur l'alphabétisation des adultes. Les services sont offerts en langue anglaise seulement.
Centre franco-ontarien de ressources en alphabétisation (Centre FORA)
Le Centre FORA est un centre d'information, de recherche, de ressources et d'édition de matériel d'apprentissage en alphabétisation en langue française. Il dessert les collèges communautaires, les groupes populaires et les conseils scolaires de la province de l'Ontario.
Centres travail Québec (CTQ)
Les CTQ sont responsables de la gestion des programmes d'employabilité du ministère de la Sécurité du revenu, dont la mesure Rattrapage scolaire qui est utilisée par certains groupes d'alphabétisation populaire.
Collège Frontière (Frontier College)
Le Collège Frontière est un organisme national d'alphabétisation créé en 1889 et qui œuvre par l'entremise de bénévoles. Il organise différents projets qui prennent la forme d'activités d'apprentissage en famille, de programmes de tutorat, de cercles ou de tentes de lecture. Son siège social est situé en Ontario.
Fédération canadienne pour l'alphabétisation en français (FCAF)
Cette fédération, qui existe depuis 1991, regroupe des organismes qui travaillent en alphabétisation en français à travers le Canada. Elle a pour objectif de promouvoir l'alphabétisation en français au Canada et d'établir des liens entre les groupes d'alphabétisation en français au Canada.
Fondation Desjardins
Cette fondation appuie, depuis 1990, les femmes participant aux ateliers d'alphabétisation en allouant un montant de 5000$ dollars annuellement pour les frais de garde. Ce montant est versé au RGPAQ qui se charge de la redistribution.
Fondation québécoise pour l'alphabétisation
Mise sur pied au début des années 1990, cette fondation a pour objectif de faire connaître la situation des personnes analphabètes, d'informer le public sur les services existants, de lutter contre les préjugés et de responsabiliser les différents agents sociaux.
Regroupement des groupes francophones d'alphabétisation populaire de l'Ontario (RGFAPO)
Le RGFAPO, qui a été fondé en 1988, regroupe 22 groupes d'alphabétisation de l'Ontario. Voici quels sont ses objectifs: agir comme porte-parole des groupes d'alphabétisation franco-ontariens, défendre les droits des analphabètes, sensibiliser la population et promouvoir l'approche populaire et collective de l'alphabétisation.
Société canadienne des postes
À travers différents projets, la Société canadienne des Postes soutient l'alphabétisation au Canada. Elle peut également accorder un appui financier à des projets d'alphabétisation à l'échelle nationale, provinciale et locale.
Volontaires de l'alphabétisation du Québec (Literacy volunteers of Quebec) - Laubach du Canada-Québec (Laubach literacy of Canada-Quebec)
Cet organisme est voué à la formation de tuteurs et tutrices pour adultes et jeunes anglophones désirant apprendre à lire, à écrire, à calculer et à se débrouiller dans la vie courante. Il sensibilise la population par l'intermédiaire des médias aux besoins de savoir lire. Il encourage la mise sur pied de programmes répondant aux besoins des familles en matière d'alphabétisation.
Et le financement?
Le financement de base
Il s'agit des modes de financement que les groupes utilisent pour financer les activités régulières d'alphabétisation.
Ministère de l'éducation du Québec (MEQ)
Le ministère finance l'alphabétisation dans le cadre du Programme de soutien à l'alphabétisation populaire autonome (PSAPA). Pour être admissible, il faut être un groupe accrédité, sans but lucratif, reconnu pour son action communautaire et pour les liens qu'il entretient avec le milieu, ainsi que pour son expertise en alphabétisation, et s'engager à réaliser des interventions éducatives conformes aux objectifs du Programme.
Initiatives fédérales-provinciales conjointes en matière d'alphabétisation (IFPCA)
Ce programme, créé par le gouvernement fédéral en 1987, vise à soutenir les activités connexes à l'alphabétisation telles que la recherche, la sensibilisation ou la production de matériel didactique. Les groupes ne peuvent, dans le cadre de ce programme, recevoir des subventions pour les activités de formation (les ateliers). Les demandes de financement sont examinées par un comité formé de représentants du ministère de l'Éducation, du Secrétariat national à l'alphabétisation et du milieu.
Ententes avec les commissions scolaires
Ce sont des contrats de services entre une commission scolaire et un groupe: le groupe offre les activités d'alphabétisation et la commission scolaire en finance une partie selon différentes formules. Il s'agit de contrats locaux qui varient d'une commission scolaire à l'autre. Dans ce type d'entente, l'autonomie du groupe et le respect de son mode de fonctionnement varient d'un endroit à un autre.
Conférence religieuse canadienne - Section Québec (CRC-Q)
Les communautés religieuses du Québec se sont dotées d'un secrétariat commun: la CRC-Q. Au sein de ce secrétariat, le «Comité de priorité pour les dons» a pour mandat d'analyser les demandes financières soumises par les organismes populaires et communautaires. Il adresse ensuite ses recommandations aux communautés religieuses qui ont pour orientation d'appuyer les projets axés sur une prise en charge dans une optique de changement social.
Auto-financement
Il s'agit essentiellement d'activités-bénéfice, de sollicitations ou de ventes, qui permettent généralement de recueillir de petites sommes d'argent. La Porte ouverte a produit un outil pour les groupes désireux d'organiser une activité bénéfice qui s'intitule: «Plan pour un souper bénéfice».
Autres modes de financement
Qu'il s'agisse de financer un projet particulier ou d'offrir des activités d'alphabétisation à des populations particulières, les groupes d'alphabétisation populaire ont fréquemment recours à d'autres bailleurs de fonds que ceux mentionnés ci-haut. Bien que nécessaires pour ces situations particulières, ces sources de financement ne doivent pas suppléer au financement de base requis pour les activités régulières d'alphabétisation des groupes. Fluctuant d'une année à l'autre, d'une priorité gouvernementale à une autre ou selon les personnes en poste, les groupes populaires d'alphabétisation doivent souvent faire preuve d'un grand esprit d'initiative et investir beaucoup de temps et d'énergie pour avoir accès à ces fonds.
Ententes avec des entreprises
Des groupes établissent des ententes avec des entreprises pour faire de l'alphabétisation en milieu de travail. L'entreprise finance le groupe, en assumant, par exemple le salaire des animateurs. L'entreprise peut profiter d'un programme d'exemption provinciale pour les frais encourus si le groupe qui offre la formation est reconnu par la Société québécoise de développement de la main-d'œuvre (SQDM).
Fondations et organismes divers
Les groupes d'alphabétisation populaire ont parfois recours à des fondations et organismes divers pour les soutenir dans leurs activités. Il existe des bottins où les diverses fondations sont répertoriées mais ils sont assez coûteux.
Ministères
Il existe, à l'intérieur des différents ministères (fédéraux et provinciaux), des programmes, destinés à soutenir des projets particuliers. Ces programmes, ainsi que leurs modalités d'application, varient d'une année à l'autre, selon les priorités gouvernementales et les orientations budgétaires des gouvernements. Ainsi, certains projets et activités réalisés par des groupes populaires d'alphabétisation ont pu être financés par le ministère de la Santé et des Services sociaux ou par le ministère des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles. Pour avoir accès à ces fonds, les groupes populaires d'alphabétisation doivent souvent effectuer de nombreuses recherches pour vérifier s'ils sont admissibles à ces programmes.
Plura-Québec
Plura-Québec est une fondation financée par les différentes églises et organisations religieuses du Canada. Elle soutient les petits projets innovateurs qui visent à contrer les injustices sociales.
Société québécoise de développement de la main-d'œuvre (SQDM)
Fondée en avril 1993, la Société québécoise de développement de la main-d'œuvre a la responsabilité de concevoir, de mettre en œuvre et de gérer des services dans les domaines de la formation professionnelle, du recyclage, du reclassement et du placement de la main-d'œuvre, ainsi que dans celui de l'aide à l'emploi et à la gestion des ressources humaines. Pour atteindre ces objectifs, elle a mis en place plusieurs fonds dont certains sont régionaux. Dans le cadre de certains projets en lien avec les objectifs de la Société, les groupes populaires d'alphabétisation peuvent avoir accès à ces fonds. Pour plus d'informations, il faut contacter les bureaux régionaux de la Société ou, à Montréal, les Corporations de développement économique et communautaire (CDEC).
Afin de vous aider à démêler toutes ces abréviations auxquelles vous êtes confrontés, voici les sigles et acronymes les plus couramment utilisés dans le monde de l'alphabétisation populaire.
CDC
Corporation de développement communautaire
CDEACF
Centre de documentation sur l'éducation des adultes et la condition féminine
CDEC
Corporation de développement économique et communautaire
CEQ
Centrale de renseignement du Québec
CFP
Centre de formation populaire
COCOA
Comité de coordination en alpha (Comité de coordination du RGPAQ)
CSD
Centrale des syndicats démocratiques
CSN
Confédération des syndicats nationaux
DFGA
Direction de la formation générale des adultes
FCAF
Fédération canadienne pour l'alphabétisation en français
Centre FORA
Centre franco-ontarien de ressources en alphabétisation
FTQ
Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec
ICEA
Institut canadien d'éducation des adultes
IFPCA
Initiatives fédérales-provinciales conjointes en matière d'alphabétisation
MEPACQ
Mouvement d'éducation populaire et d'action communautaire du Québec
MEQ
Ministère de l'Éducation du Québec
MSR
Ministère de la Sécurité du revenu (Ministère responsable de l'aide sociale)
OVEP
Organismes volontaires d'éducation populaire
PSAPA
Programme de soutien à l'alphabétisation populaire autonome
PSÉPA
Programme de soutien à l'éducation populaire autonome
RGPAQ
Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec
ROVEP
Regroupement des organismes volontaires d'éducation populaire
SNA
Secrétariat national à l'alphabétisation
SQDM
Société québécoise de développement de la main-d'œuvre
SUCO
Service universitaire canadien d'outre-mer (organisme de coopération internationale)
UNESCO
Organisation des Nations Unies pour l'éducation, les sciences et la culture
En 1986, les groupes membres du RGPAQ se sont dotés d'une déclaration de principes. Celle-ci définit les orientations qui sont au cœur de l'alphabétisation populaire, du RGPAQ et de ses groupes membres.
Les orientations du RGPAQ
Le Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec voit à la promotion, à la défense et au développement de l'alphabétisation populaire, des groupes populaires d'alphabétisation ainsi qu'à la défense des droits des personnes analphabètes.
Ces orientations découlent des définitions d'alphabétisation populaire et de groupe populaire d'alphabétisation que nous avons adoptées collectivement et se fondent sur:
1- Des bases idéologiques
A. Nous croyons que les groupes populaires d'alphabétisation, de par leur spécificité, tiennent mieux compte des besoins et attentes des personnes analphabètes et y apportent des réponses qui se veulent plus adaptées.
B. L'analphabétisme est souvent présenté comme un problème individuel alors qu'il s'agit d'un problème social.
C. Nous croyons que le droit à l'alphabétisation et l'accessibilité réelle aux programmes d'alphabétisation ne sont pas vraiment reconnus.
2- Des bases politiques
A. Nous sommes conscients que, pour se développer, l'alphabétisation populaire et les groupes populaires d'alphabétisation ont besoin d'une reconnaissance politique et sociale.
B. Nous pensons qu'un regroupement de groupes de même nature permet de mieux définir des stratégies communes et représente une force collective nécessaire pour atteindre nos objectifs.
C. Nous devons nous assurer le respect de notre spécificité et de notre autonomie politique, pédagogique et administrative.
D. Nous devons revendiquer notre reconnaissance effective par le biais d'un financement adéquat et statutaire.
E. Nous devons revendiquer le développement des groupes existants, la mise sur pied de nouveaux groupes, ainsi que l'obtention de meilleures conditions de travail pour les animateurs et animatrices des groupes.
F. Nous devons sensibiliser la population au problème de l'analphabétisme et faire connaître et reconnaître le niveau de langage, les valeurs, la culture et les référents des milieux populaires.
G. Nous devons faire reconnaître les droits des personnes analphabètes, dont le droit de choisir leurs lieux de formation.
L'alphabétisation populaire
L'alphabétisation populaire est pour nous une approche polyvalente en éducation populaire autonome dont la spécificité se retrouve à travers:
1- Sa dimension pédagogique
A. L'alphabétisation populaire favorise la maîtrise des outils essentiels que sont la lecture, l'écriture et le calcul. Elle vise le développement des connaissances générales: fonctionnelles, politiques, sociales et personnelles.
Elle fait de l'apprentissage de la lecture et de l'écriture un outil d'expression sociale, de prise de parole, de pouvoir sur son milieu et son environnement, un moyen de développer la confiance en soi et une appropriation du langage écrit.
B. L'alphabétisation populaire est une approche collective à l'intérieur de laquelle l'individu est intégré à une démarche de groupe, ce qui permet de développer un sentiment d'appartenance, de réaliser des projets et d'avancer des revendications.
C. L'alphabétisation populaire se caractérise par la place qu'occupent les participants et participantes à l'intérieur des groupes. Elle se développe par ceux et celles qui sont impliqués dans le groupe, soit les animateurs et animatrices ainsi que les participants et participantes.
D. L'alphabétisation populaire est en lien avec le milieu de vie. Les horaires, les activités et la vie du groupe sont pensés et développés en fonction des besoins des participants et participantes.
2- Sa dimension politique
A. L'alphabétisation populaire vise l'ensemble de la population et vise principalement les milieux qui ne contrôlent pas ou peu leurs conditions de vie.
B. L'alphabétisation populaire tend à faire connaître et reconnaître le niveau de langage, la culture et les valeurs des milieux populaires.
C. L'alphabétisation populaire favorise une prise de conscience et une connaissance critique du vécu des participants des groupes ainsi que des différentes réalités de la société. Elle favorise chez les participants et les animateurs le développement d'une conscience sociale et politique en développant des capacités d'analyse critique, de choix d'action et d'évaluation.
D. L'alphabétisation populaire suscite une prise en charge collective du milieu afin d'améliorer les conditions de vie de la population et vise donc, à court, moyen et long terme, la gestion par les participants de leur espace social, culturel, politique et économique.
3- Son implication sociale
A. L'alphabétisation populaire se préoccupe de la sensibilisation constante du milieu ainsi que de la promotion des droits des personnes analphabètes.
B. L'alphabétisation populaire implique l'établissement dans nos milieux d'alliances les plus nombreuses pour répondre aux besoins des personnes analphabètes, afin que ces besoins soient intégrés dans un discours plus large sur les personnes défavorisées socialement.
Un groupe populaire d'alphabétisation
Un groupe populaire d'alphabétisation est un groupe dont les membres, de par leur orientation, se donnent pour objectif de faire de l'alphabétisation populaire.
ABC des manoirs
568, rue Léon Martel, Terrebonne, J6W2J8, (514)471-6928
L'ABC des manoirs est un centre d'alphabétisation populaire autonome qui dessert la région des Moulins (Terrebonne, Mascouche, Lachenaie, La Plaine). Nous offrons des ateliers en petits groupes, le jour et le soir. À l'inscription, chaque participant reçoit une carte de membre.
Alphabeille Vanier
235, rue Beaucage, Ville-Vanier, GlM 1H2, (418) 527-8267
Alphabeille, c'est une approche basée sur les besoins des participantes et participants. À Alphabeille, on se sent un peu chez soi.
Alpha-Nicolet
690, rue Mgr Panet, suite 110, Nicolet, JOG 1E0, (819) 293-5745
Alpha-Nicolet, par la méthode du «langage intégré», a réussi à produire deux recueils de textes d'apprenants. La série Rose Latulippe, Nos. 1, 2 et 3, a été produite par un groupe atteint de déficience intellectuelle légère. Nous sommes très satisfaits de ces productions. Notre slogan: «Libre comme le papillon».
Alpha-Thémis
1019, Rte 382, Laverlochère, J0Z 2P0, (819)765-3431
Alpha-Témis a des ateliers dans quatre villages éloignés les uns des autres. Nos groupes se composent de trois, quatre, cinq apprenants ou plus, de niveaux différents. Les formatrices travaillent à partir des besoins et des intérêts de chacun. Pour diminuer l'isolement des groupes, nous organisons deux journées de rencontres annuelles.
L'Atelier des lettres
1710, rue Beaudry, Montréal, H2L 3E7, (514) 524-0507
L'Atelier des lettres, c'est:
Atout-lire
266, rue St-Vallier ouest, Québec, G1K1K2, (418)524-9353
Le groupe offre des ateliers de français, de calcul (et de francisation pour les immigrants) selon l'approche thématique. Deux projets en alphamenuiserie et alimentation-nutrition. Des publications: «Atout-Lire, dix ans d'alphabétisation populaire», «Calcul de base, expérience d'apprentissage, niveau débutant».
Carrefour d'éducation populaire de Pointe St-Charles
2356, rue Centre, Montréal, H3K 1J7, (514)596-4444
Centre d'alphabétisation et d'éducation populaire mis sur pied il y a plus de 25 ans par les citoyens et citoyennes de Pointe St-Charles. Notre particularité? Nous faisons de la conscientisation. Le Carrefour est un lieu pour s'informer, réfléchir, discuter et agir ensemble dans les luttes du milieu populaire.
Centre alpha de La Baie
802, boul. Grande Baie nord, La Baie, G7B 3K7, (418) 544-2586
Les activités proposées aux participants sont: initiation à l'écriture, lecture et calcul par des exercices appropriés tels que faire des chèques, un curriculum vitae, un budget, des listes d'épicerie ou remplir des formulaires.
Centre d'action socio-communautaire de Montréal
4050, rue St-Urbain, Montréal, H2W 1V3, (514)842-8045
C'est un organisme autonome et sans but lucratif qui a été créé à l'origine pour trouver une solution aux problèmes ressentis par un nombre considérable de membres de la communauté portugaise. Tout en accordant la priorité à la communauté portugaise, le Centre est ouvert sur le milieu et a une orientation socio-communautaire.
Centre d'alphabétisation des Basques
15, rue Notre-Dame est, Trois-Pistoles, G0L 4K0, (418) 851-4088
Le Centre lutte depuis ses débuts pour aider les personnes analphabètes ou peu scolarisées à prendre leur place dans la société et ce, par le biais d'ateliers d'apprentissage adapté du français et des mathématiques et de discussions thématiques.
«L'analphabétisme et l'alphabétisation, ÇA VOUS CONCERNE!»
Centre de croissance d'Abitibi-Ouest
419B, 2e rue est, C.P. 533, La Sarre, J9Z 3J3, (819) 333-3881
Notre souci: former un «Comité des participants» afin de donner à l'individu l'occasion de réfléchir, de comprendre, de faire face à la réalité, et de lui permettre ainsi d'assumer la responsabilité de ses actions. Nous voulons développer le savoir, le savoir-être et le savoir-faire du domaine social, éducatif et personnel.
Le centre d'éducation populaire de l'Estrie
31, rue King ouest, bureau 415, Sherbrooke, JlH lN5, (819) 562-1466
Le Centre offre de la formation à tout adulte soucieux de développer sa capacité de lire, d'écrire, de comprendre, d'agir socialement et de devenir ainsi un citoyen autonome. Afin de répondre à vos besoins, les contenus, rapproche et la durée de la formation sont adaptés aux objectifs fixés par le groupe.
Centre d'éducation populaire de Pointe-du-Lac
201, Grande Allée, Pointe-du-Lac, GOX 1Z0, (819) 377-3309
Regroupant des personnes a faibles revenus qui s'organisent ensemble pour améliorer leurs conditions de vie, le Centre offre des activités d'alphabétisation populaire autonome et d'éducation dans le cadre de divers ateliers. «Collectivement on y gagne!»
Centre de lecture et d'écriture (CLÉ)
3684, rue Mentana Montréal H2L 3R3 (514) 527-9097
CLÉ travaille à développer chez les participantes et participants la connaissance et l'utilisation des groupes populaires locaux de service et de défense des droits. CLÉ a produit du matériel de sensibilisation à l'analphabétisme (Alpha-Quizz). La recherche occupe également une part importante de la pédagogie à CLÉ.
Centre haïtien d'animation et d'intervention sociale
7700, avenue d'Outremont, C.P. 514, Succ. R, Station St-Laurent, Montréal, H2S 3M3, (514) 271-7563
Centres mot-à-mot
3760, rue St-Léonard, Shipshaw, G0V 1V0, (418) 695-5385
En considérant les besoins spécifiques de chaque personne apprenante et dans une atmosphère de détente, les Centres Mot-à-mot offrent aux adultes l'opportunité de renouer avec l'écriture, la lecture et le calcul. La compréhension, l'encouragement, la valorisation de l'apprenant et de l'apprenante ont toujours une place de choix.
Centre n'a rivé
6971, rue St-Denis, Montréal, H2S 2S5, (514)278-2157
Depuis deux ans, le Centre expérimente avec les femmes analphabètes d'origine haïtienne le projet Intégration femmes/comptoir alimentaire: il s'agit d'offrir une formation adaptée en cuisine d'établissement visant l'intégration en emploi de ces femmes totalement démunies.
Clé des mots
870, Chemin St-Jean # 21, La Prairie, J5R 2L,5 (514)659-7941
Sais-tu...lire le journal? Lire le nom des rues? Écrire un message? Lire ou écrire une lettre? Si tu es adulte, si tu aimes travailler en groupe, si tu aimes avoir une attention individuelle, tu n'as qu'à nous appeler. Il n'est jamais trop tard pour apprendre à lire et à écrire ou pour s'améliorer.
Collectif de recherche et d'intervention Kiskeya
7115, Chemin Côte-des-Neiges, Montréal, H3R 2M2, (514)735-8867
Comité d'éducation des adultes de St-Henri (CEDA)
2515, rue Delisle, Montréal, H3J 1K8, (514)596-4422
Secteur alphabétisation du Comité: Formation de base en entreprise: Monic Brillon et Louise Crépeau, tél.: 596-3423. Démarche de préalphabétisation, alphabétisation et de postalphabétisation avec les participantes et participants: Denise Audet et Richard Latendresse, tél.: 596-4428.
COMSEP
749, rue St-Maurice, Trois-Rivières, G9A 3P5, (819)378-6963
C'est un centre d'éducation populaire qui, par ses différents comités, s'implique dans la lutte contre la pauvreté. Il se préoccupe de la condition féminine et revendique une meilleure reconnaissance du rôle des femmes dans la société, ainsi qu'une justice en ce qui les concerne. «L'union fait la force!»
Coop de services multiples Lanaudière (CSML)
2566, rue Victoria, Ste-Julienne, J0K 2T0, (514)831-3333
La CSML est une coopérative à fin sociale et à but non-lucratif. Toutes les actions et tous les services sont à caractère éducatif et de nature pédagogique. Tous les projets font appel à des valeurs de solidarité, d'entraide et de valorisation personnelle.
DÉCLIC
731 -A, rue Montcalm, C.P. 1439, Berthierville, J0K 1A0, (514) 836-7122
À Déclic, on cultive les échanges, les projets et un champ d'ail aussi. Le champ nous amène à lire, écrire, calculer sa récolte, respecter nos engagements, travailler en groupe... Finalement, ce «champ» est une merveilleuse aventure où la nature, une fois de plus, rend service à l'humain.
Groupe centre Lac d'Alma
475, rue St-Bernard ouest, Alma, G8B 4R1, (418) 668-3357
Nous sommes une association pour personnes handicapées du Lac-St-Jean-Est. Nous offrons à nos membres divers services, dont des activités d'alphabétisation: français, mathématiques et vie pratique adaptée aux besoins des personnes. «Se prendre en main»
Groupe d'entraide IOTA
160, rue Charron, Ville LeMoyne, J4R 2K7, (514) 465-1803
Notre mission: offrir des cours gratuits aux adultes qui éprouvent des difficultés à lire ou à écrire. Notre objectif, favoriser l'autonomie, l'intégration sociale et une plus grande confiance en soi. En 1990, Année internationale de l'alphabétisation, IOTA a conçu quarante cours télévisés d'apprentissage de la lecture.
La Boîte à lettres
360, rue Cherbourg, Longueuil, J4J 4Z3, (514) 646-9273
La Boîte à lettres est un organisme d'alphabétisation qui travaille depuis 10 ans auprès de jeunes adultes de 16 à 30 ans. En 1993, la Boîte à lettres a publié une trousse d'intervention pour les intervenantes et intervenants qui travaillent auprès de parents faibles lecteurs ayant des enfants de moins de 5 ans.
La clé en éducation populaire de Maskinongé
92, rue St-Thomas, Louiseville, J5V 2A4, (819) 228-8071
La Clé en éducation populaire de Maskinongé est un organisme à but non lucratif dont l'objectif est d'améliorer la qualité de vie des personnes analphabètes et de promouvoir et défendre leurs droits. C'est un milieu de vie enrichissant où l'on apprend à compter, lire et écrire.
La Jarnigoine
7445, rue St-Denis, Montréal, H2R 2E5, (514) 273-6683
La Jarigoine a développé une expertise auprès de la clientèle analphabète hispanophone. Elle a crée également un outil pédagogique intitulé «Une histoire à suivre».
La Porte ouverte
439, boul. du Séminaire Nord, St-Jean-sur-le-Richelieu, J3B 5L4, (514) 349-6827
Services offerts et activités: sensibilisation - service d'écoute téléphonique et de référence -ateliers d'alphabétisation élaborés en jonction du vécu et des besoins des participantes et participants - cours de français langue seconde offerts gratuitement aux allophones qui n'ont plus accès aux différents programmes de francisation.
Le Tour de lire
1437, boul. Pie IX, Montréal, H1V 2C2, (514) 521-2075
Le Tour de lire a vu le jour en 1980 dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve. Membre fondateur du RGPAQ, le Tour de lire se voue à la promotion de l'alpha pop. Ses ateliers de formation se fondent sur une approche globale, souple et ouverte. Une priorité de travail: la recherche et la production de matériel pédagogique.
Lettres en main
5483, 12e Avenue, Montréal, H1X 2Z8, (514) 729-3056
Lettres en main: une équipe qui se démarque, depuis 1982, par sa stabilité et son souci constant d'explorer de nouvelles voies.
Là où on fait de l'alphabétisation Rolls Royce avec un budget Lada!
LIRA
5-A, rue Napoléon, Sept-Iles, G4R 3K5, (418) 968-9843
LIRA c'est... créer des liens et mieux se connaître, développer son autonomie, avoir plus de facilité à s'exprimer, se donner une meilleure qualité de vie...c'est aussi apprendre à COMPTER - LIRE - ÉCRIRE.
Ludolettre
303, rue Principale C.P. 488, St-Léonard-d 'Aston, J0C 1M0, (819) 399-3023
C'est un centre d'éducation et d'alphabétisation populaire, établi en milieu rural, qui a dû développer une gamme de services tels que: ateliers d'alpha, ateliers jeunes débrouillards, banque d'emplois, conférences, cours divers, cuisines collectives... «Apprendre à pêcher plutôt que de donner du poisson.»
Maison d'Haïti
8833, boul. St-Michel, Montréal, H1Z 3G3, (514) 326-3022
Dès sa création, la Maison d'Haïti a choisi de développer une intervention en alphabétisation qui respecte les spécificités linguistiques et culturelles de la communautés haïtienne.
POPCO
41, Parent, Port-Cartier, G5B 2G3, (418) 766-8303
Popco existe depuis 1980 et offre des ateliers d'alphabétisation et d'éducation populaire aux personnes de tout âge désirant améliorer leur qualité de vie. Ces ateliers sont adaptés selon les besoins exprimés par la population. En septembre 1995, nous expérimenterons l'alphabétisation en milieu de travail.
Regroupement des assistés sociaux de Joliette métro
181, rue Lajoie sud, Joliette, J6E 5L3, (514)759-7977
S'alphabétiser à Joliette, c'est la prise en charge de la personne, l'amélioration constante des conditions de vie. Le partage du savoir et le développement de la confiance en soi font partie des outils qui permettent aux participantes et participants de développer des connaissances de base, soit la lecture, l'écriture et le calcul.
Un Mondalire
12127, rue Victoria, Montréal, H1B 2R4, (514) 640-9228
Nous sommes un centre de lecture et d'écriture et un groupe populaire. Le professeur est un animateur. L'élève est un participant. Les cours sont des ateliers gratuits de jour et de soir. L'école est un local. Pas de période d'inscription, entrée continue toute l'année.
Coordination du projet
Marie-Hélène Deshaies
Liliane Rajaonina
Ginette Richard
Rédaction
Jean-François Aubin
Marie-Hélène Deshaies
Martine Dupont
Anne-Marie Gervais
Berthe Lacharité
Richard Latendresse
Françoise Lefebvre
Colette Paquet
Liliane Rajaonina
Ginette Richard
Micheline Seguin.
Correction du texte
Claudine Vivier
Relecture du texte
Denise Audet
Marie-Hélène Deshaies
Jocelyne Desrosiers
Martine Dupont
Sylvie Lambert
Richard Latendresse
Colette Paquet.
Saisie des corrections
Eliette Beaulieu
Conception graphique
Pierre Lachance
Mise en pages
Louis Lefort
Correction d'épreuves
Marie-Hélène Deshaies
Diane Labelle
Liliane Rajaonina
Impression
Imprimerie La Providence
Publié par le Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec (RGPAQ), avec l'appui financier du ministère de l'Éducation du Québec et du Secrétariat national à l'alphabétisation dans le cadre du programme Initiatives fédérales-provinciales conjointes en matière d'alphabétisation (IFPCA).
On peut commander des exemplaires de ce document en s'adressant au:
Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec (RGPAQ)
5040, boul. St-Laurent, app. 1
Montréal (Québec) H2T 1R7
Téléphone: (514) 277-9976
Télécopieur: (514) 277-2044